BERGERS ET BERGERES DE NOS CONTREES

Petite remarque préliminaire : Les illustrations de ce chapitre sont loin d’être d’une qualité irréprochable, c’est parce qu’elle date d’une époque où mes chroniques étaient transmises au journal sans le support technique du numérique. La plupart des illustrations que me fournissaient les correspondants de la Petite Gazette étaient alors de simples photocopies. Il me semblait utile de le rappeler.

La Petite Gazette du 26 juillet 2000

A LA RENCONTRE DU BERGER DE PETIT-BOMAL

Madame Christine Gillet, de Jemelle, ne reçoit pas Les Annonces, car elle habite en dehors du triple secteur de distribution ; cela ne l’empêche cependant pas d’en être une lectrice assidue et attentive grâce à une de ses amies de Chéoux, qui lui envoie régulièrement ses journaux. Mme Gillet est née, en 1922, à Bomal, elle a quitté le village dix ans plus tard, mais en emportant avec de merveilleux souvenirs d’enfance. Elle se souvient notamment d’un personnage qui, il y a quelques années, tint la vedette de La petite Gazette : le berger de Petit-Bomal.

« Nous allions, de temps en temps, nous promener à la ferme ; il y avait une dame qui s’appelait Rachelle. Ce que nous adorions voir par dessus tout, c’étaient les moutons, quand ils rentraient de Saint-Rahy. Nous attendions pour les regarder rentrer. Le berger dormait alors dans la bergerie ; j’ai encore son image devant les yeux. Il est là devant moi avec sa houppelande… »

J’imagine que ma correspondante n’est pas la seule, parmi les lecteurs et les lectrices de La Petite Gazette, a avoir conservé des souvenirs, peut-être même aussi des photos, des derniers bergers de nos régions. Comme nous l’avons fait avec d’autres professions disparues ou menacées, j’aimerais beaucoup que cette rubrique s’ouvre aux souvenirs relatifs aux bergers de nos régions, aux craintes que leurs connaissances faisaient naître, à leur vie, aux horaires auxquels ils étaient soumis…J’espère surtout en recevoir des photographies, que ce soient celles de ces vieux bergers du début du siècle ou celles de ces nombreux enfants qui, il n’y a pas si longtemps, ont surveillé ou gardé les petits troupeaux des grandes fermes de chez nous. Qui sera le premier a faire revivre cette profession si importante hier encore.

La Petite Gazette du 13 septembre 2000

LES BERGERS DE NOS BELLES CONTREES

Les hasards du contenu de vos correspondances m’ont mis sur la piste des bergers et des bergères qui, jadis, faisaient paître petits et grands troupeaux le long de nos chemins, dans les bois ou sur les terrains communaux. Comme vous êtes réellement formidables, il m’a suffit d’en parler une seule fois pour recevoir vos premiers commentaires et, surtout, vos premiers documents.

Ainsi, j’ai l’immense plaisir de vous proposer une première photographie illustrant cette nouvelle rubrique ; elle provient des collections de Monsieur Freddy Lemaire, d’Aywaille.

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« Ce berger a été photographié, pour les éditions LUMA, d’Aywaille, avant 1940, dans la région de Harre-Burnontige. »  Mais nous ne savons rien de l’identité de ce berger qui fait paître son maigre troupeau ; était-il vraiment berger ou l’a-t-il été le temps de prendre cette photo dont la légende nous dit qu’il s’agit de Bellem ? Grâce à vous, nous en saurons certainement davantage très bientôt. Dans nos prochaines éditions, nous retrouverons d’autres bergers et bergères de nos contrées, mais je vous engage à m’envoyer photos, documents et souvenirs que vous avez conservés de ces étonnants personnages d’hier.

La Petite Gazette du 20 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

Il n’y a pas que l’illustre Bellem qui garda les moutons de nos vallées et de nos plateaux…

Monsieur Louis Vieuxtemps, collaborateur régulier du journal Les Annonces, m’a confié cette jolie photographie d’une bergère, encore active avant la dernière guerre mondiale, Léocadie Hanozet

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Mon correspondant apporte quelques renseignements intéressants sur ce personnage : « La famille Hanozet s’installe sur la ferme de Petit-Bomal en mai 1909 et y restera jusqu’en 1946. 14 enfants sont nés dans cette famille dont Jean-Baptiste Hanozet, (11 mars 1873 – 11 janvier 1963), l’aîné des quatre garçons qui sera le dernier berger de Saint-Rahy, pâturages dominant la ferme en direction d’Izier.

Léocadie Hanozet, (21 juillet 1867- décédée fin 1944) était une des dix filles de la famille. A l’occasion, elle relayait Jean-Baptiste, mais tout porte à croire qu’elle fut bergère avant lui et, de ce fait, fut l’avant-dernière bergère de Saint-Rahy. »

Vous aussi, certainement, vous avez des souvenirs de ces bergers d’hier, du mystère qui entourait leurs connaissances, de leurs pouvoirs supposés… Nous en parlerez-vous ? J’attends avec beaucoup d’impatience tout ce que vous pourrez nous dire à ce propos.

La Petite Gazette du 27 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

C’est encore à Monsieur Louis Vieuxtemps que nous devons ces deux très jolies photographies du dernier berger de Saint-Rahy, pâturages relevant de l’ancienne seigneurie de Petit-Bomal, à quelques centaines de mètres d’où se construit votre hebdomadaire préféré ! On y voit Jean-Baptiste Hanozet, le frère de Léocadie dont vous avez fait la connaissance la semaine dernière.

003« Sur ce cliché, nous dit M. Vieuxtemps, Jean-Baptiste Hanozet est âgé de près de 70 ans (nous sommes en 1942), on le voit quittant la magnifique ferme de Petit-Bomal pour se rendre vers le mont Saint-Rahy, comme il le fit durant 37 ans.

 

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Cette autre photographie date de la même époque, elle aurait été prise quelques semaines après la précédente, nous précise notre correspondant. Il semble bien que c’est alors le printemps, les fleurs éclairent les pâturages de leurs jolies couleurs et le berger est là, pensif mais attentif, son chien à ses pieds et sa canne à la main. »

Si vous avez connu ce berger ou si vous en avez connu d’autres, ce serait particulièrement intéressant que vous nous confiez vos souvenirs, vos anecdotes, vos documents pour faire revivre cette vieille profession de nos régions.

La Petite Gazette du 18 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Grâce à la précieuse collaboration de plusieurs collectionneurs de vues anciennes de nos contrées, j’ai eu l’immense plaisir de vous présenter plusieurs clichés de bergers ou de bergères de nos régions ; et les photographies parues ont suscité, à leur tour, d’intéressantes réactions.

Aujourd’hui, c’est Monsieur Freddy Rixhon, de Ferrières, qui nous apporte de précieux renseignements relatifs au berger présent sur la carte postale que nous avait confiée M. Freddy Lemaire, d’Aywaille. (Voir l’article du 13 septembre 2000)

« Le berger présent sur cette photographie n’est autre que Monsieur François Mahieu, de Burnontige, mieux connu encore sous le nom de « François d’al Creû » explique mon correspondant. Voici ce que dit de lui Maurice Capitaine dans Temps et cendres de mes jeunes années, le numéro 11 de la très belle collection « Au rythme de Ferrières »

 « François Mahieu, habitant le lieu-dit Al Creû, sur le chemin de Saint-Antoine. Une grave maladie, le typhus, contractée dans son jeune âge, avait laissé quelques séquelles dans son comportement. Oh rien de bien grave ! C’est ainsi qu’il avait vingt, parfois trente, chèvres auxquelles il s’adressait sur un ton doctrinal châtié. Les chèvres qui ne comprenaient évidemment rien à cet éloquent laïus avaient pris l’habitude de s’assembler autour de lui, paraissant  prêter une oreille attentive à ses propos. Les enfants qui passaient par-là pour se rendre au catéchisme en avaient fait un sujet de curiosité. Ils s’arrêtaient pour voir et entendre notre ami pérorer, parfois pour s’en moquer, mais fort rarement, car François était un homme doux, gentil, malin qui n’aurait pas fait de tort à une mouche. »

Monsieur Rixhon, en collectionneur averti qu’il est, me signale qu’il existe au moins quatre autres cartes postales, d’autant d’éditeurs différents, immortalisant ce berger ! Je le remercie chaleureusement pour toutes ses informations.

Une personne de Werbomont, qui a très bien connu Jean-Baptiste Hanozet, le dernier berger de Petit-Bomal, a eu l’extrême gentillesse de nous contacter pour nous narrer quelques souvenirs :

« Je veux bien croire que j’ai bien connu ce berger, me dit-elle, car c’est mon mari, malheureusement décédé aujourd’hui, qui, au moment de l’Offensive, lui a racheté son troupeau. La famille Hanozet se préparait à quitter la ferme de Petit-Bomal et Jean-Baptiste proposa à mon époux de reprendre le troupeau. Mon mari a toujours élevé des moutons, il le faisait pour la viande, pour l’élevage… Il fut d’ailleurs le premier à avoir fait venir des moutons d’Angleterre ! Mon époux et le berger se connaissaient évidemment et, pendant les années de guerre, ils s’étaient notamment aidés pour répondre aux réquisitions allemandes. Quand mon mari a accepté la proposition du berger de reprendre ses bêtes, s’est posée la question du transport de celles-ci. Comment les moutons allaient-ils aller de Petit-Bomal à Bois Saint-Jean ? En marchant, tout simplement ! Jean-Baptiste Hanozet souhaita que ce soit mon mari qui l’accompagne pour cette longue promenade et c’est ce qui se fit. Quand les bêtes furent arrivées sur place, j’ai vu le vieux berger pleurer de joie ; il se disait très heureux de constater que ses moutons seraient mieux encore.

Au sujet du berger de Petit-Bomal, je me rappelle une anecdote qu’il racontait. Souvent, nous disait-il, il lui arrivait de se disputer avec son frère, mais toujours pour la même raison : la nuit, Jean-Baptiste se relevait pour aller chiper le bon foin que son frère gardait pour ses chevaux ! »

Un immense merci à cette lectrice qui nous a réservé ces quelques souvenirs de première main.

La Petite Gazette du 31 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

C’est toujours avec beaucoup d’impatience que j’attends que vous me confiez vos souvenirs des rencontres que vous avez sans doute faites avec ces étonnants personnes de nos régions. En effet, les bergers et les bergères ont toujours bénéficié d’une aura de mystère auprès de toutes les personnes qui ne possédaient pas leurs connaissances des choses de la nature. En espérant que vous aurez la gentillesse de nous parler de ces personnages extraordinaires, je ne résiste pas au plaisir de vous présenter deux nouvelles cartes postales anciennes ayant pour sujet principal le berger de Burnontige, François Mahieu.

Monsieur F. Rixhon, de Ferrières, qui avait reconnu ce berger sur une photo prêtée par Monsieur Lemaire, d’Aywaille, m’a remis quatre cartes postales différentes présentant ce berger ; vous en découvrirez deux aujourd’hui.

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 Carte postale des éditions Goblet, Source de Harre à Burnontige portant en légende « Harre : un berger ardennais dans les environs de la Source de Harre » avec, en plus, la mention « Touristes, visitez la Source de Harre »

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 carte postale des éditions Léon Vanderhoven, à Liège, portant en légende : « Burnontige – Le chèvrier. Un coin pittoresque de nos environs » Avec, en plus, la mention : « Pension de Famille Gaiemet-Mignolet Burnontige – Werbomont. Téléphone : 70 Werbomont »

 

La Petite Gazette du 8 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES, DES PERSONNAGES ETONNANTS …

Toujours avec le seul désir de vous voir me communiquer les souvenirs que vous avez conservés de vos rencontres avec ces personnages étonnants qu’étaient les bergers et les bergères de nos contrées, j’ai l’immense plaisir de vous faire découvrir les deux dernières cartes postales représentant le berger de Burnontige que m’a, si gentiment, prêtées Monsieur Rixhon, de Ferrières.

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 Carte postale éditée par Photo Gonay, Moulin Harre

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Editeur Hôtel Colin

Mon correspondant a indiqué que cette vue daterait de 1935

Si vous possédez, vous aussi, des photos de bergers ou de bergères de nos villages ; pensez que nombreux sont les lecteurs et les lectrices qui prendraient plaisir à les découvrir. Vos souvenirs sont, bien entendu, les bienvenus. Merci d’avance.

La Petite Gazette du 15 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Monsieur J. Paquay, de Nadrin, nous a déjà fait le plaisir de partager avec nous les jolies photographie de sa collection ; aujourd’hui, il nous propose cette jolie carte postale du château Saint-Jean, aux environs de la Baraque Fraiture, plus précisément à Samrée.

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« Cette carte postale a été postée le 22 juin 1913, me précise M. Paquay. Cette photographie nous fait découvrir un berger bien habillé, gardant son troupeau près de la façade arrière de l’imposant château de « Bois Saint-Jean ». Il est aidé dans sa tâche par un garçon et deux chiens.

Le recto de la carte atteste du reçu par un certain Victor Vincent, à Bihain, de la somme de deux cent treize francs et cinquante centimes, à l’adresse de François Chabat, négociant en laines à Comblain-la-Tour.  Qui était le dénommé Victor Vincent ? Etait-il le propriétaire des moutons ou le régisseur du château ?

En ce qui concerne le château construit au XIXème siècle par le Comte de Limburg Stirum, il avait alors, avec son impression donjon et sa tour ronde, des allures de petite forteresse. Ayant été réquisitionné par les Allemands pour y établir le quartier-général de Von Manteuffel à la fin de la guerre, il fut bombardé et incendié par les Alliés, fin 1944. Reconstruit après la guerre, il a perdu les allures médiévales de son caractère d’antan. »

Merci pour toutes ces informations ; j’espère que l’un ou l’autre lecteur pourra répondre à votre question relative à Monsieur Victor Vincent.  Votre question j’ajoute la mienne, qui nous parlera de ce négociant en laines de Comblain-la-Tour ? J’imagine que parmi les lecteurs de l’excellente revue « Les Echos de Comblain », il s’en trouvera un qui possède des renseignements à propos de ce négociant ; peut-être nous fera-t-il le plaisir de les partager avec nous ?

Monsieur Freddy Rixhon, grâce à qui nous avons pu faire la connaissance du berger de Burnontige,  m’a écrit à nouveau pour me demander de rectifier le nom de ce berger : « depuis toujours, j’ai entendu les gens du cru parler de F. Mathieu, pour désigner ce berger ardennais ; le livre de M. Capitaine, qui est une référence pour moi, m’a conduit à corriger le Mathieu en Mahieu :  ce fut une erreur. Ce Mathieu, source confirmée par une nonagénaire, en pleine forme, de Burnontige, a eu une fille mariée à un Mahieu, d’où probablement la confusion. »

Merci à M. Rixhon pour son souci du détail et de la précision.

La Petite Gazette du 20 décembre 2000

BERGERS ET BERGERES DE NOS REGIONS

La photo parue, il y a un mois, dans La Petite Gazette et nous présentant le berger du château de Bois St-Jean, a fait réagir un lecteur heureux cette photo et tout aussi heureux de partager ses souvenirs avec nous

« Le berger Victor Vincent, que l’on voit sur cette photo, était le cousin germain de mon père, Camille Vincent. Il exploitait, en tant que locataire et avec ses parents, ses frères et ses sœurs, la ferme du Bois St-Jean, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Son père, Lambert Vincent, était le frère jumeau de mon grand-père paternel ; il est décédé au Bois St-Jean et repose au cimetière de Bérismenil. Mon père parlait assez souvent de ses cousins et cousines du Bois St-Jean et, particulièrement, de Victor qui s’occupait d’un grand troupeau de moutons, dont ils étaient les propriétaires. »

Merci M. Vincent d’avoir, pour La Petite Gazette, ressuscité les souvenirs de votre papa.

La Petite Gazette du 10 janvier 2001

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Après la parution de la jolie photographie et des informations relatives au berger du domaine de Bois Saint-Jean, M. J. Paquay, de Nadrin, a glané de nouvelles informations qu’il a tenu à partager avec nous.

Madame J. Renard-Cornet, de Hives, dont le papa était garde-chasse à Saint-Jean, a bien connu Victor Vincent. « Il était fermier au domaine de Bois Saint-Jean ; je me souviens bien qu’il faisait aussi, à la demande, le tour des fermes des villages voisins pour châtrer les jeunes taureaux et en faire des bœufs destinés à l’engraissement. »

010 Carte-vue montrant la façade avant du château, avant 1903 (carte-vue extraite des collections de M. J. Paquay)

 

 

 

Madame P. Petit-Rappe lui a également confirmé que Victor Vincent était bien le fermier de Saint-Jean : « je l’ai d’autant bien connu qu’il était un frère de ma maman ; il était aussi marchand de bestiaux. A cette époque, le troupeau de moutons se composait d’un millier de têtes appartenant au fermier. Ceci explique le reçu attestant une transaction personnelle de V. Vincent, pour une fourniture de laine à M. Chabat. La production herbeuse sur ce plateau froid, sur des terres acides, dans un îlot agricole souvent noyé dans le brouillard et entouré de grandes forêts, était très aléatoire. De plus, les moutons devaient chaque jour partager leur herbage avec le gibier : cervidés et surtout sangliers laboureurs. La concurrence était très vive. C’est d’ailleurs cette raison qui motiva V . Vincent à quitter le domaine dans les années 20 – 25 pour émigrer à Ortho, puis à aller finir ses jours à Bastogne. Il fut remplacé à Saint-Jean par la famille Désert, qui continua l’exploitation ovine jusque dans les années 70. Le troupeau de moutons d’Alphonse Désert se composait lui aussi d’un millier de têtes. »

Monsieur Louis de Fisenne, de Fisenne, a également réagi suite à la parution de la photo du berger de Bois Saint-Jean : « Dans mon jeune âge, j’allais passer une partie de mes vacances au château de Bois Saint-Jean. J’y ai dès lors connu, bien qu’il soit déjà très âgé, l’ancien propriétaire, le Comte de Limburg, qui n’avait pas d’enfant. Je connaissais bien son fils adoptif, Charles, avec qui j’entretenais d’excellentes relations. Je possède la même carte postale que celle publiée dans La Petite Gazette et je puis vous affirmer que le berger avec ses moutons est bien le propriétaire du troupeau et non le régisseur du château. Le gamin qui l’accompagne est son neveu, Léon Dumont, mon cousin. En effet, la maman de Léon et la mienne étaient les sœurs de Victor, qui, avec  sa maman, et d’autres sœurs et  frères, occupait les bâtiments de la ferme. Je suis né en 1911 et je me souviens  très bien que nous allions, à Pâques, récolter les œufs que les cloches avaient déposés dans le parc du château. C’était encore la bonne époque. Je suis déjà retourné souvent à Bois Saint-Jean pour revivre un peu de ma jeunesse. »

011Photo de la cour de la ferme de Bois Saint-Jean dans les années 1920. A l’arrière-plan : le château (document extrait des collections de M. J. Paquay)

Monsieur Paquay a également conservé des souvenirs du début de sa carrière de garde forestier quand, plus d’une fois, il a retrouvé des animaux égarés, ou en fugue, dans les bois communaux de Samrée, dont j’ai la garde et qui jouxtent le domaine de Saint-Jean Les moutons quitteront définitivement Saint-Jean après la retraite de M. A. Désert. Après un intermède de bétail indigène, ils sont remplacés, depuis quelques années, par des animaux plus imposants, venant d’outre-Atlantique : des bisons canadiens. Nos cervidés et autres sangliers ardennais ne font plus le poids face à ces mastodontes américains : la concurrence est devenue déloyale, ils doivent désormais s’alimenter en forêt uniquement. »

Un immense merci

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

LES MOUTONS ET LES BERGERS DE LA COMMUNE DE FERRIERES

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, a entrepris une intéressante recherche sur les troupeaux et les bergers de Ferrières au début du XIXe siècle. Il nous en livre le résultat :

« Nous  avons  remarqué  que  le  relevé géographique  de  Philippe Vandermaelen établi  en  1831 précisait  que  la  commune  de  Ferrières  comptait autrefois  8  troupeaux  de  moutons. Les  relevés  de  population  de  la  commune  ont  commencé  à  être  tenus  à  partir  de  1846. Nous  devrions  donc  y  retrouver  la  trace  de  plusieurs  de  ces  bergers. Le  résultat  de  cette  recherche  donne :

Stiennon Gilles, 67  ans, né  à  Esneux,  il  habite  Lognoul.

Dubois  Lambert, 32  ans, né à Hamoir.

Dengis  Julien, né  à  Villers  Ste-Gertrude  le  15  mars  1830.

Maréchal Gilles, né  à  Louveigné  le  13 mars 1802.

Maon Gérard, né 15  janvier 1792, il  habite  le  Thier  de  Ferrières.

Bodson Gilles, né  à  Bra, 23 ans, il  habite  St-Roch.

Abraham Servais, 47 ans, né  à  My, il  habite  Rouge Minière.

Gosset  Théodore Joseph, berger  né  à  Heid  le  9 octobre  1825.

Le  relevé  suivant, celui  de  1866, en  cite  encore :

Maréchal Gilles  Joseph, né  à  Louveigné  le  13  mars 1802, il  meurt  le  27  avril 1868. Berger  à  Thiers, maison nr 4.

Maon Gérard, né  à  Ferrières  le  15 janvier 1792, il  meurt  le  6  juin 1869, il  habitait  à  Thiers.

Dangis  Julien, né  à  Ferrières  le  3  septembre 1808, berger  à  Burnontige.

Ajoutons  qu’un  dénombrement  établi  en  1822  dans  la  commune  mentionnait :

165 vaches  et  395 moutons  à  Burnontige, 44 chefs  de  famille.

143 vaches  et   32 moutons  à  Houpet  et  Malacord, 47 cf.

109 vaches et  227 moutons  à  Ferrières  et  Lognoul, 43 cf.

69 vaches  et  62 moutons  à  Rouge Minière, 29 cf.

Soit un total : 486 vaches  et  716  moutons  pour  163 chefs  de  famille. »

 

 

MEDECINE POPULAIRE – GUERISSEURS ET PRIERES

Tout ce qui touche à la médecine populaire, ses pratiques, les guérisseurs, les remèdes… a toujours suscité un énorme intérêt parmi les lecteurs de La Petite Gazette et cela sans jamais faiblir au fil des années. Cela m’a permis de réunir une incroyable collection de remèdes mais aussi d’informations précieuses sur les différents types de guérisseurs et leurs façons de procéder. Aussi ai-je, en 2012, décidé de rassembler dans un ouvrage toutes ces contributions et témoignages transmis par les lecteurs. . Ce livre de près de 300 pages présente, dans sa première partie, de nombreux guérisseurs de nos contrées et, dans la seconde, les centaines de remèdes que, depuis des années, vous m’avez communiqués en réponse aux appels lancés par les lecteurs.

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Ce livre, « Les Pratiques de la médecine populaires »,
est toujours disponible  au prix de 19€ (port postal offert) à verser sur le compte bancaire BE29 0682 0895 1464 de P.A.C Aywaille à 4920 Aywaille

 La Petite Gazette du 30 janvier 2008

A PROPOS DE MEDECINE POPULAIRE

Dans nos contrées, au temps jadis, les médecins étaient rares et surtout trop chers pour que les villageois s’adressent régulièrement à eux. Aussi a-t-on jalousement conservé bien des remèdes de famille, transmis de génération en génération. Le plus souvent, ils appartiennent à la tradition orale, mais ils étaient quelquefois consignés dans de petits carnets. La seule « autorité » en matière de médecine dont on sollicitait alors les conseils était souvent la sage femme, ainsi que nous l’avons déjà évoqué grâce à vos passionnants témoignages. A ses côtés interviennent régulièrement des guérisseurs (sègneûs et r’bouteûdésignés ainsi selon les procédures qu’ils mettent en œuvre).

Vos communications régulières à propos de remèdes anciens montre, s’il en était encore besoin, combien certaines de ces traditions sont restées particulièrement vivaces dans les esprits et dans les usages. Il ne faudrait cependant pas que ces secrets de famille et ces traditions ancestrales disparaissent alors qu’elles ont été précieusement conservées beaucoup des siècles et des siècles.

Nous l’avons souvent constaté quand nous abordons ce sujet, la connaissance des vertus des plantes se mêle souvent de pratiques aux frontières de la religion et de la magie. C’est pourquoi, il était communément admis que la date de naissance de quelqu’un pouvait lui accorder des pouvoirs spécifiques. Avez-vous connaissance de ces dates particulière (jours de fêtes religieuses ou jour particulier d’équinoxe ou de solstice par exemple) ?

On pensait la même chose dans les cas, pourtant fréquents, de naissances présentant des particularités remarquables : naissance par le siège, enfant né « coiffé », Xe enfant du même sexe dans la même famille ou enfant posthume. Parfois c’est la maman qui donne naissance à des enfants multiples (jumeaux, triplés…) qui se trouvait considérée comme détentrice de pouvoirs spéciaux. Avez-vous retenu au sein de votre famille des anecdotes liées à ces pouvoirs issus de naissance particulière ?

On a même pensé (c’est du moins ce que certains qui menèrent des études sérieuses  sur le sujet ont prétendu) qu’il était possible de conférer à quelqu’un des dons de guérisseur en le soumettant à diverses épreuves durant sa jeunesse Il était également généralement admis que celui qui était le descendant de plusieurs générations d’un même métier (meunier, maréchal-ferrant, berger…) se trouvait investi du don de guérir. En avez-vous déjà entendu parler ? Avez-vous des exemples précis ?

J’espère que vous pourrez apporter l’une ou l’autre réponse à ces questions afin de me permettre de développer ces sujets avec vous. Je vous remercie chaleureusement de me confier vos souvenirs.

La Petite Gazette du 27 février 2008

MEDECINE POPULAIRE… LES DONS LIÉS Á LA DATE DE NAISSANCE

Monsieur Roger Detry nous transmet une passionnante communication sur les dons de guérisseurs liés à une date de naissance particulière :

« Il faut y voir un rapport avec le saint du jour.

25/1 confère l’aptitude de soigner les envenimations (morsures de serpents, insectes etc.) et leurs conséquences éventuelles: dartres, furoncles, panaris.

1/2 Egalement don de passer le venin (Sainte Viridiane qui repoussait les serpents)

29/6  Idem- ce sont Saint Pierre et Saint Paul qui d’après l’anecdote citée dans l’acte des apôtres étaient maîtres des serpents

23:/7  peut guérir zona et dartres.

1/8  morsures de serpents et empoisonnements divers- c’est en référence à Saint Eleazar qui refusa de s’empoisonner en mangeant de la viande de porc qui lui aurait fait transgresser la sainte loi.

10/8  Saint Laurent guérit les brûlures.

18/8  Saint Augustin  guérit les verrues

25/8 Saint Louis( le roi) : brûlures, zona, eczéma, certaines mycoses.

21/9 une personne née à cette date (Saint Mathieu) peut intervenir sur les effets des venins.

25/12   idem

31/12 redresse les membres (rebouteux) »

Mon correspondant poursuit en établissant une liste des dons puisés dans les circonstances de la naissance:

Peut avoir des dons pour guérir certains cas l’enfant qui n’aurait pas connu son père

Ce dernier point est évidemment relatif à des contextes et modes de liaisons d’une autre époque.

Un enfant né les pieds devant peut réduire les entorses.

Idem pour les personnes venues au monde par le siège.

Une mère qui met au monde des jumeaux pourrait intervenir dans les cas de luxation.

Les cinquième-septième-neuvième enfants d’une même famille et de même sexe auraient également des pouvoirs, surtout pour  soigner des cas importants de peau.

Le cinquième, lui, peut en outre traiter les rhumatismes. »

Ces propos évoquent-ils quelque chose pour vous ? Etes-vous dans un de ces cas ? Avez-vous constaté ces dons ? Dites-nous tout, le sujet est réellement passionnant. Un immense merci à M. Detry.

La Petite Gazette du 19 mars 2008

A PROPOS DES DONS DES GUERISSEURS

Un sympathique lecteur de Neupré a souhaité intervenir au sujet des dons de guérisseurs liés à la date de naissance. « Dans mon cas, m’écrit-il, il s’agit du fait que je n’ai pas connu mon père, celui-ci étant décédé accidentellement en mai 1946 et je suis né en septembre. Il m’a toujours été dit par ma maman et ma grand-mère que je possédais certains dons de guérison, pour ce faire il me suffisait d’imposer les mains sur la partie du corps à guérir et de réciter la prière appropriée au cas.
Par deux fois dans ma jeunesse, j’ai usé de ces « dons » mais sans pouvoir dire si vraiment ils ont changé quelque chose dans la guérison qui est intervenue.La première fois, c’était pour soigner une brûlure qu’une jeune fille du voisinage s’était occasionnée en renversant de l’huile de friture (ou de l’eau bouillante je ne sais plus très bien) sur la jambe. Il est vrai que la brûlure s’est soignée assez rapidement et n’a pas
provoqué de cicatrice comme l’on voit sur les personnes brûlées mais les parents avaient quand même emmené leur fille chez le médecin qui avait prescrit des soins, ai-je participé à une guérison plus rapide ? Je ne sais pas !La deuxième fois, c’était sur ma propre personne donc je ne serais pas très objectif dans ce cas mais je le raconte malgré tout.A cette époque j’habitais Trois-Ponts et j’allais à l’école technique de Verviers, en internat.
Le jeudi (je m’en souviens encore) j’avais cours de gymnastique et je me suis foulé la cheville lors d’un exercice. La douleur était telle qu’il m’était impossible de mettre le pied par terre et les responsables de l’école m’ont fait garder la chambre jusqu’au samedi jour de retour au foyer.
Pour aller de l’internat à la gare de Verviers et de la gare de Trois-Ponts à mon domicile, c’est un ami qui a dû me porter sur son dos car il m’était toujours impossible de marcher.
L’après-midi ma maman m’a fait réciter la prière adéquate mais a aussi préparé un cataplasme de pommes de terre cuites avec l’épluchure, elle les a écrasées et placées dans un linge qu’elle a appliqué très chaud  sur ma cheville. Le lendemain, je marchais normalement ! Était-ce la prière, le cataplasme ou aussi la pommade que le médecin avait prescrite ? Je ne peux le dire. »Pour compléter son sobre témoignage, ce lecteur vous propose de découvrir les prières qui furent récitent lors de ces deux épisodes :

Pour les brûlures :

Brûlure retire ta fureur tout comme Judas perdit sa rageur quand il trahit Notre Seigneur au jardin des oliviers (le répéter trois fois)

Trois Pater, trois Avé – Maria et faire le signe de la croix.

Pour la mespassure (entorse) :

Marche sur ton pied tout comme l’âne de Saint Joseph marcha sur les siens en portant Marie et Jésus en Egypte.

Cinq Pater, cinq Avé – Maria et faire le signe de la croix.

La semaine prochaine, je vous indiquerai quelles autres prières sont connues par ce monsieur que je remercie tout particulièrement pour cet intéressant témoignage.

La Petite Gazette du 26 mars 2008

LES PRIERES QUI GUERISSENT

Comme promis, retrouvons, cette semaine, une première série de prières communiquées par ce monsieur de Neupré qui aurait certains dons de guérisseurs puisqu’il s’agit d’un enfant posthume.

Pour arrêter le sang  (1) :

Sang je t’arrête au nom de Jésus de Nazareth arrête, arrête, arrête.

Trois Pater et trois Ave-Maria et faire un signe de croix.

Pour arrêter le sang (2) :

Sur mon chemin faisant, trois jeunes j’ai rencontré,

L’une dit, je vois du sang,

L’autre dit, je perds du sang,

La troisième dit qu’elle n’en perdait pas plus que les cinq plaies de Notre Seigneur.

Cinq Pater, cinq Avé – Maria et faire trois fois le signe de la croix.

Pour la foulure :

Soit passure ou mespassure (entorse)  au nom de Dieu et de Saint Eloi, je te conjure,

Faire le signe de la croix du genou au boulet, un deuxième du boulet au sabot et un troisième sur le sabot.

Trois Pater et trois Avé – Maria.

Pour les coliques :

Saint Pierre et Saint Jean s’en allant parmi les champs firent rencontre du mal de flanc.

Mal de flanc où va-tu ? je vais tourmenter le cœur  de (dire le nom de la personne).

Mal de flanc retourne parce que les vêpres et les mâtines sont serrées. Pour toi tout est fait et défait, faire le signe de la croix.

Trois Pater et trois Avé – Maria.

Pour faire sortir une épine :

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit est tiesse.

Trois Pater et trois Avé – Maria.

Passionnant n’est-ce pas ? Je vous en promets d’autres pour la semaine prochaine. Un immense merci à ce lecteur qui nous a communiqué ces trésors de médecine populaire. Si vous pouvez compléter cette intéressante collection, ne vous en privez surtout pas.

La Petite Gazette du 2 avril 2008

LES PRIERES QUI GUERISSENT

Comme promis, retrouvons, cette semaine, une première série de prières communiquées par ce monsieur de Neupré qui aurait certains dons de guérisseurs puisqu’il s’agit d’un enfant posthume.

Prière à la sainte goutte :

Prière à la Sainte Goutte par votre puissante intercession auprès de Dieu aspiré moi une guérison s’il vous plait. Trois Pater et trois Avé – Maria.

Pour le mal de dents :

Sainte Appoline était assise sur la pierre de marbre, Notre Seigneur vint a passer par là, lui demanda Appoline que fait-tu là ?

Je suis ici pour mon sang pour mon chef et pour mon mal de dents.

Appoline retourne si c’est un ver il périra et si c’est une goutte de sang elle tombera.

Faire le signe de la croix et réciter trois Pater et trois Avé – Maria.

Pour les yeux :

En l’honneur de Dieu et de la Vierge (signe de croix, Pater, Avé)

En l’honneur de Saint Benoît et de Saint Bernard (signe de croix, Pater, Avé)

En l’honneur de la Sainte Trinité et de l’incarnation du fils de Dieu en un seul Dieu en trois personnes, le Père, le Fils, le Saint Esprit (signe de la croix, Pater, Avé)

La Petite Gazette du 9 avril 2008

A PROPOS DE CE MONSIEUR QUI A UN DON DE GUERISSEUR

Mme Edith Muller-Massin, de Vielsalm, a réagi à cette communication concernant le don de guérisseur. « Il est dommage, m’écrit-elle, que votre correspondant n’ait pas pratiqué ce don qui est très précieux, il faut savoir que cela « marche », beaucoup de personnes font appel à ces personnes qui « signent » (c’est le terme utilisé) et malheureusement il y en a de moins en moins. Mon papa « signait pour les orgelets et les coliques; mon oncle pour les brûlures. Je peux dire à votre correspondant que si la jeune fille en question n’a gardé aucune cicatrice et si la brûlure s’est très bien soignée et rapidement c’est grâce à lui. Il faut évidemment avoir recours à un médecin ensuite et utiliser les traitements prescrits mais, disaient toujours mon oncle et mes parents, il faut se faire signer avant qu’un médecin ne soigne. J’ai souvent fait appel à ces personnes qui mettent leur don au service des gens, je dis « au service des gens » car certaines personnes se font rémunérer!Comme je le dis il y a de moins en moins de ces « guérisseurs », ils décèdent sans avoir pris le temps de passer ce don ce qui a été le cas de papa et mon oncle. »

 La Petite Gazette du 16 avril 2008

AU SUJET DES PRIERES QUI GUERISSENT…

Madame Céline Bayer nous transmet un intéressant témoignage :

« Concernant les prières qui guérissent, je peux vous affirmer que deux dont le monsieur parle font leurs effets. Il s’agit de celles relatives aux brûlures et aux saignements de nez. J’ai 82 ans et je les applique encore maintenant quand l’occasion se présente.Pour les brûlures, je signe avec les mêmes mots mais sans les prières pour terminer, je tiens cette formulation d’une dame qui avait eu de graves brûlures.L’autre prière, je la connais grâce à mon père qui nous en avait parlé quand j’étais enfant, mes soeurs n’y ont pas fait attention, mais moi je l’ai retenue et m’en suis souvent servie quand je travaillais. J’avais une collègue qui ne croyait pas à tout cela et, chaque fois, que je m’apercevais d’un début de saignement de nez ou quand je le pressentais, je disais la prière et cela s’arrêtait et elle le reconnaissait malgré un petit sourire mitigé. Mon père tenait cette prière de ses grands-parents fagnards. ».Merci pour cet intéressant témoignage. Si, comme Mme Bayer, vous avez utilisé de pareilles prières pour soigner, si vous les utilisez encore, si vous en connaissez d’autres, j’espère que vous aurez la gentillesse de nous communiquer vos souvenirs et connaissances.

La Petite Gazette du 7 mai 2008

LES PRIERES QUI GUERISSENT

Madame Maria Lambotte, de Werbomont, nous confie, à son tour, un intéressant témoignage sur ces prières qui guérissent :« Grand-maman m’avait parlé de ses gros problèmes d’allaitement à la naissance de son premier enfant, en 1908. Elle souffrait de crevasses aux seins. Son beau-père l’a conduite, avec la carriole et le cheval, en Haute Ardenne, mais j’ai oublié où précisément.Un vieux monsieur l’a fait entrer dans une pièce sur les murs de laquelle il y avait de grands cadres avec des images pieuses. Il a invité grand-mère à le suivre en s’arrêtant à chaque image où il fallait dire : « Seigneur, si vous le voulez, vous le pouvez. »Au bout d’un moment, son beau-père qui l’attendait sur le seuil a dit : « Vinè m’fèye, c’est’on rcroyou makray. », ce qui voulait dire un sorcier.Bien que très croyant et pratiquant, mon arrière-grand-père était très sceptique quant à l’issue de la démarche qu’il avait proposée à sa belle-fille ! »

La Petite Gazette du 14 mai 2008

LES PRIERES QUI GUERISSENT

Madame Ida Lengelé-Schmitz, de Tilff, se souvient :

« Dans mon village de Petit-Thier, il y avait un garçon né après la mort de son père, tué à la guerre de 40. Il avait des dons lui aussi, je l’ai vu soigner quelqu’un de la famille, nous étions sept enfants. Je crois que c’était un de mes frères qui s’était occasionné une foulure au poignet. Il a été de suite soulagé. Mes parents nous parlaient de ce que cet enfant posthume savait faire, mais j’ai oublié les détails. Nous avions des parents merveilleux, braves et courageux qui nous ont enseigné le bien et appris à suivre le bon chemin. Maman nous a donné la prière pour les brûlures, d’autres aussi. Dans la famille, nous connaissions beaucoup de prières. Je l’ai déjà utilisée sur plusieurs personnes et, même de loin, cela réussit. J’ai donné cette prières à plusieurs de mes amis et connaissances qui m’ont remerciée car,avec cette prière, il ne reste quasiment aucune trace des brûlures. Elle n’est pas tout à fait la même que celle du monsieur de Neupré, mais cela ne m’étonne pas car, en région d’Ardenne, il y a encore beaucoup de personnes qui possèdent ces secrets Je pense que ces gens devraient les donner pour assurer la continuité de ces bienfaits, mais la mentalité d’aujourd’hui le permettra-t-elle ? »

Les nombreuses réactions, communications et témoignages enregistrés par la Petite Gazette  semblent répondre que oui… Il serait intéressant que ma correspondante nous confie cette prière afin de constater ce qui la différencie de celle de ce lecteur de Neupré. En attendant  sa prochaine contribution, je la remercie vivement pour celle-ci.

La Petite Gazette du 28 mai 2008

A PROPOS DES PRIERES QUI GUERISSENT

Madame Maria Lambotte, de Werbomont, nous avait parlé de la visite de sa grand-mère chez un guérisseur et du doute qui s’était emparé du beau-père de l’aïeule. A ma demande, elle a replongé dans ses souvenirs, mais ne peut pas affirmer que cette démarche avait porté ses fruits, elle l’a oublié.

« Le beau-père de ma grand-mère était si confiant dans la prière que, durant la guerre 1914-1918, il promit de faire ériger une chapelle s’il revoyait Joseph, le plus jeunes des cinq fils appelés sous les drapeaux. Il tint promesse et la petite chapelle se dresse à Grand-Trixhe, près de la vieille ferme, son bien à l’époque. Une dame qui a travaillé chez eux, Léontine Dethier, m’avait dit que mon arrière-grand-mère donnait régulièrement de l’argent à un mendiant, en ajoutant « pour faire dire une messe afin de hâter le retour de mon fils ».

Joseph revint, mais on oublia d’en parler au mendiant. Quand ce dernier se représenta, on lui annonça : « Vos sav’, Joseph est rivnou d’al guerre ! » et le bonhomme de répondre : « Vos co mî aller… » La messe est dite ! Ici, ce n’est pas sûr… Il est vrai que c’était tentant de garder l’argent des messes, surtout quand on doit sa survie à la mendicité… »

La Petite Gazette du 4 juin 2008

ENCORE DES PRIERES QUI GUERISSENT

Cette semaine, c’est Mme Jenny Hellinx, d’Esneux, qui nous transmet ces prières :

Madame sainte Anne, mère de la Vierge Marie, mère de Jésus-Christ,

Dieu te bénisse et te guérisse de brûlure, de blessure, de rompure, d’entrave de toute sorte, d’infirmité quelconque.

En l’honneur de Dieu et de la Vierge Marie, faites que Dieu me guérisse par sa puissance, en l’honneur des angoisses qu’a souffert notre seigneur Jésus-Christ sur le calvaire

« Prière à réciter durant 9 jours, à jeun, avant de réciter trois Notre Père et trois Je vous salue Marie. »

Prière pour le sang

Elisabeth a enfanté Jean

Anne a enfanté Marie

Marie a enfanté Jésus-Christ

Au nom de Jésus, flux ne coule plus et quitte (préciser le nom de  la personne), humble serviteur de Dieu.

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, ainsi soit-il.

« Après chaque prière, souffler et faire le signe de croix trois fois ; puis avec la main, et de droite à gauche, la faire aller pour éloigner pour ce que l’on prie.

J’ai toujours été exaucée avec ces prières, mais il faut les dire avec foi. »

Merci pour cette contribution.

La Petite Gazette du 16 juillet 2008

ENCORE UNE PRIERE POUR GUERIR

Madame Viviane Bultot, de Dolembreux, a eu l’excellente idée de me confier, afin que je vous la livre, cette prière pour arrêter les hémorragies.

« Couper deux herbes dehors et les placer en croix sur la partie qui saigne, dire :

Que toutes les plantes que Dieu a créées arrêtent ce sang.

Répéter trois fois et signer.

1 Ave et 1 Pater. »

UNE ANNEE DE SOUVENIRS, DE TRADITIONS, DE GESTES OUBLIES… NOSTALGIE ET RÊVERIE

Au gré des publications hebdomadaires de La Petite Gazette, de très nombreux lecteurs ont pris la peine de répondre aux nombreuses questions qui leur étaient posées, parfois même après avoir mené de longues recherches. Il est également arrivé, à plusieurs reprises, que certains d’entre eux retrouvent un vrai plaisir à reprendre la plume ou le stylo et se lancent dans la rédaction de textes inspirés par l’un ou l’autre des sujets abordés dans les colonnes de cette rubrique. C’est un fait tout à fait banal, la découverte d’un calendrier reçu pour marquer le début d’une année nouvelle, qui décida Monsieur Jean Bolland à coucher sur le papier, des évocations nostalgiques d’une époque révolue bien que peu lointaine… Souvenirs, traditions ancestrales, croyances populaires, faits et gestes d’hier se mêlent intimement dans ces douze textes rédigés avec une plume lerte, précise et très agréable.

La Petite Gazette du 6 février 2013

UN NOUVEAU CALENDRIER ET DES SOUVENIRS QUI RESSURGISSENT

Monsieur Jean Bolland s’est pris à rêver en découvrant les illustrations désuètes d’un calendrier qu’il a reçu, comme bien d’autres parmi vous, aux premiers jours de cette année 2013. Ces illustrations lui ont inspiré, mois après mois, quelques lignes que nous partagerons avec lui :

« Janvier

La classe est finie. Chaussés de sabots pour les uns, de bottines pour les autres, les bambins se sont échappés de l’école. Oubliés, les calculs et la grammaire!

Le chemin du retour est l’occasion de mille et une découvertes changeant au fil des saisons. Les températures polaires de ce mois de janvier ont figé l’eau des mares et des étangs. Une belle couche de glace exerce une attraction à laquelle les enfants ne résistent que difficilement. Chaque marmot se souvient, cependant, des recommandations parentales. Mais cette petite voix intérieure incitant à la prudence est bientôt mise sous l’éteignoir. La glace a l’air si épaisse !

Chacun s’avance prudemment, pose délicatement un pied sur le miroir glacé, appuie de plus en plus fort et, devant la solidité éprouvée, les bras en guise de balancier, progresse à petits pas glissés. C’est avec retenue et contrôle de soi que les patineurs sillonnent la glace, évitant les aspérités qui pourraient provoquer la chute.

Après quelques évolutions grisantes, la petite troupe prend le chemin du logis, contente d’avoir osé! Mais…chut! L es parents ne doivent rien savoir. Pas question de vendre la mèche! D’autant que l’hiver ne semble pas avoir dit son dernier mot. »

 

La Petite Gazette du 27 février 2013

ET VOICI FEVRIER

Retrouvons, maintenant le texte que le dessin de février sur le calendrier reçu a inspiré à Monsieur Jean Bolland :

« Janvier avait allongé ses jours sous une température clémente qui faisait ressembler cet hiver à un automne qui n’en finissait pas.

Vers la fin du mois, un vent du nord avait charrié de lourds nuages d’un gris jaunâtre qui laissèrent échapper des myriades de flocons. Il neigea un jour et une nuit, sans discontinuer, accumulant une couche épaisse qui amortissait les sons. Après cet épisode neigeux, une bise piquante balaya les nuages.

Pendant les journées lumineuses, le soleil dardait ses rayons glacés. Au cours des nuits, dans un ciel piqué d’étoiles, la lune accentuait le sentiment que tout était figé part le gel.

Ce froid avait ralenti l’activité des hommes. Seules, des obligations impératives poussaient les campagnards à affronter cet assaut de l’hiver. C’était le cas d’André, le garde-chasse du comte. Après s’être rassasié d’une onctueuse omelette agrémentée de deux tranches de lard maigre, il se mit en route dès le lever du jour. C’est que le temps était propice à la découverte des pas du braconnier qui prélevait du petit gibier du côté du Bois de Tave! Cependant, secrètement, le garde espérait ne jamais prendre l’homme sur le fait. Il avait bien des soupçons mais connaissait suffisamment la situation du chapardeur pour savoir que ces menus larcins servaient uniquement à améliorer l’ordinaire de cette famille dans le besoin. A son grand soulagement, à part ses propres pas de la veille, André n’en découvrit pas d’autres.
Le coeur léger, il se mit en quête de bois mort qu’il rassembla en un imposant fagot avant de dévaler le sentier enneigé qui conduisait au village. Ce soir, un bon feu crépiterait dans l’âtre.
Le garde fut bientôt en vue du hameau dont les fermettes flanquaient l’unique rue ou, plutôt, ce qui en tenait lieu : deux ornières sinueuses séparées par un terre-plein étroit. En été, les charrettes soulevaient des nuages de poussières. La boue s’accrochait aux roues à rayons aussitôt les pluies d’automne arrivées.

A travers les fenêtres de l’école, il devina les écoliers penchés sur leur ardoise. Le maître avait fort à faire au cours de l’hiver où le local était bien garni. Au contraire, à la bonne saison, nombre d’enfants désertaient la classe pour aider leurs parents dans les travaux des champs.
Des volutes de fumée s’échappant des cheminées, des filets de vapeur s’élevant des fumiers coincés entre les habitations et le chemin : seuls signes que gens et bêtes vivaient reclus pour échapper aux morsures du froid.

Au bout du village, se dressait l’église à la tour trapue, comme pour rappeler au rare étranger de passage, qu’ici, tout est retenue et simplicité.

Le cimetière dépassé, André prit une route en légère pente, longea le manoir et bifurqua vers la droite pour s’arrêter devant le bûcher de la demeure mise à sa disposition par le comte. Il ôta son couvre-chef, se pencha vers l’avant : le fagot roula et s’écrasa lourdement sur le sol de terre battue.

Arrivé sur le pas de sa porte, les narines de l’homme captèrent des effluves prometteurs : il sut, qu’en ce jour de la Chandeleur, Manon faisait sauter les crêpes pour le repas de midi. Les enfants n’allaient pas tarder à rentrer de l’école. »

 

La Petite Gazette du 13 mars 2013

NOUS AVONS VU LE PRINTEMPS…

Voici mars, aussi retrouvons-nous le texte que l’illustration du calendrier inspira à Monsieur Jean Bolland.

« – Fanchon! Javotte! Levez-vous!

Les fillettes émergèrent doucement de leur sommeil. Pendant quelques minutes, elles profitèrent encore de la douce chaleur du lit. Les oreilles aux aguets, elles devinaient les multiples tâches que leur maman accomplissait chaque matin.

Après un brin de toilette, les demoiselles s’attablèrent face à un bol de lait chaud accompagné de tartines beurrées qu’elles avalèrent en échangeant des propos ponctués de rires complices.
Rassasiées, le cartable au dos, elles prirent le chemin de l’école. Ces instants de liberté étaient l’occasion de mille et une découvertes. Le moment qu’elles appréciaient le plus était celui où elles côtoyaient ces vieux chênes tordus par les ans et les intempéries. Un long frisson de plaisir mêlé d’un zeste de crainte délicieuse s’emparait des petites lorsqu’elles frôlaient les branches difformes qu’elles imaginaient armées de fins doigts crochus prêts à les agripper au passage.
En fin d’après-midi, les deux soeurs franchirent le portail rouillé de la cour de récréation, obliquèrent à gauche pour longer le ruisseau dont le cours sinueux les ramènerait à la maison. Le trajet du retour était souvent différent de l’aller : il fallait bien varier les occasions de musarder!
En bonnes  campagnardes proches de la nature, elles se dirigèrent vers un fossé dans lequel des grenouilles avaient pondu. Les manches retroussées, elles plongèrent les mains dans les amas gélatineux. Elles s’évertuaient à les soulever mais, immanquablement, ceux-ci leur glissaient entre les doigts pour retomber dans un grand flotch!, éclaboussant les fillettes qui partaient alors d’un grand éclat de rire.

Plus loin, le chemin traversait une boulaie dont la blancheur des écorces était accentuée par les rayons du soleil. Déjà, les bourgeons des bouleaux laissaient poindre de minuscules feuilles fripées, avant-gardes de toutes celles qui, d’ici quelques jours, pareraient la forêt d’un vert tendre. Les petites s’amusaient des chatons du noisetier : d’une chiquenaude, elles libéraient le pollen qui se contorsionnait sous le souffle d’un filet d’air frais.
Alors que la maison était en vue, des cris d’oiseaux leur firent lever la tête. Presqu’imperceptibles d’abord, ils allèrent en s’amplifiant. Les gamines reconnurent les craquettements caractéristiques d’un vol de grues griffant le ciel d’un grand V qui, parfois se déformait quelque peu pour reprendre bientôt sa forme initiale.

Les grands échassiers s’éloignaient vers le nord quand Fanchon et Javotte aperçurent Vincent, leur papa, taillant son pied de vigne.

Papa! Papa! Nous avons vu le printemps! »

 

La Petite Gazette du 24 avril 2013

EN AVRIL

Monsieur Jean Bolland, inspiré par les illustrations de Georges Delaw ornant son calendrier, nous livre, mois après mois, un petit texte où se mêlent nostalgie et poésie…

« L’hiver, s’il faut en croire le calendrier, a tiré sa révérence. Malheureusement, le printemps idéal, comme notre imagination se plaît à l’évoquer, n’est pas encore là.

Pour pallier les températures encore bien basses, le poêle à charbon de l’école rurale ronfle au centre de la classe.

Et pourtant, un franc soleil sème de la gaieté dans le local quelque peu austère. Cet apport de lumière semble, mais n’est-ce peut-être qu’une impression, infléchir la discipline rigoureuse imposée par l’instituteur déambulant entre les pupitres.

Bientôt, de gros nuages, d’un noir presque bleu, accourent, poussés par un vent du nord-ouest. En quelques instants, le jour baisse. Une semi-obscurité s’insinue dans les moindres recoins. Des volées de grêlons s’écrasent contre les carreaux avant de rebondir sur les bacs en bois destinés à accueillir les futurs géraniums. Le crépitement assourdissant couvre la voix du maître, l’obligeant à suspendre sa leçon. Seize paires d’yeux se tournent vers le ciel  déchaîné. Quel spectacle! Quel sentiment de sécurité et de bien-être! Dans cette lumière tamisée, à l’abri des intempéries, même le plus rétif des potaches se complaît, bercé par une douce chaleur.
Les éléments finissent par se calmer. Les nuages aux flancs lourds s’éloignent. Des rais de lumières, timides d’abord, succèdent à la pénombre, rendant couleurs et vie aux objets classiques.  La fine couche granuleuse qui masque la cour disparaît. Jusqu’à la prochaine giboulée. »

 

La Petite Gazette du 15 mai 2013

LE JOLI MOIS DE MAI

Retrouvons maintenant le texte que Monsieur Jean Bolland a écrit, inspiré par un dessin de Georges Delaw (1871-1938) imprimé sur son calendrier 2013. Ce mois-ci, c’est à la lessive que nous convie mon correspondant ; plus particulièrement la façon dont la lessive était faite à l’époque où les poudres actuelles n’existaient pas encore.

« Chaque matin, Julie se levait de bonne heure : en été, aux premières lueurs de l’aube; en hiver, lorsque le soleil pâle glissait ses rayons froids dans la chaumière, la jeune femme travaillait déjà depuis quelques heures.

Entre la traite des quelques vaches, les râteliers à garnir de foin lors de la mauvaise saison, la préparation de la pâtée pour les cochons et le grain à distribuer à la volaille, la fermière ne chômait pas.

A ces activités quotidiennes, s’ajoutaient les travaux hebdomadaires comme le pétrissage de la pâte suivi de la cuisson des pains pour la semaine, la fabrication du beurre et la lessive.

C’est précisément cette dernière tâche qui occupait la ménagère chaque lundi matin. Au chant du coq, elle craquait une allumette qui enflammait les brindilles sèches. Le feu léchait et dévorait les menus bois avant de s’attaquer aux bûches disposées sous deux chaudrons noircis par les ans et les flammes.

Le premier récipient était rempli d’eau dans lequel baignait le linge que la buandière avait soigneusement brossé pour en détacher le maximum de saletés. Une fois l’eau chauffée, Julie y déposait un sac rempli de cendres de bois ou de paille. Au préalable, elle avait évité de recueillir les cendres de chêne qui auraient bruni draps et vêtements sous l’action du tan. L’eau bouillante du second chaudron était alors puisée à l’aide d’une louche profonde armée d’un long manche puis versée sur les cendres dont la potasse faisait office de savon. Cette opération se répétait plusieurs fois. Julie laissait ensuite reposer le linge toute la journée.

Le lendemain, la lavandière sortait la lessive du chaudron et la disposait dans une brouette qu’elle poussait jusqu’à la rivière. Agenouillée sur un sac rempli de paille ou dans un garde-genoux, elle trempait le linge dans l’eau claire pour le rincer et le frappait à l’aide d’un battoir avant de l’essorer en le tordant. Quand le temps le permettait, Julie étendait les draps sur l’herbe pour qu’ils sèchent et blanchissent au soleil.

Elle se souvenait de sa grand-mère lui racontant que, de son temps, les grosses lessives s’effectuaient seulement deux ou trois fois sur l’année. »

Quel voyage dans le temps… Merci Monsieur Bolland.

 

La Petite Gazette du 12 juin 2013

EN JUIN, ON FAUCHE…

Monsieur Jean Bolland, a tourné une nouvelle page de son calendrier et son imagination fait le reste…

« Dans un large bol au décor fleuri, Auguste dispose des morceaux de pain d’épeautre qu’il arrose généreusement d’une longue rasade de crème de lait. Ce déjeuner, simple mais roboratif, accompagné d’une jatte de café noir et sucré lui fournira l’énergie nécessaire pour accomplir son travail matinal : le fauchage d’une prairie sur Saint-Hasted.

Il quitte la ferme tassée le long du coteau puis traverse Bergister qui, peu à peu, sort de son sommeil. Il retrouve bientôt d’autres agriculteurs, la faux sur l’épaule, en route vers les prairies dont ils sont locataires ou propriétaires. Tous supputent les chances d’un maintien du beau temps pour les jours à venir. Chacun y va de ses observations : la rosée abondante, les hirondelles volant haut, la lune qui brille clairement et nettement dans le ciel nocturne …
Arrivé à la sortie du village, Auguste s’engage dans la Bounir où, çà et là, traînent encore des écharpes de brume qui s’effilochent sous l’action des rayons du soleil levant. Tout à leur aise, prés et champs s’étendent dans cette vaste cuvette avec, pour seules limites, les forêts montant à l’assaut des plateaux de La Lue et de Benasse.

Le sifflement charmeur des merles qui se répondent pour mieux marquer leur territoire, le parfum suave des reines-des-prés  dressant leurs épis sur les accotements humides du chemin, la senteur délicate du chèvrefeuille qui s’entortille malicieusement dans les haies, tout concourt à donner du coeur à l’ouvrage.

Hier, assis sur un sac en jute, Auguste avait enfoncé une enclumette devant le poulailler, y avait posé et maintenu la lame.  A l’aide d’un marteau,il avait battu l’acier afin de redresser et d’affiler le tranchant.

Arrivé à destination, le fermier affûte l’instrument au moyen d’une pierre à aiguiser qu’il retire du coffin accroché à sa ceinture. L’étui oblong en bois contient de l’eau allongée d’un filet de vinaigre. Cette opération sera répétée toutes les dix minutes afin de garantir un travail efficace et performant.

L’homme balance la faux en demi-cercle, le fer maintenu parallèlement au sol. Le chuintement de l’acier couchant l’herbe et la cadence du corps guidant l’outil rythment le labeur. Le soleil brille déjà haut dans le ciel quand Auguste peut contempler les andains jonchant la prairie.

Le séchage du foin qui exhalera une odeur à nulle autre pareille, sa disposition sur des chevalets-trépieds, l’entassement sur le chariot, le déchargement à la ferme et l’engrangement dans le fenil fourniront la provende au bétail pendant les longs mois d’hiver. »

 

La Petite Gazette du 1er juillet 2013

EN JUILLET, A LA RENCONTRE DES NUTONS

Comme chaque mois, insipiré par les illustrations de son calendrier, Monsieur Jean Bolland nous invite à le suivre dans son imagination, aujourd’hui, fantastique et merveilleuse :

« L’heure d’entre chien et loup ! Le soleil s’est perdu à l’ouest.  L’horizon éclaboussé de jaune-orange est passé au rouge incandescent puis au bordeaux.

C’est le moment choisi par Arduin pour emprunter la sente herbue dégringolant de Menuheyd. Arrivé au bas de l’escarpement, il traverse le chemin se hissant vers Betaumont, se coule entre les buissons et atteint le fond de la vallée où se faufile La Lue. Il s’immobilise tout en scrutant la crête du coteau boisé qu’il vient de descendre.

Plus d’une fois, il a cru déceler sa venue. Cette fois, il en est sûr : elle arrive !  Là-haut, au faîte de la butte rocheuse, il la devine entre la cime des bouleaux : quelques éclats d’or se mouvant et grandissant au fil des minutes. Les arbres aident à cette naissance. Leurs branches, agitées par la brise vespérale, finissent par expulser celle pour qui Arduin se languit : la lune s’est enfin extraite de sa gangue forestière.

Le regard du petit bonhomme passe et repasse de sa belle-de-nuit à la surface du ruisseau. Insensiblement, le reflet de l’astre gagne l’instabilité de la piste liquide. Arduin,  fasciné par la danse endiablée de la flaque lumineuse tordue au gré des mouvements de l’onde, imite la chorégraphie de la lune. Elle, dans l’eau ; lui, sur la berge. Couple improbable qui communie au rythme de la nature et des mêmes mouvements.

Un craquement de branche sèche ! Le charme se rompt ! Arduin devine une présence humaine qui s’enfuit vers l’aval. Connaissant le caractère moqueur de bon nombre d’hommes, il ne doute pas un instant que celui qui vient de le surprendre fera un mauvais usage du spectacle auquel il vient d’assister.

Le lendemain, le danseur monte prudemment au village. Il se faufile furtivement entre chaumières et granges pour surprendre les bribes de conversations qui lui laisseraient deviner que sa danse avec la lune est devenue objet de dérision. Il termine sa quête d’informations en descendant vers le moulin d’où vient un tombereau chargé de sacs de farine. Il a juste le temps de se jeter derrière une haie pour éviter la rencontre avec le charretier et son fils commentant  la nouvelle apprise de la bouche du meunier : la veille, en vérifiant le bon état du bief, l’indélicat a surpris un Nuton se trémoussant sur la rive de La Lue.

Triste, le cœur lourd, Arduin rejoint le massif escarpé.  Son secret est éventé.

Depuis longtemps, l’entraide avait toujours prévalu entre les hommes et les Nutons. Les villageois, chargés de galoches à ressemeler, de chaudrons à rétamer et de divers outils à réparer empruntaient la route défoncée et caillouteuse qui dévale, en oblique, vers Menuheyd. Le ponceau de pierres moussues traversé, la troupe gravissait la colline boisée pour s’arrêter à l’entrée de la grotte devant laquelle les objets à restaurer étaient déposés.

A la nuit tombante, de petits êtres barbus sortaient de l’antre et s’emparaient du dépôt avant de disparaître au plus profond de la cavité. Le jour suivant, les paysans retrouvaient leurs biens remis à neuf et, en remerciement, les remplaçaient par des victuailles. Les deux peuples vivaient ainsi en parfaite symbiose.

Mais, malheur au campagnard qui aurait osé railler ces créatures farouches et discrètes. La guigne  s’abattait alors sur lui : gens et bêtes malades, mauvaises récoltes et autres contrariétés.

C’est ainsi que les nuits du meunier devinrent agitées.  Coups redoublés contre la porte, cris lugubres dans les combles, bruits de pas sur le toit, roue à aubes qui se mettait à tourner intempestivement. Le malheureux ne trouvait plus le sommeil. Pour ajouter à son désarroi, sa femme lui reprochait d’avoir ri du Nuton. Les clients se firent rares, terrifiés par l’étrangeté du phénomène touchant les lieux.

Le moulin fut vendu. Dès que le nouveau propriétaire prit possession du bâtiment, les manifestations inquiétantes cessèrent.»

 

La Petite Gazette du 7 août 2013

MONSIEUR JEAN BOLLAND EVOQUE AOUT…

« Le modeste atelier de menuiserie, ou plutôt l’appentis qui en tenait lieu, assurait la transition entre la maison et l’enclos dans lequel poussaient, au cours de la belle saison, légumes et  fleurs vivaces.

C’était le royaume du grand-père. Penché sur l’antique établi marqué par les cicatrices des ans, maniant, avec une dextérité innée, des outils rudimentaires tels le vilebrequin, les ciseaux, le rabot, la scie égoïne… il façonnait et assemblait planches, clous et vis qui devenaient objets usuels ou jeux pour ses petits-enfants. De presque rien, naissaient des merveilles.

Il travaillait posément, avec application, le dos tourné vers un insignifiant poêle à bois qui, néanmoins, réchauffait prestement le local lorsque le temps était au froid. Le crépitement des bûches, la douce chaleur, l’odeur du bois, le cliquetis de l’outillage, le martèlement des sabots au contact du béton rugueux, toutes ces sensations, Baptiste les emmagasinait en lui. Longtemps après, il s’en souviendrait encore.

Une fois l’entrée franchie, dans le coin gauche, se dressait la canne à pêche. Composée de trois éléments en bambou brun vernissé, elle ne quittait que rarement l’endroit qui lui était dévolu. Son grand-père l’utilisait pour aller taquiner la truite dans les rares moments de loisir qu’il s’accordait. Il enfourchait alors son vélo pour gagner les rives du ruisseau bordant le village au nord.

Pêcher ! Baptiste en avait envie ! Ne suffisait-il pas d’une bonne paire de bottes, d’acheter un permis, de retourner quelques pierres plates à la recherche de vers ?

C’est ainsi,  qu’équipé de pied en cap, avec l’autorisation parentale et la canne de son aïeul, le garçonnet partit pour ce qu’il pensait être la première d’une longue série de fructueuses équipées aquatiques. Fier comme Artaban, spéculant sur la quantité de poissons pêchés, il courut plus qu’il ne marcha au long des sentiers et ruelles, emprunta le chemin caillouteux des Evals, à la rencontre du futur théâtre de ses exploits.

Au bord de l’eau, il déposa le sac de toile kaki contenant le petit matériel et monta la canne. L’enthousiasme ressenti retomba d’un cran lorsqu’il voulut enfiler un ver sur l’hameçon. Non que l’opération était complexe mais l’enfant, révulsé par le pauvre annélide empalé et gigotant, découvrait un aspect de ce sport auquel il n’avait pas pensé.

Le ru bordé d’aulnes aux branches retombantes constitua un deuxième frein à l’exaltation initiale : la ligne s’accrochait aux brindilles, obligeant Baptiste à poser sa gaule pour libérer le fil. Finalement, l’appât daigna toucher le courant, dériva en bondissant entre les galets et ralentit sa course folle dans un méandre plus calme et plus profond. Là, nouveau dépit : le crochet se planta dans les racines d’un buisson surmontant l’onde de sa masse imposante. Dégoûté, l’apprenti pêcheur dut accepter des rentrées liquides dans les bottes afin de récupérer le matériel.

Oui, vraiment, la pêche n’était pas ce qu’il avait imaginé. Il comprit que le clapotis de l’eau, le vol gracieux des libellules et les multiples formes de vie explosant dans ce milieu aux confins de deux mondes suffisaient amplement à son bonheur de petit campagnard.

La canne retrouva sa place dans l’atelier et perdit, définitivement, son pouvoir de fascination. »

 

La Petite Gazette du 11 septembre 2013

SEPTEMBRE…

Retrouvons, comme chaque mois de cette année, le texte consacré à ce mois de septembre par Monsieur Jean Bolland :

« Septembre ! Chaque jour plus nombreuses, les hirondelles se rassemblent.  Un beau matin, dans un grand froufroutement d’ailes, les gracieuses demoiselles s’envolent vers des cieux plus cléments.

Au fil du mois, le soleil s’extirpe de l’horizon avec plus de difficultés. Fatigué d’un si long été, il peine à dissiper les écheveaux de brouillard noyant, dans une mer immobile, les fonds de vallées desquels émergent, çà et là, un clocher ou une poignée d’arbres.

Le temps est venu pour récolter les pommes de terre. Harnaché, Gamin a été attelé aux brancards du tombereau dans lequel Joseph a jeté une fourche, deux paniers en osier et des sacs en jute. Aurore, sa femme, l’accompagne.

Arrivés dans le champ, tous deux se mettent aussitôt à l’ouvrage. Lui, dégageant les tubercules du sol. Elle, les ramassant et les déposant précautionneusement dans les paniers qui, une fois remplis, sont délestés de leur contenu à la limite du terrain où le doux soleil d’arrière-saison séchera la récolte.

En fin de journée, les sacs rebondis sont transportés à la ferme : les patates reposeront quelques jours dans la grange.

Un travail qu’il affectionne sera alors accompli par Joseph : rassembler et brûler les fanes dont la fumée âcre lui rappelle l’époque où, enfant, il aidait son père dans cette même tâche.

Lorsque le moment lui semblera opportun, le fermier disposera les pommes de terre dans la cave, sur une épaisse litière de fougères sèches.

Aurore débute ses journées par la traite des vaches qui, en cette saison, paissent encore dans les prés. L’agricultrice dépose les deux cruches dans les emplacements circulaires de la charrette à bras. L’une est coiffée d’un seau retourné. L’autre reçoit une étamine qui filtrera le lait afin de le débarrasser des impuretés qui auraient pu y tomber. Poussant la petite carriole devant elle, Aurore gagne  l’enclos où l’attendent les trois vaches. Assise sur un trépied, le seau coincé entre les genoux, la tête appuyée contre le flanc de l’animal, la fermière débute la traite.

Rentrée à la ferme, Aurore transvase le précieux liquide dans de grands plats en terre cuite. D’ici un jour ou deux, la crème, séparée du lait, sera battue et malaxée pour donner du beurre.

La traite de fin d’après-midi terminée, Aurore prépare le souper. Pendant ce temps,  Joseph s’assure que les animaux de son petit élevage ne manquent de rien. Les grains lancés aux poules provoquent un remue-ménage caquetant. Du fond de sa soue, le cochon se précipite vers la porte en bois vermoulu. Dans un concert de grognements, il se rue goulûment vers le seau cabossé débordant d’épluchures cuites.

La table dressée, Aurore perçoit enfin les pas fatigués de son mari. Le dos légèrement voûté sous le poids du labeur, vêtu d’un sarrau rapiécé, celui-ci ouvre la porte qui grince sur ses gonds, s’avance vers la table et prend place à côté du bahut contenant les pains pour la semaine. La cuisinière remplit les assiettes de pommes de terre rissolées accompagnées d’une scarole.

Le repas terminé et la table débarrassée, chacun prend place près du poêle. A la lumière d’un quinquet, Aurore tricote. La pipe vissée au coin de la bouche, Joseph laisse échapper de mouvantes volutes de fumée bleuâtre. Pensif, il parle peu. Quelques rares paroles. Chez les gens de la terre, on ne dit pas en vingt mots ce qui peut être exprimé en cinq. Chez eux, rien n’est gaspillé.

Le silence est haché par le cliquetis des aiguilles à tricoter. Par le chant plaintif et grave des bûches noueuses. Par le tic-tac de l’antique horloge qui égrène le temps. Par le mugissement des premiers vents d’automne dans la cheminée.

La sérénité de ces heures apaise et répare les corps qui ont oeuvré de l’aube au crépuscule. »

 

La Petite Gazette du 8 octobre 2013

OCTOBRE…

Retrouvons, comme chaque mois de cette année, le texte que les illustrations du calendrier de Monsieur Jean Bolland lui ont inspiré…

« Les sorcières ! Aujourd’hui, cette évocation fait délicieusement frissonner les enfants. Pour eux, ce vocable est synonyme de fête, de carnaval et d’amusement.

Autrefois, il en allait autrement. Ce nom provoquait la crainte et l’effroi. En témoigne le nombre de lieux-dits rappelant le souvenir de ces êtres qui, bien malgré eux, ont terrifié les générations des siècles passés.

La définition, qu’en donne le dictionnaire Larousse,  dit l’essentiel : « Personne qu’on croit en liaison avec le diable et qui peut opérer des maléfices. » Chaque mot a son importance.

Il est toujours dangereux de vivre et de penser autrement que le commun des mortels. De nos jours, de tels individus sont parfois regardés avec commisération ou, dans le pire des cas, mis au ban de la société.

Jadis, ces gens risquaient leur vie. A une époque où l’instruction était limitée, où la crédulité de nos ancêtres leur faisait entrevoir l’intervention de forces obscures, il ne faisait pas bon être versé dans la catégorie des originaux. Une maladie grave ou un décès inexpliqué dans la famille, une épidémie dévastatrice ou, plus simplement, une vache et son veau qui crevaient,  ne pouvaient être que le résultat  de l’action de puissances maléfiques avec lesquelles certaines personnes, pensait-on, pactisaient.

Lorsque la rumeur enflait et se concentrait sur un malheureux, celui-ci devenait le coupable, tout désigné,  à l’origine des misères affligeant la communauté. Un procès, ou plutôt un simulacre de procès, était organisé. En résultait, généralement, l’exécution de l’accusée.

Dans nos régions, les 16° et 17° siècles virent une grande chasse aux sorcières qui furent brûlées à cause du fanatisme,  de l’ignorance de la population et de ses représentants. Comble de l’abjection, les frais de l’exécution étaient réclamés à la famille du condamné : rétribution du bourreau, payement du bois utilisé et repas de ceux qui s’attribuaient le titre de juges. »

 

La Petite Gazette du 30 octobre 2013

AVEC NOVEMBRE QUI S’ANNONCE, C’EST LE RETOUR DES LONGUES SIZES

Nous retrouvons, avec grand plaisir, le texte que M. Bolland a imaginé en découvrant la nouvelle page de son calendrier…

« Fernand, Raymond et Gaston aimaient passer, ensemble, les soirées de la mauvaise saison. Réunis, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre, ils discutaient des menus événements survenus dans le village, jouaient aux cartes ou évoquaient des histoires d’autrefois. Le plus souvent, c’était Fernand qui hébergeait ses compagnons.

A côté de l’âtre, lové sur une chaise basse, ronronnait un des nombreux chats de la ferme, fatigué d’avoir chassé les souris ayant élu domicile dans les moindres recoins de l’exploitation. Cette chaise lui était dévolue. Il se confondait avec elle. Pour peu, il aurait fait partie des meubles.

Combien de fois les compères ne s’étaient-ils pas rappelé le tour pendable qu’ils avaient joué à Eustache, un jeune marié. Le soir de ses noces,  les trois complices s’étaient dirigés vers la fermette de leur victime. C’était une modeste demeure adossée à un talus et dont le pied de la toiture arrière touchait le sol. Un chariot était entreposé dans le hangar accolé à la grange. Ils eurent vite fait de démonter l’engin, d’en transporter les éléments sur le robuste toit de cherbains avant de le remonter au faîte de l’habitation.

Une autre fois, ils avaient décroché et étendu, sur les buis du presbytère, le linge qu’une vieille jeune fille acariâtre avait mis à sécher au fil reliant deux pommiers de son verger.

Ces évocations étaient accompagnées de rires sonores qui allaient en s’amplifiant au fur et à mesure que la bouteille de genièvre diminuait. Difficile de dire qui était le plus farceur, tant chacun sollicitait  son imagination.

Fin novembre, Raymond et Gaston s’étaient invités à souper chez leur ami. Clotilde, l’épouse de Fernand,  mettait la dernière main aux préparatifs du repas pendant que le trio devisait joyeusement, cherchant un prochain souffre-douleur à leurs espiègleries. Le délicieux fumet qui s’échappait du chaudron suspendu à la crémaillère faisait saliver les invités.

Au moment de prendre place autour de la table, on frappa à la porte. La maîtresse de maison alla ouvrir : c’était la jeune voisine. Elle venait quérir de l’aide pour préparer le mélange de base à la fabrication du boudin noir. Clotilde se dit qu’elle souperait plus tard.

Prétextant des douleurs à l’estomac, Fernand ne fit que goûter les aliments avant de repousser son assiette. L’appétit ouvert par quelques petites gouttes, ses deux copains parlèrent peu, occupés qu’ils étaient à faire honneur aux mets. Ils relevèrent la tête lorsqu’il ne resta, au fond du plat, qu’un discret  morceau de viande et deux bouts de pommes de terre baignant dans un reliquat de sauce. Ils s’excusèrent presque de n’avoir rien laissé pour Clotilde.

Les deux hommes, rassasiés, reculèrent leur chaise, s’appuyant confortablement contre le dossier qui gémit, les jambes étendues sous la table. Il y a longtemps qu’ils n’avaient plus participé à pareil festin !

Un large sourire de satisfaction illuminait leur visage quand, soudain, Gaston donna un coup de coude nerveux à Raymond. D’un mouvement rapide de la tête, il l’invita à regarder la chaise basse dressée à côté de la cheminée :  le chat ne s’y trouvait pas ! Leur mine s’allongea. Pris de violentes nausées, ils se précipitèrent vers l’étable. »

 

La Petite Gazette du 11 décembre 2013

FEERIE DE DECEMBRE

Comme chaque mois de cette année qui s’épuise, Monsieur Jean Bolland nous baigne dans une intimité désuète, mais tellement sincère, et qui, je le sais, vous invite à la rêverie…

« Décembre est bien entamé. La Saint-Nicolas passée, une autre fête occupe peu à peu les esprits : Noël et sa féerie. Son attente donne de la couleur aux jours gris et de plus en plus courts.

Le temps d’une soirée, et elles sont longues en ce début d’hiver, l’église millénaire résonne de coups de marteaux. Des bénévoles installent, du côté droit du choeur, la structure qui hébergera les statuettes reléguées, pendant le restant de l’année, dans un coin sombre de la tour. Quelques résineux, placés en arrière-fond, donnent une touche bucolique à l’ensemble.

Après l’école, à l’aide de plâtre, les enfants  façonnent des santons qu’ils peindront avec méticulosité. Dans les jours qui précèdent la Nativité, les boîtes contenant les différentes garnitures sont  descendues du grenier et ouvertes délicatement. Les réflexions des petits fusent lors de la redécouverte des trésors fragiles qu’elles contiennent. L’un avait oublié la présence de telle boule. Un autre a des étoiles plein les yeux en retrouvant le clinquant des oiseaux qui le fascinent. Chacun rivalise d’adresse et de prudence au moment d’accrocher ces objets aux branches du sapin.  La crèche est enfin posée sur une petite table au pied de l’arbre rutilant : elle accueillera les personnages créés par les enfants. Ainsi garni, ce coin de la salle à manger, vers lequel convergeront tous les regards, ajoutera une touche de merveilleux et de bien-être.

Matinée de la veille de Noël. Le pot du poêle plate-buse est incandescent. Les deux portes émaillées du coffre ont été, au préalable, fermées afin d’y accumuler un maximum de chaleur. Sous les doigts experts de la maman, la farine, la levure, le lait, le beurre fondu, les œufs et une pincée de sel deviennent pâte qui reposera avant d’être partagée en pâtons aplatis à l’aide d’un rouleau puis étalés dans des moules à l’intérieur enduit de matière grasse. Fruits en morceaux, compote, riz… couronneront le tout. Enfournées dans le coffre du poêle pour en être retirées trois quarts d’heure après, dorées et appétissantes à souhait, les tartes prendront la direction de la cave pour y être entreposées dans un garde-manger à claies

La soirée du 24 s’annonce longue. Après le repas, les marmots sont invités à se reposer – à dormir même- pour pouvoir assister à la messe de minuit. A 23 h 45, les cloches sonnent à toute volée, emplissant l’espace de résonances claires s’interpénétrant et roulant jusqu’au fond de la vallée. La famille est en vue de l’église vers laquelle se dirigent d’autres groupes. Tout ce petit monde s’engouffre dans l’édifice. La douce chaleur, l’odeur de résine, les notes de musique dégringolant du jubé, les sourires échangés, la crèche illuminée, tout concourt à rendre l’assemblée heureuse. La magie des chants traditionnels ajoute un supplément de félicité et de surnaturel à ces instants de grâce.

L’office terminé, alors que chacun rentre chez soi, des détonations éclatent soudain et font se lever les têtes. C’est Hector, le menuisier, qui tire quelques fusées griffant les ténèbres du ciel d’éphémères traces dorées et chuintantes.

La porte close, la maisonnée prend place autour de la table pour avaler un morceau de tarte ou un cougnou « maison », le tout accompagné d’un petit verre de vin de muscat. »

Un tout grand merci à monsieur Bolland pour ces très beaux textes qui ponctuèrent fort agréablement cette année 2013.

POUR RAMONER LES CHEMINEES: LES EPLUCHURES DE POMMES DE TERRE !

La Petite Gazette du 22 décembre 2010

POUR RAMONER LES CHEMINEES ?

Il y a quelque temps de cela, une charmante dame, fidèle lectrice de cette page, m’affirmait que, dans sa jeunesse, son papa, un Ardennais de vieille et pure souche, jetait toujours dans le poêle à bois de la maison familiale les épluchures de pommes de terre car disait-il « Cela ramone la cheminée ! »

Avez-vous déjà entendu parler de cette pratique ? Qu’en pensez-vous ? Connaissez-vous un autre procédé que la bonne vieille brosse à ramoner, lestée d’un poids ou munie de manches successifs, pour l’entretien des cheminées des maisons chauffées au bois ?

J’attends vos réponses avec beaucoup de curiosité.

La Petite Gazette du 5 janvier 2011

POUR RAMONER LA CHEMINEE…

Madame Christine Petit, Aye, respecte toujours cet usage ancien :

« Tout comme l’explique votre fidèle lectrice, je mets les épluchures de pommes de terre dans le poêle à bois pour ramoner la cheminée. Je suis née en 1960 et j’ai le souvenir déjà de ma grand-mère qui mettait ses épluchures dans le poêle à bois pour nettoyer la cheminée disait-elle. »

Monsieur Jacques Bastin,  de Heyd,  se souvient lui aussi et explique :

«Cette fidèle lectrice a parfaitement raison en ce qu’elle avance au sujet des pelures de pommes de terre. En effet, quand j’habitais au quartier du Laveu à Liège, très nombreuses étaient alors les familles qui, dans les années quarante, jetaient régulièrement, sur le feu brûlant de leur cuisinière à charbon, des pelures de pommes de terre et épluchures diverses en vue d’éviter tout feu dans la cheminée. Ce truc marchait à merveille. Il venait, à la fois, d’un ancien ami de régiment de mon père, qui était devenu poêlier, et du père d’un de mes amis d’enfance qui était maçon.

Je suppose que la protection provenait du simple fait qu’en brûlant vivement toutes ces pelures  et épluchures on humidifiait, non seulement assez fortement ainsi, le conduit de la cheminée où s’était déposée la suie, mais que, quand la quantité de cette suie était devenue un rien trop importante, cette accumulation d’humidité en augmentait le poids au point qu’elle finissait  vite alors par se détacher  d’elle-même. »

Monsieur Christian Delhez, de Remouchamps, sait lui aussi que cette pratique était courante :

« Effectivement, j’ai déjà entendu parler des épluchures quand j’étais gamin, mais sans pouvoir vous parler des résultats obtenus !

Un autre « truc et astuce » brûler des morceaux de vieux zinc, morceaux venant du démontage
d’anciennes toitures. C’est sensé limiter les dépôts de goudron dans les conduits de cheminée. J’ai testé, pas sur un très long terme, mais le conduit restait bien sec. Maintenant la qualité du bois a aussi toute son importance.

Néanmoins, conclut-il avec prudence, tout cela ne remplace pas un ramonage correct. »

C’est toujours un plaisir que de vous questionner… Vos réponses sont toujours si intéressantes !

La Petite Gazette du 19 janvier 2011

ENCORE LE RAMONAGE DES CHEMINEES

Madame Lamette, de Waha, aime à confirmer ce qui a été dit sur l’usage des épluchures de pomme de terre à des fins de ramonage.

« J’ai 73 ans et, depuis ma plus tendre enfance, je me souviens de mes grands-parents et de maman, que j’ai encore le bonheur d’avoir auprès de nous, qui confiaient au feu les épluchures de pomme de terre.

Etant jeune, j’en riais un peu mais, un jour, un feu de cheminée s’est déclaré chez des voisins. Les pompiers marchois sont intervenus avec de l’eau et il y a eu des dégâts… Un pompier, parmi les plus âgés, a alors parlé des épluchures…

Depuis des années, je sèche légèrement les épluchures et, toutes les deux semaines, je ramone ma cheminée avec un bon sachet d’épluchures de pomme de terre, quand il y a un bon feu de bois. Chaque fois, je pense que nos anciens avaient de bonnes idées et étaient de bons conseils. »

La Petite Gazette du 26 janvier 2011

ENCORE LE RAMONAGE DES CHEMINEES

Cette fois, c’est Mme Marie Wirtz, de Somme-Leuze, qui confirme ce qui a été dit jusqu’à présent :

« Je confirme bien la pratique de jeter les épluchures de pommes de terre dans le poêle pour le bon entretien de la cheminée. J’ai toujours vu ma belle-mère, qui aujourd’hui serait âgée de 97 ans, agir de cette façon dans la région arlonnaise. Il est vraisemblable que tout le monde ne faisait pas comme cela, je pense notamment aux personnes qui élevaient un cochon et qui lui réservaient dès lors les épluchures des pommes de terre. »

Un grand merci pour cette communication.

 La Petite Gazette du 2 février 2011

UNE EXPLICATION AU RAMONAGE PAR LES EPLUCHURES

Un très aimable lecteur nous explique en quoi les épluchures de pommes de terre peuvent effectivement avoir une vertu « ramoneuse » :

« Il est tout à fait plausible, m’écrit-il, que les épluchures de pomme de terre puissent avoir un effet sur l’élimination des suies dans les conduits de cheminées. Le zinc est un des composants utilisé dans les bûches ramoneuses qu’on trouve de nos jours dans divers magasins ; en effet, le zinc présent également dans les épluchures de pomme de terre soumises à de hautes température s’évapore sous forme d’oxyde et décroche avec efficacité les suies…cqfd. »

Ah ! ces merveilleux trucs de grand-mère…

La Petite Gazette du 9 février 2011

CONFIRMATION : LES EPLUCHURES DE POMMES DE TERRE RAMONENT…

Monsieur Jacques Petit, de Sprimont, apporte une nouvelle confirmation à ce qui a été publié sur le sujet : « Ce procédé est efficace et, d’ailleurs, il y a quelques années, un technicien de la firme Eifel l’a préconisé lors d’une émission télévisée.

La pomme de terre est un tubercule à forte teneur d’amidon. C’est l’amidon qui doit imbiber les suies qui collent dans la cheminée. Ces suies qui sont normalement grasses sont asséchées par l’amidon contenu dans les fumées. Nous constatons que cette suie asséchée et devenue craquante tombe toute seule dans la cheminée. Après un ramonage sommaire, on la retrouve au pied de cette cheminée. Il suffit alors de la récolter à la main afin de l’évacuer.

Cependant, pour plus de tranquillité, nous ramonons par le dessus et nous constatons que la cheminée s’est ramonée toute seule. Seule, un petit résidu tombe au pied de la cheminée.

Avant de mettre les épluchures dans le feu, nous les laissons sécher pour éliminer l’eau qui ne ferait qu’encrasser davantage la cheminée. »

Monsieur Marcel Pestiaux, de Marche-en-Famenne, a également tenu à vous faire savoir que ses « grands-parents paternels utilisaient eux aussi cette vertu des épluchures de pommes de terre. Ils ont élevé douze enfants, dont neuf sont restés très longtemps en vie, mon papa était l’aîné. Une fois par semaine, on attendait un feu bien flambant pour y introduire une portion d’épluchures mi-séchées. Jamais ils ne connurent d’incendie… »

La Petite Gazette du 23 février 2011

ENCORE A PROPOS DU RAMONAGE DES CHEMINEES

Monsieur R. Lecomte, de Clavier, apporte lui aussi sa confirmation :

« Oui, les épluchures de pommes de terre ramonent ! » Il poursuit son envoi en donnant d’autres moyens d’arriver au même but : « Si vous avez chaque jour des capsules senséo, jetez au feu ce marc de café. Il est aussi un autre moyen bon marché et très efficace, un bon vieux morceau de zinc glissé entre deux bûches flambantes, le morceau fondra très vite et la fumée fera son effet salutaire. » Mon correspondant précise qu’il n’a pas consulté Monsieur van Ypersele, le célèbre climatologue belge, pour connaître l’impact environnemental de ce procédé… »

L’IMPORTANCE DE L’ACTIVITE LIEE A L’EXTRACTION DU MINERAI DE FER A FERRIERES A LA FIN DU XVIIIe SIECLE

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, est, vous le savez bien, un inlassable chercheur, passionné par les réalités passées de sa région. Il ne se fatigue de fouiller et de déchiffrer les archives que nous ont laissées les siècles écoulés et il aime à partager ses intéressantes découvertes. Il revient sur l’évocation de l’importante activité que générait, encore à la fin du XVIIIe, l’extraction du minerai de fer.Voic, avec l’orthographe de l’époque, le fruit de ses découvertes:

Liste  des  minéraux  tirez  au  Comté  de  Logne  sur  le  bien  des  Seigneurs  du  Chapitre  de  Stavelot  depuis  le  Noel 1781  jusqu’au  Noel 1782.

1781.

Le  28  Xbre (décembre)  mesuré  à  L. Sylvestre  et  consors 18  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Seigneurs  du  Chapitre  de  Stavelot  deriere  leur  cense  à  Feriere  lesquels  sont  vendus  à  la  Delle veuve  Xhardez  à  9 florins  le  char, vient  auxdits  Sgr  pour  propriété   la  dime  déduite  25  sous  par  char, ici : 20,9,1 florins.

Le  28  Xbre  mesuré  à  Martin  Paulus et  à  G. J. Sylvestre  12  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  lesquels  sont  vendus  aux  Mrs Boumalle  à  9  florins  le  char,  vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  13,12,3 florins.

Le  28  Xbre  mesuré  à  Antoine  Sylvestre  de  Feriere  6  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  lesquels  sont  vendus  au  Sr Henry  Lambert   à  9  florins  le  char, vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  6,16,2 florins. 

1782.

Le  2  janvier  mesuré  audit  Sylvestre  15 ½  chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu et  sont  vendus  au  Sr  H. Lambert  à  9 florins  le  char,  vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  17,1,0 florins.

Le  2  janvier  mesuré  à  Martin  Paulus et  à  G. J. Sylvestre  25 ½ chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  et  sont  vendus  aux  Mrs  de  Boumal  à  9  florins  de  char, vient  pour  propriété  auxdits  Sgrs  25  sous  par  char la dime  déduite, icy  28,8,1 florins.

Le  15  avril  mesuré  à  H. Roucelle  et  consors  11  chars  mine  venante  du  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  et  tirée  par  le  bien  du  Sr Biron  à  Filot, icy  aux  Sgrs  1  florin  par  char  la  dime  déduite, 10 florins.

Le  19  avril  mesuré  à  J. J. Charlier  et  consors  59  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  aux  Aguesses  et  sont  vendus  au  Sr J. P. Hubin à  4,15 florins  le  char, icy  auxdits  Sgr  le  4 eme  la  dime  déduite  ou  63,13,3 florins.

Le  20  dito  mesuré  à  Henry Seret et  consors 18  chars  mine  tirez  sur  le  bien  audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  4 eme  la  dime  déduite  ou  12,5,1 florins.

Le  23  dito  mesuré  audit  Seret 10 ½ chars et  1  mesure  grosse  mine  tirez  sur  ledit  bien audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4 eme la  dime  déduite, 7,3,3 florins.

Le  23  avril  mesuré  à  J. J. Charlier et  consors  21  chars  et  2  mesures  grosse  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  et  sont  vendus  au  Sr mayeur Lembrée  à  3  florins le  char,  icy  auxdits  Sgrs  le  4 eme  la  dime  déduite, 14,7,2 florins.

Le  5  juillet et  suivants  mesuré à  Seny  et  consors 149 ½ chars mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  à  la  heid  des  Cheins  à  Filot  et  sont  vendus  aux  Mrs Hauzeur  à  5 florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs 1 florin  par  char  la  dime  déduite, 135,18,1 florins.

Le  5  juillet  mesuré  à  H. Roucelle et  consors  72 ½ chars  mine  tirez  sur  le  même  bien, vient  auxdits  Sgrs  1  florin  par  char  la  dime  déduite, 65,18,1 florins.

Le  9  juillet mesuré  à  M. Bonjean et  consors  13  chars  mine  tirez  par  le  bien G. Bonjean  venante  de  dessous  le  chemin  à  Feriere et  sont  vendus  au  Sr M. Wathelet  à  7,5 florins  le  char, icy auxdits  Sgrs  le  10 eme pour  terrage  la  dime  déduite, 8,0,1 florins.

Le  9 dito mesuré  à  G. Masset  et  consors 13  chars  mine  tirez  par  le  bien  G. Bonjean  venante  de  dessous  le  chemin  à  Feriere  et  sont  vendus  aux  Mrs Boumalle  à  7,5 florins  le  char, icy  aux  Sgrs du  Chapitre  le  10 eme pour  terrage  la  dime  déduite, 8,0,1 florins.

Le  19  juillet  mesuré  à D. Brialmont  46  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  aux  Aguesses  et  sont  vendus  à  la  Delle  veuve  Xhardez  à  4,5 florins  le  char, ici  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 44,8,2 florins.

Le  19  juillet  mesuré  à J. C. Hubin  46  chars  mine  tirez  sur  le  même  lieu  et  sont  vendus  à  J. P. Hubin  à  4,10 florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 47,0,3 florins.

Le  19 dito  mesuré  à  F. Marechal  46  chars  mine  tirez  sur  le  même  lieu et  ont  vendus au  Sr  maieur  Lembrée  à  4,10 florins le  char, icy auxdits  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 31,7,1 florins.

Le  20  août  mesuré à  Henry  le  Kaye  et  consors  100 chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs la  4 eme  la  dime  déduite, 68,3,2 florins.  

Le  4 7bre mesuré  à  J.P. Hubin et  consors  94  chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu  dont  la  dime  se  paie  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 64,1,3 florins.

Item  aussi  estimé  audit  Hubin  9 ½ chars  mine  venantes  du  bien  Joseph  Guillaume  et  tirée  par  celui  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  audit  lieu  dont  la  dime  se  paie  à  3  florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  30 eme  la  dime  déduite, 0,18,3 florins.

Le  6 9bre mesuré  à  J.C. Hubin et  consors  101 chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  audit  lieu  et  sont  vendus au  Sr maieur  Lembré  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4eme la  dime  déduite, 68,17,1 florins.

Le  8  dito mesuré à  J.F. Brialmont  et  consors  127  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le char, icy  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduits, 86,1,3 florins.

Les  postes  de la  veuve  Xhardez  portent : 64,17,3 florins.

Les  postes  de  Mrs  Boumalle  portent : 50,1,1 florins.

Ceux  du  Sr H. Lambert  portent 23,17,2 florins.

Ceux  de  Herman Roucelle  portent : 17,18,1 florins.

Ceux  de  J.P. Hubin  portent : 193,4,0 florins.

Ceux  du  Sr maieur  Lembrée  portent : 268,17,1 florins.

Celui  de  Mrs Haueur  porte : 135,18,1 florins.

Celui  du  Sr Wathelet  porte : 8,0,1 florins.

Total : 822,14,2 florins.

Le  Sr Henry  Lambert  at  quitté  le  poste  le  28  mars  1785 portant  40,12,1 florins  par  une  étuve  quarrée  qu’il  at  livré  auxdits  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  à  leur  cense  de  Ferière.

B. Gisbrant.

Mon correspondant commente : « Plus de 1.000 chars, 1.011 exactement, ont été extraits des terres des Seigneurs du Chapitre de l’abbaye de Stavelot à Ferrières durant cette seule année ! remarquons qu’ils sont vendus à des prix différents et que plusieurs taux d’imposition existent. Retenons également qu’ils sont désignés « char mine » ou « grosse mine » ; il semble ainsi que le minerai soit de qualité différente suivant les endroits d’extraction. »

N.D.L.R. J’attire également votre attention sur le fait que c’est bien la dîme, l’impôt religieux, qui s’applique puisqu’il s’agit d’une ressource du sous-sol, cet impôt ne concerne donc pas que les carottes, les navets ou les pommes de terre…

LES ATTELAGES DE NOS CAMPAGNES

La Petite Gazette du 27 décembre 2007

POUR LES SPECIALISTES DU WALLON OU CEUX DE L’ATTELAGE

Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, est enchantée de découvrir, semaine après semaine, l’étendue de vos connaissances ; elle a donc décidé de faire appel à votre sagacité.

« Je me suis mise à écrire un texte qui fait appel à des termes du patois, dont j’indique la traduction française entre parenthèses. Je bute actuellement contre le mot « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans mon entourage. Il s’agit d’une petite charrette basse et triangulaire, à trois roues, celle de devant étant plus petite, à courtes ridelles, à laquelle s’attelait un cheval. Les hommes, je crois, s’en servait pour transporter leurs outils aux champs et en ramener, par exemple, les sacs de pommes de terre. J’espère m’être bien expliquée, j’espère être comprise de l’un ou l’autre lecteur à qui, d’avance, je dis merci. »

A vous de jouer et d’étonner encore cette lectrice.

 

La Petite Gazette du 9 janvier 2008

POUR LES SPECIALISTES DU WALLON OU CEUX DE L’ATTELAGE

Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, avait  décidé de faire appel à votre sagacité pour obtenir la traduction française d’un terme wallon « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans son entourage.

Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo,  s’est penché dans ses vieux dictionnaires et nous livre le fruit de ses recherches : « Je ne trouve aucune mention de ce mot dans le dictionnaire de Jean Haust, par contre le dictionnaire de L  Remacle édité en 1823 reprend :

Galio : s.m. Efourceau, machine composée d’un essieu, deux roues et un timon pour transporter des fardeaux très pesants.

Le dictionnaire de la langue française par E. Littré, tome II, année 1876 donne la définition suivante :

Efourceau : s.m. Nom d’une voiture à deux roues qui sert à conduire de pesants fardeaux, tels que les troncs d’arbres, de grosses poutres, etc.

Etym. : ce mot paraît formé du latin « furca » fourche : chariot à fourche. »

Un immense merci pour cette recherche précise. D’autres développements très prochainement.

La Petite Gazette du 16 janvier 2008

POUR LES SPECIALISTES DU WALLON OU CEUX DE L’ATTELAG

Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, avait  décidé de faire appel à votre sagacité pour obtenir la traduction française d’un terme wallon « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans son entourage. La semaine dernière, je vous livrais l’analyse faite par M. Gabriel, de Roanne-Coo ; d’autres me sont parvenues et elles sont également intéressantes :

Mme Marcel David-Lacasse, de Manhay, s’est plongée dans les dictionnaires et voici ce qu’elle a trouvé :

« Dans le dictionnaire de Hesbaye d’Eugène Dethier, édition 1994, je lis :

Galiot : sorte de banneau (petit chariot aux roues antérieures amovibles pouvant être remplacées, en hiver, par un traîneau)

Gaillotte : grosse brouette utilisée en Champagne. »

Mme Godinas-Borsu,de Lorcé, m’écrit pour signaler que, selon elle, « ce mot wallon est mal orthographié, il s’agit plutôt d’un ‘galiot’. Le dictionnaire de Jean Haust en donne la définition suivante : ‘terme rural, petit chariot bas sur roues, pour les travaux des champs’ Il s’agit donc, tout simplement, d’un chariot. D’après ce dictionnaire, ‘galiot’ signifie aussi haquet de brasseur et, en terme de houillère, un petit wagonnet employé dans les voies intermédiaires. Dans notre région, poursuit ma correspondante, je n’ai jamais entendu ce terme de ‘galiot’. Chez nous, on dirait tout simplement ‘on tchårê’. Le dictionnaire de Jean Haust est très explicite, je doute fort que Mme Demazy trouve d’autres formules. »

Monsieur Jean Grosdent, de Hotton, puise aux mêmes sources : « petit chariot pour les travaux des champs ou haquet (camion) de brasseur ». Il ajoute que « ce mot est dérivé de l’ancien français ‘galie’ qui était une galère. »

Merci à ces dames et à ce monsieur pour les recherches menées.

 La Petite Gazette du 23 janvier 2008

GALLIO… GALIOT… GARIOT

Comme beaucoup d’autres, M. Louis Daems, d’Ougrée, s’est passionné par cette question linguistique.« Cette lectrice désire connaître la signification du mot « gaillo ». En wallon liégeois (Jean Haust), il s’agit du mot « galiot » et « gariot » dans la région de Durbuy. Il s’agit d’un terme rural qui désigne un petit chariot bas, souvent à trois roues, pour les travaux des champs (J. Haust). La Petite Gazette du 1er avril 2005 a publié une illustration de ce type de véhicule, communiquée par M. Dethier, de Méan. » (N.D.L.R. La voici) bel-attelage

M. J. Polet, de Sprimont,  a cherché lui aussi et, outre ce qu’en dit Jean Haust il nous apprend que « Dans les années 1935, lors de la première invasion de notre région par des cultivateurs du plat pays, j’ai vu un «galiot » au travail. A la description faire par Mme Demazy, j’ajouterai que la petite roue située à l’avant pivotait sous le chariot, actionnée par un court timon auquel le cheval était attaché par un palonnier simple (« on cope »dans notre wallon de Sprimont, pour découvrir d’autres noms de ce palonnier simple, voir J. Haust p. 163 : coplê, copê, coplî, couplî). Le chariot que j’ai vu ne possédait pas de « mécanike », système de freins à patins de bois dur, ou une manivelle à vis sans fin, rabattait simultanément sur les roues arrières.Dans un pays accidenté comme le nôtre, cet engin n’était pas commode à utiliser. Avant d’entamer une descente, le charron devait stopper son cheval et bloquer ses roues arrières au moyen d’une perche passée entre les rayons ; le cheval tirant dans la descente.L’éfourceau dont parle M. R. Gabriel dans l’édition du 9 janvier dernier est un « trikebale » (voir J. Haust, page 676).Pour M. Georges, de Bomal, « le gallio » est une petite charrette à trois roues, avec ridelles sur les côtés, une petite roue devant (semblable à une roue de brouette) et un crochet d’attelage pour transporter des charges légères (les semences, les pommes…)

Pour M. Jacob, d’Ambly, il s’agit tout simplement d’un tombereau.

Monsieur Guy Miny, d’Aywaille, renvoie à l’excellent dictionnaire de M. Simon Stasse, d’Aywaille lui aussi. Voici ce qu’on peut y lire:

GALIOT : 1. Haquet, charrette étroite pour le transport des tonneaux ; syn. Tchèrète di brèsseû  (ou al bîre). 2. Efourceau, fardier, petit chariot bas sur roues pour le transport de lourdes charges. 3. wagonnet employé dans les voies intermédiaires.

M. Jean Dolne, de Sendrone, s’est également fendu d’une intéressante recherche :

« J’ai vu les premiers éléments de réponse parus ce 9 janvier.

Le « Dictionnaire pratique du wallon liégeois » de Jules Lempereur et Jacques Morayns, reprend le galiot avec comme seule précision « haquet, camion ». Mais ce n’est ni un haquet (véhicule à deux roues pour transporter des charges lourdes, des tonneaux), ni un camion (véhicule bas à deux ou quatre roues).

En faisant la même confusion, le dictionnaire Remacle a envoyé M. Gabriel sur une fausse piste. La définition de l’éfourceau montre bien que ce n’est pas ce que nous cherchons. Le « gaillo » décrit par Mme Demazy a trois roues, l’éfourceau en a deux. Il y en a plusieurs définitions de l’éfourceau sur Google, je vous donne celle de l’Académie.

ÉFOURCEAU : n. m. XVIIIe siècle. Issu de la forme masculine de l’ancien français forcelle, « clavicule », qui remonte au latin furcilla, « petite fourche ».

Chariot composé de deux roues, d’un essieu et d’un timon, utilisé pour le transport des grumes, des poutres, etc.

Une recherche plus poussée sur l’éfourceau m’a permis de trouver une illustration dans un ouvrage qui apparaît sur Internet, Elfinspell: Late 19th Century Modes of Transportation In France Taken from The Dictionary of P. Larousse

trinqueballeC’est donc bien une espèce de triqueballe, dont les roues sont reliées par un essieu droit, celles du triqueballe sont fixées sur une sorte d’arceau qui augmente la distance sol-support,

 

 

ou de diable. c003_102

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J’ai trouvé – en cherchant dans la traction chevaline – le « beignot » utilisé en France, dans le Nord: ce serait bien un engin semblable à ce que nous cherchons … mais cela ne résout pas la question, car je n’en trouve que deux occurrences en cherchant avec Google. (Le diable et le beignot sont visibles sur http://metiers.free.fr/ac/c003_d.html). Qui trouvera ? … si c’est trouvable? »

Un tout grand merci pour cette belle recherche.

La Petite Gazette du 6 février 2008

GALLIO… GALIOT… GARIOT

Monsieur Roger Dorval, d’Emptinne, a rassemblé ses souvenirs :« Natif d’un petit village agricole à l’époque…, j’ai souvent entendu ce terme de « gaillo » qui désignait un petit chariot à deux ou quatre roues (le plus souvent), utilisé pour le transport de quantité ou volume peu important : des strains (paille), des canadas (pommes de terre), des pils (pulpe de betterave et ses feuilles)… attelé d’une seule bête. Le transport de matériaux plus lourds se faisait aussi à l’aide d’on bègnon (tombereau) qui, lui, avait deux roues et pouvait souvent basculer pour aider au déchargement del terroul (charbon), des sauvion (sable), encine (fumier)…Au contraire, le grand chariot était on tchôr pour le transport des grandes masses : moissons, pétrâles (betteraves)… beaucoup plus lourdes et attelé, souvent, de plusieurs bêtes. Il était fabriqué par on tcherron (charron) et entretenu par le tchorli qui était aussi le menuisier du village (châssis, cercueil, escaliers…) »Un immense merci pour cette précieuse collaboration. Merci également pour les recherches faites par Mme Jacqueline Wilmet-Mottet, de Marchin, et M Léon Franchimont, d’Esneux.Monsieur Jean De Tender revient sur ce sujet qui, décidément, aura passionné tous les amateurs de vocabulaire, tant wallon que français. Mon correspondant vous propose de découvrir ce petit passage de l’œuvre de Victor Hugo qu’il extrait de   Les misérables, livre IV chapitre premier : « Rien n’est plus ordinaire qu’un tombereau ou une charrette à la porte d’une auberge. Cependant le véhicule ou, pour mieux dire, le fragment de véhicule qui encombrait la rue devant la gargote du Sergent de Waterloo, un soir du printemps de 1818, eût certainement attiré par sa masse l’attention d’un peintre qui eût passé là.C’était l’avant-train d’un de ces fardiers, usités dans les pays de forêts, et qui servent à charrier des madriers et des troncs d’arbres. Cet avant-train se composait d’un massif essieu de fer à pivot où s’emboîtait un lourd timon, et que supportaient deux roues démesurées. Tout cet ensemble était trapu, écrasant et difforme. On eût dit l’affût d’un canon géant. Les ornières avaient donné aux roues, aux jantes, aux moyeux, à l’essieu et au timon, une couche de vase, hideux badigeonnage jaunâtre assez semblable à celui dont on orne volontiers les cathédrales. Le bois disparaissait sous la boue et le fer sous la rouille. Sous l’essieu pendait en draperie une grosse chaîne digne de Goliath forçat. Cette chaîne faisait songer, non aux poutres qu’elle avait fonction de transporter, mais aux mastodontes et aux mammons qu’elle eût pu atteler ; elle avait un air de bagne, mais de bagne cyclopéen et surhumain, et elle semblait détachée de quelque monstre. Homère y eût lié Polyphème et Shakespeare Caliban
(…)
Le centre de la chaîne pendait sous l’essieu assez près de terre, et sur la courbure, comme sur la corde d’une balançoire, étaient assises et groupées, ce soir-là, dans un entrelacement exquis, deux petites filles, l’une d’environ deux ans et demi, l’autre de dix-huit mois, la plus petite dans les bras de la plus grande. Un mouchoir savamment noué les empêchait de tomber. Une mère avait vu cette effroyable chaîne, et avait dit : « Tiens ! voilà un joujou pour mes enfants.»
Et Monsieur de Tender de commenter cet extrait :« A mon avis, ce qu’a vu Victor devant l’auberge de Thénardier est bien un éfourceau. Pour que deux fillettes, même si l’aînée n’a que deux ans et demi, puissent se balancer en dessous de l’essieu, il faut bien que celui-ci soit cintré vers le haut, même si les roues sont démesurées aux yeux du grand homme. Celui-ci semblait donc connaître la bonne mesure qu’auraient du avoir ces roues, mais  ignorant le nom à donner à cette apparition, il a recours à la bible et à la mythologie pour enrichir sa description. Que n’avait-il la « Petite Gazette » à sa disposition ! Osons croire que, dans un âge plus avancé il aura pris connaissance du dictionnaire de l’académie. »

Mme Stéphanie Demazy, de Waillet, qui est à l’origine de cet engouement pour cette petite charrette tient à remercier tout qui lui a apporté des informations et elle profite de l’occasion pour me livrer celles-ci :« Ma nièce, Jeanine Saint-Viteux, a découvert, dans une vieille encyclopédie, le terme « gaillote » qui en Champagne, serait « une brouette pour charger le raisin. » Mon fils, Patrice, sur un site wallon, a découvert pas mal de synonymes à ce gaillot :galiot, galiyot, garlot, gariot, siglisse, tchèrèt di brèsseu qui serait on piti tchèrèt avou dè ptitè rowes. Mon frère, Jean-Marie¸ décidément la famille s’investit, se réjouit ma correspondante, m’adresse la reproduction d’une photographie, que je vous propose de découvrir ci-dessous, que sa femme a découverte dans ses archives et sur laquelle figure cette petite charrette (à laquelle, faute de mémoire, je ne voyais que trois roues). L’âge du garçonnet nous indique que cette photo daterait des années 1942 ou 1943. »

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La semaine prochaine nous partirons à la découverte d’autres souvenirs et d’une autre photographie de cette petite charrette.

La Petite Gazette du 13 février 2008

ENCORE LE GALLIO …

Extraordinaire l’engouement suscité par ce mot…

Monsieur M. Godfrind, de Xhoris, nous donne à connaître cette photographie que lui a prêtée M. Jules Bastin, de Sougné-Remouchamps.

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« Cette photo correspond bien à la description que donnait M. Georges, de Bomal : « le gallio est une petite charrette à trois roues, avec ridelles sur les côtés, une petite roue devant (semblable à une roue de brouette) et un crochet d’attelage pour transporter des charges légères (les semences, les pommes…). Cette petite charrette est aussi appelée « clitchet » »

Merci pour ces précisions et merci également à Mme Marie-Thérèse Damoiseau pour sa communication.

La Petite Gazette du 20 février 2008

ENCORE A PROPOS DU GALIOT

Quand vous vous passionnez pour une recherche, c’est vraiment tout bénéfice pour tous les lecteurs…

Voici la très intéressante contribution de Mme Madeleine Jamotton-Collin, de Somme-Leuze que je remercie très chaleureusement pour la clarté de ses explications.

« Cette semaine (N.D.L.R. Voir l’édition du 23 janvier dernier) la photo parue est celle d’un gros tombereau ou bègnon. Il avait de grandes roues à l’arrière et une petite roue devant sous un petit timon triangulaire sur lequel on pouvait s’asseoir et auquel on attelait les  chevaux. Dans les petites fermes où il n’y avait qu’un cheval, la roue avant était remplacée par des brancards (crustale en wallon), dans lesquels on faisait reculer le cheval pour l’atteler.

Ces gros tombereaux servaient à conduire le fumier dans les champs, ramener les betteraves ou les pommes de terre. Ils étaient pourvus de freins à patins que l’on actionnait avec une mécanike placée à portée de main à l’avant du véhicule.

On pouvait également relever le devant de la caisse et la faire basculer, ce qui permettait de la vider plus facilement soit progressivement pour tirer le fumier, la caisse étant alors attachée à l’avant avec une chaîne et allongée au fur et à mesure ; soit d’un coup pour verser les betteraves ou les pommes de terre. On disait alors : taper li bègnon à cou.

Voici la photographie d’un galiot, beaucoup plus bas et plus léger et qui servait à conduire des charges plus légères : sacs de semences, piquets de clôture etc. Ils étaient beaucoup plus maniables qu’un les gros tombereaux et avaient aussi une petite roue pivotante à l’avant.

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Cette photo a été prise en 1938 et, dans le galiot, il y a ma grand-mère, mon père, ma mère, ma petite sœur, un cousin et moi. A l’avant, on distingue bien la manivelle qui servait à freiner, la mécanike. »

Après avoir fait des recherches dans les dictionnaires, ma correspondante se demande s’il n’y a pas un lien sémantique entre « galiot » et « galiote » petite galère à voiles rondes dont se servaient les Hollandais pour pêcher. Appelée aussi « caboteur », petit navire côtier employé pour de petites distances entre deux ports d’une même mer par exemple. Mme Jamotton a relevé la similitude d’emploi : « un petit véhicule pour transporter de petites charges, à faible distance » Qu’en pensez-vous ?

Monsieur Damoiseau, de Jambes, m’adresse un courrier plein d’humour, jugez plutôt : « en Namurois qui se respectent, nous arrivons sûrement les derniers… Qu’à cela ne tienne ! Les lumçons, les caracoles ni vont nin vite ! Do momin qu’i z’arrivaient ! »

Il revient ensuite sur le lien déjà fait entre galiot et éfourceau en précisant que ce petit chariot à trois roues utilisé pour les travaux des champs tire son nom du latin furcilla, petite fourche.

Force est de s’interroger sur l’éventualité d’interprétations différentes données à ce chariot d’une région à l’autre…

 

 

LES TCHINS D’TCHERETE

La Petite Gazette du 17 août 2011

LES TCHINS D’TCHERETE 

Monsieur Jean-Pierre Beaufays nous revient avec un sujet passionnant, mais d’abord, il tient à vous remercier chaleureusement pour l’intérêt que vous avez porté à sa précédente question :

« J’ai été très surpris par l’intérêt suscité par cette question. Je n’aurais jamais imaginé qu’un sujet d’apparence aussi banal puisse engendrer un tel volume de courrier de la part de lecteurs passionnés et cette question m’a entre autres valu une intéressante communication téléphonique avec le très sympathique Monsieur Louis Daems d’Ougrée.

Lors de cette conversation, nous avons évoqué les charrettes à chiens utilisées jadis pour de petits transports et il m’avait narré une amusante anecdote à ce sujet.

Il se trouve que je possède encore une de ces charrettes ainsi qu’une photo d’époque dont je lui avais promis de lui envoyer une copie. Puis je me suis dit que je pouvais également en faire profiter tous vos lecteurs.

charrette_a-chien_

Cette photo date d’immédiatement avant la première guerre mondiale car on y voit dans le charrette mon oncle René Beaufays, né aux environs de 1910.

Les personnages debout doivent être de droite à gauche mon arrière-grand-père Joseph Beaufays, son épouse, et une petite dame âgée qui était probablement une voisine.

La photo a été prise devant leur maison de Villers-aux-Tours où mon arrière grand-père que je n’ai évidemment pas connu, exerçait la profession de menuisier-charpentier.

A en croire les inscriptions au dos de la photo, le chien s’appelait Toby ( or not Toby, c’est la question….)

Ceci me rappelle une ancienne et croustillante expression wallonne que je vous livre telle que je me la rappelle en wallon phonétique  » Pôv nos autes, les tchins d’tchèrète è les grossés feumes à bicyckette…. »

Merci à Monsieur Beaufays, j’imagine, et j’espère, que je vais recevoir d’autres documents et témoignages sur ces tchins d’tchèrète si fréquents il y a peu de temps encore dans nos contrées et ailleurs. Me confierez-vous vos souvenirs et vos photographies d’aïeules crémières qui se voyaient ainsi si précieusement secondées dans leur commerce ? Vous pouvez bien sûr nous parler des chiens qui tiraient le petit chariot portant les cruches pour aller à la traite, mais aussi, parce qu’ils étaient plus rares, évoquer les chiens de forge chargés d’actionner le soufflet… Enfin vous pourriez également vous pencher sur les expressions wallonnes évoquant ces tchins d’tchèrètes car celle rappelée par M. Beaufays m’intrigue quelque peu… surtout sa chute.

 

La Petite Gazette du 21 septembre 2011

UNE HISTOIRE DE TCHINS D’TCHERETE

Monsieur Roland Georges, de Welkenraedt, évoque cette histoire qui s’est passée à Ollomont-Nadrin en 1947 ou 1948 :

« Ma cousine, en fin de grossesse, s’en allait pour la traitre du soir avec sa charrette à deux roues de vélo, contenant sans doute trois cruches, un seau et le filtre. A Ollomont, cela grimpe assez fort. Pour monter le village vers les prairies, ma cousine avait l’habitude d’accrocher une corde au collier du chien qui l’aidait assurément. Pour le retour, c’était la descente et le chien n’était plus nécessaire.

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Mais cela gênait un touriste de passage qui s’est permis de dételer le chien et de laisser le soin à la fermière de pousser la charrette seule ! Pitié pour le chien mais pas pour la future maman ! »

 

La Petite Gazette du 28 septembre 2011

LES TCHINS D’TCHERETE

Monsieur Robert Nizet, oui oui il s’agit bien de l’auteur et de l’éditeur dont nous avons déjà présenté le travail dans nos colonnes, m’a fait parvenir quelques extraits d’un très bel ouvrage qu’il a signé il y a plusieurs années et qui est, malheureusement épuisé aujourd’hui : Vieilles images sur toits de Cherbins. Il y avait consacré plusieurs pages à ces chiens de charrette. J’en extraits les renseignements suivants car je sais que vous en apprécierez l’intérêt :

« L’attelage du chien dans les brancards d’une petite « charrette à chien » a été répandu jusque tard dans le vingtième siècle, dans notre région comme dans beaucoup d’autres. Le souvenir de ce moyen de transport sympathique s’estompant déjà fortement, il m’a paru intéressant d’en donner quelques illustrations et de rapporter quelques témoignages de son utilisation.

Les chiens attelés n’étaient pas d’une race déterminée : c’étaient des bâtards ou des bergers allemands ou des « chiens de vache », parfois même assez petits.

Peu à peu les autorités ont estimé que ces animaux ne disposaient pas des qualités physiques et physiologiques les rendant aptes à remplir une telle besogne et, après plusieurs restrictions, édictèrent la loi du 2 juillet 1975 sur la protection des animaux.

Suivant l’article 2 de celle-ci, est puni d’un emprisonnement de 8 jours à 1 mois et d’une amende de 26 à 500 francs ou l’une de ces peines seulement celui qui (…) se sert de chiens comme bêtes de somme ou de trait, sauf les dérogations qui pourront être accordées par le Roi.

Aucune des personnes interrogées ne partagent l’avis suivant lequel on demandait trop aux chiens attelés. Certes, comme en toute chose, il y avait de temps à autre une exagération, mais des quantités d’utilisateurs ont accompli de très longs trajets, durant de très longues années, en parfaite communion avec leur compagnon à quatre pattes qu’ils ménageaient et entretenaient comme on le fait d’un outil ou d’un auxiliaire.

Toutefois, le sort du chien attelé n’était sans doute pas enviable (par rapport au chien de garde par exemple) et s’identifiait assez bien à celui de tout travailleur (Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front), comme en témoigne l’exclamation plaintive qu’on entendait souvent : « Pô’ noz autes èt les tchins d’tchèrète ».

Qui utilisait les chiens de charrette ?

D’une part ce que j’appellerai les petits métiers, d’autre part les fermiers pour aller traire. Exceptionnellement, l’attelage pouvait être utilisé pour transporter le propriétaire lui-même. »

L’auteur présente plusieurs photos intéressantes de ces attelages d’hier et évoque tantôt un rétameur à Rogery ou un rémouleur ailleurs, tantôt un couple de pépiniéristes de Grand-Halleux ou un colporteur vendant ses fromages à Provèdroux et ailleurs. Il évoque même certains facteurs, dont un à Beho vers 1900, qui effectuaient leur tournée juché pareille charrette.

On rencontre encore, de temps à autre, ce passionnant ouvrage dans des bourses aux livres, si vous avez cette chance, ne la laissez pas passer…

 

La Petite Gazette du 5 octobre 2011

 A PROPOS DES TCHINS D’TCHERETE

Monsieur Robert André, de Marcourt, me dit sa surprise de ne pas lire davantage de réactions à propos des « charrettes à chiens », aussi a-t-il décidé d’apporter sa contribution. C’était là la meilleure façon de procéder pour susciter, peut-être, d’autre réactions encore : « Voici une histoire que racontait merveilleusement Joseph Evrard, « li p’tit tayeûr » à Erezée. :

Un citoyen d’Erezée, après avoir traité une affaire à Grandmenil (Pa d’là l’bwès), descendait à pied la route sinueuse qui traverse le Bois du Pays. Le chemin, bien moins fréquenté qu’aujourd’hui, devait lui paraître bien long, quand tout à coup surgit derrière lui un attelage pittoresque. C’était Henri Pikète, colporteur ambulant, qui dévalait la pente juché sur sa carriole, tirée par un molosse impressionnant. L’homme, qui ne rechignait pas à rendre service, s’arrête près de notre voyageur et lui demande « Vouss’ vini avou mi ? » (Veux-tu venir avec moi ?) « Pokwè nin » (Pourquoi pas) dit l’autre. Et les voilà tous deux perchés tant bien que mal sur la charrette. Le chien, encouragé par les cris de son maître, descendait à belle allure, trop belle même ! Si bien que le voyageur, ballotté d’un côté à l’autre de la route (non asphaltée bien sûr), finit par prendre peur. « Dji dinreû bin cinh sous po z’èsse dju » (Je donnerais bien cinq sous pour être a bas de cette carriole) confie-t-il au colporteur. Et Henri, du tac au tac, lui répond : « Wade tès cinq sous, va, t’î sèrè tot rate po rin » (Garde tes cinq sous, va, tu y seras bientôt pour rien). »

Absolument délicieux et tout empreint de cette truculence qui caractérisait si bien nos anciens.

Vous aussi, vous connaissez sans doute des anecdotes que les lecteurs de cette page aimeraient découvrir ; il ne vous reste qu’à nous les confier.

 

La Petite Gazette du 26 octobre 2011

PETIT MAGASIN ET TCHINS D’TCHERETE … QUE DE SOUVENIRS !

Monsieur A. Maréchal, de Bende, a vu ressurgir bien des souvenirs à la lecture de l’évocation du petit magasin de Buresse…

« C’est précisément dans ce petit village que nous avons été accueillis, les 12 et 13 mai 1940, lors de notre exode ; c’était dans une famille, chez Libois. C’est aussi de là que nous avons fait demi-tour…

Quant au petit magasin de village, ma grand-mère, Sidonie Dossogne, a tenu celui de Bende pendant trente ans. Je possède encore un de ses meubles avec petits tiroirs et cases car beaucoup de marchandises étaient alors vendues en vrac : café, farine et même le sirop noir.

Mon grand-père était messager et faisait la liaison avec Huy d’où il ramenait tout ce qui était nécessaire.

Maman utilisait un tchin d’chèrète pour revenir de la traite avec ses trois cruches. Il tirait, sur un chemin toujours en mauvais état, une petite charrette aux roues de fer. Un petit collier spécial avec des lanières de cuir et un petit palonnier en bois léger constituaient l’attelage. »

Merci beaucoup de vous en être souvenu pour nous.

 

LA FIEVRE APHTEUSE DANS NOS REGIONS JADIS

La Petite Gazette du 4 avril 2001

LA FIEVRE APHTEUSE DANS NOS REGIONS SOUS L’ANCIEN REGIME

   La situation dramatique dans laquelle se débattent aujourd’hui les éleveurs de bi-ongulés n’est pas, semble-t-il due, cette fois, à une dérive étonnante des techniques mises en œuvre pour l’élevage des bêtes. Rien à voir donc avec la maladie de la vache folle qui attaque ces pauvres bêtes auxquelles on a donné à absorber leurs parents réduits en farine !

La fièvre aphteuse a, par le passé, gravement touché nos régions qui, à l’heure où j’écris ces lignes sont encore (et heureusement) à l’écart des zones touchées par l’épizootie. Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, m’a fait parvenir des extraits d’une extraordinaire chronique rédigée, il y a plusieurs siècles, par un moine malmédien ; je vous invite à découvrir ce document exceptionnel  et les commentaires de mon correspondant:

« Nos anciens croyaient que les comètes et autres manifestations de ce genre étaient présages de malheurs et de calamités. Lors de la consultation d’anciennes chroniques, il arrive fréquemment, qu’après de telles manifestations, le rédacteur évoque ces circonstances fâcheuses. Suivons  une de ces chroniques (avec respect de l’orthographe de l’époque), écrite par un moine malmédien :

« En 1682, au mois d’aoust, on vit encor une comette pendant 8 jours, mais beaucoup plus petite que le precedente.

La meme anné, il y eu une grande consternation pour lam aldie des betes à corne. Elle avoit commencé du coté de la Suisse et elle a passé d’un lieu a l’autre. Il venoit aux betes une vessie à la langue, le remede étoit d’ouvrir la vessie avec un instrument de fin argent ce pourquoi on faisoit quelques crins, comme pour scier dans une demi kopstuck monnoie d’Espagne, on ouvrit avec cela la vessie, puis on bassinoit la langue avec du vinaigre, du sel et du souffré melé ensemble jusqu’à guérison, d’autres usoient d’ail. »

Monsieur Gabriel poursuit son commentaire en nous rapportant ce que sa maman, 80 ans, lui a dit sur ce sujet : « Auparavant, on ne s’inquiétait pas outre mesure de cette maladie et on buvait le lait des bêtes. La corvée des enfants, quand la saison le permettait, était d’aller ramasser des pommes sauvages que l’on donnait à manger aux animaux. » Cette nourriture aigre n’est pas sans rappeler l’usage du vinaigre évoqué dans la chronique malmédienne remarque fort justement mon correspondant avec qui, la semaine prochaine, nous parcourrons un texte de 1762 parlant de cette maladie en France (symptômes, remèdes, précautions).

Monsieur Maurice Fanon, de Bomal, qui nous avait apporté beaucoup de renseignements fort intéressants sur les « rinnètes », avait également tenu à préciser que cette affection bénigne, connue plus largement sous le nom de « muguet », affectait également les animaux.

« Même les chevaux souffraient du muguet ou « rênète des dj’vås ». Le remède était poétique à souhait : un collier rustique de « rinnes des prés » (« pîs d’gade » à Tohogne). On le passait au col de l’animal, puis on lui faisait un bâillon. En même temps, on chargeait une pieuse vieille femme de commencer une neuvaine. A quel(le) saint(e) ? »

Une petite recherche dans ma documentation me permet d’apporter un petit élément de réponse. En consultant Le Rituel de Magie Blanche de Benjamin Manassé (éd. La diffusion scientifique, Paris, 1991), je découvre que dans les cas de muguet (chez les oiseaux et chez les gallinacés) il convient de faire une neuvaine à saint Marcou.

A la question de M. Fanon, j’ajouterai celle-ci « Pourquoi une vieille femme ? »

La Petite Gazette du 11 avril 2001

LA FIEVRE APHTEUSE DANS NOS REGIONS SOUS L’ANCIEN REGIME

   Avec Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, retrouvons description et remèdes concernant cette maladie contagieuse qui continue à faire les gros titres de toutes les informations écrites et parlées. Après avoir consulté pour nous la chronique malmédienne évoquant l’année 1682, notre chercheur a relevé des informations intéressantes (reproduites dans le style et l’orthographe de l’époque) dans un écrit publié à Paris, en 1762, : La Nouvelle Maison Rustique, traité des choses de la campagne et particulièrement des maladies des animaux.

« La Maladie qui a attaqué les Bêtes à cornes et les chevaux dans la Généralité d’Auvergne et qui s’est introduite sur la fin du mois d’Avril 1731.

   Cette maladie se découvre par une vessie – aphte – qui paroit dessus, dessous et aux côtés de la langue de la bête malade. Cette vessie est blanche dans sa naissance, rouge ensuite, et dans un instant presque noire : elle croît et laisse après elle un ulcère chancreux qui croisse dans l’épaisseur de la langue en avançant du côté de la racine, la coupe en entier, et fait, peu de temps après, périr l’animal. Monsieur Gabriel précise que cette description, selon un vétérinaire de Trois-Ponts, est nettement exagérée. On voit, dans les vingt-quatre heures, le commencement, le progrès et la fin de cette maladie.

   Elle est d’autant plus dangereuse, qu’elle ne se manifeste par aucun symptôme extérieur et que la bête malade boit, mange et travaille à son ordinaire jusqu’à ce que la langue soit tombée.

   Il faut donc pour prévenir les suites fâcheuses de cette maladie, avoir une attention infinie à faire visiter deux ou trois fois par jour la langue de toutes les bêtes à cornes, afin de prendre le mal dans sa naissance et  sur-tout l’on ne doit point se tranquilliser sur l’éloignement de cette maladie. L’expérience vient d’apprendre que, quoi qu’elle fût à une distance raisonnable de la ville de Gannac -Auvergne-  toutes les paroisses des environs de cette ville, et à une demi-lieue à la ronde, en ont été infectées dans le même jour, sans qu’il y ait eu aucune communication d’une paroisse à l’autre.

   Le remède préservatif pour les bestiaux, qui ne sont point encore attaqués de cette maladie, est composé des drogues suivantes, pour chaque bête.

   Prenez thériaque ou orviétan, trois dragmes (précisons qu’un dragme ou drachme est la huitième partie de l’once soit 3,824 grammes) ; gingembre, girofle et canelle, un dragme ; genièvre en grains et poivre concassé, deux  dragmes de chacun ; et une muscade de moyenne grosseur, qu’il faut concasser : faites infuser le tout dans un pot couvert, pendant cinq ou six heures au moins, dans une pinte de bon vin rouge.

   Avant de donner le remède, remuez bien le tout, de manière que le marc suive l’infusion ; et ne le donnez qu’après que la bête a été cinq ou six heures sans manger.

   Ce breuvage ne peut faire que du bien aux bestiaux qui le prennent.

   Si, en visitant les bestiaux, on aperçoit une ou plusieurs vessies – aphtes – adhérentes à la langue, il faut, sur le champ, avec une cuillier ou autre pièce d’argent, crever la vessie, en enlevant la peau et racler la plaie jusqu’au sang ; ensuite continuer et la laver avec de l’eau de fontaine ; et, pour le mieux, avec du fort vinaigre dans lequel on aura mis du sel pilé, du poivre, de l’ail concassé et des herbes fortes, si on en a. Cela fait, on couvre la plaie de sel bien fin, après l’avoir bien frottée avec une pierre de vitriol Chypre.

   Si l’on trouve l’ulcère formé, il faut usé du même remède et le réitérer, dans l’un ou l’autre cas, deux ou trois fois par jour, jusque guérison.

   On prétend que, quand la vessie se trouve sur la langue, on doit faire saigner la bête au cou.

   Cette maladie s’est fort étendue en 1731 ; elle a attaqué aussi les chevaux. On en attribue la cause à la grande sécheresse et à la quantité prodigieuse de chenilles qu’il y a eu cette année. »

    Monsieur Gabriel fait remarquer, fort judicieusement, que ce texte, comme celui du chroniqueur, moine de Malmédy, réclame l’usage d’un objet en argent pour ouvrir la vessie ! Pour le reste, je pense, comme mon correspondant, que ce remède, s’il n’est pas salutaire, ne peut certainement faire aucun tort aux bêtes.

La Petite Gazette du 2 mai 2001

LA FIEVRE APHTEUSE DANS NOS REGIONS

   A l’heure où je rédige ces lignes, nos régions résistent toujours, et ce n’est que tant mieux, à la terrible épidémie sévissant dans quasiment tous les pays voisins. Après le regard porté, grâce aux anciens documents sur cette maladie, j’aime à vous rappeler une réalité régionale autrefois bien connue. Bien sûr, la fièvre aphteuse, appelée « cocotte » en nos contrées, est très contagieuse. Contrairement à ce que l’on entend généralement aujourd’hui, elle était considérée, hier, comme transmissible à l’homme et j’ai rencontré plusieurs personnes qui m’ont affirmé l’avoir contractée ou connaître quelqu’un qui en a souffert. Avant la dernière guerre, on savait très bien que ce mal était endémique dans certaines régions, les polders hollandais par exemple.

La concurrence du blé américain ayant causé l’abandon de zones de culture où les rendements étaient faibles, des fermiers de chez nous ont rendu à l’élevage des superficies alors réservées à la culture. Ils ont constitué leurs cheptels avec des bêtes achetées en Hollande ; c’est alors que la fièvre aphteuse fit son apparition en Belgique où elle était quasiment inconnue. Très vite, l’épidémie prit des proportions qui obligèrent le gouvernement à prendre des mesures de mise en quarantaine des bêtes achetées hors de nos frontières. L’Ardenne échappa au fléau durant très longtemps, mais une épidémie, d’une rare violence, la toucha en 1900. Les moyens mis en œuvre pour s’en préserver ou pour limiter le nombre de bêtes atteintes étaient les suivantes : bains de pieds à la chaux, badigeonnage de la bouche des animaux au vinaigre et, bien entendu, bénédiction des étables.

Dans le Pays de Herve, la même cause provoquait les mêmes effets. On constata néanmoins qu’un fermier de Battice avait vu son troupeau tout à fait épargné ; or, la seule chose qui distinguait ce fermier de ses collègues résidait dans le fait qu’il fréquentait régulièrement l’abbaye de Val-Dieu. Aussi, quand une nouvelle épidémie toucha la région vers 1920, un grand pèlerinage fut organisé durant l’été.

A la même époque, Liège avait également ses « cocottes » (on dira par la suite ses « poules ») qui se rendaient régulièrement en Hors-Château pour prier saint Gérard dans l’espoir qu’il leur assure une nombreuse clientèle ! C’est évidemment un autre sujet.

Madame Léona Biet, d’Awan-Aywaille, s’est souvenue pour vous d’une attaque de ce mal :

« Vers 1924, chez mes parents, le bétail a eu la fièvre aphteuse. On a donc appelé le vétérinaire qui a conseillé de laver la langue des vaches avec de l’eau vinaigrée et d’étendre de la chaux devant l’entrée des étables. Deux vaches ont été atteintes par la maladie, mais le reste du bétail qui se trouvait dans la même étable, a été épargné ! Pendant cette période, nous avons continué à consommer du lait, à écrémer et à faire du beurre comme précédemment. Le rendement du lait était diminué parce que les vaches mangeaient difficilement, mais, après quelques jours, elles se nourrissaient de nouveau comme avant la maladie. »

Toutes celles et tous ceux qui ont connu ces épidémies passées sont unanimes pour déclarer ne pas comprendre pourquoi on abat, aujourd’hui, des troupeaux entiers de bêtes saines ! ce n’est évidemment pas un domaine relevant de mes compétences, mais on peut tout de même s’étonner…

La Petite Gazette du 16 mai 2001

QUAND IL EST ENCORE QUESTION DE LA COCOTTE…

Le sujet reste d’actualité et préoccupe toujours … aussi ai-je poursuivi mes recherches dans ma documentation personnelle. L’extraordinaire ouvrage de l’Abbé Joseph Bastin, Les plantes dans le parler, l’histoire et les usages de la Wallonie malmédienne, édité à Liège en 1939 m’a apporté d’intéressants renseignements que j’aime à partager avec vous :

L’auteur nous indique que lors de la « terrible épizootie de cette année 1938 » on a donné au bétail, en guise de protection, de l’Angélique Archangélique, dobe anjèlike ou rècène du Saint-Esprit.

Plus loin, à propos du thym serpolet, poyî, pouyî, il nous dit ceci : « Au dire d’éleveurs qui en font usage depuis longtemps, la plante préserve de la stomatite aphteuse (cocotte). On devrait toujours en avoir en réserve ; malheureusement elle recule peut-être plus que d’autres devant les engrais chimiques. La faire prendre dans le fourrage ou le breuvage du bétail. Elle donnera peut-être une mauvaise saveur au lait, mais la bête sera immunisée en cas d’épizootie. Soigner les bêtes atteintes avec des compresses du décocté de poyî. »

Enfin, il signale encore que « l’Egopode podagraire (herbe-aux-goutteux, pîd d’âwe, pîd d’gade, cette plante, qui déborde souvent des haies dans les potagers, où elle est difficile à extraire, s’emploie à Meiz  (N.D.L.R. entre Malmédy et Francorchamps) contre la fièvre aphteuse (l’écraser et la mettre dans le breuvage).

 

Comme souvent, et c’est bien sûr heureux et souhaité, dans La Petite Gazette, débattre d’un sujet en fait apparaître d’autres, suscite des réflexions et des prolongements. Ce sujet ne fait pas exception à cette règle.

La Petite Gazette du 11 avril 2001

PENSEES D’UN AGRICULTEUR UN PEU DESABUSE

   Monsieur A. Rulot, de Bois et Borsu, nous a, à plusieurs reprises, fait parvenir des textes et des souvenirs relatifs aux paysages de son enfance, mais aussi à tout ce qui fit les grands tourments du siècle écoulé. Aujourd’hui, un peu amer, il jette un regard sur sa profession.

« Il est bien difficile de traduire, dans nos sens en émoi, ce que nous les agriculteurs, souvent déconsidérés, mal rémunérés, nous pouvons éprouver dans nos sentiments les plus profonds, les plus nobles.

Après notre vie offerte à la plus grande action humanitaire, essentielle entre toutes, y pensons-nous ? Nos peines ont apporté sur la table de la grande famille humaine toute la nourriture issue des champs. Cette manne terrestre, fruit de nos plaines fécondes, par nos soins, n’est-elle pas élémentaire, substantielle, exclusive à la condition, à la constitution de la vie, de nous tous. Au crépuscule de notre pérégrination sur terre, nous pouvons mieux comprendre, discerner la mission élevée, primordiale qui nous était dévolue : nourrir les hommes. »

 

Un grand merci à mon correspondant pour avoir partagé avec La Petite Gazette ces pensées qui sont certainement dans l’esprit de très nombreux travailleurs de la terre en ces temps si difficiles pour eux…

 

La Petite Gazette du 22 mai 2001

A MILLE LIEUES DES DEGATS PROVOQUES PAR  LA FIEVRE APHTEUSE…

   Mary Bertosi est une conteuse ardennaise ; à quelques reprises déjà, La Petite Gazette vous a permis de découvrir quelques textes dus à sa plume ; en voici un autre échantillon :

   Jacques, le petit pâtre

   Depuis des siècles et encore jusqu’à la guerre de 1914, les Ardennais avaient une vie rude et pauvre, seuls les seigneurs menaient grand train car tout leur appartenait, les terres, les forêts, les châteaux et les pauvres maisons et même les gens étaient soumis au seigneur et devaient obéissance et travail ; moyennant quoi le seigneur les nourrissait pauvrement car la moitié des récoltes lui était due, et il devait les protéger en cas d’attaque. Quelques métayers plus riches ou quelques commerçants qui faisaient de bonnes affaires pouvaient vivre un peu mieux sans dépendre entièrement du châtelain.

   Un seigneur de La Roche qui régnait en ce temps-là était particulièrement dur et méchant. Il était craint à plusieurs lieues à la ronde et nul n’osait le défier. Il régnait en despote sur son territoire. Un de ses serfs qui avait une famille nombreuse décida de placer le plus jeune de ses enfants, qui n’avait que 8 ans, chez un riche fermier du pays de Hives, à quelques kilomètres de La Roche. Il n’était pas rare à cette époque de placer ses enfants à droite ou à gauche, ainsi au moins ils pouvaient manger tous les jours et gagner quelques sous par an.

   Le petit Jacques fut donc conduit par son père chez le fermier pour y devenir pâtre, malgré ses pleurs et la douleur de la séparation d’avec sa famille. Jacques n’avait pour tous vêtements que ceux qu’ils portaient sur lui et une méchante paire de sabots déjà bien usés. La fermière, qui était brave femme, lui donna une grande cape de laine qui le protégerait des pluies et du vent ainsi qu’un magnifique canif, si beau que Jacques en fut ravi, car il n’avait jamais reçu de cadeau. Jacques, enchanté, dit à la fermière : « Maîtresse, ce canif que vous m’offrez fera un jour votre fortune. » La fermière sourit en le regardant partir avec le troupeau de moutons et se dit « Pauvre petit, le voilà bien content de peu ! » et elle n’y pensa plus. Jacques conduisait ses bêtes dans les prés aux herbes grasses qu’ils savaient les meilleures pour les brebis.

   Pendant que les moutons broutaient, bientôt il s’ennuya, son chien de berger veillait si bien qu’il ne devait presque pas s’occuper des bêtes. Alors il eut l’idée de couper une branche de coudrier et se mit à la tailler avec son beau canif et cela jour après jour. Il travailla tant et si bien qu’il en fabriqua une petite flûte et, lorsqu’il eut terminé et qu’il souffla dedans, un son merveilleux se fit entendre. Jacques, enchanté, continuait de jouer des airs qui venaient on ne sait d’où !

   Je vous propose de retrouver le petit pâtre de Mary Bertosi la semaine prochaine.

La Petite Gazette du 30 mai 2001

A MILLE LIEUES DES DEGATS PROVOQUES PAR LA FIEVRE APHTEUSE…

   Comme promis, nous retrouvons Jacques, le petit pâtre de Mary Bertosi, là où nous l’avions laissé la semaine passée : auprès de ses moutons.

L’époque de l’agnelage arriva, Jacques dut s’occuper des brebis et des agneaux qui naissaient et qui restaient à l’étable quelque temps. Au printemps suivant, le troupeau avait doublé et les fermiers étaient fort contents, ils offrirent à Jacques une nouvelle paire de sabots pour le remercier de son bon travail.

   Un jour qu’il gardait ses bêtes au Pré Collin sur les terres du seigneur, celui-ci arriva avec une meute de chiens de chasse ; ses cavaliers, lancés au galop, foncèrent dans le troupeau. Beaucoup de moutons périrent et cela amusa fort le seigneur. Jacques pleura de rage et d’impuissance. Comment expliquer un tel carnage au fermier ? Que faire ? Alors il prit sa flûte et se mit à jouer un air si triste qu’on l’entendit jusqu’à La Roche. Ses larmes coulaient tout le long de la flûte ; il pleura tant et tant qu’une petite mare se fit autour de lui et se mit à couler doucement vers le ruisseau tout proche. Il joua ainsi pendant des heures et, quand le soir tomba, Jacques ne vit pas revenir le seigneur et ses cavaliers ; et ceux-ci foncèrent à vive allure à travers le ruisseau. C’est alors que l’eau monta brusquement, que la pluie se mit à tomber drue et froide, un vent glacé terrible se leva. Les chevaux restaient cloués sur place, piaffant, hennissant ; le seigneur hurlait et bientôt il fut recouvert par un torrent de boue énorme qui le noya, lui, mais aussi ses hommes, ses chevaux et ses chiens. Les éléments déchaînés s’arrêtent brusquement, le calme revint. Jacques alors joua un air plus gai et, dans le petit matin qui se levait, il eut la surprise de voir sortir du bois un troupeau de belles brebis, bien plus  grasses que celles qu’il avait perdues, avec chacune plusieurs agneaux vigoureux, ce qui était fort rare ! Il en vint tant et tant que Jacques ne sut plus les compter, il en fut si heureux qu’il joua de la flûte en dansant tout autour du troupeau en le ramenant à la ferme. Quelle surprise pour les fermiers ! Jamais on avait vu de bêtes aussi belles, aussi grasses, aussi vigoureuses. La fermière permit à Jacques de rentrer chez lui avec une bourse remplie de pièces d’un or qui ferait vivre sa famille pendant longtemps.

   Dans le pays, on raconte que chaque larme de Jacques, mêlée à chaque note de musique, s’était transformée en mouton car la flûte de Jacques était enchantée et, grâce à elle, le pays prospéra et le nouveau seigneur fut bon pour ses sujets. Malheureusement, de nos jours, on a perdu la trace de la flûte enchantée.

LES METS OUBLIES…

La Petite Gazette du 2 mai 2001

DES LECTEURS SE SOUVIENNENT DE METS OUBLIES… ET VOUS ?

   Monsieur Roland Meuprez, de Gouvy, m’écrit pour évoquer un mets qui lui a été proposé il y a bien longtemps : « J’ai souvenir d’avoir mangé un « bèt » plutôt proche d’un flan donc je pense qu’il était préparé cuit avec des œufs. Jean Haust, dans son Dictionnaire liégeois, définit ce mot ainsi « bèt ou  : m. terme rural. – premier lait de la vache qui vient de vêler ;

– espèce de mets que l’on fait en cuisant, avec du sucre, ce lait (ou ordinairement celui de la deuxième ou troisième traite) {dérivé de l’ancien français beter (se figer) comme l’ancien français bet, d’où le français béton}. L’un ou l’autre lecteur possède-t-il des souvenirs à ce sujet ? Existe-t-il des recettes précises du bèt ? » A ces questions de M. Meuprez, j’ajouterai les miennes : quelles vertus accordait-on à ce mets ? A qui le destinait-on ?

La Petite Gazette du 16 mai 2001

DES LECTEURS SE SOUVIENNENT DE METS OUBLIES… ET VOUS ?

   Il y a quinze jours, M. Roland Meuprez, de Gouvy, vous interpellait à propos du « bèt » ou «  », plat qu’il se souvenait avoir mangé avec plaisir il y a bien longtemps et, très vite, son appel a fait réagir Mme Léona Biet, d’Awan-Aywaille, que je remercie chaleureusement pour sa régulière collaboration à La Petite Gazette.

« Je me souviens, étant jeune, d’avoir mangé du « bê ». Quand une vache était prête à vêler, une de nos voisines demandait à mes parents de lui garder la deuxième traite, que d’habitude on jetait. Elle disait que c’était pour faire du «  ». Elle attribuait à cet aliment de hautes qualités énergétiques et disait qu’il n’y avait rien de pareil pour avoir une bonne santé. Un jour, maman a gardé une partie du lait afin de goûter ce met inhabituel. Elle a vidé le lait dans un casserole qu’elle a déposée sur la plate-buse du poêle pour faire cailler le lait. Le lendemain, il était caillé  et, dans le fond du récipient, se trouvait un dépôt ressemblant très fort à du flan. On a vidé le liquide qui surnageait et recueilli le «  » dont nous avons garni nos tartines que nous avons saupoudrées de sucre fin. Cela n’a pas été très apprécié et l’expérience n’a pas été renouvelée. »

D’autres lecteurs nous feront-ils le plaisir de nous conter les souvenirs qu’ils ont conservés de ce plat oublié ?

La Petite Gazette du 22 mai 2001

DES LECTEURS SE SOUVIENNENT DE METS OUBLIES… ET VOUS ?

   C’est au tour, aujourd’hui, de Mme Marie-Jeanne Renard-Cornet, de Hives, de nous communiquer ses souvenirs à propos du « bèt ».

« Je me rappelle que, dans mon enfance, notre voisine âgée possédait une vache. A chaque naissance d’un veau, c’était pour elle une fête que de confectionner le bèt. Le deuxième jour, elle prenait le lait rosé et gluant ajoutait un peu de farine et de sucre ce qui formait une espèce de flan. Elle avait invité notre instituteur au goûter. Celui-ci était très nåreûs , comme on disait en patois, c’est-à-dire qu’il était vite dégoûté. Quand il y eut termine, « C’était bien bon Marie ! » « Savez-vous ce que vous avez mangé ?  et bien, c’était du bèt ! » Il s’est lancé dehors et a remis tout son repas en disant que, jamais, il ne mangerait plus du bèt. »

Un grand merci à cette aimable lectrice pour cette plaisante anecdote.

Je n’ai pas encore reçu la moindre information pour ce lecteur à la recherche de la marche à suivre pour produire une boisson pétillante à base de sève de bouleau… Qui viendra à son aise ? Comme d’habitude, je compte sur votre gentillesse et votre propension à rendre service ou à faire plaisir et vous en remercie d’avance.

La Petite Gazette du 6 juin 2001

DES LECTEURS SE SOUVIENNENT DE METS OUBLIES… et vous ?

L’eau de bouleau

   Enfin, grâce à une communication de Monsieur Louis Langen, de Haute-Bodeux, voici des informations sur l’eau de bouleau :

« Pour conserver l’eau de bouleau, outre le moyen moderne de congélation (poche à glaçons par exemple), l’adjonction de quatre à cinq clous de girofle par litre de ce liquide se montre efficace. » Mon correspondant poursuit son courrier par une très utile recommandation « par reconnaissance respectueuse et pour ne pas commettre de délit forestier, bouchon donc le trou d’écoulement après récolte de l’eau de bouleau (cheville, silicone…) ».

Merci à Monsieur Langen pour ses bons conseils, j’espère, avec lui, qu’ils seront strictement observés.

Le « bê »

Vous avez encore été nombreux à me communiquer vos souvenirs relatifs au «  » et la confrontation de vos témoignages  se montre particulièrement intéressante.

Madame Adèle Hubin, d’Embourg, m’écrit qu’elle s’est décidée à nous parler du «  » qu’elle connaît très bien et depuis longtemps (elle est octogénaire). « mes parents étaient ardennais, ils habitaient Rondu (Remagne). Mon père s’appelait Hubert Hubin et ma mère Céline Goergette, ils tenaient une petite ferme. J’étais toute petite, mais je me rappelle qu’ils faisaient du «  » et que l’on mettait cela sur nos tartines. Nous étions neuf enfants à la maison, le «  » ressemblait beaucoup au flan comme goût et nous aimions tous cela. »

Monsieur Raoul Rutten, de Romsée, nous parle de ce « plat, savoureux s’il en est. Le «  » est un plat réalisé au départ du troisième lait de la vache vêlée. Ce lait est additionné de sucre et de vanille. Il est ensuite mis au four tel quel dans un plat en grès émaillé, où sa cuisson fera durcir le colostrum qu’il contient. On peut y ajouter un œuf si la quantité de colostrum est plus faible (un lait moins riche par exemple ou une quatrième traite). (…) En ce moment encore, les éleveurs plus âgés préparent ce met savoureux d’une part mais également très nourrissant, si l’on sait qu’il est consommé au moment des vêlages, soit, le plus souvent, durant les mois d’hiver. On disait « avec un pot de bê, on peut aller contre le vent du Nord ». J’en ai personnellement consommé de manière régulière et j’invite les lecteurs à en faire de même. »

Monsieur Norbert Minguet, de Kin, m’écrit à propos de « cette merveille qu’on appelle le «  » fait, par sa maman, avec le lait de la deuxième traite après le vêlage. Il faut mettre le lait à tiédir dans une terrine avec du sucre, de la vanille, de la cannelle (bâton). Mélanger de temps en temps pour que le lait soit bien homogène. Le mélange est ensuite mis au four légèrement chauffé ; le lait s’épaissit et prend l’aspect d’un flan, le dessus en est doré. Il se déguste chaud ou froid. »

Madame Irène Baum, de Vielsalm, nous communique la recette de sa maman ; vous allez constater qu’elle est tout à fait différente de celles parues jusqu’alors : « On prend le deuxième lait d’une vache fraîchement vêlée, le troisième si le précédent est encore trop rouge. Ce lait, le colostrum, sert à purger l’organisme du bébé, bête ou homme. Il paraît que le «  » est plein de vitamines. Passer le lait dans une étamine car il est souvent sale. Le mettre à cuire au bain marie avec du sel, du poivre, des feuilles de laurier. Mélanger un peu au début, puis laisser cuire jusqu’à obtention d’une consistance très épaisse. Manger froid. Pour moi, c’est délicieux… j’ignore si sucré c’est aussi bon. »

Un immense merci à toutes et à tous.

La Petite Gazette du 13 juin 2001

DES METS OUBLIES… L’EAU DE BOULEAU

   Une lectrice  Tenneville, correspondante depuis longtemps de La Petite Gazette, nous confie des recettes qu’elle a extraites, notamment, de l’ouvrage de Jean Valnet, La phytothérapie .

« Au printemps, on scie une branche de bonne taille pour fournir 4 à 5 litres par jour. Mise en bouteilles, elle devient pétillante. On peut y ajouter 5 clous de girofle par litre et du sucre (facultatif). »

Dans un autre ouvrage (Jean Palaiseul, Nos grand-mères savaient) : « Avant le développement des feuilles, on perce un trou avec une petite vrille dans le tronc des jeunes arbres en pleine croissance et on y enfonce une paille par laquelle s’écoule la sève recueillie dans un récipient couvert d’un linge pour filtrer. Pour ne pas épuiser l’arbre, on ne récolte que quelques jours, deux ou trois. Puis on rebouche avec une cheville en bois. Le liquide se conserve soit en le stérilisant ou en y ajoutant 6 clous de girofle et un peu de cannelle. 4 à 6 cuillerées par jour.

Pour le vin pétillant et sucré : en mettant la sève dans un récipient, on y ajoute du miel, des raisins secs plus de la sauge et du thym. Après un mois, mettre en bouteilles. On obtient les mêmes résultats en employant les feuilles au printemps. »

Monsieur G. De Meyer, de Boncelles, nous a également transmis son mode opératoire.

« Au printemps, attendre que les feuilles se forment et placer les tuyaux à plus ou moins 1,50 mètre du sol, c’est, paraît-il, l’endroit par lequel l’arbre « saigne » le plus fort. C’est pendant la nuit que la sève redescend et elle abondante par temps chaud. Lors de la récolte, mettre la sève en tourie dans un endroit frais pour éviter la fermentation (une cave par exemple). Lorsque la tourie est pleine, la monter dans un local où la température est plus élevée pour provoquer la fermentation (garage ou véranda par exemple), mais veillez à abriter la tourie du soleil. Mettre 16 litres de sève dans une tourie de 20 litres. Ajouter 2 kg de sucre cristallisé fondu dans 3 litres d’eau et le verser dans la tourie lorsqu’il est refroidi. Ajouter le jus d’un kilo de pommes Golden (extrait à la centrifugeuse). Lorsque la tourie est remplie jusqu’au goulot, placer le barboteur. Nettoyer les impuretés plusieurs fois par jour suivant la densité de fermentation jusqu’au moment où les impuretés restent au fond de la tourie. Mise en bouteilles : prendre des bouteilles à champagne, attendre que la fermentation diminue. Rincer les bouteilles qui doivent être humides lors du remplissage. Laisser 4 à 5 cm. du bord du goulot, les bouchonner et mettre un fil de fer car la pression peut atteindre 36 kilos ! mettre les bouteilles en cave, le goulot légèrement relevé. Attendre 6 mois avant de déguster, mais le boire dans l’année. Je vous souhaite pleine réussite. »

Un grand merci à cette lectrice et à ce lecteur pour leurs précieux conseils qui, j’en suis persuadé, viendront bien à point non seulement à Monsieur Jean  Laurent, de Les Tailles, mais aussi à beaucoup d’autres.

AVANT LE FRIGO, LA GLACIERE…

La Petite Gazette du 2 mars 2011

QUI SE SOUVIENT DES GLACIERS ?

Monsieur F. Petit, de Petit-Houmart, qui vous pose la question ne s’intéresse pas aux marchands de crème glacée mais à ceux qui apportaient, dans de grands sacs de toile de jute, de grands morceaux de glace destinés à rafraîchir les étals des bouchers par exemple.

Mon correspondant aimerait que vous lui parliez de ces livreurs de glace. D’où venaient-ils ? Qui livraient-ils ? Comment la glace était-elle transportée ? Jusqu’à quand leur commerce connut-il des débouchés ? Quand et qui fit appel à eux dans nos régions ? Y a-t-il eu chez nous des fabriques de glace à rafraîchir ? Comme d’habitude, tout nous intéresse et j’espère que vous aurez à cœur de nous renseigner sur ce sujet.

La Petite Gazette du 16 mars 2011

AU SUJET DES GLACIERES D’HIER

Monsieur R Wautriche, Comblain la Tour, se souvient très bien de l’ère des glacières et a l’amabilité de partager ses souvenirs avec La Petite Gazette. Je sais que cela fera très plaisir à Monsieur F. Petit, de Petit-Houmart, qui a sollicité vos souvenirs sur le sujet.

« Mes parents ont tenu une crémerie, rue St-Léonard à Liège de 1936 à 1972, ce magasin sous la pression des grandes surfaces devint petit à petit un magasin d’alimentation générale.
Le magasin fut équipé jusque vers 1965 d’une armoire frigo d’environ 2m sur 2 et de 60 cm de profondeur. Elle était constituée de 4 compartiments (75 cm sur 100) répartis sur 2 étages de part et d’autre d’une armoire centrale (200 cm sur 50) dont l’intérieur était recouvert de zinc.
Ce compartiment central était destiné à recevoir des blocs de glace qui avaient la forme d’un parallélépipède de 25X20X100 cm environ. (N.D.L.R. Je retrouve bien là toute la précision de mon ancien professeur de mathématique…)

Un livreur, qui se fournissait à Seraing passait quotidiennement proposer la glace. La consommation allait d’un bloc tous les deux jours en saison froide à un ou deux blocs en été. L’eau de fonte de la glace allait directement dans le système d’évacuation des eaux usées du bâtiment. Toutes les parois de l’armoire avaient environ 10 cm d’épaisseur et contenaient un isolant dont j’ignore la nature. Le prix du bloc de glace était de 14 Fb dans les années 60.

Le frigo contenait le beurre, la margarine, certains fromages, des boissons et les denrées du ménage. L’armoire fut remplacée par un réfrigérateur électrique et je peux l’avouer, puisqu’il y a maintenant prescription, finit sa vie en pièces détachées dans la Meuse voisine.

Pour l’anecdote j’ajoute encore que j’avais apporté en 64 pour un cours de physique à l’Athénée Liège 2 un morceau de bloc de glace pour faire l’expérience de la glace coupée par un fil métallique et qui regèle immédiatement après le passage du fil. »

Monsieur Christian Godard, de Nandrin, a lui aussi des souvenirs précis. Il les évoque pour nous en nous transportant dans un commerce tout différent : la brasserie :

 « Mon grand-père Henri Godard, né en 1905, et mon père Eugène, né en 1923, ont repris, en 1947, un commerce de bières à Andenne, ils sont devenus à cette époque <<Dépositaires pour la Brasserie Piedboeuf >>  Quant à moi, je suis né en 1949 et j’ai également exercé ce métier de 1968 à 1978. J’en reviens maintenant à ce qui nous intéresse soit : les glaciers.

A l’époque où j’étais gamin (il y a quelques semaines à peine !), on ne connaissait pas encore les refroidisseurs à boissons électriques transportables. Il en existait déjà, je me souviens en effet de la marque << SEM >> mais ceux-ci étaient très lourds et étaient placés uniquement dans les cafés ; chez les cafetiers bien sûr qui avaient les moyens financiers de les acheter et ceux qui également croyaient que peut-être <<c’était l’avenir >>

De nombreux cafetiers possédaient donc des glacières souvent en zinc, dans ou à proximité de leur comptoir, qui quelquefois comportaient deux cuves séparées par une paroi, dans une des cuves, on  plaçait les bouteilles à refroidir et dans l’autre des blocs de glace, la paroi métallique laissait passer le froid mais empêchait la glace d’entrer en contact avec les bouteilles pour ne pas mouiller celles-ci lorsqu’elle fondait; ce réservoir à glace comportait également un petit robinet de vidange pour évacuer la glace fondue.

Pour les cafetiers qui débitaient déjà la bière à la pression et qui ne possédaient pas non plus de refroidisseur électrique, il existait des glacières dans lesquelles se trouvaient au fond 1 ou 2 serpentins en fonction du nombre de pompes, qui étaient à l’époque en étain et on plaçait sur ces serpentins des blocs de glace pour refroidir la bière.

Quant à la fabrication de ces blocs de glace, dans les années 50 et 60, il y avait à Namur la   << Brasserie Delforge >> qui a depuis disparu, qui était un gros dépôt de la Brasserie Artois de Louvain. La brasserie Delforge disposait d’une très grande installation pour la fabrication de blocs de glace qui étaient stockés à la sortie de fabrication dans de très grandes chambres froides. Cette brasserie Delforge possédait également un petit dépôt de vente de boissons à Andenne ainsi qu’une chambre froide où étaient stockés les blocs de glace ramenés de Namur dans une glacière placée sur un petit camion. J’ignore combien de blocs pouvait contenir cette glacière mais elle était quand même relativement grande car elle occupait la largeur du camion soit plus ou moins 2 mètres et devait mesurer plus d’un mètre de côté et de hauteur. Je me souviens du livreur de chez Delforge prénommé Alex qui faisait sa tournée tôt le matin pour livrer les blocs de glace chez les cafetiers (peut-être aussi chez les bouchers ou d’autres commerçants mais de cela, je ne m’en souviens pas)

De notre côté, en qualité de négociants en bières, nous possédions des glacières et pompes volantes (c’est-à-dire transportables, mais les pompes étaient lourdes !) utilisées dans les différentes festivités de notre région d’Andenne et nous allions donc acheter nos blocs de glace au dépôt Delforge à Andenne. »

Un immense merci pour ces premiers témoignages, je puis, d’ores et déjà, vous en annoncer d’autres.

La Petite Gazette du 30 mars 2011

LES GLACIERES… VOUS VOUS EN SOUVENEZ

Madame Jeannine Xhenseval, d’Aywaille, a conservé le souvenir d’une petite anecdote liée à ces glacières d’hier :

« Je sais que la « fabrique » de glace se trouvait rue des Pitteurs à Liège et qu’elle a fonctionné jusque dans les années 1960. Elle produisait les blocs de glace qui étaient ensuite fournis aux bouchers et dans les cafés notamment. Lorsqu’on a opéré ma petite sœur des amygdales, on m’a envoyée chercher de la glace chez le boucher pour la lui faire sucer. »

Madame Marie Grignet, d’Esneux, se souvient du frère de son grand-père qui était marchand de blocs de glace :

« Je me souviens très bien de l’un de ces marchands de glace : le frère de mon grand-père Henri Cerfontaine. Nous le rencontrions régulièrement rue Haute Sauvenière, rue très commerçante dans les années 1930. Il s’appelait Martin Cerfontaine et ne manquait jamais de me donner une pièce de 25 centimes pour aller m’acheter une chique. Je ne l’ai jamais oublié. Il faisait partie d’une famille de onze enfants, neuf garçons et deux filles. Si ma mémoire de 87 ans ne me fait pas défaut, il transportait de gros et lourds blocs de glace d’environ 50cm X 30 cm X 30cm, enveloppés dans une rude toile de sac ; il les prenait sur une charrette couverte tirée par un cheval et les transportait sur son épaule. Ses parents avaient élevé leur famille du côté de Ste-Foy, où le père était cordonnier. Ils avaient aussi de la famille à Dalem. Mon grand-père, quant à lui, était ouvrier tourneur à la S.N.C.B.

Il y a quelques années, lors de Journées du Patrimoine je pense, on nous a montré d’anciens trous ou fosses profondes et maçonnées qui servaient à stocker la glace ou la neige en hiver. Quelqu’un pourra-t-il me dire si cela a un rapport avec le commerce de glace ? »

Monsieur Lucien Sadzot, de Noiseux, se souvient d’un glacier à Marche-en-Famenne qui fabriquait des blocs de glace (100 cm X 20 cm X 20 cm) et qui était installé rue des Tanneurs. Selon mon correspondant, c’est dans les années 1958 ou 1959 que le commerce disparut, victime des frigos ! Ce marchand de glace, Felix Larondelle, desservait principalement les cafés et son installation serait toujours en place.

La Petite Gazette du 6 avril 2011

ENCORE A PROPOS DES MARCHANDS DE BLOCS DE GLACE

Quelques précisions m’ont été apportées par des lecteurs soucieux de les partager avec vous. Monsieur Christian Godard précise ce qu’il nous a déjà appris :

« Monsieur Wautriche, de Comblain-laTour, parle d’une armoire frigo utilisée dans la crèmerie de ses parents rue St-Léonard à Liège. Je reviens sur les propos que je vous ai transmis concernant les glacières de brasseries, l’isolant à cette époque était du liège (en tout cas dans les glacières que nous utilisions). »

Madame Marie Depret, quant à elle, informe les lecteurs désireux de compléter leurs informations, qu’elle a découvert sur internet  un petit historique sur les activités de la brasserie Delforge de Namur.

Voici l’adresse du site :users.skynet.be/artemisia/brie17eme7.htm

Monsieur Jean Nivarlet, Secrétaire communal honoraire de Clavier, évoque, quant à lui la remarquable glacière du château d’Ochain et me transmet la copie d’un intéressant article de Vers l’Avenir daté du 15.09.1992 rappelant que cette année-là, à l’occasion des Journées du Patrimoine, on procéda à l’inauguration de l’ancienne glacière, entièrement restaurée.

Cette glacière, qui sera classée le 22 janvier 1993, est remarquable à plus d’un point. Elle n’est pas située, comme c’est souvent le cas, dans les sous-sols du château mais à quelques centaines de mètres de là, à flanc de coteau, et à proximité d’un étang. Elle couverte d’une remarquable et étonnante toiture mixte constituée d’une voûte recouverte d’argile et protégée par une toiture octogonale.

Abandonnée pendant plus d’un demi-siècle, cette glacière a fait l’objet d’une totale restauration. E. Chefneux, dans son remarquable « Ochain, les vies d’un château » (1998) nous apprend que : « A Ochain, dès les premières gelées, les bûcherons du château venaient sur l’étang gelé et débitaient, à l’aide de scies à grandes dents, des blocs de glace qui étaient transportés et empilés dans la glacière, ensuite arrosés ce qui permettait d’homogénéiser les stocks (environ 200 m³). »

Le dernier coupeur de glace du château d’Ochain, M. A Duchesne, de Clavier, confiait, en 1995, qu’il avait effectué cette tâche jusque dans les années 1930 et qu’il se souvenait d’une épaisseur de glace sur l’étang pouvant aller jusqu’à vingt centimètres !

Un grand merci à vous tous qui prenez la peine de répondre aux questions qui vous sont adressées et qui, de cette façon, transmettez un savoir précieux.

Très prochainement, j’évoquerai, grâce à un passionnant envoi de M. Robert Nizet, de Vielsalm, la glacière de Hermannmont à Vielsalm.

La Petite Gazette du 13 avril 2011

LA GLACIERE DE HERMANMONT

Comme promis la semaine dernière, voici quelques précieuses informations sur la glacière de la propriété de Rosée à Hermanmont, Vielsalm. Merci à Monsieur Robert Nizet grâce à qui je puis vous transmettre ces informations que, tout d’abord, je puise dans une étude rédigée par M. Charles Legros à l’occasion de l’inauguration de la glacière restaurée lors des Journées du Patrimoine en septembre 1995.

« La cuve de la glacière de Hermanmont est assez particulière. Elle est cylindrique, ce qui est inhabituel, mais le fond n’est que partiellement maçonné : après un rétrécissement du pourtour, nous trouvons simplement de la terre battue, sans aucun aménagement. Le plafond de la cuve est formé de voussettes de briques soutenues par des poutrelles d’acier. Le mur cylindrique est en moellons de schiste salmien et les briques ont été façonnées à Rencheux : des matériaux typiquement locaux.

La hauteur totale est de cinq mètres, le plafond se situant à 2,5 m. au-dessus du seuil de la porte. La capacité totale est de 55m³ dont 25 sous le seuil de la porte.

(…) la glace à conserver était prélevée sur les étangs de la vaste propriété de Hermanmont. Elle était découpée avec de grandes scies. D’après des témoignages oraux, l’étang du Tiennemesse était le plus exploité : il est peu profond (à peine plus d’un mètre) ; le fond en est garni de « jetées » parallèles de gros moellons qui le traversent de part en part (…) De tradition, ce sont les gens de Ville-du-Bois qui assuraient le transport par tombereau )à cheval.

La glace était utilisée pour rafraîchir des préparations diverses. Elle n’était toutefois pas mélangée directement aux boissons, par exemple. N’oublions pas que c’était l’eau d’un étang ! Parfois, un Salmien malade, pour atténuer ses souffrances, recevait des glaçons : on m’a cité un cas de péritonite soulagé de cette manière. La meilleure « procédure » était de « demander à Madame la Baronne ». Cet épisode se passait en 1920. »

Monsieur Nizet dans un article intitulé « La propriété de Rosée à Hermanmont (Vielsalm) : grandeur et décadence » publié in Glain et Salm, Haute Ardenne n°35, nous apprend que : « Le principe de la glacière était simple et on en trouvait presque partout en Belgique, en général à proximité des châteaux ou, comme à Spa, des hôtels. Il s’agit d’une construction, enterrée et isolée le mieux possible. Dans le fond, un système d’évacuation des eaux vers un puits perdu permet de conserver la glace prélevée aux étangs voisins jusqu’en été. La glacière permettait de présenter à table glaces, sorbets ou autres préparations et se montrait utile pour l’élaboration de compresses médications diverses.

La Baronne de Rosée écrivait le 6 août 1914 : « J’ai été interrompue par les dames Beaupain qui venaient voir si j’avais encore un peu de glace pour une pauvre dame qui vient d’avoir une attaque d’apoplexie » L’auteur rapporte que cette glacière a été prise pour une chapelle par des Allemands qu’on y vit s’agenouiller et y prier en 1918… Un grand merci à Monsieur Nizet.

ET CELLE DE MARCHE …

Monsieur Francis Roufosse, quant à lui, évoque, d’après un texte de M. Jacques Rossignon, la glacière de Marche-en-Famenne.

« Dans la rue des Tanneurs à Marche-en-Famenne (ancienne rue des 3 Bombes), on peut encore apercevoir aujourd’hui un ancien bâtiment en briques portant sur sa façade une inscription à moitié effacée : « aplatisseur d’avoine ». Cet ancien moulin à eau fut vendu en 1929 à M. Rouffin, lequel le transforma en glacière, y fabriquant des blocs de glace de trente kilos qui étaient ensuite utilisés par des restaurateurs, bouchers, poissonniers, cafetiers, fermiers, marchands ambulants de crème glacée pour assurer la bonne conservation de leurs produits. A la mort de M. Rouffin en 1939, la succession de l’entreprise fut assurée par M. Déom, propriétaire de l’Hôtel de la Cloche. Après la seconde guerre mondiale, Félix Larondelle et son épouse, surnommée « la petite Maria », vont reprendre la glacière et la moderniser.

glace 1

C’était devenu une véritable petite industrie, équipée d’un gros compresseur à ammoniac des Ets Lebrun de Nimy, mû par un puissant moteur électrique. Le gaz obtenu était amené par des tuyaux vers un grand bac métallique rempli de saumure qui était ainsi maintenue à une température de -18°C. De grands moules en métal épais, hauts d’un mètre et remplis d’eau, étaient amenés dans le bac de saumure grâce à un palan accroché à un rail, lequel pouvait transporter huit moules à la fois. La cuve de saumure recevait ainsi 150 moules qui y trempaient pendant une douzaine d’heures. Deux démoulages étaient opérés chaque jour : à 5 heures du matin et dans l’après-midi à 17 heures. Les blocs étaient alors transportés sur l’épaule, emballés dans de la jute, jusqu’à la camionnette de Félix qui les attendait pour entreprendre sa tournée. Selon leurs besoins, les clients achetaient plusieurs blocs, mais souvent aussi un demi-bloc. Un pic permettait de couper la glace pour l’amener à la dimension souhaitée. Félix Larondelle s’était constitué une très belle clientèle. Au volant de sa camionnette, il livrait de nombreux commerçants marchois, mais également de Jemelle, Saint-Hubert, de toute la vallée de l’Ourthe, de Barvaux à Houffalize et à Bastogne, dont la laiterie consommait régulièrement de 60 à 70 blocs. Toutes les petites laiteries de la région comptaient d’ailleurs parmi sa clientèle. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes… Et puis, vers 1963, avec l’arrivée sur le marché des frigidaires et autres appareils électriques de refroidissement, Félix Larondelle sentit le vent tourner et, en bon visionnaire, il prit la décision de cesser son activité « avant d’y perdre ses culottes » !

Et les années sont passées, mais encore aujourd’hui, tous se souviennent de « la petite Maria » qui tenait une petite épicerie derrière l’Hôtel de Ville. Son rayon friandises était en permanence assailli par des bandes de galopins en manque de bonbons et de « chiques » ou encore de « babeluttes ».

glace 2Et toujours, Maria les accueillait avec sa bonne humeur et sa verve légendaire… » Vous en souvenez-vous ? Merci à vous de si bien nous renseigner sur ces réalités d’hier.

 

 

 

 

La Petite Gazette du 20 avril 2011

ENCORE QUELQUES INFORMATIONS SUR LA GLACIERE DE LA RUE DES PITTEURS

Madame Maryse Schillings, de Poulseur, se souvient de la glacière de la rue de Pitteurs à Liège : jusqu’en 1988, elle et son époux étaient membres actifs de la confrérie des Vignerons du Petit Bourgogne à Sclessin. Cette confrérie organisait toutes les années à Pâques un grand week-end gastronomique dans les locaux du château de Slessin. Pour conserver les huîtres au frais, on avait besoin de gros blocs de glaces fournis dans les années 80 par cette glacière qui fonctionnait toujours.

Les blocs étaient transportés dans des bassines (Des « tines » … vous savez, celles-là mêmes dans lesquelles on se lavait, enfants, au coin de la cuisinière à charbon) et livrés par le propriétaire de la glacière, M. Robert Coolman, qui aujourd’hui est toujours en pleine forme. Il faut croire que le froid conserve !

La cour de cette glacière est rebaptisée chaque année « Place du Tertre » à l’occasion des fêtes du 15 août en Outremeuse.

La Petite Gazette du 27 avril 2011

AU TEMPS DES MARCHANDS DE BLOCS DE GLACE

Monsieur Alain Charlier me transmet cette photographie qui illustre parfaitement plusieurs souvenirs réunis à propos de ces marchands de glace d’hier… et plus spécifiquement de cette glacière, maintes fois évoquée, de la rue des Pitteurs à Liège.

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Il m’indique simplement : « cette photo d’époque prouve, s’il en était besoin, que le métier existait déjà du temps du transport hippomobile… »

La Petite Gazette du 4 mai 2011

IL ACHETAIT DES BLOCS DE GLACE ET VENDAIT DE LA CREME GLACEE…

Les différentes interventions sur les glacières d’un jadis encore très proche ont poussé M. D. Libert, de Hony, a nous parler de son papa et à nous présenter cette jolie photo.

« Avant la guerre de 1940, j’ai bien connu le marchand de blocs de glace que l’on appelait Monsieur Glacemaker. Mon père, Georges Libert, fabriquait de la glace, de la crème glacée, selon la recette d’un ancien glacier italien de Liège. Il allait la vendre dans Hony et à Fèchereux, dans les campings. Comme le montre cette photo, prise, avant-guerre, au barrage de Hony. Papa attachait sa charrette à glace à son vélo pour faire la tournée des campings.

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Pour faire sa crème glacée, à l’époque, mon père avait fabriqué l’ancêtre du frigo. C’était une petite pièce carrée, avec un bac en briques pour y déposer les blocs de glace apportés de Liège. L’intérieur de ce bac en briques était tapissé de liège, le couvercle également, afin de bien conserver les blocs de glace. Une cuve en métal servait pour faire la crème glacée à l’intérieur même de ce bac.

Après la guerre, M. Dessart, de Liège, nous installera une « glaçonnière » frigidaire pour garder la charcuterie et le fromage vendus dans le magasin. »