A NE PAS MANQUER


L’EGLISE ST-JACQUES A FOSSE (TROIS-PONTS) SUR LE CHEMIN DE COMPOSTELLEA Trois-Ponts, comme dans d’autres communes, on ne se contente pas des éphémères Journées du Patrimoine pour mettre en valeur les merveilles de nos contrées… Le programme inscrit dans le cadre de l’Année Patrimoniale 2017 vous propose une alléchante journée, le dimanche 8 octobre prochain, en l’église Saint-Jacques de Fosse, Trois-Ponts. Dès 10h. vous êtes conviés à visiter une exposition de photos anciennes évoquant l’histoire de l’église Saint-Jacques et la vie, durant le 20e siècle, des villages attachés de Fosse, Bergeval, Dairomont, Cour, Mont-de-Fosse. A 16h., Quentin et Lionel Hurdebise, les petits-fils de Jules Hurdebise, porteurs du projet « Lu Stâve dès Boûs » de Logbiermé, reviendront sur l’histoire de deux voies majeures qui parcouraient jadis notre territoire en empruntant ses sommets : le Grand Chemin du Luxembourg connu notamment pour le transport des écorces de chênes en direction de Stavelot et de Malmedy et la fabuleuse voie de Compostelle qui, semble-t-il, voyait passer les pèlerins par les hauteurs de Saint-Jacques. A tour de rôle, ils évoqueront les différentes curiosités naturelles et historiques qui jalonnent ces anciennes voies (faune et flore, maisons et personnages célèbres, croix et monuments, etc.) ; la raison de l’existence du chemin de st-Jacques de Compostelle et son tracé en Belgique afin de comprendre pourquoi « Saint-Jacques » à Fosse. |
|
A leur suite, René Gabriel, bien connu de tous les lecteurs de La Petite Gazette, présentera le fruit de son inlassable travail de recherche. Sa consultation d’archives et de récits anciens de voyageurs apportera un intéressant éclairage sur l’histoire du ban de Fosse et de nos régions à une époque où les déplacements s’organisaient bien différemment dans nos campagnes. Le livre qu’il vient de publier sur le sujet, à cette occasion, sera disponible sur place.
Une organisation de l’Espace culturel de Trois-Ponts en collaboration avec le « Stâve dès Boûs, Monsieur René Gabriel, le musée de Wanne et Madame Madeleine Gaspar. Conférence > 3€. Rens. Espace culturel de Trois-Ponts 080/292460 ou 0471/226 883 Exposition >accès gratuit. Rens. Madeleine Gaspar
|
On ne compte plus les alléchantes propositions d’expositions, de visites guidées, de conférences… qui vous sont proposées lors du prochain weekend des Journées du Patrimoine. La Petite Gazette a choisi de vous en présenter une sélection qui, je le sais, devrait vous intéresser.
A AYWAILLE
Le thème de cette année se déclinera sous l’angle de l’exploitation carrière. Dans les locaux de l’Administration communale, il vous sera proposé une exposition de documents vous montrant comment les maîtres carriers ont pu se frayer les voies, rapides et sécures, publiques ou privées, vers nos carrières. Cette exposition sera accessiblement librement les samedi 9 et dimanche 10 septembre, de 10 à 17h.
Le vendredi à 19h., au même endroit et au cœur même de l’exposition, j’aurai l’immense plaisir de donner une conférence au cours de laquelle René Henry vous montrera comment les maîtres carriers ont réussi à se frayer ces voies. Il y sera question de batellerie, de chemins de fer, terrestres ou aériens et, bien sûr, de chemins et de routes qui bouleversèrent nos paysages.
« Document extrait des collections de René Henry »
Contrairement à ce que l’on s’imagine, l’exploitation industrielle de la pierre de chez nous ne remonte pas au-delà des années 1830-1840, à Florzé précisément. Très vite, l’essor de cette industrie, pourvoyeuse de très nombreux emplois locaux, provoqua des bouleversements tangibles de nos paysages locaux. On pense d’emblée au flanc des collines éventrés mais bien d’autres aspects paysagers et environnementaux furent modifiés. Un nombre toujours croissant d’exploitations allait de pair avec la nécessité de pouvoir acheminer les produits, bruts ou finis, issus de cette activité extractive. Les lieux d’exploitation n’étaient pas toujours accessibles à un important charroi, il fallut dès lors créer ces voies d’accès. Dans notre région et dans notre commune bien des moyens furent mis en œuvre pour assurer la circulation la plus aisée possible de ces produits dont le poids est, sans doute, un des éléments majeurs. Nos anciens sites carriers conservent le souvenir de ces voies nouvelles imaginées par nos ingénieux aïeux. En plus de la voie d’eau utilisée depuis des siècles déjà, la voie ferrée fut largement mise à contribution quelle qu’en soit la forme ou le statut : chemin de fer de l’Etat, réseau vicinal, réseau privé et même lignes aériennes sillonnèrent nos coteaux et franchirent nos vallées alors même que le réseau routier se développait considérablement en raison des transports nombreux qu’il devait supporter mais aussi parce que, attirée par le travail qu’offrait les carrières, la population et les zones d’habitat se développaient.
A ESNEUX-TILFF
A PROPOS DE LA BATELLERIE ET DU CANAL DE L’OURTHE…
C’est ce sujet que l’asbl Le Vieil Esneux, le Contrat Rivière Ourthe, les R.S.I. de Tilff et d’Esneux et la Commune d’Esneux ont choisi de développer lors des toutes prochaines Journées du Patrimoine. Le programme est alléchant et ne manquera d’attirer un public passionné : une exposition au château Brunsode (du 9 au 13 septembre), des balades à pied et à vélo à la découverte des vestiges du canal (les 9 et 10 septembre à 14h.) et une conférence de Géry de Pierpont, le samedi à 20h., sur le thème : L’aventure du Canal de Meuse & Moselle à travers les Ardennes, il y a 185 ans. Un souterrain pour bateaux, sous la frontière luxembourgeoise…
Géry de Pierpont est archéologue de formation (ULg) et « passeur de patrimoine » par passion. Ancien responsable du programme patrimoine architectural de la Fondation Roi Baudouin et coordinateur européen des Journées du Patrimoine, il fut durant cinq ans le responsable du musée BELvue, dédié à l’histoire de la Belgique et de sa Dynastie, puis chargé de la communication de la Maison des Auteurs de Bruxelles. Après avoir lancé le site de tourisme culturel « intoHistory », pour la promotion des logements dans l’histoire, il travaille aujourd’hui pour la Fondation Eglises Ouvertes. Les curieux d’histoire apprécieront son roman « La Rivière contrariée », consacré à l’épopée du Canal de Meuse et Moselle.
Une manifestation que les amateurs de cet important aspect de notre histoire régionale auront à cœur de ne pas manquer.
A GOUVY, LIERNEUX, STOUMONT, TROIS-PONTS et VIELSALM
« 150 ans du rail en Haute-Ardenne », cela se célèbre dignement !
Au programme des festivités, ces samedi 9 et dimanche 10 septembre, conférence, expos, visites guidées, spectacles historiques pour les familles, concerts à Gouvy, Lierneux, Trois-Ponts, Stoumont et Lierneux.
En ce 19ème s., siècle de la révolution industrielle, l’Ardenne est considérée comme la « Sibérie belge. »
Les récits des auteurs romantiques qui découvrent la région s’apparentent à des aventures dignes de la conquête de terres inconnues. L’Ardenne parait lointaine pour le reste du pays. La diligence permet certes de s’y rendre mais là aussi, le terme d’épopée n’est pas usurpé. Le rail, promis par le Roi Léopold Ier va lever ces frontières théoriques au sein de notre pays. Il va s’avérer être un merveilleux vecteur d’émancipation pour la région ardennaise. Sur le plan économique, social et celui des idées.
Ainsi le 20 février 1867 marque le début d’une ère nouvelle pour notre région ; durant les 3 dernières décennies du 19ème s. et la 1ère moitié du 20ème s., les voies de fer irriguèrent progressivement nos vertes vallées, reliant nos bourgades et villages aux grands centres industriels et névralgiques nationaux et internationaux. Les métamorphoses et impacts sur cette région furent multiples et inégaux.La place grandissante donnée à la voiture, la fermeture progressive des charbonnages et les difficultés rencontrées par la sidérurgie détricotent progressivement cette voie de fer dont subsiste, depuis 1959, uniquement la ligne 42 !
Sa 09 à 19h30, à l’Espace culturel de Trois-Ponts, sera donnée la conférence inaugurale et introductive « Le rail, vecteur d’émancipation de l’Ardenne ». En analysant le cas du nord de la province de Luxembourg et du sud de celle de Liège, J.-M. Bodelet (historien) remettra en perspective ce que fut « l’âge d’or du rail. » . A l’issue de la conférence, un verre de l’amitié sera offert à l’occasion des 150 ans de l’inauguration du chemin de fer Spa-Gouvy, 1ère ligne de chemin de fer qui traversa notre région !
Di 10 de 9h à 18h, à Gouvy, Lierneux, Stoumont, Trois-Ponts, Vielsalm, vous pourrez profiter d’un circuit guidé en 5 étapes accessible en car (sur réservation !) ou librement.
Au programme : expos, visites guidées, conte historiques par la cie Sandra Proes, animations, visites sur site, concerts
Stoumont « Exceptionnel ! Une exploitation minière (extraction de manganèse) en Ardenne liégeoise » : expo et visites guidées 9h, 11h, 16h.
Lierneux « Quand le tram ouvrit nos villages »: expo et visites guidées 10h30 ( avec conte historique), 14h
Vielsalm « Vielsalm, à la croisée du rail depuis 150 ans ! »: expo et visites guidées 10h30, 13h (avec conte historique), 15h30
Trois-Ponts « L’âge d’or d’un village né du train ! »: expo et visites guidées à 10h, 14h30 (avec conte historique), 17h
Gouvy « Gouvy, nœud ferroviaire »: expo et visites guidées 10h, 14h, 16h30 (avec conte historique)
Di 10 à 19h30, dans la grange tout à côté du Château de Rahier, clôturez cette belle journée en compagnie du groupe Chat Pitre quartet pour un concert de « Jazz manouche ». En collaboration avec l’asbl « Les Chemins d’Elise »
Je vous invite à consulter le programme complet ci-annexé.
Infos pratiques
Info & rés obligatoire : avant le 7 septembre > places limitées pour la formule en car (50 places) et pour le conte historique tout public (50 places).
Espace culturel de Trois-Ponts 080/29.24.60 ou 0471-226883- Espaceculturel3ponts.jimdo.com
PAF : circuit > parcours en bus et animations gratuites.- sauf repas à votre charge
La Petite Gazette du 18 janvier 2017
En lecteurs avisés de La Petite Gazette, vous savez que Monsieur Gabriel Gabriel, de Roanne–Coo est un inlassable chercheur. Depuis des années, il fouille méticuleusement les vieux documents relatifs à nos régions qui reposent au dépôt des Archives de l’Etat à Liège. Lorsqu’il fait une découverte susceptible d’intéresser les lecteurs de cette rubrique, il ne manque jamais de me la communiquer pour que j’en partage le contenu avec vous tous. Encore une fois, en votre nom à tous, je tiens à l’en remercier chaleureusement. Cette semaine, c’est un document déniché dans les archives du Fonds hollandais qu’il vous propose de découvrir ; comme il traite des bateliers de l’Ourthe, je sais qu’il vous passionnera. Il vous présente son contenu :
« Après la défaite des armées françaises à Liepzig en 1813, les armées des coalisés, ou des Hautes Puissances Alliées, vont occuper notre pays dès janvier 1814. Il sera alors administré par des représentants hollandais avant que le sort de notre nation soit définitivement scellé lors du Congrès tenu à Vienne en 1815.
La période charnière entre ces deux évènements marquants de l’histoire de notre pays sera particulièrement difficile.
Retenons une plainte des Bateliers de l’Ourthe adressée au Commissaire du Gouvernement. Selon son excellente habitude, René Gabriel nous propose ce texte dans son orthographe d’origine :
A Monsieur Koenen Commissaire du Gouvernement pour le département de l’Ourte.
Les soussignés bateliers des communes d’Esneux, Hamoir, Comblin-Fairon, Sprimont, Tilff, Angleur et Chesnée ont l’honneur de vous exposer que depuis longtemps ils sont privés de leurs bateaux emploiés au pont qui a été jetté sur la Meuse vis à vis de Visé, que ces bateaux sont la seule et unique ressource de la plupart d’eux qui n’ont d’autre moyen d’existence pour eux et leur nombreuse famille, ils se permettent d’observer que la destination de ce pont est bonne à cesser depuis la reddition de la place de Mastricht et qu’il ne peut tout au plus aujourd’hui que servir aux habitants de Visé pour communiquer plus aisément d’une rive à l’autre de la Meuse, tandis d’un autre côté que l’intérêt de la navigation et par suite du commerce réclame impérieusement la prompte remise des bateaux aux soussignés pour pouvoir continuer comme ci-devant à transporter toutes sortes de marchandises dans les villes de Maestricht, Venlo, Ruremonde et même plus avant dans la Hollande.
Pleins de confiance dans votre justice ordinaire, les soussignés osent se flatter, Monsieur le Commissaire, que vous ne balancerez pas d’après toutes ces considérations, d’ordonner sur le champ la remise de leurs dits bateaux.
Salut et profond respect.
Signatures.
Et mon correspondant de conclure par une information et une remarque très judicieuses :
« La fourchette des années 1814-1815 semble bonne. En effet, je viens de trouver que le siège de Maestricht avait eu lieu de décembre 1813 au 21 juillet 1814. En outre, il me semble bien intéressant de retenir les destinations hollandaises de nos bateliers locaux: Venlo, Ruremonde et au delà …! »
La Petite Gazette du 25 janvier 2017
C’est avec intérêt que nous retrouvons les documents exhumés des archives par René Gabriel. Il nous présente une autre trouvaille sur le sujet abordé dernièrement :
« Précédemment, nous avons suivi une plainte des bateliers réclamant le retour de leurs embarcations. Revenons début mars 1814 et découvrons un premier rapport relatif au projet de pont :
Liège le 10 mars 1814.
Mise en réquisition dans les communes de Tilff et d’Esneux de vingt bateaux de l’Ourte propres à porter des canons, cordes et chaines et dans celle de Chokier de 1600 planches de 2 à 3 pouces d’épaisseur, nous appréhendons que ces réquisitions ne se rempliront au moins pas entièrement et nous vous en prévenons pour votre gouverne afin de pouvoir de votre côté prendre les précautions que vous jugerez nécessaires.
Nous venons également de requérir le maire de Visé de procurer demain à l’officier du Génie les ouvriers et outils désignés dans la liste que vous nous avez envoyée hier.
Pour cet ouvrage il est demandé 20 bateaux pour porter canons, cordes et chaines, 230 poutres, 1000 planches, 3000 clous.
Les ouvriers proviendront de la région de Visé dont presque tous exercent la profession de charpentier.
Les bateaux de l’Ourte conviendront mieux que ceux que l’on trouve en Liège, aussi Messieurs vous pourriez requérir dans les communes de cette rivière.
Cette précision va être très préjudiciable à nos bateliers locaux car l’ordre est immédiatement transmis aux maires de Tilff et d’Esneux :
Liège le 10 mars 1814.
Aux maires d’Esneux et de Tilff.
C’est d’après des ordres supérieurs que nous vous enjoignons de mettre dans vos communes en réquisition 10 bateaux d’eau d’Ourte et les envoyer de suite devant Visé pour la construction d’un pont que l’armée des Alliés va y établir. Il faut que ces bateaux soient de profondeur à porter des canons, cordes et chaines.
Nous vous observons que cette réquisition est aussi pressée que rigoureuse et sous peine d’une nombreuse réquisition militaire. Nous vous accuserons la réception de celle-ci par un récipissé au porteur auquel on paye un franc pour frais de voiage. »
Simplement passionnant, un immense merci à Monsieur Gabriel qui reviendra vers nous avec d’autres documents si ses recherches lui permettent de les mettre à jour. Evidemment si, de votre côté, vous êtes en possession de renseignements permettant de compléter le sujet, les colonnes de La Petite Gazette vous sont ouvertes.
La Petite Gazette du 1er février 2017
Les documents transmis par M. René Gabriel évoquant « la réquisition des bateaux d’Ourte » décidée par les autorités françaises au début du XIXe siècle pour servir à l’installation d’un pont provisoire, réclamé par l’armée, devant Visé avaient conduit ce lecteur-chercheur à s’interroger sur les destinations qu’atteignaient alors les bateliers de l’Ourthe : « dans les villes de Maestricht, Venlo, Ruremonde… ». Je savais que cette information me rappelait quelque chose de connu et, à mon tour, j’ai fouillé mes notes relatives à cette période et… j’ai retrouvé ce que j’y cherchais.
Dans son extraordinaire « Mémoire statistique du département de l’Ourte », Thomassin, chef de division à l’administration du département, rapporte ceci : « Les pavés des carrières d’Esneux et de Comblain-au-Pont descendent par l’Ourthe dans la Meuse à Liège et se transportent de là, sur les différentes chaussées et par la Meuse, à Maestricht et Venlo »
L’auteur de ce précieux « Mémoire » nous précise qu’il y a alors 12 carrières à Esneux, employant 60 ouvriers et produisant annuellement 800 000 pavés ; 2 carrières à Gomzé-Andoumont, 13 ouvriers et 249 000 pavés/an ; 4 carrières à Comblain-au-Pont qui, avec 16 ouvriers fournissent 300 000 pavés/an.
Monsieur René Gabriel nous donne encore à découvrir de nouveaux documents :
Réquisition des bateaux d’Ourte.
Le 9 mai 1814.
A Monsieur Defloen maire de Visé,
On vous prévient que Son Excellence le Gouverneur Général par sa dépêche du 28 avril, a défendu formellement la démolition du pont établi à Visé pour la communication des troupes aussi que la vente au profit de l’armée Suédoise des matières provenant de ce pont.
Ce pont ayant été construit aux frais du pays ainsi que la fourniture de tous les objets qui ont été nécessaires, ils doivent être considérés comme sa propriété sacrée et rester à sa disposition. Je vous invite en conséquence à me rendre compte sur le champ des attentats que les militaires voudroient se permettre à l’égard de ce pont et prendre les mesures les plus efficaces pour les empêcher …
Le 16 mai 1814.
A Monsieur Koenen Gouverneur du département de l’Ourte.
Les bateliers soussignés ont l’honneur de vous exposer qu’étant privés de leurs bateaux qu’ils ont fournis pour la construction du pont de Visé d’après la réquisition leur insinuée, ils ont encore le désagrément d’être contraints au payement d’une taxe arbitraire pour le passage du même pont lorsqu’ils descendent avec quelques bateaux qui leurs restent, cette taxe étant de 3, 4 ou 5 francs par partie et même prix à la remonte à vuide.
Les soussignés épuisés par le défaut de navigation pendant tout le temps que la Meuse a été fermée et privés aujourd’hui de leurs bateaux dont ils ne sont pas encore payés ce qui les empêche de se relever de leurs pertes, viennent implorer votre justice dans la ferme croyance que vous daignerez Monsieur le Gouverneur combien il leur est sensible de payer le passage d’un pont construit de leurs propres bateaux et que vous ordonnerez que le passage leur soit libre, ils ont l’honneur d’être avec le plus profond respect.
Vos très humbles et très obéissants serviteurs.
On comprend très aisément, analyse René Gabriel, l’exaspération des bateliers d’Ourte car, outre la réquisition de leurs bateaux, ils doivent en plus lorsqu’il naviguent avec d’autres embarcations payer des taxes lors de leurs passages sur ce (leur) pont.
Précisons que c’était une grande difficulté pour le franchissement de l’ouvrage. En effet, cela nécessitait de couper provisoirement la continuité de celui-ci afin de laisser passer les embarcations qui de dirigeaient vers Maastricht et au-delà, ou à la remontée vers Liège, puis d’opérer de nouveau le raccord. Cela nécessitait donc la présence de nombreux ouvriers et faisait monter le coût total de cette entreprise.
René Gabriel nous permet de suivre, pas à pas ses recherches et de ses découvertes puisqu’il continue à alimenter ce sujet par de nouveaux documents et informations…
Le 18 mai 1814.
A Son Excellence le Gouverneur Général,
Monsieur,
J’ai l’honneur de rendre compte à Votre Excellence, ainsi qu’elle me le prescrit par sa dépêche du 7 de ce mois, que le pont établi à Visé pour la communication des cantonnemens Suédois subsiste toujours en son entier, et que l’autorité militaire suédoise semble s’être désintéressée de ses prétentions à l’égard de ce pont. Cependant un piquet de 14 hommes de cette troupe stationne toujours à Visé sous prétexte de garder le pont, et sont une charge permanente pour les habitans de cette commune ; quoique depuis le 25 avril dernier, époque de la levée des derniers cantonnemens Suédois, Monsieur le chef de brigade Anckarsward ait ordonné la démolition de ce pont comme devenu inutile au service des armées. En effet, depuis l’ouverture de la place de Maastricht, le pont ne fait qu’entraver la navigation de la Meuse. Les bateliers et autres personnes qui ont été requises de fournir des pièces de construction, en réclament vivement la restitution. Je prie donc Votre Excellence de m’autoriser à faire déconstruire incessamment ce pont, pour que je puisse faire restituer à chacun les objets qui leurs appartiennent, et du produit de quelques matériaux acquis par le département faire payer les ouvriers et autres fournisseurs à qui il reste des prétentions pour avoir concouru à l’établissement de ce pont.
Je suis avec respect …
Liège le 26 mai 1814.
A la Commission municipale de la ville de Liège
Il s’agit, Messieurs, de préparer sur le champ au corps d’armée Russe qui arrivera le 28 courant par Terwagne, des moyens de franchir la Meuse au passage de Seraing. Comme le pont de Visé subsiste encore en son entier, il viendroit très à propos parer à ce besoin. A cet effet, je vous invite à requérir des ouvriers intelligens, aidés de quelques bateliers pour opérer de suite la dislocation du pont de Visé, en remonter les pièces jusqu’à Seraing et l’y recomposer pour servir jusqu’après le passage dont il s’agit. Pour que cette mission puisse être exécutée d’une manière certaine pour le 28 de ce mois vous feriez bien de nommer un commissaire spécial qui ait toute votre confiance afin de surveiller et diriger cette opération.
Vous sentez Messieurs que nous avons tous le plus grand intérêt à ce que cette troupe puisse traverser rapidement le département et surtout la ville de Liège, il faut donc lui ôter tout prétexte de s’y arrêter.
Je vous prie de m’accuser réception de cette lettre.
Je pense que le moyen le plus sûr d’atteindre le but seroit de charger de cet ouvrage un entrepreneur qui devroit se faire fort d’achever cette besogne pour le jour indiqué.
—
Le 27 mai 1814. Arrondissement communal de Liège. Ville de Liège.
La Commission Municipale, à Monsieur Koenen Commissaire du Gouvernement pour le département de l’Ourte.
Monsieur le Commissaire
Nous avons reçu ce matin vers les onze heures votre lettre relative à la construction d’un pont à Seraing en employant les poutres et madriers du pont de Visé, mais il y a impossibilité physique d’effectuer ce transport et la reconstruction pour le 28 de ce mois, cette impossibilité est même reconnue par les officiers Russes et en conséquence Monsieur le Directeur du Cercle de Liège que nous venons de voir à cet effet et qui a cet objet dans ses attributions avait déjà fait réunir tous les bacs et bateaux de Seraing et des environs afin d’assurer le prompt passage de la colonne qui vient de Terwagne, et il y aura d’autant plus de facilité que les eaux sont basses ce qui ôte toute idée d’inconvéniens et de danger dans la mesure que le peu de tems qui reste à faire adopter par Monsieur De Harsez.
Nous avons l’honneur d’être avec la plus haute considération.
Vos très humbles et très obéissants.
Le président de la Commission.
Commentaire de notre inlassable chercheur : « Démolir le pont de bateaux de Visé et le reconstruire à Seraing … ! En deux jours !! Remarquons que les coalisés ont peu envie de rencontrer leurs “alliés Russes” ! »
Les armées des Hautes Puissances Alliées arrivent dans nos contrées.
Retenons à présent un autre auteur : Paul Verhaegen, qui dans son ouvrage La Belgique sous la Domination Française 1792-1814 évoque cette année 1814 et les armées des Hautes Puissances Alliées. Nous allons y rencontrer les troupes en présence :
« Rançonnés par leurs maîtres de la veille, menacés de désordres intérieurs par la disparition des autorités, les Belges rencontraient une nouvelle source de malheurs dans l’occupation étrangère. C’est le moment de décrire les calamités que l’invasion de 1814 vint apporter à nos provinces à l’occasion de leur libération.
L’armée du Nord, chargée d’affranchir les Pays-Bas était composée d’éléments extrêmement variés. Sous le haut commandement de Bernadotte, prince royal de Suède, elle groupait des troupes suédoises, russes, prussiennes, hessoises, saxonnes, wurtembourgeoises, anglaises et hollandaises.
Parmi ces contingents si divers, le plus nombreux était celui qu’avait fourni le troisième corps prussien dirigé par le duc de Saxe-Weimar, assisté par les généraux Wolzogen, prince de Wurtenberg, Borstell et Thielmann. Précédant le troisième corps, le général Bulow à la tête d’une première armée prussienne et d’une avant-garde de cosaques, avait traversé la Belgique presque sans s’arrêter et s’était porté vers Maubeuge et Laon. Derrière la masse des Allemands arrivèrent les autres bataillons dont les uns stationnèrent dans le pays et les autres gagnèrent la France. Dans la vallée de la Meuse, ce furent les russes du général Wintzingerode qui défilèrent les premiers, suivis de près par les Prussiens et les Saxons. Plus au Sud, un corps commandé par le général York et composé principalement de Prussiens, traversa le Luxembourg, somma la ville de ce nom, puis fut remplacé pendant les opérations du blocus par des troupes hessoises.
Tels étaient les premiers flots du torrent qui désola les villes et les campagnes voisines des grands’routes à partir de la fin de janvier 1814.
L’invasion parut suspendue quand on apprit la capitulation de Paris et l’abdication de Napoléon. Mais ces évènements furent le signal d’un second envahissement. Les forces qui avaient conquis le Nord de la France traversèrent de nouveau la Belgique pour rentrer dans leurs foyers. Cette fois, le mal fut accru parce qu’elles croisèrent en de nombreux endroits les garnisons françaises qui, ayant évacué les forteresses du Nord, se hâtaient de regagner leur patrie.
Au milieu de tout ce mouvement de troupes, le sort de la population belge était profondément à plaindre. Privée de ces chefs, n’ayant aucune force à opposer aux exigences arbitraires des occupants, la nation était réduite au rôle des serfs de jadis, taillables et corvéables à merci. Sans doutes, les commandants supérieurs s’efforçaient de modérer les prétentions de leurs soldats, et bientôt une administration centrale réorganisée vint seconder leur bonne volonté. Mais la célérité du passage des régiments et la multiplicité des corps auxquels ils appartenaient relâchaient la discipline et empêchaient le redressement des abus. Beaucoup d’étrangers, d’ailleurs, joignant à des habitudes de pillage la conviction que les Belges étaient amis de la France, traitaient leurs hôtes d’un jour en ennemis.
A vrai dire, ces pensées hostiles étaient principalement partagées par les soldats prussiens. Quand on montait dans la hiérarchie, on rencontrait chez les officiers allemands une attitude tout autre. La plupart possédaient la langue française et s’attachaient à acquérir les sympathies des habitants du pays.
Chez leur chef, le duc Charles-Auguste de Saxe-Weimar, l’urbanité de manières se joignait à la distinction de l’esprit et à un jugement éclairé, qui valurent à cet ami de Goethe et de Schiller l’attachement des Belges. Malheureusement, les rudes cavaliers accourus des bords du Don et du fond de la Poméranie pour venger sur Paris les insultes de 1806 et de 1812, ne comprenaient rien aux charmes le l’atticisme ou aux prescriptions du droit des gens. Pendant deux années, et principalement pendant les premiers mois de 1814, la Belgique allait constater que la cour de Weimar, l’Athènes du Nord, n’avait guère policé les mœurs des villageois allemands.
A côté des officiers allemands qui se piquaient d’aménité et s’efforçaient de modérer leurs soldats, une mention particulière était due aux contingents anglais et hanovriens. Fort bien disciplinés, pourvus largement de tout ce qui était nécessaire à une troupe de campagne, les soldats qui les composaient laissèrent, en général, les meilleurs souvenirs de leurs cantonnements. Bon nombre avaient fait en Belgique les campagnes de 1793 et de 1794, et furent reconnus dans les localités comme Courtrai, Nieuport, Ypres et Menin, où ils avaient guerroyé autrefois. Non seulement leur conduite ne donna lieu à aucune plainte, mais quand ils s’éloignèrent, ils reçurent de leurs hôtes les témoignages les plus flatteurs d’estime et de regrets.
Tout au contraire, ce furent la crainte et la haine que provoquèrent les cosaques et les Prussiens. L’aspect seul des premiers suffisait à indisposer la population. Ils étaient, en général, petits de taille, de visage difforme, présentant le type Kalmouk ou Mongol. Leurs barbes et leurs cheveux incultes donnaient à leur personne un caractère de saleté odieux. Ils étaient couverts de vermine et exhalaient des odeurs repoussantes. Coiffés de bonnets de fourrures, montés sur de petits chevaux à peine harnachés à l’aide d’une mauvaise selle ou d’une couverture, ils portaient une longue lance et étaient armés de pistolets et de sabres. Certains même, appelés Baskirs, n’avaient d’autre arme qu’un arc, des flèches et un fouet. Merveilleux cavaliers, ils ne faisaient qu’un avec leur monture. C’était un jeu pour eux, en galopant à fond de train, de se pencher assez pour ramasser sur le sol une arme ou une pièce de monnaie. C’était aussi pour eux une habitude de ne pas se séparer de leurs chevaux, à côté desquels ils passaient la nuit, couchés dans les rues, même au milieu de l’hiver. Ajoutez à cet extérieur répugnant les habitudes de gloutonnerie qui leur faisaient absorber non seulement des liqueurs fortes en quantité considérable, mais l’huile de lampe, le suif, les chandelles, ou mêler de la poudre à leur boisson pour en relever le goût. En un mot, ils apparaissaient comme l’incarnation de la sauvagerie sortant des steppes de l’Orient.
Enfant du désert comme la plupart de ses hommes, le colonel commandant le premier régiment des cosaques du Don resta légendaire à Gand. Il personnifiait les qualités et les défauts de ses soldats. C’était l’hetman Bychalow, que les Gantois baptisèrent familièrement du nom de Pietje Kosak. Vieillard de plus de quatre-vingt ans, aux cheveux blancs, doué d’une activité prodigieuse, il passait ses journées à chevaucher ou à boire. Ignorant les langues de l’Occident, il était accompagné partout par un juif polonais qui lui servait à la fois d’interprète, de secrétaire et de chef d’état-major. Il traînait derrière lui trente et un chevaux, et chacun de ses officiers en avait sept. Quand il arriva à Gand, le 14 février, pour remplacer le colonel de cosaques Mentchikof, il s’installa dans l’hôtel d’une des premières familles de la ville. Quoique fort bien reçu, il ne tarda pas à se plaindre et à s’installer dans une autre demeure patricienne qu’il délaissa bientôt aussi. Il fit ainsi le tour des hôtels de Gand, accablant ses hôtes d’exigences et les surprenant par ses excentricités. L’une des moindres consistait à imposer à la municipalité d’organiser, aux frais de la caisse communale, des banquets somptueux où elle avait ordre d’inviter les officiers étrangers, parfois au nombre de quatre-vingts. Exagérant les forces dont il disposait, il obtint après une simple démonstration militaire, la capitulation du Sas de Gand, et s’empara d’une grande quantité d’eau-de-vie et de vin qu’il fit distribuer aux Gantois quand il quitta leur ville. Recherchant la popularité, il fit fouetter des soldats convaincus d’avoir détroussé des habitants. Il prenait un plaisir particulier à jeter des pièces de monnaie à la foule afin de s’amuser à voir les luttes occasionnées par ses libéralités. Pour célébrer dignement le jour de fête de son souverain, il fit établir une estrade sur la Place d’Armes, devant l’hôtel où il logeait, et après le concert donné par la musique du régiment, il s’avança sur la scène pour exécuter une danse cosaque. «Il gambada comme un fou, rapporte un chroniqueur, pendant que ses soldats buvaient le vin dans des cuvelles, comme des bêtes ».Le même soir, comme la Chambre de rhétorique avait organisé une solennité en son honneur, Bychalow se rendit à la représentation, accepta le titre de membre d’honneur de la confrérie et fit don aux rhétoriciens de son portrait peint sur ivoire. Le lendemain, après un banquet imposé à la municipalité, il exécuta de nouveau devant l’assemblée des danses cosaques qui achevèrent de scandaliser la gravité flamande et qui le firent traiter de pitre de foire. Tout en flattant les Gantois, le colonel ne négligeait guère les profits que pouvait valoir sa situation de commandant militaire. En l’espace d’un mois, son prédécesseur et lui avaient imposé à la ville des réquisitions atteignant la somme de 168.000 francs et une contribution de guerre de 750.000 francs.
Sous de pareils chefs la licence des soldats ne connaissait guère de limites. Logement, alimentation, fourniture d’équipement, transport de bagages et d’artillerie, tout était occasion d’abus et de brutalités.
Presque toutes les villes belges étaient, en 1814, des places ouvertes, occupées par des garnisons peu nombreuses. L’insuffisance des casernes amenait ainsi forcément les corps militaires traversant la Belgique à se loger chez les habitants. On vit même à Gand les soldats refuser d’occuper les casernes afin de continuer à être hébergés dans les maisons particulières. On conçoit ce que ces hôtes incommodes, amenant avec eux leurs chevaux, dont ils prétendaient ne pas se séparer, apportaient de trouble dans les demeures où ils s’installaient. »
Et René Gabriel d’ajouter : « Ces troupes Russes, ou une partie du moins, sont passées dans nos régions. Nous en avons retrouvé des traces; il était exigé dans certaines de nos commune, de Stavelot et de La Gleize notamment, un … “impôt de guerre” en leur faveur ainsi que fournitures diverses tant pour les soldats que pour leurs montures. »
La démolition du pont de bateaux d’Ourte construit à Visé.
Le 3 juin 1814.
Les 11 et 12 mars la réquisition des bateaux a été faite par MM. Doblesteine et Doneux préposés à la construction par le Capitaine Gilbert officier du Génie Suédois. On a utilisé :
80 pieds de chaines de fosse acquis aux maitres des houillères, 3.000 clous de 5 pouces de long, 2.000 clous de 6 pouces de long, 150 livres de clous de 3 pouces de long, 215 pièces de bois de chêne pour prix de 4.000 francs.
Quant au loyer des indemnités il nous parait que les propriétaires les méritoient mais aucune indemnité n’a été fixée ni statuée à charge de qui elle soit.
Le 7 juin 1814.
Le Commissaire du Gouvernement à M. le Directeur du Cercle de Liège,
Il résulte des correspondances que les commandants des troupes prussiennes stationnées à Visé et à Argenteau s’opposent à la déconstruction du pont de Visé.
Comme je n’ai prescrit cette déconstruction que d’après la décision formelle de Son Excellence le Gouverneur Général et après avoir obtenu l’assentiment de Son Excellence en chef d’Yorck, je dois croire messieurs que les commandants n’ont pas de raison de s’y opposer …
Liège le 8 juin 1814.
Les soussignés bateliers navigant sur le Meuse
A
Monsieur Koenen, commissaire du Gouvernement pour le département de l’Ourte
Monsieur le Commissaire,
Le pont de bateaux construit sur la Meuse vis à vis de Visé, donne de très grands embarras à la navigation, retarde la correspondance entre Liège et Maestricht, enfin cause une foule d’inconvénients qu’il est inutile de détailler ; mais ce qui mérite bien de fixer votre attention, Monsieur le Commissaire, c’est que ce pont est construit de bateaux qui sont les seuls convenables pour naviguer de temps-ci, moment où les eaux sont les plus basses, le commerce de la Meuse est donc privé d’une très grande ressource et les propriétaires de ces bateaux sont tous des malheureux trop longtemps privés de leurs moyens d’existence.
Le pont de Visé est inutile aux troupes des Hautes puissances Alliées, il cause des dommages à des pauvres particuliers et gène le commerce. Nous vous supplions donc, Monsieur le Commissaire, d’ordonner qu’il soit levé, vous êtes trop juste et trop raisonnable pour ne pas faire droit à notre demande.
Nous avons l’honneur d’être, Monsieur le Commissaire,
Vos très humbles et très obéissants serviteurs. Signatures.
—
Le 9 juin 1814.
La direction du Cercle à la Municipalité de Liège,
Quant à l’indemnité à payer aux propriétaires des bateaux requis il convient que vous vous en fassiez remettre l’Etat par MM. Doneux et Doblesteine et que vous proposiez l’indemnité que vous jugerez convenable de leur faire accorder.
Le 11 juin 1814.
Le pont de bateaux construit sur la Meuse vis à vis de Visé donne de très grands embarras à la navigation, il retarde la correspondance entre Liège et Maastricht.
—
Le 19 juin 1814.
23 personnes ont démonté le pont de Visé, pontainiers, bateliers, ouvriers, menuisiers, charretier et préposé. Le montant total des journées s’élève à 163 francs 36 centimes. Il faut y ajouter le montant à payer lors de la construction qui est de 13,60 francs. Total : 176 francs 96.
Visé le 23 juin 1814.
L’abonnataire du passage d’eau du 10 février au 20 mars, la Meuse étant haute, a dû mettre les ouvriers pour faire le passage d’eau qu’exigeoient jour et nuit les ordonnances et troupes des Hautes Puissances Alliées jusqu’au 20 mars qu’un pont s’établit.
—
Le 30 juin 1814.
Discry Servais Joseph, fermier du passage de Hermalle sous Argenteau à
Monsieur Koenen Commissaire du Gouvernement pour le Département de l’Ourte,
Monsieur,
Me confiant dans la droiture de vos intentions, à l’égard de tous vos administrés, et fort de la justice de ma réclamation, j’ose espérer que vous daignerez l’accueillir et me préserver moi et ma famille de la misère qui pourrait nous accabler.
Le simple exposé de fait suffira pour mettre au jour l’équité de ma demande.
D’après une convention faite le 24 9bre (novembre) 1813 avec Monsieur le préfet de ce département, je me suis rendu adjudicataire du grand bac au passage d’eau de Hermalle, devant Visé, et j’entrai en jouissance le premier janvier 1814.
Je ne parlerai point du préjudice qui ne fut fait la nuit du 18 au 19 janvier par des individus qui s’avisèrent de fracturer mon bateau et de le faire couler à fond, ils s’imaginèrent sans doute se soustraire au passage des trouppes qui allaient être fréquents, puisque c’était alors que les français effectuaient leur retraite poursuivis par les armées Alliées, mais le 10 février suivant, Mrs les maires de Hermalle et de Visé, après m’avoir ordonné de faire relever le bac / car il avait resté enfoncé sous l’eau jusqu’à cette époque / et de le raccommoder, me le firent conduire, ledit jour, devant Visé, pour y passer conjointement avec les bateliers de Visé et d’Argenteau, jour et nuit toute la correspondance des armées, la cavalerie, l’infanterie, etc. … L’âpreté du froid couvrait dans ces moments la rivière de glaçons, ce qui m’occasionna beaucoup de frais, tant par le nombre plus considérable d’ouvriers que je devais employer que par la grande déterioration faite à mon bateau.
Cette manœuvre gratuite ne cessa que le premier avril 1814 jour où fut achevé le pont qu’on avait ordonné de jetter sur la Meuse ; le maire m’enjoignit alors de faire remonter le bac et une autre nacelle que j’avais été forcé d’y joindre au rivage d’Hermal, mais vu la construction du pont par lequel tout pouvait passer gratuitement, mon passage fut totalement paralysé et pour ainsi dire nul, de sorte que pendant un espace de quatre mois et d’avantage je n’ay reçu aucune rétribution de ma reprise.
Ce simple allégué suffit sans doute pour vous convaincre, Monsieur, que pendant les deux trimestres de cette année, dont j’ai dû acquitter le 1er d’avance au gouvernement français, je n’ai pu gagner de quoi subvenir aux besoins de ma famille ; qu’au contraire j’ai fait beaucoup de frais qui ne pourront se compenser que de longtems avec le petit bénéfice que je retire du passage qui m’est confié.
J’espère, Monsieur, que vous vous attendrirez sur mon triste sort, que vous l’allègerez en me gratifiant pour le 3eme trimestre et que vous calmerez par ce bienfait les inquiétudes de celui qui vous en aura une reconnaissance hors bornes.
Quoy faisant,
J’ai l’honneur d’être avec un très profond respect, Monsieur le Commissaire.
Votre très humble et très obéissant serviteur. Servais J Discry.
—
Nous arrivons à la fin de ce long épisode relatif à la réquisition de ces vingt bateaux d’Ourte qui composèrent le pont de Visé. Je n’ai toutefois pas, jusqu’à présent, retrouvé l’indemnisation proposée aux propriétaires. Comment toujours, il s’agissait de réquisition militaire très urgente … , on devine que les pauvres bateliers qui auront récupéré leurs embarcations – dans quel état ?- attendront pour obtenir satisfaction.
En marge de ce qui précède, René Gabriel nous donne à connaître le contenu d’un autre document très intéressant, une pétition – comportant une trentaine de signatures. Elle indique autant de noms de bateliers ou propriétaires qui naviguaient sur l’Ourte en cette fin d’Ancien régime.
Des bateliers d’Ourte en 1816.
Le 20 juillet 1816. Les bateliers de la rivière d’Ourte se plaignent du très mauvais état du chemin de halage depuis Douflamme jusqu’aux Vennes. Les noms des signataires sont, sauf erreur :
Jean François Fouat, F. Renard, J. Grégoire, G. Henry, Joseph Poncin, M. Honhon, J. le baux, G. Poncin, JM Gavage, JJ. Collignon, G. Lisent, J. Ignace Halleux, François Brinbois, Hubert Hanson, JP Gillard, Simon Grignet, Joseph petit Han, Philippe Bomal, Poncin, Martin Boumal, JF Laguesse, F Artus, Raskin Gillard, de Amoury, L Grignet, Joseph Josset, Hubert Leonard, W Montulet, François Minguet, Joseph Halleux et quelques autres …
Un immense merci pour tous ces documents et la masse d’informations qu’ils recèlent.
Ainsi que je l’ai fait pour la balade le long des bornes de Stavelot, je vais tenter, ici, de permettre à celles et à ceux qui n’avaient pu participer à la découverte du site de Raborive que proposait Eneo-Aywaille le 21 octobre dernier, de se déplacer virtuellement sur les lieux que j’ai alors présentés et commentés. Je vous souhaite une agréable promenade.
C’est tout d’abord l’industrie métallurgique qui vint d’abord troubler la quiétude des lieux au pied de l’impressionnante falaise sur laquelle se dressait encore fièrement Neufchâteau-sur-Amblève… Ainsi que vous le savez sans doute, il ne sera démoli qu’en 1587, sur ordre de Philippe II, le fils de Charles Quint.
Mais commençons par planter le décor ! Pour ce faire, il convient d’emblée de contredire les auteurs qui, dès le XIXe siècle, installèrent à Raborive un terrible combat, dont le nombre de victimes rougit les eaux de l’Amblève. Selon eux, les toponymes Martinrive et Raborive perpétuent le souvenir du cruel affrontement qui opposa les troupes de Charles Martel, duc d’Austrasie, à celle du duc de Frise dénommé tantôt Robo, tantôt Radbod. Force est de constater que, bien que les documents placent ce combat le long de l’Amblève et près d’un domaine royal, seul un apparent cousinage entre les patronymes des belligérants et les toponymes locaux a conduit ces auteurs à croire qu’ils avaient localisé le site de cet épisode sanglant.
La toponymie est une science difficile et ceux qui la pratiquent savent pertinemment qu’il convient de se méfier des interprétations hâtives et de ce qui pourrait apparaître comme une évidence… Etienne Compère dans son excellente « Toponymie d’Aywaille » nous explique que Martinrive s’est développée au confluent de l’Amblève et d’un ruisseau descendant de Rouvreux qui, à l’approche de la rivière, s’était scindé en plusieurs bras et avait créé un ilôt marécageux. « Maretain » (qui deviendra « Martin ») signifie « marais ». Et voilà la légende balayée…
L’Ourthe-Amblève connait, dès l’époque gallo-romaine, une exploitation du minerai de fer abondant dans son sous-sol. L’existence de bas fourneaux de cette époque a été démontrée à Dolembreux par André Neelissen et la présence de scories très anciennes a été attestée notamment à Deigné et à Quarreux.
L’exploitation du minerai connaîtra, chez nous, un net développement dès la fin du XIVe siècle, des forges sont en activité à Ferot en 1380. La métallurgie moderne aux origines wallonnes, rappelons-le, impose que soient associés fourneau et four d’affinage ; nous verrons par la suite que les sites de Ferot et de Raborive connurent de longues périodes d’histoire commune.
Le minerai est exploité dans toute la région à Aywaille, à Xhoris, à Comblain-au-Pont, à Ferrières… Cette réalité entraîne un net développement de l’activité métallurgique régionale durant la première moitié du XVIe siècle et les usines se créent à Harzé, aux Pouhons, à Hamoir, à Chevron, à Louveigné… Il est intéressant de remarquer que toutes ces installations réclamant la force motrice de l’eau s’installent le long de ruisseaux dont le cours est relativement aisé à réguler sans avoir recours aux importantes infrastructures que réclamerait la maîtrise du débit d’une rivière.
L’essentiel des productions de cette industrie locale est destiné à l’exportation. Ici encore, il convient de rappeler que, durant tout l’ancien régime, l’Ourthe-Amblève se trouve bien aux confins d’états différents (duché de Luxembourg, duché de Limbourg, Principauté de Liège et Principauté de Stavelot-Malmedy). Le tonlieu qui est perçu alors au pont des Arches à Liège, il s’agit de l’impôt qui frappe tout produit entrant en ville pour y être vendu, nous apprend que le fer soumis à la taxe a été acheminé par voie d’eau au départ de Bomal, de Comblain, de Hamoir et d’Aywaille.
Les archives mentionnent l’existence d’une forge et d’un marteau à Raborive en 1532. Il est possible que leur création soit quelque peu antérieure à cette date mais sans doute de très peu car il est déjà remarquable à cette date de constater pareille infrastructure sur une rive de l’Amblève. L’existence d’un bras naturel de la rivière à cet endroit explique en partie le choix du site ; en effet, cette particularité géographique ralentit sensiblement le débit de la rivière. Néanmoins, il est impossible de ne pas faire remarquer les caractéristiques géopolitiques de l’endroit. A Raborive se rencontrent les limites des duchés de Limbourg et de Luxembourg, celles de la Principauté de Stavelot-Malmedy mais également celles de diverses seigneuries ; ainsi, l’usine métallurgique est installée à la frontière entre les seigneuries de Harzé et d’Aywaille.
Si le bassin inférieur de l’Amblève compte 14 usines en 1570, le déclin de cette industrie sera quasiment aussi brutal que son développement. De 1590 à 1663, Raborive connaît une très longue période de chômage qui laisse l’usine en ruine dès 1645. Le site connaît alors un premier pojet de réaffection puisqu’il est alors question d’y installer une papeterie mais le projet avorte et c’est à Martinrive qu’une « papinerie » s’installera mue par un impressionnant moulin à quatre roues.
En 1663, le comte de Suys, alors seigneur de Harzé, accense le coup d’eau (donne l’autorisation d’utiliser la force motrice de l’eau, moyennant redevance) de Raborive à Jean le Gohelier afin qu’il puisse y construire une forge. Ce personnage n’est pas un inconnu dans l’histoire de la métallurgie régionale puisqu’il est également le propriétaire de l’usine de Ferot. Son projet industriel associe d’ailleurs les deux sites, Ferot produira la fonte au fourneau et Raborive l’affinera.
Un demi-siècle plus tard, c’est Philippe Hauzeur qui reprend les usines et Raborive a déjà besoin d’une remise en état. Quand Ferot délaissera la production de la fonte destinée à l’affinage au profit de la fonte de moulage, l’usine de Raborive est à nouveau abandonnée. Alors qu’elle n’est plus en état de fonctionner en 1752, elle reprend du service 10 ans plus tard quand, à Ferot, la production de fonte d’affinage est relancée.
En 1765, cinq ouvriers y produisent annuellement 20 000 livres de fer en barre. L’activité d’affinage se poursuivra sur le site jusqu’en 1819, l’usine est alors la propriété de la famille Ancion de Ville depuis 1780. Une description des lieux datée de 1820 nous apprend qu’il reste sur place, à l’état de ruine, un bâtiment de pierre au toit de chaume abritant toujours deux fours « à chauffer les masses » et un martinet ainsi que les deux roues hydrauliques de 12 pieds chacune qui fournissaient l’énergie motrice de l’usine.
A cette époque, Aywaille connaît toujours un autre site de production métallurgique, les forges et fourneau de Dieupart qui résistèrent quelque temps au déplacement de l’activité métallurgique vers le bassin liégeois grâce à la spécialisation de sa production. A Dieupart, on produit alors de la fonte moulée pour répondre aux besoins de l’armée, à ceux réclamés, d’une part, par le développement de l’éclairage au gaz et, d’autre part, par la mécanisation de l’industrie textile.
Ce sont aussi les spécificités géopolitiques des lieux qui, au XVIIIe siècle, attirèrent des industriels désireux de profiter de la convergence des frontières pour tenter de se soustraire à l’impôt. C’est la raison qui explique pourquoi Aywaille fut choisie, en 1704, par un échevin verviétois pour y proposer l’établissement d’une manufacture de draps qui, selon ses dires, aurait permis à la localité de se redresser économiquement après le terrible incendie qui l’avait anéantie en 1691. Pour lui permettre de développer son projet, il reçut l’assurance que son entreprise sera exemptée de tout impôt. Cependant ce projet tourna court très rapidement car, derrière les propos généreux du promoteur, se cachait sa volonté d’introduire sur le marché, en toute illégalité et sans payer la moindre taxe, une grande quantité de draps étrangers, en provenance du duché de Limbourg. La supercherie fut rapidement identifiée car cet homme sans scrupules s’était montré beaucoup trop impatient de profiter de ses malversations.
L’entreprise qui, indubitablement, sut le plus habilement mettre à profit le foisonnement des frontières en ces lieux qui nous occupent est celle qui vit le développement d’une verrerie presque en face de l’usine métallurgique de Raborive, sur l’autre rive de l’Amblève.
Cette verrerie utilisait d’ailleurs pour sa production de bouteilles, destinées à assurer le transport des eaux de Spa et de la source de Bru à Chevron, le laitier résultant des opérations métallurgiques de l’usine voisine. Cette entreprise est née du rapprochement des deux producteurs qui, jusqu’alors se disputaient ce juteux marché en pleine expansion : la famille Grandchamps, par ailleurs seigneur de Deigné, et la famille Penay, apparentée au curé de Sprimont, Nicolas-Henri Massin – futur Prince-abbé de Stavelot-Malmedy. De 1728 à 1754, ils donnèrent, sur ce site, du travail à 125 hommes chargés de la production et à 300 femmes occupées à l’emballage en osier tressé assurant un transport sans encombres aux flacons de verre. La seule présentation des lieux vous permettra de comprendre comment l’impôt fut très habilement éludé. Les fours avaient été installés en terres limbourgeoises, les entrepôts et magasins en terres luxembourgeoises alors que les quais de chargement étaient en terres stavelotaines !
Les verriers liégeois voyaient évidemment d’un très mauvais œil cette concurrence déloyale et leurs revendications légitimes poussèrent le Prince-évêque à frapper d’un important droit d’entrée les bouteilles produites sur la rive de l’Amblève ; ce qui provoqua très vite la délocalisation de l’usine, à Chênée, en terres liégeoises.
L’abandon du travail du fer à Raborive précéda de quelques années seulement l’avènement d’une nouvelle industrie locale : l’exploitation de la pierre. Et oui, notre pays carrier ne mérite cette appellation que depuis moins de deux siècles…
La première carrière ouverte chez nous est celle que créa le Comte de Berlaymont à Florzé, à quelques centaines de mètres à vol d’oiseau de Raborive. Cette carrière est particulière puisque le chantier d’extraction est séparé du chantier de taille par un long tunnel. A la fin du XIXe siècle, 200 ouvriers ouvriers s’activaient à la taille sur ce chantier, les pierres qu’ils façonnaient avaient été chargées sur des wagonnets qui, grâce à la pente naturelle du tunnel, voyageaient seuls. Ils étaient ensuite remontés grâce à la traction chevaline. Le système fut perfectionné par la suite par la création d’un chemin de fer privé.
L’extension de l’industrie extractive dans la zone Martinrive-Raborive-Florzé est consécutive à l’ouverture, en 1882, de la ligne de chemin de fer de l’Amblève qui permit l’ouverture de nouvelles carrières puisque le transport de leur production était désormais assuré. Les exploitations qui n’étaient pas aux abords immédiats de cette nouvelle et importante voie de communication s’en rapprochèrent par le développement d’un très dense réseau privé qui, de Florzé, desservaient plusieurs carrières avant de rejoindre la gare de Martinrive.
Le site de Raborive vit l’implantation d’une importante scierie de marbre et de petit-granit, raccordée elle aussi par voie ferrée à la gare de Martinrive. Un atelier de polissage de marbre compléta les installations et fournissaient du travail à 30 ouvrières. Le patron, Math. Van Groenendael, par ailleurs patron de la carrière d’Ogné, était un homme très riche puisqu’on affirme qu’il fut le premier à posséder une automobile dans la région. Manifestement, tout lui était bon pour gagner de l’argent ; en effet, nous savons qu’il appartenait à cette catégorie de patrons qui, à la fin du XIXe siècle, ne payait ses ouvriers non en argent officiel mais seulement avec des billets d’un franc qu’il avait fait imprimer à son nom et qui ne s’échangeaient que dans certains magasins… L’histoire retient cette façon de procéder en parlant de paiement en monnaie de singe.
A l’origine, les blocs de pierre brute étaient débités par un fil hélicoïdal (un câble en forme d’hélice) ; dans les scieries, ces blocs étaient ensuite coupés en tranches sous des armatures à lames d’acier (constamment arrosées d’eau et de sable) qui travaillaient 24 heures sur 24. Elles permettaient de couper une profondeur de 10 cm en 24 heures. L’introduction des lames diamantées ou au carbure de tungstène multiplia par 48 la vitesse de coupe : 20 cm/heure.
Un terrible éboulement survenu le 26 mai 1954 et qui coûta la vie à 9 ouvriers travaillant à la paroi rocheuse sonna définitivement le glas de la carrière de Florzé.
L’exploitation de la scierie de Raborive se poursuivit jusqu’il y a seulement quelques années, elle fut successivement exploitée par les sociétés « Carrières De Mont & van den Wildenberg» et «Carrière de Vinalmont ».
Le site, entièrement nettoyé aujourd’hui, se prépare à vivre le développement d’une nouvelle activité économique destinée à devenir une nouvelle tradition locale. C’est, en effet, à Raborive qu’est annoncée la prochaine installation de la brasserie Elfique.
BIBLIOGRAPHIE
BOVY J., Promenades historiques dans le Pays de Liège, Liège, Collardin, 1838
COMPERE E., Toponymie d’Aywaille, Aywaille, E. Compère éditeur, 1997
HANSOTTE G., La métallurgie dans les bassins de l’Amblève et e l’Ourthe stavelotaine et limbourgeoise, 1393-1846, Malmedy, Famille et Terroir, 1968
HENNEN G., Etablissement d’une manufacture de draps à Aywaille en 1704, in Bull. de la Soc. Verv. d’Arch. et d’Hist. Tome XII, Verviers 1912
HENRY R., Hier en Ourthe-Amblève, T. 1 Réalités et Mystères, Bressoux, Dricot, 1991
HENRY R., Hier en Ourthe-Amblève, T. 2 Mythes et Destinées, Bressoux, Dricot, 1994
HENRY R., Vertiges du Passé – Nos châteaux, Bressoux, Dricot, 2013
LAMBERCY Ch., HENRY R., RELAVISSE F., Aywaille 500, Stavelot, Chauveheid, 1982
PIMPURNIAUX J., Guide du voyageur en Ardenne, Bruxelles, A. Decq, 1852
RAHIR E., Promenades dans les vallées de l’Amblève et de l’Ourthe, Bruxelles, J. Lebègue, 1899
THIRY L., Histoire de l’ancienne seigneurie et commune d’Aywaille, Liège, L. Gothier, 1937-1941
REMERCIEMENTS
À François Vitoux pour les nombreuses illustrations fournies
La Petite Gazette du 27 décembre 2007
Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, est enchantée de découvrir, semaine après semaine, l’étendue de vos connaissances ; elle a donc décidé de faire appel à votre sagacité.
« Je me suis mise à écrire un texte qui fait appel à des termes du patois, dont j’indique la traduction française entre parenthèses. Je bute actuellement contre le mot « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans mon entourage. Il s’agit d’une petite charrette basse et triangulaire, à trois roues, celle de devant étant plus petite, à courtes ridelles, à laquelle s’attelait un cheval. Les hommes, je crois, s’en servait pour transporter leurs outils aux champs et en ramener, par exemple, les sacs de pommes de terre. J’espère m’être bien expliquée, j’espère être comprise de l’un ou l’autre lecteur à qui, d’avance, je dis merci. »
A vous de jouer et d’étonner encore cette lectrice.
La Petite Gazette du 9 janvier 2008
Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, avait décidé de faire appel à votre sagacité pour obtenir la traduction française d’un terme wallon « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans son entourage.
Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo, s’est penché dans ses vieux dictionnaires et nous livre le fruit de ses recherches : « Je ne trouve aucune mention de ce mot dans le dictionnaire de Jean Haust, par contre le dictionnaire de L Remacle édité en 1823 reprend :
Galio : s.m. Efourceau, machine composée d’un essieu, deux roues et un timon pour transporter des fardeaux très pesants.
Le dictionnaire de la langue française par E. Littré, tome II, année 1876 donne la définition suivante :
Efourceau : s.m. Nom d’une voiture à deux roues qui sert à conduire de pesants fardeaux, tels que les troncs d’arbres, de grosses poutres, etc.
Etym. : ce mot paraît formé du latin « furca » fourche : chariot à fourche. »
Un immense merci pour cette recherche précise. D’autres développements très prochainement.
La Petite Gazette du 16 janvier 2008
Madame Stéphanie Demazy, de Waillet, avait décidé de faire appel à votre sagacité pour obtenir la traduction française d’un terme wallon « gaillo » que personne n’arrive à traduire en français dans son entourage. La semaine dernière, je vous livrais l’analyse faite par M. Gabriel, de Roanne-Coo ; d’autres me sont parvenues et elles sont également intéressantes :
Mme Marcel David-Lacasse, de Manhay, s’est plongée dans les dictionnaires et voici ce qu’elle a trouvé :
« Dans le dictionnaire de Hesbaye d’Eugène Dethier, édition 1994, je lis :
Galiot : sorte de banneau (petit chariot aux roues antérieures amovibles pouvant être remplacées, en hiver, par un traîneau)
Gaillotte : grosse brouette utilisée en Champagne. »
Mme Godinas-Borsu,de Lorcé, m’écrit pour signaler que, selon elle, « ce mot wallon est mal orthographié, il s’agit plutôt d’un ‘galiot’. Le dictionnaire de Jean Haust en donne la définition suivante : ‘terme rural, petit chariot bas sur roues, pour les travaux des champs’ Il s’agit donc, tout simplement, d’un chariot. D’après ce dictionnaire, ‘galiot’ signifie aussi haquet de brasseur et, en terme de houillère, un petit wagonnet employé dans les voies intermédiaires. Dans notre région, poursuit ma correspondante, je n’ai jamais entendu ce terme de ‘galiot’. Chez nous, on dirait tout simplement ‘on tchårê’. Le dictionnaire de Jean Haust est très explicite, je doute fort que Mme Demazy trouve d’autres formules. »
Monsieur Jean Grosdent, de Hotton, puise aux mêmes sources : « petit chariot pour les travaux des champs ou haquet (camion) de brasseur ». Il ajoute que « ce mot est dérivé de l’ancien français ‘galie’ qui était une galère. »
Merci à ces dames et à ce monsieur pour les recherches menées.
La Petite Gazette du 23 janvier 2008
Comme beaucoup d’autres, M. Louis Daems, d’Ougrée, s’est passionné par cette question linguistique.« Cette lectrice désire connaître la signification du mot « gaillo ». En wallon liégeois (Jean Haust), il s’agit du mot « galiot » et « gariot » dans la région de Durbuy. Il s’agit d’un terme rural qui désigne un petit chariot bas, souvent à trois roues, pour les travaux des champs (J. Haust). La Petite Gazette du 1er avril 2005 a publié une illustration de ce type de véhicule, communiquée par M. Dethier, de Méan. » (N.D.L.R. La voici)
M. J. Polet, de Sprimont, a cherché lui aussi et, outre ce qu’en dit Jean Haust il nous apprend que « Dans les années 1935, lors de la première invasion de notre région par des cultivateurs du plat pays, j’ai vu un «galiot » au travail. A la description faire par Mme Demazy, j’ajouterai que la petite roue située à l’avant pivotait sous le chariot, actionnée par un court timon auquel le cheval était attaché par un palonnier simple (« on cope »dans notre wallon de Sprimont, pour découvrir d’autres noms de ce palonnier simple, voir J. Haust p. 163 : coplê, copê, coplî, couplî). Le chariot que j’ai vu ne possédait pas de « mécanike », système de freins à patins de bois dur, ou une manivelle à vis sans fin, rabattait simultanément sur les roues arrières.Dans un pays accidenté comme le nôtre, cet engin n’était pas commode à utiliser. Avant d’entamer une descente, le charron devait stopper son cheval et bloquer ses roues arrières au moyen d’une perche passée entre les rayons ; le cheval tirant dans la descente.L’éfourceau dont parle M. R. Gabriel dans l’édition du 9 janvier dernier est un « trikebale » (voir J. Haust, page 676).Pour M. Georges, de Bomal, « le gallio » est une petite charrette à trois roues, avec ridelles sur les côtés, une petite roue devant (semblable à une roue de brouette) et un crochet d’attelage pour transporter des charges légères (les semences, les pommes…)
Pour M. Jacob, d’Ambly, il s’agit tout simplement d’un tombereau.
Monsieur Guy Miny, d’Aywaille, renvoie à l’excellent dictionnaire de M. Simon Stasse, d’Aywaille lui aussi. Voici ce qu’on peut y lire:
GALIOT : 1. Haquet, charrette étroite pour le transport des tonneaux ; syn. Tchèrète di brèsseû (ou al bîre). 2. Efourceau, fardier, petit chariot bas sur roues pour le transport de lourdes charges. 3. wagonnet employé dans les voies intermédiaires.
M. Jean Dolne, de Sendrone, s’est également fendu d’une intéressante recherche :
« J’ai vu les premiers éléments de réponse parus ce 9 janvier.
Le « Dictionnaire pratique du wallon liégeois » de Jules Lempereur et Jacques Morayns, reprend le galiot avec comme seule précision « haquet, camion ». Mais ce n’est ni un haquet (véhicule à deux roues pour transporter des charges lourdes, des tonneaux), ni un camion (véhicule bas à deux ou quatre roues).
En faisant la même confusion, le dictionnaire Remacle a envoyé M. Gabriel sur une fausse piste. La définition de l’éfourceau montre bien que ce n’est pas ce que nous cherchons. Le « gaillo » décrit par Mme Demazy a trois roues, l’éfourceau en a deux. Il y en a plusieurs définitions de l’éfourceau sur Google, je vous donne celle de l’Académie.
ÉFOURCEAU : n. m. XVIIIe siècle. Issu de la forme masculine de l’ancien français forcelle, « clavicule », qui remonte au latin furcilla, « petite fourche ».
Chariot composé de deux roues, d’un essieu et d’un timon, utilisé pour le transport des grumes, des poutres, etc.
Une recherche plus poussée sur l’éfourceau m’a permis de trouver une illustration dans un ouvrage qui apparaît sur Internet, Elfinspell: Late 19th Century Modes of Transportation In France Taken from The Dictionary of P. Larousse
C’est donc bien une espèce de triqueballe, dont les roues sont reliées par un essieu droit, celles du triqueballe sont fixées sur une sorte d’arceau qui augmente la distance sol-support,
ou de diable.
J’ai trouvé – en cherchant dans la traction chevaline – le « beignot » utilisé en France, dans le Nord: ce serait bien un engin semblable à ce que nous cherchons … mais cela ne résout pas la question, car je n’en trouve que deux occurrences en cherchant avec Google. (Le diable et le beignot sont visibles sur http://metiers.free.fr/ac/c003_d.html). Qui trouvera ? … si c’est trouvable? »
Un tout grand merci pour cette belle recherche.
La Petite Gazette du 6 février 2008
Monsieur Roger Dorval, d’Emptinne, a rassemblé ses souvenirs :« Natif d’un petit village agricole à l’époque…, j’ai souvent entendu ce terme de « gaillo » qui désignait un petit chariot à deux ou quatre roues (le plus souvent), utilisé pour le transport de quantité ou volume peu important : des strains (paille), des canadas (pommes de terre), des pils (pulpe de betterave et ses feuilles)… attelé d’une seule bête. Le transport de matériaux plus lourds se faisait aussi à l’aide d’on bègnon (tombereau) qui, lui, avait deux roues et pouvait souvent basculer pour aider au déchargement del terroul (charbon), des sauvion (sable), encine (fumier)…Au contraire, le grand chariot était on tchôr pour le transport des grandes masses : moissons, pétrâles (betteraves)… beaucoup plus lourdes et attelé, souvent, de plusieurs bêtes. Il était fabriqué par on tcherron (charron) et entretenu par le tchorli qui était aussi le menuisier du village (châssis, cercueil, escaliers…) »Un immense merci pour cette précieuse collaboration. Merci également pour les recherches faites par Mme Jacqueline Wilmet-Mottet, de Marchin, et M Léon Franchimont, d’Esneux.Monsieur Jean De Tender revient sur ce sujet qui, décidément, aura passionné tous les amateurs de vocabulaire, tant wallon que français. Mon correspondant vous propose de découvrir ce petit passage de l’œuvre de Victor Hugo qu’il extrait de Les misérables, livre IV chapitre premier : « Rien n’est plus ordinaire qu’un tombereau ou une charrette à la porte d’une auberge. Cependant le véhicule ou, pour mieux dire, le fragment de véhicule qui encombrait la rue devant la gargote du Sergent de Waterloo, un soir du printemps de 1818, eût certainement attiré par sa masse l’attention d’un peintre qui eût passé là.C’était l’avant-train d’un de ces fardiers, usités dans les pays de forêts, et qui servent à charrier des madriers et des troncs d’arbres. Cet avant-train se composait d’un massif essieu de fer à pivot où s’emboîtait un lourd timon, et que supportaient deux roues démesurées. Tout cet ensemble était trapu, écrasant et difforme. On eût dit l’affût d’un canon géant. Les ornières avaient donné aux roues, aux jantes, aux moyeux, à l’essieu et au timon, une couche de vase, hideux badigeonnage jaunâtre assez semblable à celui dont on orne volontiers les cathédrales. Le bois disparaissait sous la boue et le fer sous la rouille. Sous l’essieu pendait en draperie une grosse chaîne digne de Goliath forçat. Cette chaîne faisait songer, non aux poutres qu’elle avait fonction de transporter, mais aux mastodontes et aux mammons qu’elle eût pu atteler ; elle avait un air de bagne, mais de bagne cyclopéen et surhumain, et elle semblait détachée de quelque monstre. Homère y eût lié Polyphème et Shakespeare Caliban
(…)
Le centre de la chaîne pendait sous l’essieu assez près de terre, et sur la courbure, comme sur la corde d’une balançoire, étaient assises et groupées, ce soir-là, dans un entrelacement exquis, deux petites filles, l’une d’environ deux ans et demi, l’autre de dix-huit mois, la plus petite dans les bras de la plus grande. Un mouchoir savamment noué les empêchait de tomber. Une mère avait vu cette effroyable chaîne, et avait dit : « Tiens ! voilà un joujou pour mes enfants.»Et Monsieur de Tender de commenter cet extrait :« A mon avis, ce qu’a vu Victor devant l’auberge de Thénardier est bien un éfourceau. Pour que deux fillettes, même si l’aînée n’a que deux ans et demi, puissent se balancer en dessous de l’essieu, il faut bien que celui-ci soit cintré vers le haut, même si les roues sont démesurées aux yeux du grand homme. Celui-ci semblait donc connaître la bonne mesure qu’auraient du avoir ces roues, mais ignorant le nom à donner à cette apparition, il a recours à la bible et à la mythologie pour enrichir sa description. Que n’avait-il la « Petite Gazette » à sa disposition ! Osons croire que, dans un âge plus avancé il aura pris connaissance du dictionnaire de l’académie. »
Mme Stéphanie Demazy, de Waillet, qui est à l’origine de cet engouement pour cette petite charrette tient à remercier tout qui lui a apporté des informations et elle profite de l’occasion pour me livrer celles-ci :« Ma nièce, Jeanine Saint-Viteux, a découvert, dans une vieille encyclopédie, le terme « gaillote » qui en Champagne, serait « une brouette pour charger le raisin. » Mon fils, Patrice, sur un site wallon, a découvert pas mal de synonymes à ce gaillot :galiot, galiyot, garlot, gariot, siglisse, tchèrèt di brèsseu qui serait on piti tchèrèt avou dè ptitè rowes. Mon frère, Jean-Marie¸ décidément la famille s’investit, se réjouit ma correspondante, m’adresse la reproduction d’une photographie, que je vous propose de découvrir ci-dessous, que sa femme a découverte dans ses archives et sur laquelle figure cette petite charrette (à laquelle, faute de mémoire, je ne voyais que trois roues). L’âge du garçonnet nous indique que cette photo daterait des années 1942 ou 1943. »
La semaine prochaine nous partirons à la découverte d’autres souvenirs et d’une autre photographie de cette petite charrette.
La Petite Gazette du 13 février 2008
Extraordinaire l’engouement suscité par ce mot…
Monsieur M. Godfrind, de Xhoris, nous donne à connaître cette photographie que lui a prêtée M. Jules Bastin, de Sougné-Remouchamps.
« Cette photo correspond bien à la description que donnait M. Georges, de Bomal : « le gallio est une petite charrette à trois roues, avec ridelles sur les côtés, une petite roue devant (semblable à une roue de brouette) et un crochet d’attelage pour transporter des charges légères (les semences, les pommes…). Cette petite charrette est aussi appelée « clitchet » »
Merci pour ces précisions et merci également à Mme Marie-Thérèse Damoiseau pour sa communication.
La Petite Gazette du 20 février 2008
Quand vous vous passionnez pour une recherche, c’est vraiment tout bénéfice pour tous les lecteurs…
Voici la très intéressante contribution de Mme Madeleine Jamotton-Collin, de Somme-Leuze que je remercie très chaleureusement pour la clarté de ses explications.
« Cette semaine (N.D.L.R. Voir l’édition du 23 janvier dernier) la photo parue est celle d’un gros tombereau ou bègnon. Il avait de grandes roues à l’arrière et une petite roue devant sous un petit timon triangulaire sur lequel on pouvait s’asseoir et auquel on attelait les chevaux. Dans les petites fermes où il n’y avait qu’un cheval, la roue avant était remplacée par des brancards (crustale en wallon), dans lesquels on faisait reculer le cheval pour l’atteler.
Ces gros tombereaux servaient à conduire le fumier dans les champs, ramener les betteraves ou les pommes de terre. Ils étaient pourvus de freins à patins que l’on actionnait avec une mécanike placée à portée de main à l’avant du véhicule.
On pouvait également relever le devant de la caisse et la faire basculer, ce qui permettait de la vider plus facilement soit progressivement pour tirer le fumier, la caisse étant alors attachée à l’avant avec une chaîne et allongée au fur et à mesure ; soit d’un coup pour verser les betteraves ou les pommes de terre. On disait alors : taper li bègnon à cou.
Voici la photographie d’un galiot, beaucoup plus bas et plus léger et qui servait à conduire des charges plus légères : sacs de semences, piquets de clôture etc. Ils étaient beaucoup plus maniables qu’un les gros tombereaux et avaient aussi une petite roue pivotante à l’avant.
Cette photo a été prise en 1938 et, dans le galiot, il y a ma grand-mère, mon père, ma mère, ma petite sœur, un cousin et moi. A l’avant, on distingue bien la manivelle qui servait à freiner, la mécanike. »
Après avoir fait des recherches dans les dictionnaires, ma correspondante se demande s’il n’y a pas un lien sémantique entre « galiot » et « galiote » petite galère à voiles rondes dont se servaient les Hollandais pour pêcher. Appelée aussi « caboteur », petit navire côtier employé pour de petites distances entre deux ports d’une même mer par exemple. Mme Jamotton a relevé la similitude d’emploi : « un petit véhicule pour transporter de petites charges, à faible distance » Qu’en pensez-vous ?
Monsieur Damoiseau, de Jambes, m’adresse un courrier plein d’humour, jugez plutôt : « en Namurois qui se respectent, nous arrivons sûrement les derniers… Qu’à cela ne tienne ! Les lumçons, les caracoles ni vont nin vite ! Do momin qu’i z’arrivaient ! »
Il revient ensuite sur le lien déjà fait entre galiot et éfourceau en précisant que ce petit chariot à trois roues utilisé pour les travaux des champs tire son nom du latin furcilla, petite fourche.
Force est de s’interroger sur l’éventualité d’interprétations différentes données à ce chariot d’une région à l’autre…
La Petite Gazette du 16 novembre 2011
Monsieur Jean-Luc Fourneau, d’Ohey, rappelle un projet d’établissement de ligne vicinale puis fait appel à vous, à votre connaissance de la région, pour recenser les vestiges de cette entreprise avortée.
« Il y a 100 ans maintenant, il a existé un projet qui prenait forme et qui visait à l’installation d’une ligne de tram passant à Somme-Leuze. Le projet a été abandonné à cause de la Première Guerre Mondiale. Cependant, il en reste des vestiges mais il faut connaitre la région pour les localiser et les découvrir. Serait-il possible de rassembler, grâce à La Petite Gazette, les localisations de ces vestiges et toutes les informations disponibles sur ce projet ?
Un grand merci à tout qui pourra contribuer à l’inventaire des renseignements et traces de ce projet. »
La Petite Gazette du 14 décembre 2011
Monsieur Michel Prégaldien, de Beaufays, pour répondre à M. Jean-Luc Fourneau, d’Ohey, m’a fait parvenir une passionnante étude sur ce projet de ligne vicinale qui devait passer par Somme-Leuze.
« Il faut d’abord rappeler brièvement que dans cette région, aux confins des provinces de Liège, de Namur et du Luxembourg, la première ligne créée par la S.N.C.V. reliait Melreux à La Roche et que le tronçon entre la gare de Melreux et Hotton fut ouvert au trafic dès le 9 octobre 1886.
Le 20 janvier 1890, c’est une ligne de 25,3 Km entre le Val Saint-Lambert et Clavier qui est mise en service, suivie, le 1er octobre 1894 par la section Clavier – Ouffet et d’une relation qui aboutira à Comblain-au-Pont deux ans plus tard.
Autorail du service voyageur manoeuvrant en gare de Clavier qui aurait pu devenir un nœud vicinal important…
Un échange de courrier, daté de septembre 1902, entre la S.N.C.V. et le Gouverneur de la Province de Liège, évoque l’utilité d’établir une jonction entre ces différentes lignes grâce à une liaison Clavier – Melreux, passant par Somme-Leuze.
Le 15 mars 1903, c’est la section Marloie-Marche, d’une ligne en provenance de Bastogne, qui est livrée à l’exploitation. Dès lors, le projet qui nous intéresse est complété par l’adjonction d’un embranchement vers Marche.
Afin de mieux comprendre la situation, voici ci-dessous, une carte de la région où figurent : en trait plein, les lignes vicinales à écartement métrique effectivement construites ;en trait interrompu, les lignes en projet dont question dans mon intervention.
Le 22 juin de la même année, le Gouvernement accorde la prise en considération provisoire du projet de la ligne Clavier – Melreux avec embranchement vers Marche.
Le capital nécessaire à la construction, répertorié sous le numéro 192, s’élève à un montant de 2.800.000 francs, pour une longueur de ligne de 46,5 Km. Initialement, l’embranchement vers Marche devait se détacher de la ligne principale à Noiseux, mais les communes intéressées préconisèrent plutôt une jonction située à Somme-Leuze. C’est donc ce dernier tracé, plus long de 2 kilomètres, qui est adopté pour un capital évalué à 3.056.000 francs. » A suivre…
La Petite Gazette du 21 décembre 2011
LE TRAM DEVAIT PASSER A SOMME-LEUZE…
Monsieur Michel Prégaldien, de Beaufays, pour répondre à M. Jean-Luc Fourneau, d’Ohey, m’a fait parvenir une passionnante étude sur ce projet de ligne vicinale qui devait passer par Somme-Leuze, je vous propose d’en découvrir la suite :
« En 1907, la S.N.C.V. rédige un mémoire descriptif dont je vous livre un extrait décrivant le parcours suivi :
« La ligne, projetée à l’écartement de 1m. entre rails, prendra son origine à la station de Clavier, empruntera la voie de la ligne de Clavier à Comblain-au-Pont jusqu’à proximité de la station de Petit-Brin et se dirigera ensuite vers Bois-Borsu en empruntant d’abord un accotement de la route de Liège à Marche, puis en s’établissant sur le siège spécial pour passer au nord de Borsu ; elle suivra en élargissement la route de Bois à Borsu, desservira l’agglomération de Borsu et d’Odet et se développera sur siège spécial pour passer entre les villages de Maffe et de Méan et atteindra la route de Havelange au Gros-Chêne, vers la 28e borne kilométrique. Après avoir traversé cette route, la ligne se dirigera (toujours en partie indépendante) vers Somme-Leuze où elle traversera la route de Liège à Marche ; elle atteindra la route de Barvaux près du moulin de Petite-Somme, et la longera ou l’empruntera jusqu’à proximité de Petit-Han ; elle longera cette agglomération sur siège spécial et reprendra ensuite la route de Barvaux près de la bifurcation de cette route avec celle de Laroche ; elle la suivra jusque Montenville où elle s’en détachera pour franchir la vallée, puis l’Ourthe sur un pont à construire en amont de Deulin ; elle passera à Fronville et Monville (tantôt en empruntant la route de Melreux, tantôt sur siège spécial) et atteindra la station vicinale de Melreux de la ligne Melreux à Laroche.
L’embranchement se détachera de la ligne principale à Somme-Leuze, se développera sur siège spécial en passant à proximité de Moressée et Heure où il empruntera la route de Feschaux à Barvaux jusqu’à proximité de Baillonville.
Il se dirigera ensuite vers Rabosée puis rejoindra la route de Marche à Liège, non loin de la 14e borne kilométrique. Il s’établira ensuite sur cette route jusqu’à Marche et aboutira à la station vicinale (ligne de Marche – Bastogne – Martelange). »
L’autorail-tracteur (ART. 155) destiné à la remarque des convois de marchandises. (En arrière-plan, vestiges du pignon du dépôt vicinal de Clavier, ravagé par un incendie en 1952)
Par l’arrêté royal du 4 novembre 1913, les vicinaux reçoivent la concession de la ligne et les travaux sont entamés entre 1916 et 1917. Les terrassements et les maçonneries des ouvrages d’art sont exécutés sur les sections Petit-Brin à Maffe, Somme-Leuze à Baillonville et Petit-Han à Deulin.
La construction est ensuite interrompue et, après la guerre, la S.N.C.V. ayant pour mission prioritaire de restaurer ses installations et ses voies démontées par l’occupant, ne pourra plus se préoccuper d’établir de nouvelles lignes.
En 1932, le projet est relancé mais, à cause du renchérissement des coûts liés à la construction, la S.N.C.V. propose de se limiter, en premier lieu, à l’achèvement des travaux entamés sur les sections Clavier – Maffe et Baillonville – Marche. Le capital complémentaire à ces réalisations se monte alors à 6.758.000 francs. L’Etat et la commune de Bois-Borsu refusant la souscription de leur quote-part à l’augmentation de capital, les vicinaux abandonnent leur projet.
Comme les lignes du Condroz étaient isolées du reste du réseau vicinal,le transfert de matériel se faisait par la route. Un autorail est ici chargé sur une remorque routière appartenant à la S.N.C.V.
En août 1941, Monsieur Renard, Bourgmestre de Lavacherie, appuyé par la Conférence des Bourgmestre du Grand Liège, entreprend des démarches en vue de la reprise du projet dans le but d’assurer, en ces temps de guerre, le ravitaillement de l’agglomération liégeoise en pommes de terre en provenance du Luxembourg. Cette intervention restera, elle aussi, infructueuse.
Après la Seconde Guerre Mondiale, le service des Ponts et Chaussées avait aménagé une zone portuaire entre le Val Saint-Lambert et Ivoz.
En 1952, afin de rentabiliser au mieux ces équipements, le port Autonome de Liège projette de construire une voie de raccordement entre ce port et la ligne vicinale aboutissant au Val Saint-Lambert. Il préconise également l’achèvement de la jonction Clavier-Marche afin de pouvoir acheminer les marchandises depuis le Luxembourg et les transférer à la voie d’eau à Ivoz. Malheureusement, cette initiative est trop tardive. Le transport routier est en pleine expansion alors que les lignes vicinales sont en déclin et sont fermées les unes après les autres. Le trafic sur les lignes Val Saint-Lambert – Clavier et Marche – Bastogne cessera définitivement avant la fin des années cinquante. »
Un tout grand merci pour cette passionnante et si précise enquête.
Un chercheur britannique, Mr John Smith, fait appel à vos souvenirs et à vos documents pour compléter une recherche qu’il mène sur cette société d’autobus de Forrières.
Avec MM. Alain Canneel et David Ullens, deux fidèles de La Petite Gazette, Mr John Smith a dressé un historique succinct de cette société:
« La gare de Forrières fut ouverte en 1858. A la même époque, les communes d’Ambly et de Nassogne furent reliées à Forrières par une malle-poste, exploitée par la famille Pellegrin, propriétaire de l’hôtel du même nom face de la gare de Forrières.
Au début de 1923, un service régulier d’autobus Forrières – Ambly-Nassogne fut confié par la commune à Maurice Burnay, originaire de Fauvilliers. Ce service, une des premières lignes d’autobus en Belgique, remplaça la malle-poste. Maurice Burnay épousa Anna Pellegrin, avec qui il prit plus tard la gestion de l’Hôtel Pellegrin. Il commença aussi un service d’autobus Forrières–Jemelle et d’autres lignes plus tard pour le compte de la SNCB.
Cette photo de l’arrêt de l’autobus à Nassogne date approximativement de 1925.
En 1934, Maurice Burnay et ses frères ont gagné une grosse somme à la Loterie coloniale. Maurice a utilisé sa part pour acheter son premier autocar. Deux hangars pour autobus et autocars furent construits à droite de l‘Hôtel Pellegrin.
A l’exode de 1940, Maurice, sa femme et leur fille unique, Marie-Thérèse, ont fui avec au moins un des bus vers un village près de Montpellier, y exploitant même une ligne locale. Pendant leur séjour en France, Marie-Thérèse rencontra un Français, André Combes et l’épousa. Lors leur retour en Belgique, après la libération, André seconda son beau-père Maurice dans son entreprise, puis lui succéda.
Forrières – place de la gare – vers 1960
La firme conserva la dénomination Burnay-Combes jusqu’à sa reprise en 1991 par la s.a. Lambert-Bozet de Neufchâteau (Groupe Penning). Cette dernière a toujours un dépôt à On, y exploitant des services liés par contrat à la TEC. »
Pour compléter et illustrer son travail, Mr John Smith est à la recherche de photographies des autobus et autocars de cette firme durant la période 1930 – 1970. Pourrez-vous l’aider ? D’ores et déjà, ce correspondant britannique vous remercie de votre précieuse contribution à sa recherche.
Voici le document transmis par M. J. Paquet (voir commentaire ci-dessous)
La parution de cet appel aux lecteurs dans l’édition « papier » de La Petite Gazette du 17 août 2016 a attiré l’attention de Monsieur Luc Gabriel. Ce lecteur me permet de vous proposer de découvrir les documents ci-dessous:
En effet, m’écrit-il :« Je connais cette société car mon père en a été le gérant durant de nombreuses années, j’espère que ces documents pourront enrichir quelque peu les recherches de Mr Smith et, si jamais je fais d’autres trouvailles, je vous les ferai parvenir.
Monsieur Maurice Trembloy, de Hargimont, a eu l’extrême gentillesse d’extraire de son incroyable collection de cartes postales de Nassogne, les deux intéressants documents que je puis vous présenter aujourd’hui.
En outre, mon correspondant nous communique cette information :
« J‘ai connu quatre chauffeurs des bus BURNAY, dans les années 1960.
Il s’agit d’André Combe, de nationalité française, de Charles Dermience (décédé), de Florent Bouchat (décédé), de Joseph Gabriel (décédé) et de François Hardenne
Monsieur Maurice Trembloy m’a également raconté cette anecdote qu’il tient de son beau-père, qui fut sabotier.
« Au lendemain de la guerre, quand un bus Burnay ramenait au village un prisonnier de guerre qui rentrait via la gare de Forrières, le chauffeur indiquait la présence du soldat dans son bus en accrochant un drapeau aux couleurs nationales à son pare-choc.
Un habitant du village grimpait dans le clocher de l’église pour appréhender le plus rapidement possible l’arrivée du bus et de son passager tant attendu. Dès qu’il apercevait le drapeau, il faisait alors résonner les cloches de l’église afin que la population se rassemble pour accueillir l’enfant du pays qui rentrait après sa longue captivité. »
Un grand merci à M. Trembloy pour ses précieuses informations et ses intéressants documents.
La Petite Gazette du 4 mai 2011
LA LIGNE VICINALE QUI N’A PAS EXISTE … ENTRE CHENEE ET SPRIMONT
Monsieur Michel Prégaldien, de Beaufays, me communique une très intéressante étude sur une ligne vicinale qui n’a pas vu le jour et qui devait relier Chênée à Sprimont.
«Rappelons, m’écrit-il, que la Société Nationale des Chemins de fer Vicinaux (S.N.C.V.) a été fondée en 1885 et que sa mission était de désenclaver certaines contrées non encore desservies par le « grand » chemin de fer (qui deviendra la S.N.C.B. en 1926). En province de Liège, la première exploitation concerne une liaison de 9 kilomètres entre Poulseur et Damré Sprimont.
Bien que la plupart des voies vicinales étaient établies à écartement métrique, on préféra pour cette ligne l’écartement normal (1,435 mètre) des grands réseaux. Ce choix fut dicté par la possibilité de transporter les produits pondéreux provenant des carrières, sans devoir procéder à un coûteux transbordement en gare de Poulseur.
La ligne fut ouverte au trafic des marchandises en décembre 1887, en traction vapeur. Elle fut ultérieurement prolongée vers Trooz via Louveigné. Dès 1888, à l’instigation de la commune de Beaufays, la S.N.C.V. établit un projet d’une ligne à voie métrique reliant Chênée à Sprimont, là aussi en faisant usage du seul mode de traction de l’époque : la vapeur.
Le 30 novembre de cette même année, les vicinaux obtiennent du Gouvernement la prise en considération du projet, permettant la poursuite des études. Un tracé est arrêté. Il doit débuter au pont sur la Vesdre à Chênée, traverser le quartier de la station, puis la ligne devait s’élever en rampe douce vers Embourg. Le tracé se serait développé en contrebas de la grand-route pour aboutir à hauteur de l’actuel collège du Sartay, où une boucle aurait ramené la ligne vers le centre de la localité afin de longer la route nationale en direction du fort d’Embourg.
Après avoir contourné celui-ci par l’est, c’est à travers les prairies situées dans le bas de l’actuel quartier des Grands Champs que la ligne se serait progressivement hissée sur le plateau, pour rejoindre la route principale, en face des nouveaux bâtiments de la zone de police récemment inaugurés. La ligne aurait alors traversé Beaufays en suivant les voiries, puis à hauteur de l’autoroute, l’itinéraire se serait incurvé vers l’Ouest afin de desservir, aussi près que possible, le centre du village de Dolembreux. La grand-route aurait été rejointe au carrefour de la Heid des Chênes et suivie sur environ un kilomètre et demi. Afin d’éviter la pente trop raide du Thier du Hornay, le tracé aurait bifurqué pour gagner Noidré et s’établir sur le coteau surplombant le vallon du Tultay. Par une ultime boucle, la ligne aurait rejoint, à hauteur de Damré, celle venant de Poulseur, déjà en exploitation. »
Nous retrouverons, la semaine prochaine, cette remarquable présentation de cette ligne vicinale qui n’a pas vu le jour…
Cependant, grâce à une précieuse information de M. Prégaldien, je puis vous préciser que les fameuses publications du G.T.F. que nous avons évoquées dernièrement dans les colonnes de La Petite Gazette et entièrement consacrées aux « Tramways du Pays de Liège » sont toujours disponibles au Musée des Transports, rue Richard Heintz à Liège. Pour les passionnés du sujet, ces ouvrages sont absolument incontournables pour leur précision et la richesse de leurs illustrations.
La Petite Gazette du 11 mai 2011
LA LIGNE VICINALE QUI N’A PAS EXISTE … ENTRE CHENEE ET SPRIMONT
Retrouvons la passionnante étude que Monsieur Michel Prégaldien, de Beaufays, a consacrée à cette ligne vicinale qui n’a pas vu le jour et qui devait relier Chênée à Sprimont.
“Les conseils communaux de Gomzé-Andoumont et de Sprimont n’ayant pas pris de décision favorable, le dossier est resté bloqué durant plusieurs années.
En 1905, un autre projet voit le jour. Il émane de M. A. Jamme, de Liège, qui propose un tramway électrique d’un développement de 28 Km prenant son départ à Liège (Longdoz) pour rallier Aywaille via Sprimont. La S.N.C.V. s’insurge contre ce dessein qui, finalement, ne donnera lieu à aucune concrétisation.
En 1908, la S.N.C.V. revoit sa copie et propose, cette fois, la réalisation d’une ligne à voie normale et à traction électrique. Elle rédige un mémoire descriptif et estime le capital nécessaire à 1.660.000 francs.
Le choix de la voie normale était dicté par la possibilité de jonction à Sprimont avec la ligne Poulseur-Sprimont-Trooz et, à Chênée, avec le tramway de la société Est-Ouest (E.O) relaiant Chênée (Grands Prés) à la Place St-Lambert par le centre de Grivegnée, la Bonne Femme et le quartier d’Outremeuse.
Une convention est même établie entre ma S.N.C.V. et l’E.O. de telle façon que les convois en provenance de Sprimont puissent emprunter, à partir de Chênée, les voies de cette dernière société, moyennant compensation financière, afin de rejoindre le centre ville.”
La Petite Gazette du 18 mai 2011
LA LIGNE VICINALE QUI N’A PAS EXISTE … ENTRE CHENEE ET SPRIMONT
« Ce projet fit l’objet d’une prise en considération définitive le 9 juin 1908 mais, ensuite, se heurte de nouveau à la réticence de certaines communes traversées. Chênée voudrait être tête de ligne et, tout comme Embourg, elle réclame l’organisation d’un trafic marchandise. La S.N.C.V. estime que, dans ce cas, les installations électriques devraient être renforcées et cela pour un faible rendement à espérer. Le projet est de nouveau à l’arrêt. »
Monsieur Prégaldien, qui a mené ses fructueuses recherches dans les archives provinciales, sait combien vous appréciez les articles illustrés aussi vous propose-t-il de découvrir cett photographie, prise devant le dépôt vicinal de Poulseur, montrant une locomotive à vapeur à voie normale ayant desservi la ligne de Sprimont. Il précise utilement que, si le projet de 1908 avait été réalisé, on aurait peut-être pu apercevoir ce type d’engin en service marchandise entre Chênée et Sprimont.
« C’est alors qu’éclate la première Guerre Mondiale, poursuit mon correspondant.
Après les années d’occupation, le réseau de la S.N.C.V. se trouvait très délabré et la société s’occupa, en priorité, de le restaurer. Elle ne pouvait plus, à ce moment se soucier de construire de nouvelles relations.
Dans l’entrefaite, une initiative privée due à Monsieur Robert Huyttens de Terbecq permit de créer un service de transport de voyageurs et de petites messageries par autobus entre Liège et Sprimont.C’est ainsi que naquit, le 6 septembre 1919, la « Compagnie Liégeoise d’Autobus » dont le siège se trouvait rue de Fragnée à Liège.
Il faut signaler que Monsieur Huyttens de Terbecq avait été échevin de la commune d’Embourg entre 1912 et 1914 et que, à ce titre, il avait été impliqué dans le projet d’établissement du vicinal Chênée – Sprimont, en participant à plusieurs réunions préparatoires.
Par arrêté royal du 26 novembre 1921, la compagnie obtient la concession de la ligne d’autobus pour une durée de 20 ans. Il s’agit d’une des toutes premières exploitations par autobus en province de Liège.
Le 14 juin 1922, la société anonyme « Compagnie des Autobus liégeois », que nous connaissons encore de nos jours, se substitue à la société coopérative précédente en reprenant ses activités.
Le 5 novembre 1928, une réunion entre des représentants de la S.N.C.V. et des différentes communes se tient au palais provincial afin de relancer le projet. On y débat de l’opportunité de réaliser une ligne vicinale de 22 Km entre Chênée-Sprimont et Remouchamps, pour un capital estimé à 18 millions de francs ou de créer un service d’autobus sur le même parcours pour un capital de 700.000 francs. Trois communes donnent une préférence marquée au tram électrique, les autres se rallient à l’idée d’un service d’autobus. Au vu des chiffres précédents, la différence d’investissement plaide pour l’autobus et la S.N.C.V. rédige un mémoire descriptif en ce sens, en février 1929.
C’est ainsi qu’après 40 ans d’atermoiements, le projet de voie ferrée est définitivement enterré. En mars 1929, les autobus Liégeois introduisent une demande en vue de prolonger leur ligne Liège-Sprimont jusqu’à Remouchamps. Le service débute peu après avec l’assentiment des communes traversées. L’autorisation officielle sera accordée par l’A.R. du 20 janvier 1931.
Comme la ligne d’autobus envisagée par la S.N.C.V. double totalement celle déjà desservie par la compagnie des Autobus Liégeois, le projet ne peut être pris en considération par le Ministère des Transports et la liaison Liège-Remouchamps restera l’apanage de cette dernière société, à titre de ligne privée jusqu’au 3 février 1949 puis en tant que fermier de la S.N.C.V. mais arrêtons-nous là car la suite relève davantage de l’historique des autobus liégeois. »
Monsieur Félix Brahy, d’Embourg, vététiste passionné s’interroge et, dans la foulée, vous interroge : « C’est très intéressant cette page d’histoire pour les passionnés que nous sommes ; cependant sauf documents d’époque, et tout le respect pour votre correspondant M Prégaldien : le tracé décrit ne serait pas faisable après +/- Sauheid vers le Sartay, la déclivité du ruisseau (- la Lèche) est trop importante pour les moyens de l’époque. Ce serait l’actuelle très fréquentée rue Pierre Henvard, et ligne d’autobus N°30 ; jadis desservie par un trolleybus, car seule le moteur électrique pouvait gravir de telles côtes [vers Cointe, vers Burenville ou le Thier-à-Liège. Mais où je veux en venir, et avec mon VTT sur le terrain : démarrons au pied du Rocher du Bout du Monde, admirons la frayère, suivez le chemin communal , dépassez un pavillon d’été : le sentier en pente douce, devenu propriété privée, présente une assise parfaite avec courbes et contre-courbe sur 1.300 m environ, pour aboutir à hauteur « du Tank » , au pied du fort d’Embourg… et contourner celui-ci par l’ouest en amont de la ferme de l’Angle et les Sept Collines.
Question : pour qui et à quoi servaient ces courbes ? Cela aurait-il pu être le tracé du tram vicinal à vapeur ?
La Petite Gazette du 10 mars 2010
AU SUJET DES EDITIONS BICHEROUX A ESNEUX ET DE LA BATELLERIE
Monsieur Philippe Hamoir, d’Esneux, est un passionné du passé de sa commune et il aime à partager largement ses connaissances. Il a mené une enquête minutieuse à propos des Editions Bicheroux. Il vous en livre les résultats en les illustrant de documents vraiment exceptionnels par leur qualité et leur rareté. Je l’en remercie tout spécialement.
« Aucune de mes listes de noms sur Esneux (matrice du plan Popp, liste électorale de 1907…) ne comporte le nom de Bicheroux, ce qui peut s’expliquer s’ils (ou semble-t-il, elles) n’étaient pas propriétaires ou, tout simplement, n’avaient pas droit de vote en tant que femmes.
Cependant je me suis entretemps souvenu des éléments que je décris brièvement ci-après et que j’ai exploités lors de l’exposition sur la batellerie que j’avais organisée en octobre 2008 à Hony, dans le cadre de Wallonie Week-end Bienvenue.
Manifestement les Soeurs Bicheroux ont tenu à Esneux un commerce de papeterie à la fin du 19e et probablement tout début du 20e siècle. En témoignent les nombreuses cartes postales éditées à leur nom (Bicheroux à Esneux, Editeur Bicheroux à Esneux ou Edit. Bicheroux Soeurs à Esneux), toutes antérieures à 1905, date jusqu’à laquelle le dos des cartes était exclusivement réservé pour y indiquer l’adresse du destinataire.
Cette carte postale éditée à leur nom (Editeur Bicheroux à Esneux) représente le sommet du vieux Thier et la place de l’église; on y distingue le sommet de la fontaine à trois vasques en pierre, initialement édifiée face à l’ancien hôtel Cobus. Or, pour permettre l’aménagement de la place, cette belle fontaine a été supprimée en 1890 en même temps que la suppression de la « basse » (mare) se trouvant devant l’ancien hôtel des Familles (administration communale actuelle). On pourrait donc en conclure que l’éditeur Bicheroux existait déjà avant cette date. Evidemment, tient à préciser mon correspondant, cette carte pourrait avoir été rééditée au début du 20e siècle, même si le cliché date d’avant 1890. Car pourquoi aurait-on précisé « ancienne église », et pas « église » tout court? Probablement la nouvelle était-elle déjà construite (1901), ou en cours de construction (1899-1900), ou l’ancienne en cours de démolition (avril 1899).
En illustration de leur commerce de papeterie et d’imprimerie, je joins la note d’envoi des Etablissements Gordinne & Fils à Liège, relative à des fournitures de rames de papier et de buvard qui leur sont destinées. Cette expédition date du 9 juin 1899 et a été effectuée par la Barque de l’Ourthe, nom donné au hernà Cornélie du batelier Joseph Pahaut de Tilff.
Joseph Pahaut assurait un service de messagerie entre Liège (quai de l’Université) et Douxflamme à Comblain. Il avait d’ailleurs fait imprimer par les Soeurs Bicheroux un feuillet réclame (photo ci-jointe) mentionnant les horaires et les lieux desservis.
A partir de fin 1899, Joseph Pahaut assure cette messagerie avec son nouveau hernà, La Maria, construit en métal par les Etablissements Jabon & Frères à Ombret, et toujours surnommé La Barque de L’Ourthe. Ci-joint une très belle photo du Maria accosté à Douxflamme.
Ces documents m’ont été communiqués par la fille du batelier Joseph Pahaut, que je remercie encore de conserver ces témoignages historiques. » A ces remerciements, j’ajoute les miens, ces documents sont vraiment exceptionnels.
La Petite Gazette du 2 avril 2014
LES MIGNOLES ET LES HERNAS DE L’OURTHE…
Monsieur J-P Gailliez est l’heureux propriétaire d’un bateau qui a navigué sur l’Ourthe et son canal. Aujourd’hui, ce bateau, entièrement restauré et en ordre de navigation, propose des chambres d’hôtes. Il est actuellement amarré au port de Seneffe et porte le nom d’Amélie.
Son heureux propriétaire nous en donne des nouvelles :
« Voici quelques nouvelles de mes recherches concernant la mignole restaurée après plus de 10 années de travail acharné. Dans l’espoir de découvrir l’histoire du bateau, je me suis mis à la recherche de toute piste susceptible de retrouver ses origines. Construit au chantier Jabon à Ombret en 1917, il a d’abord porté le nom d’ HUBERT.
J’ai retrouvé une partie des archives du chantier auprès de l’IHOES (Institut d’histoire ouvrière, économique et sociale) à Seraing. Quelle chance : le listing des bateaux construits pendant la guerre y est présent. La Mignole HUBERT y a été construite simultanément à la mignole ANTOINETTE sur commande de Monsieur Hubert Maréchal, de Méry.
Quelques semaines plus tard, j’ai trouvé chez Delcampe une carte postale représentant un concert sous le pont d’Esneux organisé à bord de deux mignoles amarrées l’une à l’autre. Le pont d’Esneux est situé à proximité immédiate de Méry… Les deux bateaux ressemblent fortement à l’AMELIE ex HUBERT. Ce serait incroyable que ce soient précisément les 2 bateaux construits pour Maréchal en 1917. »
N.D.L.R. Ici, il est intéressant d’apporter directement la réponse à cette question. J’en laisse le soin à M. Philippe Hamoir, de l’asbl « Le vieil Esneux » :
« Quant à la carte postale représentant un orchestre jouant sur l’Ourthe, sur deux hernàs jumelés, je pense qu’il s’agit probablement de deux pontons (sans roof central), alors que le Hubert et l’Antoinette devaient certainement comporter de base un tel roof. Et que c’étaient des bateaux en bois de bateliers locaux, Esneux et Hony étaient également des fiefs de bateliers à l’époque. A proximité immédiate de ce lieu sont d’ailleurs visibles sur certaines cartes et photos des hernàs ou pontons en cale sèche. »
Monsieur Gailliez poursuit : « Il est étonnant que ce Monsieur Hubert Maréchal ait décidé d’investir en pleine occupation allemande dans la construction non pas d’une, mais de deux mignoles ! Cela m’interpelle… Quel était son projet ? Assurer le passage de l’Ourthe et / ou de la Meuse suite à la destruction de nombreux ponts pendant l’offensive allemande ?
J’ai repris la lecture du livre de DALEM et NELISSEN, 1000 ans de navigation sur l’Ourthe, j’étais arrivé à la page 169… et quel hasard !! page 171, les auteurs y font mention d’un herna dénommé ANTOINETTE et d’un remorqueur qui appartenait à M. van Bossuyt Maréchal de Méry ! »
Et Philippe Hamoir de répondre avec la précision qu’on lui connaît :
« Concernant Hubert Maréchal, qui a fait construire ces deux hernàs, voici les renseignements que j’ai glanés:
Maréchal Hubert Georges, né à Tilff, le 3 novembre 1861, fils de Eugène Maurice et de Gilman Marie-Jeanne Félicie. Il exerce la profession de maître batelier et habitait à Méry, avenue d’Esneux n° 55. Il a épousé à Esneux, le 3 décembre 1898, Halleux Marie Antoinette, née à Esneux le 22 avril 1863. Ils ont eu une fille Nelly Marie Joséphine, née à Tilff le 27 octobre 1901. Cette dernière a épousé le 2 mai 1922 à Tilff, Van Bossuyt Richard Henri, né à Pepinghem (Brabant) le 4 février 1896. Il exerçait la profession d’instituteur et habitait à Méry, rue de l’église, n° 2. Mais Richard Van Bossuyt a préféré reprendre et poursuivre la profession de son beau-père. Il a d’ailleurs été le dernier batelier sur l’Ourthe, jusqu’à 1950.
Les noms des bateaux reflètent bien les prénoms du couple Maréchal et de leur fille Nelly.
Il est probable qu’Hubert Maréchal a lui-même poursuivi l’activité de son beau-père, Eugène Maurice Gilman, dont c’est vraisemblablement le père, Lambert Joseph, qui est répertorié comme batelier dans la matrice du plan Popp de Tilff, dressé avant 1866. Ces Gilman disposaient des parcelles, dont la parcelle 160b sur laquelle a été construite la grange batelière comportant une ancre gravée sur la clef de voûte datée 1879 (dont je joins la photo). Je devrais néanmoins vérifier ces dernières suppositions. »
Aborder pareil sujet dans La Petite Gazette est toujours un régal car il permet de se remémorer une réalité régionale absolument passionnante et dont les vestiges, toujours bien visibles le long de l’Ourthe et du canal de l’Ourthe, méritent d’être mieux connus encore pour être bien protégés.
La Petite Gazette du 16 avril 2014
UNE PRECISION SUR LES DERNIERS BATELIERS DE L’OURTHE
Notre récent article sur le sujet a suscité commentaires, questions et réflexions parmi ceux que le sujet passionne. Merci pour les précisions apportées par Mme Anne-Marie Halleux et MM. Paul Natalis et Philippe Hamoir.
La question qui s’est posée concerne le prénom du dernier batelier de l’Ourthe, à savoir un certain Van Bossuyt. Philippe Hamoir nous a parlé de Richard (il m’a entretemps signalé qu’il avait répondu un peu vite…). Monsieur Natalis, lecteur très attentif de la Petite Gazette, lui a fait remarquer que cela ne correspond pas au prénom que lui donne son ami et poète wallon Marcel Bouchat dans un poème lui dédié et intitulé « Li bat’lî » avec en-tête « A m’ camarâde René Van Bossuyt, li dièrin bat’lî d’ Oûte ».
René est en fait le fils de Richard Van Bossuyt.
Madame Halleux apporte les précisions suivantes : « Richard Van Bossuyt est décédé en 1942 et est enterré au cimetière de Tilff (av. Laboulle) dans un caveau familial.
Ce même Richard Van Bossuyt avait épousé Nelly Maréchal et ils ont eu deux enfants : René et Lucy. Quand Richard est mort, René avait 15 ans, ce sont sa maman et sa soeur qui ont repris l’exploitation de la péniche. Puis, à l’âge de 17 ans, c’est René qui a pris la relève seul. Le bateau appartenait avant à un certain Monsieur Hubert Maréchal.
Pour information, René est né le 11/07/1927 et est décédé le 04/11/2007. »
C’est donc René, le fils de Richard Van Bossuyt, qui a poursuivi l’exploitation de son père Richard, décédé en 1942. Il n’avait que 23 ans lorsqu’il en arrêta définitivement l’exploitation.
La Petite Gazette du 30 avril 2014
SUR LE CANAL DE L’OURTHE
Monsieur Jean-Pierre Beaufays, pour donner bonne suite aux récentes communications sur les bateaux ayant circulé sur l’Ourthe, me fait parvenir cette très belle photographie :
PHOTO DU HERNA
« Cette photo a été prise à l’écluse de la Mâle Eau à Tilff le 03-11-1935, on y reconnaît mon oncle René Beaufays (environ 1910-1980) prenant la pose sur une de ces embarcations. Autant qu’on puisse en juger, le barreur devait être musclé.
D’après l’ouvrage de Robert Dalem et André Nelissen, Mille de navigation sur l’Ourthe et ses affluents, pages 167 et suivantes, les historiens ne s’entendent pas sur l’appellation de ces barques. Mignolle, ponton ou herna.
Ce dernier terme m’étonne car, autant que je me rappelle, on désignait sous ce nom les filets de tenderie utilisés jadis pour capturer les petits oiseaux. Rien à voir donc avec la batellerie. »
Sur le même sujet encore, Monsieur Luc Nollomont, secrétaire-trésorier du cercle d’Histoire et d’Archéologie SEGNIA, rappelle que le Hors-série n°6 de ce cercle (publié en juin 2012) présente un article de B. Marnette qui devrait intéresser les passionnés de l’histoire de l’Ourthe, notamment en ce qui concerne le batelier Van Bossuyt.