LES TRANSPORTS EXCEPTIONNELS DE BOIS JADIS

La Petite Gazette du 1er novembre 2017

MAIS COMMENT FAISAIT-IL ?

C’est à l’obligeance de Monsieur René Jacobs, de Harzé, que je dois la chance de pouvoir vous présenter cet exceptionnel document d’un transport qui me semble hors du commun, mais dites-moi si je me trompe…

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A la vue de cette photo, je me pose bien des questions et j’espère de tout cœur que vous pourrez y répondre :

–  Combien peut peser cet énorme tronc ?

– Quel est l’avantage d’un tel attelage de trois chevaux en ligne (on devine l’arrière-train du cheval de tête à l’extrême gauche du cliché) ? Est-ce lié à la maniabilité de l’ensemble ou cela donne-t-il un force de traction plus importante ?

– Surtout, j’aimerais beaucoup que l’on m’explique de quelle manière pareil tronc pouvait être hissé sur un char et comment il était déchargé à la scierie ? Je suis vraiment très intrigué et me demande quels engins de levage étaient utilisés… Comme j’imagine qu’il fallait aller chercher ce tronc dans le bois, peut-être qu’une installation particulière, un talus artificiel par exemple, était aménagée pour le chargement à l’aide de palans et de treuils ; mais comment faisait-on pour ne pas arracher les roues arrières au passage ?

Les lecteurs attentifs auront sans doute reconnu les lieux où cette photo a été prise il y a plus d’un siècle… Nous sommes là sur la place d’Aywaille, face à la maison Lambercy, à quelques pas du carrefour avec la route de Bastogne.

Je compte sur vos connaissances et votre légendaire sagacité pour m’éclairer. Bien entendu, j’accueillerai avec grand plaisir toutes vos photos et documents sur ce sujet. C’est avec énormément d’impatience et d’intérêt que j’attends vos réactions et réponses.

La Petite Gazette du 22 novembre 2017

REVOICI CE « TRANSPORT EXCEPTIONNEL » D’IL Y A PLUS D’UN SIECLE

La magnifique photographie que m’avait confiée M. René Jacobs, de Harzé, et que vous avez découverte il y a peu de temps dans la Petite Gazette, a conduit Monsieur Michel Bartholomé, d’Aywaille, à extraire de sa belle collection de documents cet autre cliché remarquable.

A première vue, il s’agit du même transport exceptionnel,  ici photographié devant la maison du bûcheron et débardeur Lagasse.

Aywaille - Lagasse - attelage avec gros arbre rue François Cornesse face à la rue de lYser (1)

M. Jean-Marie Tavier, le conservateur du très intéressant Musée de Xhoris, apporte quelques éléments de réponse aux questions que je vous posais en vous présentant la première photo de cet impressionnant transport.

« Un cheval de trait développe en continu une puissance de 8 à 10 cv Din. Trois chevaux attelés donnent une puissance cumulée de 24 à 30 cv, à peine supérieure à celle d’une Citroën 2cv4 à 2cv6 ! Donc rien de trop pour un tel attelage. »

Et vous, pourrez-vous m’éclairer sur les autres interrogations que ces magnifiques clichés m’ont inspirées ?

– Combien peut peser cet énorme tronc ?

– Quel est l’avantage d’un tel attelage de trois chevaux en ligne? Est-ce lié à la maniabilité de l’ensemble ou cela donne-t-il une force de traction plus importante ?

– Surtout, j’aimerais beaucoup que l’on m’explique de quelle manière pareil tronc pouvait être hissé sur un char et comment il était déchargé à la scierie ? Je suis vraiment très intrigué et me demande quels engins de levage étaient utilisés… Comme j’imagine qu’il fallait aller chercher ce tronc dans le bois, peut-être qu’une installation particulière, un talus artificiel par exemple, était aménagée pour le chargement à l’aide de palans et de treuils ; mais comment faisait-on pour ne pas arracher les roues arrières au passage ?

La Petite Gazette du 6 décembre 2017

LES TRANSPORTS EXCEPTIONNELS DE BOIS

Encore une fois, vous vous êtes montrés simplement extraordinaires. La très belle photo présentée il y a quinze jours dans la Petite Gazette et les questions que je formulais à son propos vous ont manifestement encouragés à chercher les réponses à mes interrogations. D’emblée, je tiens à remercier chaleureusement Messieurs Barthélemy Carpentier, de Sougné-Remouchamps, Germain, de Fraiture, Philippe Grégoire, de Harzé, le Dr Paul Maquet, d’Aywaille, et Warlomont, de Rouvreux, pour leurs explications, documents et photographies.

Pour charger pareil tronc (celui de la photo parue le 23 novembre dernier avait un volume de 12m3 et un poids d’environ 12 tonnes) sur une charrette, voici comment on procédait : la charrette est positionnée parallèlement à la grume, entre les deux sont placées deux fortes pièces de bois destinées à servir de rampe pour hisser le tronc sur la charrette. Celle-ci avait été débarrassée de ses roues du côté du tronc à charger et ses essieux reposaient alors sur des « dames« , des chambrières ou béquilles de charrette. Le tronc était alors tiré grâce à un ingénieux dispositif de chaînes (voir le croquis de M. Warlomont) par un ou plusieurs chevaux selon sa taille. Ce système est une variante du débardage « al roule » dans lequel, le tronc à faire rouler est attaché par une chaîne dont la fixation se fait du côté opposé à celui où s’exerce la traction du cheval.

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Dessin réalisé par M. Warlomont

Monsieur Warlomont m’a également confié ces photographies qui montrent que cette technique de chargement était toujours adoptée même lorsque fut abandonnée la traction hippomobile au profit de l’utilisation des camions.

Ce tronc, lui aussi particulièrement imposant, 12 m3,  a été amené le long de la route à Goffontaine, en septembre 1942. La remorque sur laquelle il va être hissé se trouve derrière lui et on distingue, sous le tronc, les pièces de bois sur lesquelles le tronc va bientôt rouler.

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La semaine prochaine, je vous montrerai cette grume sur le camion que conduisait alors Emile Wuidar. Nous évoquerons également par le dessin et la photographie, une autre façon de transporter pareil tronc d’arbre, essentiellement pour les sortir du bois. Ce sera alors le « trikbale »  qui sera mis à l’honneur mais le sujet nous occupera encore quelque temps car vos témoignages et vos documents méritent vraiment que l’on s’y attarde.

La Petite Gazette du 13 décembre 2017

COMME PROMIS

Voici cet arbre remarquable, un tronc de près de 12m3, dont nous avons assisté la semaine dernière au chargement en septembre 1942. Sur cette photo, confiée par M. Warlomont, vous reconnaîtrez peut-être l’homme à droite. Il s’agit d’Albert Warlomont, le papa de mon correspondant, et, à côté de la cabine du camion, Emile Wuidar. Vous pouvez évidemment me parler de camion, de ce transport et de ces hommes…

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La Petite Gazette du 13 décembre 2017

RETROUVONS NOS TRANSPORTS EXCEPTIONNELS D’IL Y A UN SIECLE

Monsieur Gérard, de Fontin, m’a fait découvrir « Le manuel du bon charretier » de Lucien Brasse-Brossard aux éditions La maison Rustique, 1945 ; où je lis ceci au sujet du triqueballe : « C’est une sorte de voiture à flèche servant au transport des grumes. Il se compose d’une limonière et d’un train de grandes roues (diamètre 1,50 à 2m.) réunies par un essieu qui supporte une courte poutre transversale en orme appelée mouton, sur laquelle prend une flèche longitudinale en frêne. La grume est cerclée d’une chaîne appelée cravate, placée au voisinage du centre de gravité. En renversant la flèche, on accroche les extrémités de la cravate sur une des faces du mouton. En ramenant la flèche en avant, la chaîne d’amarrage fait un quart de tour autour du mouton et celui-ci se trouvant alors au-dessus de l’essieu, la grume est soulevée suffisamment au-dessus du sol pour pouvoir être transportée sans traîner. 

Pour pouvoir manier des grumes plus volumineuses, on emploie aussi des triqueballes à essieu coudé. Certains modèles possèdent un treuil vertical à vis carrée qui permet de soulever des grumes plus lourdes que ne le permettrait la manœuvre de la flèche. Enfin, ils sont parfois munis de freins, bien que le triqueballe soit surtout un véhicule de terrain plat puisque son bon fonctionnement est fonction de l’équilibre de la grume.»

Monsieur Raymond Gillet nous a fait parvenir ses réflexions, diverses illustrations (dont celle de cet impressionnant triqueballe) et le fruit de ses recherches sur ce passionnant sujet.

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« Noter  la branche située sur le dessus de l’arbre (entre les deux essieux) c’est la perche qui a servi à « tordre » la chaîne qui solidarise la « grume » à la longe du chariot, une deuxième chaîne est située juste avant l’essieu arrière. (Voir les éditions des 1er et 22/11/17.

Le chargement de cet arbre sur le chariot a peut-être été réalisé avec un trépied et un palan ?  Une fois l’arbre soulevé, le débardeur a fait reculer le chariot entre les branches du trépied deux ou trois fois, suivant la hauteur du trépied pour assurer un équilibre et un centrage de la charge.

Pour ce qui est de l’attelage «  en ligne », le débardeur connaissant ses chevaux les a placés suivant leur âge, leur force et leur « docilité », mais également suivant le contexte d’accessibilité du lieu d’abattage de cet arbre.

L’attelage a certainement rejoint une scierie locale, comme il en existait dans certains villages.  Il y en avait deux dans mon village d’Ardennes, dans les années cinquante (1950).Et pour le déchargement, les scieries étaient équipées de monorail avec palan. Certaines dont la scierie Jadot située à Anthisnes, possédait un monorail et au sol un système de rail Decauville avec wagonnet. Le tracé des rails ceinturait le dépôt de grumes. Après chargement  d’une grume sur le wagonnet le scieur ou son aide faisait rentrer le wagonnet à l’intérieur du site de sciage  comme me le précise Monsieur Jadot fils. L’arbre de la photographie de M. Jacobs n’est pas rentré directement dans la scierie, il a été amputé d’une partie principale importante, côté « souche » au moins 1,50m. me semble-t-il, voir plus si l’arbre était « malade ».

Les bancs de sciage « anciens » acceptaient des grumes d’un diamètre maximal de 1,20 mètre, me précise Monsieur Jadot, peut-être 1,40mètre après modification et réglage maximal.

Mais que n’a-t-on pas réalisé avec cet arbre s’il était sain ? Il est peut-être resté deux jours voir plus dans la scierie à être débité en : doses pour le chauffage des chaumières du village, billes pour la S.N.C.V ou la S.N.C.B, chevrons de charpentes, poutres pour maisons, divers profils pour menuisiers et ; oh mon dieu………des planches pour cercueil ; mais également son écorce qui a été récupérée pour diverses applications d’époque. »

D’autres communications nous permettront d’encore compléter ce sujet prochainement. Merci de continuer à alimenter votre Petite Gazette en souvenirs, photographies et questions à soumettre aux lecteurs. Rendez-vous la semaine prochaine ou de suite sur www.lapetitegazette.net

La Petite Gazette du 21 mars 2018

LE TRANSPORT DE GRUMES, CONVOIS EXCEPTIONNELS DE JADIS

Les photos et témoignages relatifs à ces convois exceptionnels de la première moitié du siècle passé vous ont particulièrement intéressés et, j’en suis persuadé, l’enquête menée par Monsieur Raymond Gillet vous passionnera tout autant. Durant les semaines à venir, vous découvrirez, étape après étape, les manutentions auxquelles tantôt les transporteurs, ici les frères Delgombe de Comblain-au-Pont, tantôt le personnel de la scierie Jadot à Anthisnes devaient appliquer à ces pesants troncs avant qu’ils ne soient débités. Pour une clarté maximale dans l’explication de toutes ces manœuvres, Monsieur Gillet a eu l’excellente idée non seulement de questionner des spécialistes mais aussi de dénicher les photographies illustrant leurs propos.

Le premier document qu’il nous propose nous montre l’arrivée de la grume au dépôt de la scierie Jadot à Anthisnes.

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Monsieur Gillet rapporte les propos de M. André Jadot qui commente cette photographie :

« Voyez les chaînes pour assurer l’arrimage de la grume sur le chariot ; de nouveau le levier «coudé» destiné à «tordre» la chaîne. Ce même levier est maintenu par une plus petite chaîne pour éviter qu’il ne retrouve sa position initiale.

Ce chariot est un des deux chariots des frères Delgombe, de Comblain-au-Pont. Ils travaillent avec deux chariots de ce type (2 chevaux côte à côte séparés par le timon du chariot). Pour gravir les côtes importantes les 2 chevaux du second chariot étaient placés « à la volée » en tête des deux autres chevaux. Ce fut le cas pour le transport de l’arbre de cette photo, me précise Monsieur André Jadot, pour gravir la côte de Vien à Anthisnes. »

La Petite Gazette du 28 mars 2018

APRES LE TRANSPORT DE GRUMES, LE SCIAGE DE CES TRONCS ENORMES

Grâce à l’enquête menée par Monsieur Raymond Gillet vous vous passionnerez, j’en suis persuadé, pour l’étape  qu’abordaient ensuite les grumes transportées : leur sciage.  Acheminé jusqu’à la scierie, ces troncs n’étaient évidemment pas au bout des nombreuses manutentions auxquelles tantôt les transporteurs, tantôt le personnel, ici celui de la scierie Jadot à Anthisnes, étaient encore tenus de satisfaire avant que ces pesants troncs ne soient débités. Pour une clarté maximale dans l’explication de toutes ces manœuvres, Monsieur Gillet a eu l’excellente idée non seulement de questionner des spécialistes mais aussi de dénicher les photographies illustrant leurs propos.

Nous avons assisté la semaine dernière à l’arrivée du tronc à la scierie. Après avoir été « paré », c’est-à-dire qu’il a été amputé de sa partie pointue, à sa base, le tronc est placé, grâce à un système de transbordement fait de câbles et d’un pylône, sur un wagonnet et est alors près à entrer dans l’enceinte même de la scierie

Le document quel nous propose Monsieur Gillet nous montre Monsieur André Jadot en position pour entamer le sciage, le tronçonnage de la grume avec une scie alternative spéciale. Ce cliché date des environs de 1945.

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Dans notre prochaine édition, Monsieur Gillet nous détaillera, grâce aux précieuses explications recueillies auprès de M. André Jadot, les particularités et le fonctionnement de cette étonnante scie. D’ici là, si, vous aussi, vous possédez des informations, des documents, des photographies sur ces scieries de jadis où tout n’était pas encore mécanisé, voire automatisé, n’hésitez surtout pas à les partager avec les lecteurs de La Petite Gazette, très friands de ce genre de découverte. Je compte sur vous et vous remercie chaleureusement de m’adresser vos communications.

La Petite Gazette du 4 avril 2018

APRES LE TRANSPORT DE GRUMES, LE SCIAGE DE CES TRONCS ENORMES

Nous retrouvons la passionnante enquête menée par Monsieur Raymond Gillet qui a suivi les grumes transportées jusqu’à la scierie. Etape après étape, il nous détaille, grâce aux informations précises qu’il a recueillies auprès des professionnels, les nombreuses manutentions auxquelles tantôt les transporteurs, tantôt le personnel, ici celui de la scierie Jadot à Anthisnes, étaient encore tenus de satisfaire avant que ces pesants troncs ne soient débités. Pour une clarté maximale dans l’explication de toutes ces manœuvres, Monsieur Gillet a eu l’excellente idée non seulement de questionner des spécialistes mais aussi de dénicher les photographies illustrant leurs propos.

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Monsieur Gillet détaille des différents éléments de cette scie spéciale alternative en condition de travail.

« A droite de la photo, contre le morceau de tronc écorcé, la grosse pièce cylindrique est le moteur électrique de commande. Juste à sa gauche, ensemble d’engrenages (2 + 2) assurant une réduction importante de la vitesse de rotation du moteur qui, grâce à ce mécanisme, passe de 1500 tours/minute à 110 tours/minute.

L’ouvrier a la main gauche sur le commutateur marche/arrêt du moteur de la scie. Simultanément, en réalisant cette opération, l’ouvrier maintient la scie afin que celle-ci s’engage dans l’arbre pour en commencer le sciage.

A hauteur de l’épaule droite de l’ouvrier, vous distinguerez aisément le levier d’accrochage de la grume contre le châssis.

Ce châssis fait immanquablement penser à une brouette avec ses deux bras et ses deux pieds, visibles à gauche du cliché. Il est ainsi plus aisé à déplacer et à manœuvrer. Il repose sur un train de roues (diamètre 52 cm.) indispensables pour le déplacement de l’unité de sciage. Le long du longeron du châssis, à hauteur des mains de l’ouvrier, vous distinguerez le levier utilisé pour modifier la position de l’axe du train de roues mais aussi pour assurer la stabilisation de la scie grâce à son appui sur la roue de stabilisation (diamètre 41 cm.). C’est cette pièce métallique, vue de profil et reposant sur des cales de bois, que l’on aperçoit à l’extrémité droite du châssis de la scie. »

Et vous, avez-vous assisté au sciage de pareilles grumes ? Nous en parlerez-vous ? Nous montrerez-vous des photographies de ces scieries d’hier ? D’avance, je vous remercie de nous confier vos souvenirs et, ainsi, de leur permettre d’éviter de sombrer dans l’oubli.

La Petite Gazette du 11 avril 2018

LE TRANSPORT DE GRUMES, CONVOIS EXCEPTIONNELS DE JADIS

Les photos et témoignages relatifs à ces convois exceptionnels de la première moitié du siècle passé vous ont particulièrement intéressés tout comme, j’en suis persuadé, l’enquête menée par Monsieur Raymond Gillet et dont vous venez de découvrir les résultats durant ces dernières semaines. Je remercie encore mon aimable correspondant pour la clarté de ses explications et l’adéquation de ses illustrations.

Aujourd’hui, dernière étape de notre visite guidée de la scierie Jadot d’Anthisnes au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale.

 

001 (5)« Sur le dépôt de grumes de la scierie, tout un mécanisme ingénieux était en place pour permettre de déplacer le plus aisément possible et avec la sécurité requise ces énormes troncs qui allaient être débités. Cette vue permet de bien se représenter comment cela pouvait alors se passer.

Un imposant pilier ou pylône (1A) se dressait du côté de la scierie, un second, non visible sur ce cliché (1B) lui faisait à l’extrémité du chantier. Sur les câbles tendus entre ces pylônes circulait le trolley (2) qui assurait la prise en charge des grumes à déplacer.

Au sol, vous découvrez, au pied du personnage fixé sur la pellicule, les rails du « Décauville » (N.D.L.R. du nom de ce constructeur français de matériel ferroviaire et de manutention qui inventa et développa ce système de transport modulable de lourdes charges grâce à un système fait d’une voie formée d’éléments (rails et traverses) entièrement métalliques qui pouvaient se démonter et être déplacés aisément selon les nécessités).

Sur les rails du chantier de la scierie circulaient les wagonnets affectés au transport des grumes vers la scierie. La voie ceinturait entièrement le dépôt de grumes et, grâce à un système d’aiguillage, pénétrait dans la scierie même. Elle avait donc un double usage : la rentrée des troncs dans la scierie et la sortie des lourdes pièces de bois sciées. »

Un grand merci à Monsieur Gillet et au spécialiste qu’il a interrogé, Monsieur André Jadot. »

VIENT DE PARAÎTRE : LAVANDIERES, DENTELLIERES et Cie

LAVANDIERES, DENTELLIERES et Cie – LE TRAVAIL DES FEMMES

C’est sous ce titre que vient de paraître le quatrième et superbe ouvrage de cette collection créée par le Domaine provincial du Fourneau Saint-Michel. Après Marmites, cocottes et Cie, Cheval, Tracteur et Cie et Bûcherons, sabotiers et Cie, Laure Gloire et Justine Fontaine se sont penchées sur le travail des Ardennaises des XIXe et XXe siècles pour nous proposer, une nouvelle fois, un ouvrage absolument remarquable tant par la précision et la rigueur de la recherche, que par la très intéressante iconographie inédite ou la qualité de la mise en page et de la réalisation du livre.

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Dès la première phrase de leur introduction, les auteures donnent le ton de leur travail :

« Au XIXe siècle, on ne considère pas la femme comme une personne à part entière : elle est entièrement soumise à l’homme, qu’il s’agisse de son père, de son mari ou du prêtre. » Ce livre se veut un hommage à toutes les femmes dont les pénibles labeurs, ajoutés à leurs missions de ménagère et de maman, n’étaient ni reconnus ni, souvent, rémunérés.

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Après avoir planté l’édifiant décor dans lequel évoluent les femmes en province de Luxembourg au XIXe siècle, Laure Gloire et Justine Fontaine vous guident dans les écoles ou au sein des Cercles de Ménagères rurales à la recherche des jeunes filles d’alors, à une époque où il est communément admis « qu’il est inutile que la femme soit instruite ! »

Au gré de l’impressionnante moisson des témoignages et documents glanés par les auteurs, vous partirez ensuite à la rencontre des multiples tâches dévolués aux femmes, en commençant par les travux ménagers. Les plus jeunes seront sans doute effarés en étant confrontés aux objets et ustensiles faisant le quotidien de leurs aïeules pour le ménage, la lessive, le repassage… Vous vous verrez rappeler leurs trucs et astuces pour faire « durer » le linge le plus longtemps possible, les recettes économiques pour nourrir la famille et la mise à profit de toutes les ressources offertes par la nature ou le petit élevage.

Ensuite, vous serez invités à vous confronter à tout ce qui s’ajoutait à leurs nombreuses tâches quotidiennes et, principalement, en nos régions rurales, leur implication dans les travaux de la ferme : la basse-cour et les jeunes animaux, guetter les mises-bas, mener et ramener les bêtes à la pâture ou au point d’eau, se charger de la traite puis de la confection du beurre à la baratte. Ce sont également les femmes qui, généralement, s’occupent du potager. Elles sont également requise pour de nombreux travaux aux champs lors de la fenaison ou de la moisson bien sûr, mais aussi pour planter, buter et récolter les pommes de terre…

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Une part importante de ce bien bel ouvrage est évidemment consacrée aux métiers exercés par les jeunes filles et les femmes en dehors du giron familial. Nombreuses sont celles qui furent employées dans les familles nanties de l’époque où elles faisaient partie de la domesticité : cuisinières et filles de cuisine, femmes de chambre et filles de quartier, gouvernantes, bonnes  d’enfant ou bonnes à tout faire… Les auteures vous guident ensuite dans ce qu’elles appellent les métiers du fil : couturières, repriseuses, modistes, sans oublier les dentellières, la dentelle étant une spécialité marchoise. Vous serez ensuite confrontés aux métiers liés au commerce, qu’il soit fixe ou ambulant ; en effet, en 1880, les femmes représentent près de 40% des commerçants ambulants et elles circulent, de village en village, une pesante hotte sur le dos.

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Vous éprouverez sans doute un peu de nostalgie en découvrant les devantures, l’intérieur et le matériel présent dans les petites épiceries de nos villages. Deux chapitres importantes, eux aussi remarquablement documentés, ponctuent ce livre indispensable ; celui consacré au corps médical, plus précisément aux infirmières et aux sages-femmes et, enfin, celui consacré aux institutrices exerçant un véritable sacerdoce dans les écoles de nos villages.

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Ce livre compte 208 pages déclinées en 9 chapitres. Il est remarquablement illustré : les photos de plus de 300 pièces extraites des réserves du Musée du fourneau saint-Michel, auxquelles s’ajoutent plus de 130 photos anciennes et 23 reproductions de documents anciens (factures, carnets, lettres…). Cette riche iconographie est également soutenue par de très nombreux extraits de témoignages recueillis par les auteures.

Ce livre est donc à réclamer à votre libraire sans la moindre hésitation.

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LE CANAL ET LA BATELLERIE DUR L’OURTHE S’EXPOSENT A COMBLAIN-AU-PONT JUSQU’AU 15/4

A NE PAS MANQUER

L’expo sur le canal et la batellerie de l’Ourthe, que l’Asbl Le Vieil Esneux organise, avec le Contrat Rivière Ourthe, dans le cadre des Journées de l’Eau au Musée de Comblain, du 22 mars au 15 avril de 10 à 17 heures, tous les jours sauf le lundi.
Cette exposition reprend les éléments présentés lors des Journées du Patrimoine en septembre 2017 : panneaux, documents, maquettes, objets…
Lors de ces Journées du Patrimoine, le programme est tellement vaste qu’il est nécessaire de faire des choix et, souvent, c’est très frustrant! C’est donc l’occasion pour ceux qui n’avaient pu y venir de découvrir cette exposition. Il est prévu des visites commentées les samedi 24 (10 et 14h) et dimanche 25 ((10 et) 15 h) sur inscription au 0470 054 110.
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VIEILLES CHARPENTES ET LES QUALITES DU BOIS D’AULNE

La Petite Gazette du 19 janvier 2000

QUE SAVEZ-VOUS DE LA CHARPENTERIE DES ANCIENNES FERMES ARDENNAISES ?

Monsieur J-Cl. Hendrick, de Stavelot, est, comme beaucoup d’entre vous, un passionné des choses du passé. Il me demande de vous interroger sur quelque chose qui constitue une énigme pour lui.

« Dans les anciennes fermes, il y avait souvent trois pièces en enfilade : la cuisine, la belle chambre et la chambre de derrière. Chacune de ces chambres étaient munies d’une fenêtre sur le pignon. Quasiment toujours, une poutre soutenant les solives du plafond de chacune de ces chambres repose sur la poutre linteau de ces fenêtres. Or cet endroit semble rendre la construction plus vulnérable que si elle était enchâssée dans le mur pignon, de part et d’autre de ces baies…

Un ancien « maître charpentier » pourrait-il donner la raison de ce mode ancien de construction ? »

Si oui, qu’il n’hésite surtout pas à encore à La Petite Gazette, je suis intimement convaincu que M. Hendrick n’est pas le seul à se poser cette question qui vient à l’esprit de toute personne curieuse admirant l’une de ces anciennes fermes.

La Petite Gazette du 1er mars 2000

QUE SAVEZ-VOUS DE LA CHARPENTE DES ANCIENNES FERMES ARDENNAISES ?

Monsieur Hendrick, de Stavelot, vous interrogeait sur un aspect particulier des charpentes anciennes reposant sur les linteaux des fenêtres et il se demandait pourquoi cette façon de faire. Je n’ai malheureusement pas reçu de réponse précise à ce sujet, mais des lecteurs m’ont néanmoins communiqué certaines réflexions et souvenirs.

Monsieur J. Ringlet, de Neuville en Condroz, nous dit ceci : « c’est avec plaisir et curiosité que j’ai pris connaissance de cette demande. Lors d’une voyage dans le Jura, j’ai séjourné dans à l’hôtel « La Poutre » (Cf. Guide Michelin rouge, page 229). L’origine du nom de cet établissement vient de la présence dans son restaurant d’une poutre, d’une seule pièce,  de plus ou moins 22 mètres et ne reposant que sur deux appuis. Si, un jour, Monsieur Hendrick passe dans cette région, je lui conseille d’aller l’admirer. »

Madame Dehossay, de Comblain-au-Pont, a, quant à elle, extrait ce texte de son imposante documentation :

« Un de mes cinq frères, Albert Dehossay, a été fermier à Xhout-si-Plout Malempré, voici ce qu’il écrivait à Monsieur Detaille (fondateur des excellents Echos de Comblain), en mars 1977. Il fut l’un des collaborateurs de M. Detaille et même, pendant quelques années, administrateur du Musée de Comblain.

Des poutres qui transmettent.

L’aulne est un bois tendre mais il est très dur quand il est coupé « so deûre leune » d’août. Etant fermier en Ardenne, je faisais mes balais d’étable moi-même. J’allais couper mes « rinmes », jeunes pousses d’aulne, dont on fait les balais) toujours au même endroit. Certains duraient, d’autres pas. J’en parlai un jour à un vieil Ardennais qui me demanda si je les coupais « so deûre leune » ou « so tinre leune ». Il me dit que je devais les couper le plus près possible de la pleine lune, « so deûre leune », la nouvelle lune étant « li tinre leune ». Je fis comme il me dit et c’était vrai. L’aulne doit être coupé « so deûre leune » d’août pour être dur comme le chêne ; il en est de même pour avoir des cadres à rayons qui ne « travaillent » pas dans les ruches d’abeilles. Attention, l’auteur parle bien de « couper » et non de placer. De nombreux parquets et poutres des châteaux-forts étaient recouverts avec ce bois « al mézon » (Vaux renard). Etaient désignés par « Maison » de gros bâtiments, plus ou moins carrés, qui se situaient entre le château-fort et le château de plaisance, c’étaient des maisons fortes. »

Au témoignage de son frère, Madame Gabriel-Dehossay ajoute ceci : «La famille Gabriel a exploité la ferme de Paradis-Harzé, de 1901 à 1963. Cette métairie a été construite en forme de petit château il y a près de 400 ans. Sur le seuil du jardin, gravé dans la pierre, on peut lire 1626. Chaque année, au temps de la fenaison, quand le fenil de la grange est rempli, sur la poutre maîtresse du toit, on peut lire, marqué à chaud : « Je suis aulne, celui qui m’a coupé connaissait ma saison ». Ainsi c’est vrai que le bois d’aulne coupé sur la « deûre leune » d’août est dur comme le chêne puisqu’on en parlait déjà, in y a 400 ans. »

Peut-être que ces quelques réflexions et surtout le manque de réponse précise à la question posée inciteront certains d’entre vous à nous dire ce qu’ils savent à propos des vieilles charpentes ? Allons, ce que vous savez nous intéresse ; confiez-le-nous.

La Petite Gazette du 17 mai 2000

DU NEUF A PROPOS DES  VIEILLES CHARPENTES

Souvenez-vous, nous avons, il y a quelque temps déjà, évoqué l’utilisation du bois d’aulne et des précises conditions à respecter lors de sa coupe. Monsieur Gaston Hankard, de Aye, nous a, lui aussi, apporté quelques précisions à ce sujet :

« Il y a plus de 50 ans, un habitant (déjà d’un certain âge) du village était venu couper des manches en plein été… ma curiosité me fit lui demander pourquoi il venait chercher des manches à cette saison ? Sa réponse fusa en ces termes : l’aulne se coupe lors de la dure lune, entre les deux Notre-Dame, c’est-à-dire en le 15 août et le 8 septembre. Il en va de même pour bouturer certains arbustes. »

J’ai également entendu parler, poursuit mon correspondant, qu’une poutre en bois d’aulne se trouverait sur une entrée de cour à la Trappe St-Remy de Rochefort qui porterait une inscription ; mais je n’ai jamais pu vérifier cela ! »

Nous en saurons peut-être davantage grâce aux lecteurs de La Petite Gazette !

La Petite Gazette du 7 juin 2000

LES VIEILLES CHAPELLES DE NOS CAMPAGNES ET DE NOS FORETS

   Monsieur André Fagnoul, de St-Séverin, vous lance un appel à propos de ces vieux monuments, vestiges de la piété et de la ferveur populaires de nos aïeux.

« Construites souvent dans des endroits isolés, campagnes ou bois, ou encore le long des routes ; c’est à nous, lecteurs de La Petite Gazette, qu’il revient de faire revivre et parler ces édifices.

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Dans le bois de Maynery St-Séverin ou Aux Houx, se trouve une chapelle construite au XVIIe siècle. Je ne sais à qui elle est dédiée. Quand j’étais jeune, avec mes parents, nous  y allions souvent.

A l’intérieur, au-dessus de l’autel, était écrit « Oh ! Marie conçue sans péchés, priez pour nous qui avons recours à vous. » A droite, un bougeoir à sept branches, à gauche, le « Je vous salue Marie » ; au milieu, un prie-Dieu, au mur, des deux côtés, des remerciements pour des grâces obtenues et un petit tronc. Il y a cinq ou six ans, cette chapelle a vu le passage de vandales ; tout a été détruit, il ne restait que les quatre murs, et encore ils étaient abîmés. Avec le curé du village, l’abbé Bienvenu, et mon voisin, Léon Lallemand, nous avons tout reconstruit et restauré.

Seul l’Ave Maria et le banc prie-Dieu étaient encore intacts. Parmi les remerciements cassés en petits morceaux, j’ai retrouvé un fragment portant la date de 1693, ce qui me fait penser que cette chapelle a pu être élevée au dix-septième siècle. Elle est accessible par la rue du moulin de Falogne, cent mètres plus loin que le moulin, à droite, se trouve l’entrée du bois ; il vous suffit de longer la prairie pendant une centaine de mètres et vous la verrez, à droite, blottie dans la verdure. Malheureusement, nous avons dû la protéger en plaçant des grillages métalliques cadenassés devant la porte et les fenêtres. »

025 La chapelle restaurée en 1995 par l’abbé Bienvenu et MM. Léon Lallemand et André Fagnoul

     Qui pourra nous apporter des renseignements sur cette chapelle, son histoire, qui l’a fait édifier, à qui était-elle dédiée, quel culte y était rendu ? Comme d’habitude, tout ce que vous savez nous intéresse. D’avance, un grand merci.

La Petite Gazette du 21 juin 2000

LE BOIS D’AULNE ET SES ETONNANTES QUALITES

   Monsieur Robertt Heiderscheidt, de Modave, me dit être très intéressé par tout ce qui touche au bois et, comme il a lu que nos évoquions les qualités de l’aulne, il nous communique ce qui suit :

«Cet arbre sans intérêt qui pousse au bord des rivières, je dis sans intérêt car il ne se conserve pas, il ne chauffe pas, il est juste bon à porter des graines qui font le bonheur des tarins ; mais c’est méconnaître ses qualités qui ont servi les bâtisseurs d’antan.

C’est ainsi qu’il y a une cinquantaine d’année, dans un château de Vyle-Taroul, les propriétaires ont fait abattre une aile du bâtiment pour réduire les frais d’entretien et les charges foncières. Un voisin en avait reçu les bois de charpente pour en faire du bois à brûler. Malheureusement pour lui, il n’a rien su en faire. Aucun outil n’a permis d’en débiter un morceau. Il en a fait un tas dans le fond du jardin et y a mis le fu, content de s’en débarrasser. Son aventure lui a quand même appris une chose : le charpentier, maître d’œuvre, avait gravé au ciseau sur une poutre : « Celui qui ne connaît pas mon époque ne connaît pas ma durée. »

Un vieux charron de mes connaissances m’a dit un jour que l’aulne remplaçait avantageusement l’acacia parce que plus léger, pour autant qu’il ait été coupé entre les deux « Sainte-Marie » ; ce qui rejoint ce qu’en disait un autre lecteur. »

Il s’agit effectivement d’une réalité bien connue et souvent rapportée. Connaissez-vous d’autres essences de bois aux qualités étonnantes ou particulières ? Tout ce que vous savez à ce sujet nous intéresse.

La Petite Gazette du 6 septembre 2000 

QUAND IL EST A NOUVEAU QUESTION DU BOIS D’AULNE

    Monsieur Heidencheidt, de Modave, revient sur les propriétés particulières de l’aulne : « Il me revient à l’esprit d’avoir rencontré, il y a une cinquantaine d’années, un transport de bois. Il s’agissait en fait de fagots de bois d’aulne qui étaient destinés à la Poudrerie de Neuville-en-Condroz. Je me suis laissé dire que l’aulne entrait dans la fabrication de la poudre. S’il en était ainsi, ce bois n’a pas toujours été laissé pour compte. »

Cet intéressant souvenir m’intrigue, vous aussi j’imagine. Quelqu’un pourra-t-il nous expliquer en quoi le bois d’aulne entrait-il dans la fabrication de poudre ? Je suis très impatient de vous lire.

La Petite Gazette du 27 septembre 2000

A PROPOS DU BOIS D’AULNE

   Vous vous souviendrez certainement des interrogations d’un de mes lecteurs à propos d’un transport de fagots d’aulne destinés à une poudrerie… Comme les questions posées dans La Petite Gazette restent très rarement sans réponse, vous ne serez pas surpris d’apprendre que, déjà, M. De Tender, d’Embourg, m’a fait parvenir de nombreuses informations sur la question.

« Les fagots que M. Heidenscheit a vu conduire à la poudrerie étaient peut-être de la Bourdaine, qui peut s ‘appeler aussi « aulne noir » ou « bois à poudre » et, en latin, « frangula alnus ».

Dans « Le Guide des arbres, du Reader’s Digest, M. De Tender a lu « Le bois de bourdaine a été longtemps recherché pour le charbon de bois qu’on en obtenait, qui, très pur, entrait dans la composition de la poudre à canon. »

Et mon passionnant lecteur de poursuivre : « Il y a vingt ou trente ans, j’ai entendu parler d’aunettes dont on formait des fagots pour les poudreries. Il ne s’agissait pas de branches coupées à des arbres, mais de pousses provenant d’arbustes buissonnants que l’on coupait avant qu’ils ne soient bien grands et qui rejetaient de souche. Ces aunettes poussaient sur les terrains qui entouraient des captages de la Compagnie Intercommunale Bruxelloise des Eaux. Ces terrains sont destinés à protéger la pureté des eaux, et le bétail, les engrais et les grosses machines en sont donc exclus. Les « aunettes » dont la culture est peu exigeante convenaient donc bien comme plantations autour des captages. » M. De Tender engage les habitants de Modave à interroger les anciens à propos de ce qui se passait sur les terrains avoisinant les captages de la CIBE ; mais on pourrait tout aussi utilement s’intéresser aux captages réalisés ailleurs.

Qui mènera l’enquête ? Qui nous apportera d’autres renseignements à ce sujet ? Je ne doute pas qu’il existe parmi vous de fins limiers qui, bientôt, auront des tas de choses à nous apprendre sur ce bois d’aulne utilisé dans les poudreries. D’avance je les en remercie.

La Petite Gazette du 21 novembre 2000

QUAND IL EST A NOUVEAU QUESTION DU BOIS D’AULNE ET DE SES EXTRAORDINAIRES QUALITES

   Monsieur R. Heidencheidt, de Modave, nous a entretenus, il y a quelques semaines, de l’aulne et de ses applications en poudrerie. Il revient sur le sujet.

« Je suis heureux d’apprendre que le scepticisme qui régnait autour de mes dires au sujet de l’aulne et de la poudre noire soit relativement aplani.  J’ai cru un moment devoir douter de la parole de mon transporteur (cf. La petite Gazette de la première semaine de septembre 2000).

Il m’est revenu à l’esprit que, durant l’hiver 1940 – 1941, je me suis trouvé plusieurs jours chez ma sœur, à Casteau. Elle habitait une maison à l’écart ; au bout du jardin, il existait une plantation d’aulnes que l’on éclaircissait en coupant les plus gros montants. Ceux-ci étaient mis en fagots et empilés, prêts à être transportés.

Quelle ne fut pas notre surprise en voyant, un jour, arriver deux Allemands qui examinèrent les tas de fagots et en ont fait l’inventaire.

Ceci dit, je suis né dans la vallée de l’Ourthe et Dieu sait si les berges regorgent d’aulnes ! Je ne conteste pas les dires de M. de Tender (cf. La Petite Gazette de la dernière semaine de septembre), mais je maintiens que le bois dont je parle est bien de l’aulne. Je connais un arbuste à écorce noire appelé « bois noir », mais il n’a rien de commun avec l’aulne. J’espère, conclut M. Heidencheidt, qu’on éclaircira un jour cette amusante énigme. »

Chers lecteurs, il ne tient qu’à vous…

La Petite Gazette du 31 janvier 2001

QUAND IL EST A NOUVEAU QUESTION DU BOIS D’AULNE

Nous en avons déjà parlé à diverses reprises, mais, comme au sein des lecteurs de La Petite Gazette, il en est beaucoup qui aiment à mener des recherches pour tenter de répondre à un maximum de questions posées, voici ce que Monsieur Raymond Gillet, de Nandrin,  a découvert :

« J’ai tout simplement, m’écrit-il, repris les définitions données par le Larousse Universel de 1972 :

aune ou aulne : nom masculin (lat. alnus). Genre de castanéacées, comprenant des arbres à bois léger des régions tempérées humides. Syn. Verne ou Vergne.

Encycl. L’espèce type de ce genre est l’aune visqueux (alnus glusitona), répandu dans toute l’Europe et la Sibérie, et qu’on appelle aussi verne. Le bois de l’aune, susceptible de recevoir un beau poli et prenant bien la couleur noire, est très propre à l’ébénisterie. Résistant longtemps à l’action de l’eau, il peut être employé  dans les constructions hydrauliques. L’écorce de l’aune est astringente et peut servir au tannage des cuirs. Combinée avec quelques préparations ferrugineuses, elle fournit une couleur noire dont les teinturiers, et surtout les chapeliers, font usage.

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l’aune visqueux

 

Bourdaine ou bourgène : nom féminin. Arbuste du genre nerprun (M. Gillet ajoute, bien à propos, que cela équivaut à prune noire), que l’on désigne vulgairement sous le nom d’aune noir et dont le bois, réduit en charbon, sert à la fabrication de la poudre de chasse : la bourdaine croît dans les forêts humides. (l’écorce de bourdaine est employée en médecine comme laxatives »

Merci à Monsieur Gillet pour son intéressante communication.

Puisque nous parlons de bois, j’aime reprendre ici une partie d’un envoi de Monsieur Hendrick, de Stavelot, qui évoque, comme cela avait été fait pour l’aulne, un vieux précepte relatif aux dates à respecter pour couper telle ou telle essence de bois. Mon correspondant m’a transmis un extrait du Sillon Belge du 3 mars 2000 dans lequel on peut lire, sous la signature de M. Vanhoren, d’Erezée : « Dans un vieil ouvrage sur la construction des cathédrales, j’ai lu que le bois destiné à leur charpente était abattu le dernier jour de la lune montante, à la lueur des torches. Ce qui, affirme l’auteur, les préservera de l’attaque des vers. » Cet habitant d’Erezée poursuit son courrier en expliquant qu’il a tenté l’expérience en 1976 avec un hêtre et qu’il n’a eu qu’à se féliciter du résultat.

Vous sera-t-il possible de m’aider à rassembler tous ces vieux préceptes recommandant les périodes ou les dates recommandées pour couper les bois ? Il me semble qu’il serait très intéressant de réaliser cet inventaire et, surtout, de vérifier si des constantes se dégagent ou, a contrario, si les principes à respecter changent de région en région.

La Petite Gazette du 7 mars 2001

DU BON USAGE DES BOIS

   Il y a déjà pas mal de semaines, suite aux informations recueillies sur le bois de saule, je vous demandais de me faire parvenir ce que vous saviez sur le bon usage des diverses essences de bois ; à quels usages les destinait-on ? quand est-il recommandé d’abattre certaines essences ?… Monsieur André Dethier, de Méan, vient de m’adresser un courrier abordant la plupart de ces sujets. Commençons-en la lecture/

« Il y a bien longtemps, bien avant que l’usage de la télévision (elle n’existait pas encore) ne détruise les liens d’intimité qui unissaient toutes les familles campagnardes et qui étaient l’essence même des communautés des petits villages condruziens et ardennais. Le soir, il était de coutume d’aller à la soirée (al’sîze) chez l’un ou l’autre. Les vieux parlaient volontiers de leurs jeunes années et des souvenirs, bien vivants dans leur mémoire, des coutumes et croyances d’autrefois.

Il fut un temps où les phases de la lune avaient une grande importance sur la vie rurale pour ces gens qui vivaient près de la terre et des réserves de la nature. Ainsi, il y a près de soixante ans, pendant l’une de ces soirées éclairées seulement par la lueur du feu du poêle duquel, par économie, le couvercle était gardé entrouvert, un ancien racontait que, dans sa jeunesse, les vieux de cette époque lui disaient, alors qu’il était ouvrier carrier, que les manches des maillets en acier utilisés par les tailleurs de pierre devaient être faits du bois de cornouiller coupé durant la « dure lune » (la lune descendante). N’y croyant pas trop, il coupa donc douze manches pendant la « tendre lune » (lune montante), appelée ainsi par comparaison avec les végétaux qui sont plus tendres quand ils poussent, et douze autres pendant la « dure lune », dans le même buisson de cornouiller. Il les mit tous à sécher dans le fenil durant un an. Les manches pris pendant la lune montante se brisaient rapidement tandis que les autres duraient très très longtemps. Lancé sur le sujet, un autre dit que les semis, pour une rapide germination, devaient être faits pendant la « tendre lune » et la récolte, particulièrement des fruits, devait être faite lors de la « dure lune », leur conservation étant plus longue. »

Pour prolonger le plaisir trouvé lors de cette veillée, je vous propose d’en redécouvrir les participants la semaine prochaine.

La Petite Gazette du 21 mars 2001

DU BON USAGE DES BOIS

   Monsieur André Dethier, de Méan, nous a conviés, toutes et tous, à une extraordinaire veillée durant laquelle il fut largement question du bon usage des bois ; après une petite interruption (due à l’abondance des sujets traités pour le moment) nous le retrouvons avec grand plaisir :

« J’ai vu, dit alors un autre participant à cette veillée, à la ferme de Leuze (Somme-Leuze), une inscription gravée dans le sommier qui supporte les charpentes du plafond « Qui m’a coupé connaissait ma saison ». Cette poutre était taillée dans du bois d’aulne. Il paraît que la bonne saison se situe entre les deux Notre-dame, entre le quinze août et, probablement, les environs du quinze septembre. Alors, l’aulne, qui est un bois tendre, devient très dur et d’une longévité exceptionnelle. Cette ferme fut vraisemblablement construite au cours du XVIIe siècle.

La conversation lancée sur l’usage du bois, m’appris que les fonds des tombereaux, pour éviter qu’ils ne pourrissent trop tôt, devaient être faits avec des planches de saule ; elles peuvent être saturées d’humidité sans dommage ! Quant aux roues, pour être très solides, le moyeu devait être fait de bois de chêne, les rais en bois d’acacias (robinier) et les jantes en bois de frêne pour son élasticité. Tandis que les râteaux servant à la fenaison étaient fabriqués avec du bois de saule marsault, les manches des cognées l’étaient en bois de merisier, les manches fabriqués en bois de frêne sont très solides, mais « durs aux mains » alors que ceux en saule, quoique moins solides, mais plus doux et plus légers, étaient préférés pour certains outils à cette époque où tous les travaux étaient manuels. »

Si certains d’entre vous restent sceptiques quant à ce qui pourrait leur apparaître comme étant des croyances de jadis, je leur conseille vivement de découvrir le témoignage suivant, transmis par M. Marc Tondeur, d’Esneux.

« J’ai vécu pendant 13 ans au Nicaragua, où j’exerçais la profession de vétérinaire, et ce jusqu’en 1995. Mon frère, agronome, y vit toujours. C’est amusant de comparer des pratiques populaires très similaires, comme celle qui consiste à tenir compte de la lune pour couper son bois de construction. Au Nicaragua, les campesinos qui veulent remplacer leurs piquets de clôture se gardent bien de le faire sans choisir le moment. E bois coupé en dehors des périodes propices (une certaine phase de la lune) se « pica », c’est-à-dire qu’il est attaqué rapidement par les vers. Certains insectes xylophages font correspondre certaines phases de leur cycle avec celui de la lune, ce qui donne un début d’explication scientifique à ce qui pouvait passer pour de la superstition.

Hélas, poursuit mon passionnant correspondant, le « bon sens populaire » a tendance à faire des extrapolations indues. C’est ainsi que la castration des taurillons doit se faire impérativement un jour après la pleine lune, sans quoi on a tous les problèmes : infection, hémorragie, dépérissement et même mort de l’animal. J’ai pratiqué des centaines de castrations de toutes sortes d’animaux : chevaux, bovins, boucs, gorets, chiens, chats et même poulets sans jamais rien constater de tel. Je n’ai pas d’indications que ces croyances soient connues ici, mais je connais très mal la Belgique où j’ai vécu très peu de temps. Si vous avez des références à me donner concernant les pratiques « magiques » concernant l’élevage, je vous serai reconnaissant de me le faire savoir. »

Un tout grand merci pour ce témoignage relatant un vécu d’outre océan ! Vous avez lu l’appel de M. Tondeur, comme d’habitude, je compte sur vous pour y répondre et pour nous confier les rites ancestraux employés dans l’élevage jadis.

LES BRASSERIES DE HOTTON

La Petite Gazette du 5 septembre 2007

UNE BRASSERIE ARTISANALE  ET BIERE DU SANGLIER A HOTTON

Mme Monique Beenders, de Vottem, est une fidèle lectrice de La Petite Gazette. Elle sait donc qu’elle peut vous mettre à contribution pour tenter de réunir les informations qu’elle souhaite rassembler :

« Dans les années 1948 – 1950, existait à Hotton, à 100 ou 200m. de la brasserie Jacquemart, sur la route de Hotton à Laroche, à droite, une brasserie, artisanale sans doute, produisant une bière de qualité connue sous le nom de « Bière du Sanglier ».

Pourra-t-on, s’il vous plaît, m’indiquer quand cette brasserie a vu le jour ? Qui l’a créée ? Quels ont été ses exploitants successifs ? A-t-elle connu des succursales ? Quand elle a cessé de fonctionner ? La bière qui y était confectionnée existe-t-elle ailleurs ? »

Bref, vous l’aurez compris, tout ce qui concerne cette brasserie et sa production intéresse ma lectrice. Aurez-vous la gentillesse de la renseigner ? Je compte sur vous et vous en remercie déjà.

La Petite Gazette du 3 octobre 2007

UN PREMIER MOT SUR LES BRASSERIES DE HOTTON

MonsieurRaymond Pirotte, d’Evelette, apporte des renseignements à Mme Beenders, de Vottem:

« La brasserie Jacquemart dont il a été question n’est pas répertoriée comme telle : il s’agit sans doute d’un négociant – marchand de bières.

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Quant à l’autre brasserie, ayant produit la « Bière du Sanglier », elle a été fondée par Emile Remy à la fin du XIXe siècle (1899 ?). Vers 1926, elle fut rachetée par Alexandre Lobet. 002.jpg

 

 

 

La  « Super Sanglier » était effectivement la spécialité la plus connue de cette brasserie.

 

En dehors des bières de ménage, la « Mustel » était une autre spécialité, qui ne semble pas avoir connu un grand succès. » A suivre.

La Petite Gazette du 10 octobre 2007

UN PREMIER MOT SUR LES BRASSERIES DE HOTTON

Retrouvons M. Raymond Pirotte, d’Evelette, et les renseignements qu’il apporte à Mme Beenders, de Vottem :

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« Je possède dans ma collection un verre d’ « Export Chasseurs Ardennais », datant probablement des années 1930 et représentant un sanglier dans une roue de vélo. 004

 

 

Selon toute vraisemblance, il s’agit aussi d’une appellation de la brasserie Lobet. Peut-être une énigme supplémentaire à résoudre par les lecteurs de la Petite Gazette ?

 

Après la Seconde Guerre, la brasserie fut dirigée par Lobet Frères. Connue aussi sous l’appellation « Brasserie Luxembourgeoise », elle cessa toutes ses activités vers 1955. »

Maintenant, j’ai la chance et le plaisir de vous donner à connaître le témoignage d’un ancien employé de chez Lobet, M. Edouard Triolet, de Lierneux : « Pour vous parler de la Brasserie Lobet, de Hotton, je dois me reporter en 1936. N’ayant plus de travail, mon père, Joseph, est contacté par les frères Lobet et, après discussion, papa devient dépositaire et négociant en bières et dérivés. Ayant terminé mes études moyennes, j’ai 15 ans et j’aide mon père dans le commerce. Nous sommes ravitaillés par camion et habitons Vielsalm. Notre commerce marche très bien, mais la guerre de 1940 et l’Offensive détruisent tout et papa est tué le 12 janvier 1945.

En 1947, jeunes mariés, nous allons habiter Melreux et je deviens chauffeur-livreur à la brasserie Lobet, gérée par les quatre frères.

Le papa Lobet, qui était tonnelier de profession, a été tué à Hotton, lors de l’Offensive des Ardennes.

Joseph Lobet, l’aîné, brasseur en bières blonde et brune ; Antoine Lobet, comptable ; Léon Lobet, entretien du matériel et André Lobet, avec un camion wagon, ravitaille les dépôts et hôtels. Parmi le personnel, il y a encore : Félix Petit, comptable, Antoine Gérard et H. Dessaive, entretien des machines et soutirage des bières. Fernand Gérard (lu Blan) chauffeur-livreur (le plus ancien), Clément Jacquet, chauffeur-livreur, Edouard Triolet, moi-même, chauffeur-livreur habitant à Melreux, près du garage de François Houssa (de 1947 à 1951). En 1948 – 1949, Joseph Lobet, brasseur qui est allé, pendant des mois, à Munich se perfectionner dans l’art de la fabrication des bières spéciales, lance la « Super Sanglier », bière brune de très grande qualité.

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 verre de la collection de M. Raymond Pirotte

 Soutirée dans une bouteille d’1/4 de litre, pansue (genre Perrier), elle porte une étiquette avec, en gros plan, un sanglier de belle allure et une colorette portant le texte :

J’aime le son du cor

Le soir au fond des bois,

Mais je préfère encor

La bière que voilà

Avec l’évolution du commerce, la brasserie Lobet est entrée en rapport avec celle de Koekelberg, de Bruxelles. Les responsables de cette brasserie ont demandé, ou plutôt imposé, à M. Joseph Lobet de fabriquer la Super sanglier en blonde au lieu de la brune. Malheureusement cela s’est révélé un réel fiasco et la disparition de cette « Perle des Ardennes » a été inévitable.

J’ai quitté la brasserie Lobet, en 1951 et, avec mon épouse, nous sommes établis à notre compte à Grand Sart, puis à Lierneux en 1955 et depuis nous sommes lierneusiens retraités. J’ignore totalement ce qui s’est passé à la Brasserie Lobet depuis mon départ… »

Un immense merci pour ce témoignage passionnant.

La Petite Gazette du 30 octobre 2007

ENCORE DE PASSIONNANTES PRECISIONS A PROPOS DES BRASSERIES DE HOTTON

Monsieur Fernand Lobet, né il y a 65 ans à Hotton, habite aujourd’hui Comblain-au-Pont. Il a pensé qu’il serait utile qu’il nous livre également ses souvenirs et il a vraiment bien fait.

« Comme chauffeur-livreur plus ancien, il y avait Julien Lobet, mon grand-père. C’était avant la guerre. Il travaillait pour ses cousins et assurait les livraisons avec un chariot tiré par un cheval.

Au sujet de Fernand Gérard, on a déjà dit qu’il était surnommé  « lu Blan », mais il était aussi affublé d’autres appellations : « le petit Fernand » par exemple, mais on le désignait également en associant son prénom au nom de ses patrons : « Fernand Lobet ».

Après les années 50, Antoine s’est installé comme distributeur Coca-Cola, à  300 mètres de la brasserie vers le centre du village, dans un grand hall. Un délégué, tout de vert vêtu, formé par la firme dirigeait l’affaire avec le financier Antoine.

Dans les anciens bâtiments de la brasserie existait une glacière qui se révéla être très utile pour les cafés du coin mais aussi lors d’organisation de fêtes ou de fancy-fair à des kilomètres à la ronde.

Léon et Jules Lobet ont fabriqué et vendu la bière Lobet en bouteilles de 75 centilitres, mais également de la bière de table, dite bière de ménage.

La « pils » qu’ils mettaient en vente était la bière « Lamot » distribuée en fûts et en bouteilles de 25 centilitres. Cette bière était alors très bue, comme la Stella, on ne parlait pas tant de la Jupiler. Evidemment, ils distribuaient également des eaux et des limonades. La bière Diekirch était leur grande et bonne bière, en fûts et en bouteilles également. Les grandes réclames vantant cette marque décoraient le plus grand café de la région, « Chez Jacquemart », sur la place. Les enfants ont quitté le commerce et Léon, qui vécu très vieux, avait repris, pour les connaissances uniquement, son ancien métier de cordonnier. »

Un tout grand merci pour tous ces renseignements qui viennent compléter ceux déjà publiés.

LE FOUR A CHAUX DE RENNES (HAMOIR)

QUE SAVEZ-VOUS DU FOUR A CHAUX DE RENNES (HAMOIR) ?

Le Cercle Histoire & Culture Hamoir (CHCH de Hamoir) rassemble des amateurs avertis et des passionnés de l’histoire régionale et locale animés par la même volonté de comprendre, d’expliquer et de préserver tous les témoins de la vie aux siècles passés. Les membres de cette association fouillent les archives, récoltent des témoignages et des documents afin de partager le fruit de leurs recherches avec le plus grand nombre dans le but de protéger et de sauvegarder tout ce qui peut encore l’être.

Madame Marie-Madeleine Boreux est un des membres actifs du CHCH et c’est à ce titre qu’elle s’adresse à la Petite Gazette.

Toute notre région, dans la seconde moitié du XIXe siècle, parce qu’elle est riche en roches calcaires, a vu se développer l’industrie de la chaufournerie. Des fours à chaux s’érigèrent en de nombreux lieux et, même si nombre d’entre eux ont disparu aujourd’hui, la toponymie et le nom de bien des rues en perpétuent souvenir de ces chafours.

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La chaux produite par les chaufourniers de nos villages est destinée à la construction et à l’amendement des terres acides. Le développement de l’agriculture dans le courant de la seconde moitié du XIXe siècle explique, en partie du moins, l’accroissement du besoin en chaux et l’érection de ces fours à l’architecture si spécifique. Les besoins du secteur de la construction au lendemain de la Grande Guerre constitueront le dernier sursaut de cette industrie mais l’avènement de l’emploi des engrais chimiques dans l’agriculture d’une part et le recours au ciment dans le secteur de la construction d’autre part allaient définitivement provoquer l’abandon des fours à chaux.

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Le Cercle Histoire & Culture Hamoir s’intéresse activement au four à chaux de Rennes, au croisement des routes  Comblain Fairon et Ouffet, derrière le hangar de la CILE. Il semble bien, comme la plupart de ses homologues dans les communes voisines, avoir été activé jusque dans les années 1920-1930. Malheureusement, les recherches menées n’ont, jusqu’à présent du moins, guère donné de résultats… Aussi, le CHCH se tourne-t-il vers vous dans l’espoir que vous pourrez communiquer souvenirs, renseignements, informations, archives, documents, photos … concernant ce four à chaux, élément très intéressant et exceptionnel du  patrimoine communal,  qui fait l’objet d’un projet de remise en état.

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Madame Boreux et tous les membres du CHCH vous remercient dès à présent pour tout ce que vous pourrez leur transmettre pour les aider dans leur recherche.

La façon la plus simple de procéder est d’écrire à la Petite Gazette qui se chargera de transmettre vos précieux renseignements.

 

QUE SONT LES TAUPIERS DEVENUS?

La Petite Gazette du 22 mars 2000

QUE SONT DONC DEVENUS LES TAUPIERS DE NOS CAMPAGNES ?

    Madame A. Mathieu-Dessart, de Modave, se pose, elle aussi, cette question. Elle se souvient :

« Il y a plus de 60 ans, mais encore après, à Ochain, il y avait des forains qui battaient les prés et les campagnes pour piéger les taupes, au grand bonheur des propriétaires. On les voyait passer avec des bâtons auxquels pendaient leurs victimes. Parfois, ils dépeçaient déjà les bêtes sur place.

Un jour, en allant à l’école, j’avais vu, au bord de la route, quatre petites mains minuscules que j’avais prises pour des mains humaines. Arrivée à mon école, j’appris à mon institutrice que j’avais vu des petites mains d’enfant le long du chemin ; elle me demanda de les lui apporter. A midi, j’ai pris une boîte à allumettes, une petite, pas le wagon, mais je ne retrouvai que deux mains que, toute fière, je rapportai à la maîtresse.

« Bon Dieu, dit-elle, comme tu m’as fait peur… ce ne sont que des pattes de taupe ! »

En passant un jour devant la maison de ces forains, j’avais vu les peaux de taupe étirées et clouées sur des planches. Papa, lui, c’était des peaux de lapin qu’il s’occupait ; il les bourrait de journaux ou de chiffons. Il les vendait, je pense, pour un ou deux francs. »

Qui nous parlera de ces taupiers ? Comment s’y prenaient-ils pour attraper ces petits animaux ? Quelqu’un a-t-il conservé leurs techniques ? Quelqu’un les utilise-t-il encore ? Tous ces renseignements doivent être passionnants, mais, en outre, ils devraient être fort utiles à  ceux qui m’écrivent et qui sont à la recherche d’un taupier pour protéger leurs jardins. Merci de me communiquer tout renseignement en votre possession dans ce domaine.

La Petite Gazette du 12 avril 2000

QUE SONT LES TAUPIERS DEVENUS ?

Cette intéressante question posée, il a peu de temps par Madame Mathieu, de Modave, m’a aussi procuré le plaisir d’enregistrer plusieurs réponses fort intéressantes.

Monsieur Emile Van Craywinkel, d’Evelette, me dit qu’il y a plus de 60 ans, il pratiquait la capture des taupes en amateur et qu’il en a capturé beaucoup avec ses dix pièges. Dans son wallon, mon correspondant appelle la taupe « li fougnon » et le taupier « li foûgty ».

« La taupe a une galerie principale où elle fait son parcours quotidiennement, dans une propreté absolue, pour se diriger vers d’autres galeries qu’elle creuse avec les pattes de devant. Avec les postérieures, elle repousse la terre au dehors et constitue ainsi la bouture. Elle est à la recherche du bon ver de terre qui est sa principale nourriture. On doit toujours placé les pièges dans la grande galerie que l’on ouvrait de chaque côté pour les y poser. Si la taupe ne voir rien, elle a par contre un odorat des plus développés. Quand elle arrive au piège, elle pousse la tête dans le piège qui se déclenche et c’est la mort instantanée. Je les capturais plus facilement dans les campagnes que dans les jardins ; j’en prenais 6 à 8 par jour. Je leur enlevais la peau que je faisais sécher étendue et fixée par quatre clous. Je les fournissais alors à un taupier professionnel pour le prix d’un franc pièce. » Monsieur Van Craywinkel  a eu la gentillesse de dessiner pour vous les pièges qu’il employait.

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Monsieur Michel Y. Baude, de Somme-Leuze, a, lui aussi, appris le métier de taupier avec un vieil ami qui avait pratiqué ce métier pendant la guerre avant de devenir jardinier.

« Je l’ai vu fabriquer ses pièges à partir de vieux ressorts de lit ; son attirail était très simple :

  • des pièges avec anneau carré pour la tension ;
  • une aiguille à tricoter de 40 cm. de long et d’un diamètre d’environ 5 mm. ;
  • un bout de tuyau de + ou – 15 mm. de diamètre écrasé au bout pour former une petite palette.

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Il m’a conté, poursuit M. Y. Baude, qu’à la demande des propriétaires, il plaçait 50 à 60 pièges et les levait le lendemain. En cas d’échec, il les laissait en place. En cas de réussite, il recevait la pièce et, souvent, le dîner. Il vendait les peaux deux francs à un fabricant de chapeaux.

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Les pièges ne doivent pas être nettoyés pour ne porter aucune odeur. Il est, de même, indispensable de ne pas toucher aux galeries avec les mains. L’ami Jules m’a dit prendre parfois 30 taupes le même jour. Moi-même, avec 10 pièges, il m’est arrivé d’en prendre 15 en trois jours. »

Merci à mes correspondants pour leurs témoignages et leur brillante façon de les illustrer. La semaine prochaine, nous poursuivrons nos investigations grâce à un passionnant courrier de Monsieur Gaston Hankard, de Aye. A suivre donc…

La Petite Gazette du 19 avril 2000

QUE SONT NOS TAUPIERS DEVENUS ?

Cette question, à juste titre, vous passionne. Les courriers reçus à ce propos sont plus passionnants les uns que les autres. Aujourd’hui, je vous livre le récit de Monsieur Gaston Hankart, de Aye,  qui rappelle la présence d’un taupier qui eut son heure de gloire.

« Nous avions à Aye un habitant qui était très habile pour piéger les taupes (en wallon « lè fougnants »). Les gens de mon âge se souviendront certainement de lui, il s’appelait Maurice Borzée, de son métier il était maçon, mais par mauvais ou quand il manquait de travail (car à l’époque ce n’était guère mieux qu’aujourd’hui), il allait débarrasser les champs de ces indésirables bêtes et, ainsi se faire un peu d’argent pour nourrir son importante famille.

C’est grâce à ses conseils que j’ai pu, par la suite, me débarrasser de mes taupes. A l’époque, ses pièges étaient façonnés au moyen de fil légèrement aciéré et galvanisé. Ce n’est que vers les années 55 qu’est apparu le piège dénommé « double service ». Antérieurement, deux pièges étaient nécessaires pour une galerie, vu qu’il y avait deux trous. Aujourd’hui, un piège du nouveau modèle est suffisant, car il est ouvert des deux côtés et se montre efficace que la taupe vienne de gauche ou de droite.

N’oublions pas que ce petit animal est rusé, qu’il peut descendre sa galerie ou contourner le piège !

Permettez-moi de vous conter cette petite anecdote. Dans les années 60, mon voisin avait entrepris de bêcher son jardin, celui-ci, entouré de prairies, était l’endroit favori de chasse pour ces bestioles. Il fit appel à mes services afin de s’en débarrasser, j’ai donc entrepris de piéger. Tous les jours, je faisais le tour de mes pièges ; une fois j’en pris deux et, pour faire une farce à mon voisin, je mis les deux taupes, face à face, dans le même piège à double service. Le soir, quand mon voisin rentra du travail, je l’invitai à venir faire le tour des pièges. Quelle ne fut pas sa surprise de voir la double prise ! Pour répondre à son interrogation, je répondis qu’il s’agissait là de taupes capturées en pleine saison des amours… »

Intéressant et amusant, que souhaiter de mieux ? Merci beaucoup à Monsieur Hankard.

Monsieur Emile Van Craywinkel, d’Evelette, nous a expliqué la semaine dernière comment il s’y prenait pour piéger les taupes, mais il a plus d’un tour dans son sac :

« Dans le jardin, comme dans la pelouse, les taupes faisaient beaucoup de dégâts. Il fallait réagir ; avec un plantoir, j’ai percé le centre des mottes jusqu’aux galeries et, avec un bout d’ouate et de l’ammoniaque, j’ai refermé la surface. L’affaire est faite… Quand la taupe sent cette odeur, elle s’en va ailleurs et on en est débarrassé sans nuire à la santé de l’animal. Pour le moment, je ne vois plus aucune bouture ni aucune galerie dans mon entourage ! »

   Madame Odile Delmelle-Bertrand, d’Aywaille, nous signale que son fils, qui habite à Beaufays, éloigne définitivement les taupes de sa pelouse en utilisant de la naphtaline, dont l’odeur repousse les indésirables.

La Petite Gazette du 26 avril 2000

QUE SONT NOS TAUPIERS DEVENUS ?

    Voici encore un sujet qui, manifestement et si j’en juge par la qualité des courriers reçus, vous intéresse réellement. Ainsi, une fidèle lectrice de Havelange m’écrit ceci :

« Il n’y avait pas que les forains qui piégeaient les taupes… Quand j’avais une dizaine d’années, mes parents, une tante et un vieil ami de la famille, et bien d’autres encore !, les piégeaient également. Ils partaient avec des besaces contenant les pièges, les œillets, un fer plat pour « ouvrir » les « pattes » des trappes et une petite houe à main. Ils creusaient un trou au-dessus d’une galerie entre deux taupinières et y déposaient les trappes à plat ou, parfois, les pattes en bas. Il arrivait également qu’ils posent un piège de chaque côté, après avoir calé l’œillet entre les deux pattes. Les pièges étaient ensuite recouverts d’une touffe d’herbe.   

     Pour nous, les enfants, c’était un réel plaisir d’aller vite voir s’il y avait des taupes prises ; on a même eu la chance d’en découvert une toute bleue et une toute blanche, je les revois encore ! Puis on rentrait à la maison, on les dépiautait et on découpait un carré avec les peaux que l’on déposait sur des planches pour les faire sécher. On en faisait ensuite des paquets de dix, déposés dans une malle hermétique avec des boules de naphtaline. Une fois l’an, venait un monsieur de Nivelles pour les acheter. Cela se passait il y a 60 ans, mais j’en garde un bon souvenir. »

« Depuis l’envoi de ma dernière lettre, m’écrit Madame Odile Delmelle, d’Aywaille, j’ai de nouveaux renseignements à vous communiquer. Ma belle-fille vient de Burnontige et son papa, Joseph Lambotte, 93 ans, possédait des pièges pour les « rates » nom wallon pour les taupes.

Il y a environ 25 ans, à Awan, une dame était venue dire des mots dans trois coins du jardin et les taupes sont parties par le quatrième ! »

N.D.L.R. Les « mots » dits par cette dame devaient être les mêmes « incantations » que celles que j’ai entendu prononcer par mon grand-oncle, M. Lucien Remy, à Limont-Tavier, qui, chaque année, le jour du Mardi Gras, s’arrêtait dans trois coins de son jardin, en disant, une torchette de paille enflammée dans la main : « a rate, a rate, a rate »  et je me souviens qu’il avait un magnifique potager, à l’abri des indésirables amateurs de racines !

Un grand merci à mes deux aimables correspondantes. Dans les éditions prochaines, d’autres précisions nous parviendront encore sur ce métier disparu ; à suivre donc…

La Petite Gazette du 3 mai 2000

QUE SONT NOS TAUPIERS DEVENUS ?

Face à cette question, une réponse s’impose d’emblée, ils sont loin d’avoir quittés les territoires de votre mémoire…

Monsieur Henri Jacquemin, de La Gleize, a consulté sa documentation à ce sujet et m’a fait parvenir un très intéressant courrier inspiré, me dit-il, des informations qu’il a puisées dans un article paru en 1990, dans le numéro 10 de la revue « De la Meuse à l’Ardenne », intitulé « Souvenir de deux taupiers ».

« Du long interview de cette paire de personnages hors série, du village de Forzée, au pays de Rochefort, et, successivement, piégeurs, braconniers et maquisards, je ne retiendrai que leur passé de « tindeûs aus fougnants ».

Dans les années 1927 – 1928, c’est le chômage, mais aussi le prix de vente des peaux, qui ont conduit les deux jeunes gens à piéger les taupes. A cette époque, une peau de taupe se vendait jusqu’à 4,10 francs.

Curieusement, ils ne piégeaient pas dans les champs et les jardins, mais dans les bois, au long des sentiers. Disposant de 100 à 120 taupières, ils partaient dès potron-minet et plaçaient deux pièges à la fois dans les galeries, mais jamais dans les taupinières. C’étaient des pièges à fourche, bien meilleurs, selon eux, que les pièges ronds du commerce. Ne rentrant pas à midi  chez eux, ils mangeaient « sur le bois ». Il n’est donc pas étonnant, qu’en fin de journée, chacun des deux compères avait à son actif plus de cent taupes, qu’ils écorchaient tout en marchant.

Le soir, les deux « fwantis » fixaient les peaux sur des planches, avec quatre clous, en rectangle, pour bien les étendre et ils les mettaient à sécher autour du poêle. Le lendemain, les peaux étaient sèches, on les détachait et on les mettait en piles, en attendant le samedi pour aller les vendre à Rochefort, chez le peaussier. Les peaux n’étaient pas travaillées là, mais expédiées chez un pelletier, à Bruxelles. Il fallait 900 peaux pour confectionner un manteau, mais, sur ce nombre, seulement 600 peaux étaient valables.

L’activité de nos deux taupiers n’a cependant duré que deux à trois ans. Selon leurs dires, les peaux n’ont plus « marché », non pas pour une question de mode, mais parce que cette fourrure était assez fragile. Les fourreurs découpaient des losanges dans les peaux de taupes et ils les assemblaient, mais les coutures cédaient souvent. Au début, la grande majorité des peaux partaient pour l’Amérique et cela rapportait beaucoup. Mais ce n’était donc pas solide et les élevages de visons et de chinchillas firent rapidement oublier les taupes ardennaises.

Quant à nos « hapeûs d’foyons », ils eurent tôt fait de se recycler dans une autre activité, tout en restant coureurs des bois… »

Dans le prolongement de cette passionnante synthèse, M. Jacquemin recommande également la lecture de « Tchesseux d’foyants » que signa, en 1885, l’historiographe spadois Albin Body. Un grand merci pour tous ces renseignements.

La Petite Gazette du 7 juin 2000

QUE SONT NOS TAUPIERS DEVENUS ?

   Suite aux divers témoignages parus, vous avez été plusieurs à vous inquiéter du sort des taupes et à me communiquer divers moyens de s’en débarrasser sans les exterminer. Parmi ces courriers, j’ai relevé celui de Madame Dessart, de Modave, qui m’écrit ceci :

« Pour les taupes, je fais un liquide avec des feuilles et des fleurs de sureau macérées dans l’eau pendant dix à quinze jours et je verse cela dans les galeries. Je prépare la mixture lors de la floraison du sureau et la conserve dans des bidons pour la saison des taupes. »

Voilà une recette qui a, au moins, le mérite de l’originalité !

La Petite Gazette du 26 juillet 2000

QUE SONT NOS TAUPIERS DEVENUS ?

    Suite aux nombreux courriers parvenus à ce propos, j’ai encore reçu, il y a quelque temps, les précisions de deux correspondants qui souhaitaient apporter quelques renseignements supplémentaires.

Monsieur André Fagnoul, de Saint-Séverin, nous dit que « pour piéger les taupes, je m’y prends de la façon la plus simple, à la bêche, comme le faisait mon grand-papa. Aplatir la butte de terre, entre 5 H. et 7 H. ou entre 19 H. et 21 H., se tenir à proximité de l’ex-butte, toujours face au vent et sans faire de bruit. Attendre de voir la terre se soulever et regarder d’où la taupe pousse pour lui couper la retraite en enfonçant la bêche et expulser la bête hors de terre.

Les taupes ne sont pas nuisibles pour les cultures, elles ne se nourrissent que de vers de terre et de larves. Par contre, les rates, en wallon « leu d’terre », utilisent les galeries des taupes pour circuler et manger, au passage, les légumes de nos potagers. Pour me débarrasser d’elles, j’ai trouvé une astuce, avec les carottes de chicons. Je les vide et, à l’intérieur, j’introduit du froment empoisonné. Je rebouche l’ouverture avec un morceau de carotte et je plante le tout dans un lieu de passage, souvent le long d’un mur ou d’un muret. Ne pas oublier de retirer ce piège de terre car il pourrait nuire à d’autres animaux : hérissons, oiseaux et autres qui, eux sont utiles. »

Monsieur Emile Van Craywinckel, d’Evelette, quant à lui, insiste sur « le mulot, dit « rate » en wallon, qui est un animal très nuisible. Il fréquente les bois, les champs et surtout les poulaillers où il occasionne des dégâts dans la volaille. Mais en général, son habitat est souterrain ; il est aussi le grand fléau des potagers où il se nourrit de carottes, de pommes de terre et où ils causent aussi des dégâts aux racines des autres plantes. Une fois, il m’est arrivé, en arrachant les pommes de terre de découvrir l’un de ces mulots mangeant mes tubercules, mais, d’un seul coup de fourche, je l’ai tué, sale petite vermine ! Le piège à taupe s’avère également très efficace pour les capturer. »

QUAND UN OUTIL INSOLITE NOUS CONDUIT AU FAUCHAGE MANUEL

La Petite Gazette du 7 mars 2001

OBJET MYSTERE… OBJET CURIEUX… OBJET INSOLITE

Cette rubrique rencontre toujours un admirable succès auprès de vous toutes et de vous tous et vous mettez toujours votre point d’honneur à identifier tous ces objets curieux dont j’aime à vous soumettre les photographies. En sera-t-il encore de même cette fois-ci avec cet objet dont Mme Léonard, de Comblain-au-Pont, m’a envoyé le cliché ci-après ?

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Ma correspondante s’interroge sur cet outil dont elle ignore et l’usage et le nom : « le manche de bois de cet outil mesure un mètre de long, 1,5 cm d’épaisseur et 3 cm de largeur avant de s’élargir à son extrémité et de se terminer en pointe de flèche ; l’outil de fer à l’autre extrémité a une longueur de 25 cm. Est-ce que l’encoche présente dans le manche, au vu de son étroitesse, n’était pas destinée à une main féminine ? » Comme d’habitude, vous savez que tout ce que vous savez à propos de cet outil nous intéresse ; j’espère que vous aurez la gentillesse de nous écrire à son propos et je vous en remercie d’ores et déjà.

 

La Petite Gazette du 21 mars 2001

OBJET CURIEUX… OBJET INSOLITE… OBJET MYSTERE…

Il y a peu, vous avez découvert ce dessin représentant un objet qui constituait un mystère pour Madame Léonard, de Comblain-au-Pont. Vous êtes vraiment formidables car, déjà nous savons de quoi il s’agit.

Grâce à des courriers de Messieurs Mieler, de Comblain-au-Pont, et de Monsieur Marcel Kelmer, de Marche-en-Famenne, cet objet est déjà identifié : il s’agit d’un instrument utilisé par les faucheurs du temps passé. La semaine prochaine, je vous donnerai tous les détails recueillis et vous proposerai plusieurs dessins les illustrant. A suivre donc…

La Petite Gazette du 28 mars 2003

OBJET CURIEUX… OBJET INSOLITE … OBJET MYSTERE…

Monsieur Stéphane Mieler, de Mont Comblain, me dit que, s’il ne connaît pas le nom de cet objet, il en connaît fort bien l’usage.

« Avant les années 1950, on utilisait encore, principalement dans les Flandres, la « squèye », petite faux que l’on tenait d’une main pour couper les céréales (froment, avoine, orge) au temps de la moisson.

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L’encoche, dans l’outil dont le dessin était proposé, servait à y introduire la lame de la « squèye » pour la transporter durant les déplacements d’un champ à l’autre, en tenant la pointe du « crochet », le tout posé sur l’épaule. Lors du retour à la ferme, un emballage s’imposait (un vieux sac, par exemple, noué sur le manche du crochet).

Ce petit croquis permet de mieux comprendre comment on pratiquait alors.

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L’avantage de cette façon de faucher résidait dans le fait que le faucheur faisait les gerbes d’une main et fauchait de l’autre. Il convenait d’encore faire le lien par la suite. En Wallonie, à l’époque, le faucheur fauchait des deux mains et ne faisait pas de gerbes. Le « tchè », sorte de grand peigne, assurait le ramassage après la coupe. »

Monsieur Marcel Kelmer, de Marche-en-Famenne, a fouillé le dictionnaire liégeois de Jean Haust et en a extrait les informations suivantes :

« En certains endroits du Nord et du Nord Ouest de Liège, on fauche les céréales au moyen de la sape ou faux flamande appelée « fâcèye » (Argenteau, Glons) « skèye » (Vottem, Hognoul, Bergilers). La main droite du faucheur tient le « pâmè » (manche de la sape) ; la main gauche manie un crochet appelé « croc’ » (Argenteau), « crokmin » (Jupille), « graw’tê » (Glons). »

Mon correspondant poursuit notre information en nous disant que « un monsieur, âgé de plus de 80 ans, m’a signalé que le trou dans le manche servait à y passer la lame de la faucille pour rendre plus aisé le transport des outils. Ce vieux monsieur a encore vu employer ces ustensiles agricoles. Son frère dispose toujours de cet outil qu’il garde en souvenir. »

Un immense merci à Messieurs Mieler et Kelmer pour leurs précieuses, et précises, informations ! J’imagine que Mme Léonard doit être bien contente de tout savoir, aujourd’hui, sur cet objet qui l’intriguait.

La Petite Gazette du 4 avril 2001

ENCORE A PROPOS DE CET OBJET MYSTERIEUX

D’autres informations me sont venues à propos de cet objet et, vous allez le constater, toutes confirment ce qui en a été dit :

Je remercie M. F. Moreau, de Neupré, qui, comme M. Kelmer, a eu l’excellente idée de consulter le dictionnaire de J. Haust.

Monsieur R. L., de Tinlot, signale que cet objet s’appelle un « pic ». « jadis, les moissonneurs s’en servaient avec une sape (petite faux à manche court). Le pic attirait le grain fauché par la sape pour en faire une gerbe. Dans le manche du pic, la petite encoche sert seulement pour pousser la lame de la sape pour un transport plus aisé des deux outils. »

Monsieur Georges Pineur, de Bois Borsu, nous dit que cet objet est  appelé « pick » et qu’il servait lors du fauchage des blés. « je m’en suis servi pendant la guerre de 1940. De la main gauche, armé de ce crochet, on rassemblait une bonne poignée de blé et de la main droite, avec une petite faux montée en forme de S, d’un coup sec, on tranchait le blé. On renouvelait cette opération cinq ou six fois jusqu’à en avoir assez pour former une gerbe. On fauchait pour tracer un passage à la lisière du champ à moissonner pour y passer avec la moissonneuse-lieuse tractée par deux ou trois chevaux. Ce travail était surtout assumé par Flamands, qui venaient faire les moissons en Wallonie. Quant à l’encoche qui intrigue Mme Léonard, elle servait tout simplement à loger la lame de la faux pour le transport de l’outil. »

Monsieur Marcel Peters, de Gouvy, confirme également qu’il s’agit bien d’un outil destiné à ramasser le blé, l’orge, le froment, l’avoine… en vue d’en faire des gerbes. « Le gerbeur porte cet outil à la ceinture au moyen de la fente allongée et ce avec le crochet en fer tourné vers le bas. Il ramasse les céréales, les redresse en bottes contre son corps et les ligature en gerbes . L’outil reste toujours attaché à la ceinture. La mesure de la longueur de cet outil est variable ; elle est fixée en fonction de la taille de celui qui l’utilise. Parfois, elle ne dépasse pas 85 cm. pour permettre aux enfants de faire le travail. On en trouve encore régulièrement dans les vieilles fermes de notre région. »

La Petite Gazette du 23 avril 2001

OBJET CURIEUX… OBJET INSOLITE… OBJET MYSTERE

Dans le prolongement de tout ce que nous avons déjà publié au sujet de cet objet curieux que nous avait soumis Madame Léonard, de Comblain-au-Pont, j’aime à signaler que les membres du Cercle d’Histoire et Musée de Marchin-Vyle se penchent sur le contenu de La Petite Gazette lors de leur réunion mensuelle. C’est ainsi que M. Léon Colson, de Huccorgne, m’a fait parvenir un intéressant courrier dont il a puisé la substance dans le dictionnaire liégeois de Jean Haust.  Ces informations nous étant déjà parvenues par ailleurs, nous ne les republierons pas, mais nous ouvrirons néanmoins nos colonnes à la reproduction qu’il a faite de l’illustration présente dans cet extraordinaire ouvrage de référence.

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Monsieur René Toussaint, de Harzé, revient quant à lui sur des propos tenus à propos de cet outil. « S’il est possible que le graw’tê ait été utilisé dans les Flandres avant 1950, je me souviens très bien m’en être servi, quand j’avais 13 ans, en 1943, à la ferme des Floxhes, à Anthisnes. C’est en recourant à ces outils que l’on fauchait autour des champs de froment, d’avoine ou d’orge pour ménager le passage nécessaire aux trois chevaux tractant la faucheuse lieuse. »

Monsieur Georges Riollay, de Neupré, apporte un éclairage nouveau au sujet de cet objet : « En Gascogne, les ouvriers gemmeurs (résiniers) se servaient et se servent encore de ce genre d’outil appelé « crampon » pour récolter la résine des pins. Je suppose, poursuit mon correspondant, qu’en Ardenne il en était de même. Le travail des gemmeurs consistait à enlever une petite partie d’écorce et, avec la pointe de cet outil, faire une entaille dans l’arbre. Ensuite, ils plaçaient, en dessous, un récipient dénommé « crot » afin d’y recevoir la résine ou gemme. Ce métier de gemmeur est appelé à disparaître car la production industrielle supplante cette manière de procéder. »

Merci à tous pour ces témoignages et ces informations.

La Petite Gazette du 27 juin 2001

REVENONS UN MOMENT SUR L’USAGE DU GRÂV’TÈ

La Petite Gazette  a publié de nombreuses réactions déjà à propos de cet objet dont Mme Léonard, de Comblain-au-Pont, nous avait proposé le dessin, mais il nous a semblé intéressant d’y revenir à nouveau.

Monsieur Léon Mathot, de Haillot, m’avait écrit au sujet de ce grâv’tè et son témoignage apporte quelques précisions au sujet de cet outil :

« Ce type de faux a été utilisé pour la première fois dans ma région (Andenne) dans les années 1942 – 1943, au grand étonnement des agriculteurs du coin. C’est effectivement un agriculteur flamand (il venait de faire l’acquisition d’une ferme dans le village) qui l’utilisait et la maniait avec beaucoup d’adresse. Ce qui était important, c’était l’usage simultané du bâton muni d’un crochet (grâv’tè sur le croquis paru le 27 avril). En effet, le faucheur retenait le blé coupé dans le crochet et déposait ainsi de petites gerbes sur le sol au fur et à mesure de sa progression.

Je n’ai jamais vu, poursuit M. Mathot, un seul agriculteur du coin se servir de cet engin. A noter que la position de travail, très courbée, était fatigante ; ce type de faux ne devait convenir qu’aux personnes de petite taille !

Enfin, conclut mon correspondant, je reste perplexe à propos de l’information communiquée par M. Riollay. Je ne vois pas comment la « facèye » puisse servir à faire des entailles dans les troncs d’arbre ; la lame ne pourrait résister longtemps à ce genre d’usage. Je me demande s’il n’y a pas confusion avec une sorte de courbet à manche long dont se servaient les forestiers pour élaguer les arbres ou pour dégager les jeunes plants qui grandissent au milieu des buissons. Ce type de courbet peut effectivement servir à faire des entailles dans les troncs. »

Merci pour toutes ces précisions.

La Petite Gazette du 23 janvier 2002

AU TEMPS DU FAUCHAGE MANUEL

Madame Henard-Cornet, de Hives, a eu l’excellente idée de m’écrire pour me confier les souvenirs qu’elle conserve du temps où son papa fauchait à la main.

« Si mes souvenirs sont bons, mon père fit ses derniers fauchages manuels dans les années 1924-1925. Il partait de grand matin, au premier chant des oiseaux, avec sa grande faux sans oublier le coffin, « li coirny » attaché derrière le dos et dans lequel pn mettait la pierre à faux, trempée dans de l’eau vinaigrée et qui servait des dizaines e fois à aiguiser la lame de sa petite chansonnette.

Le lendemain, munis de fourches, on allait « disonner », éparpiller l’herbe et la retourner deux ou trois jours après, pour enfin en faire de gros melons, que l’on retournait le jour du charriage pour reprendre l’humidité pompée dans le sol.

Alors on arrivait avec le gros lourd chariot tiré par les deux chevaux de trait avec les grosses roues en bois ferrées par de beaux bandages forgés par notre bon maréchal ferrant. On ne devait pas oublier la perche et les deux fourches, surtout la grande qui servait à soulever les dernières « croyées ».

Il restait alors deux opérations : le peignage, en prenant le petit râteau en bois afin de faire descendre le foin qui aurait pu se perdre sur le chemin du retour. Il fallait alors soulever la perche attachée devant par une grand chaîne et également à l’arrière car celle-ci rattachée au « tir dial » qui, maille par maille, pressait fortement le foin. Il arrivait, mais très rarement, dans les terrains fort accidentés, que le foin « vêle » et il fallait recommencer tout le travail.

Pour nous, les enfants, la fenaison n’était pas terminée. En hiver, défense de monter sur les tas, mais nous devions tirer le foin mèche par mèche à l’aide d’un gros crochet en fer, dont je possède toujours un spécimen, afin de rationner le bétail jusqu’au printemps. »

Un grand merci pour ces souvenirs qui, on le ressent très fort, vivent toujours intensément dans la mémoire de ma correspondante.

La Petite Gazette du 28 août 2013

EN HAUTE ARDENNE, ON FAUCHAIT BIEN PLUS TARD…

Comme toujours quand il s’agit d’évoquer la Haute-Ardenne, c’est vers notre envoyé spécial dans le passé des hauts plateaux, M. Joseph Gavroye, que nous nous tournons :

« En juin, on fauche dans le bon pays. En Haute Ardenne, région pauvre et froide, c’était fin juin ou début juillet. A l’époque et cela se passait encore entre les deux guerres, de nombreux paysans ardennais partaient faucher dans le pays de Herve, région herbagère par excellence, avec une croissance de l’herbe bien plus hâtive. Ils y allaient, munis de leur faux, par groupes rassemblant le père et les fils, au moyen du train et du tram et arrivaient sur les lieux où ils étaient attendus d’année en année. Les coupes terminées, ils regagnaient le haut pays pour y entreprendre ensuite la même besogne.

Mon père, né en 1876, était lui aussi un maniaque de la faux. Comme le racontait si bien Monsieur Bolland, dans son évocation du mois de juin, mon père, levé très tôt le matin et assis sur un sac de jute devant l’enclumette, battait sa faux. Cela se passait dans les environs immédiats de la ferme et tant pis pour les lève-tard, dérangés par les coups répétés du marteau sur la lame d’acier. Ce travail terminé et sans trop s’attarder à table, à l’aube naissante, il se dirigeait vers le pré à faucher. Mon père avait comme habitude de s’équiper d’un parapluie qu’il rangeait à côté de la faux sur une épaule. Certains le raillaient lui reprochant, qu’équipé de la sorte, il allait faire pleuvoir. Il répondait avec humour que, lorsqu’il avait son parapluie, il ne pleuvait jamais… c’était son sentiment.

Une petite anecdote personnelle me revient à l’esprit. Papa et moi avions 53 ans de différence d’âge ; un jour qu’il était équipé de sa faux, je l’accompagnais avec le cheval tirant la faucheuse mécanique. Comme nous arrivions en face du pré à faucher, Papa constata qu’il s’agissait d’un pré d’une contenance d’environ 50 ares d’un jeune trèfle bien droit sur pied. Dans son orgueil du travail bien fait, il me donna l’ordre de déposer la machine à l’ombre d’un chêne et de détacher le cheval avant de rentrer à la ferme. A mon âge, j’avais alors 16 ou 17 ans, une autre génération donc, la chose me choqua mais je m’exécutai sans pouvoir émettre de commentaires, la décision venant du paternel !

Tout l’après-midi, le père Gavroye, faucheur émérite, s’adonna à faucher un chemin tout autour du terrain afin d’éviter que le cheval ne piétine ce magnifique trèfle. C’était un peu exagéré, mais il avait la fierté du travail bien fait, ce qui prévalait à l’époque.

Actuellement cette façon de faire est dépassée. Tout est fait à la grande échelle. Une partie du foin est abandonnée à la nature. Des machines de plus en plus sophistiquées sont utilisées, le temps presse ainsi que la rentabilité. La faux à main est rangée aux oubliettes ou déposée dans un musée. Finis les battements et l’aiguisage de la lame en acier pourtant si appréciés des anciens. »

BERGERS ET BERGERES DE NOS CONTREES

Petite remarque préliminaire : Les illustrations de ce chapitre sont loin d’être d’une qualité irréprochable, c’est parce qu’elle date d’une époque où mes chroniques étaient transmises au journal sans le support technique du numérique. La plupart des illustrations que me fournissaient les correspondants de la Petite Gazette étaient alors de simples photocopies. Il me semblait utile de le rappeler.

La Petite Gazette du 26 juillet 2000

A LA RENCONTRE DU BERGER DE PETIT-BOMAL

Madame Christine Gillet, de Jemelle, ne reçoit pas Les Annonces, car elle habite en dehors du triple secteur de distribution ; cela ne l’empêche cependant pas d’en être une lectrice assidue et attentive grâce à une de ses amies de Chéoux, qui lui envoie régulièrement ses journaux. Mme Gillet est née, en 1922, à Bomal, elle a quitté le village dix ans plus tard, mais en emportant avec de merveilleux souvenirs d’enfance. Elle se souvient notamment d’un personnage qui, il y a quelques années, tint la vedette de La petite Gazette : le berger de Petit-Bomal.

« Nous allions, de temps en temps, nous promener à la ferme ; il y avait une dame qui s’appelait Rachelle. Ce que nous adorions voir par dessus tout, c’étaient les moutons, quand ils rentraient de Saint-Rahy. Nous attendions pour les regarder rentrer. Le berger dormait alors dans la bergerie ; j’ai encore son image devant les yeux. Il est là devant moi avec sa houppelande… »

J’imagine que ma correspondante n’est pas la seule, parmi les lecteurs et les lectrices de La Petite Gazette, a avoir conservé des souvenirs, peut-être même aussi des photos, des derniers bergers de nos régions. Comme nous l’avons fait avec d’autres professions disparues ou menacées, j’aimerais beaucoup que cette rubrique s’ouvre aux souvenirs relatifs aux bergers de nos régions, aux craintes que leurs connaissances faisaient naître, à leur vie, aux horaires auxquels ils étaient soumis…J’espère surtout en recevoir des photographies, que ce soient celles de ces vieux bergers du début du siècle ou celles de ces nombreux enfants qui, il n’y a pas si longtemps, ont surveillé ou gardé les petits troupeaux des grandes fermes de chez nous. Qui sera le premier a faire revivre cette profession si importante hier encore.

La Petite Gazette du 13 septembre 2000

LES BERGERS DE NOS BELLES CONTREES

Les hasards du contenu de vos correspondances m’ont mis sur la piste des bergers et des bergères qui, jadis, faisaient paître petits et grands troupeaux le long de nos chemins, dans les bois ou sur les terrains communaux. Comme vous êtes réellement formidables, il m’a suffit d’en parler une seule fois pour recevoir vos premiers commentaires et, surtout, vos premiers documents.

Ainsi, j’ai l’immense plaisir de vous proposer une première photographie illustrant cette nouvelle rubrique ; elle provient des collections de Monsieur Freddy Lemaire, d’Aywaille.

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« Ce berger a été photographié, pour les éditions LUMA, d’Aywaille, avant 1940, dans la région de Harre-Burnontige. »  Mais nous ne savons rien de l’identité de ce berger qui fait paître son maigre troupeau ; était-il vraiment berger ou l’a-t-il été le temps de prendre cette photo dont la légende nous dit qu’il s’agit de Bellem ? Grâce à vous, nous en saurons certainement davantage très bientôt. Dans nos prochaines éditions, nous retrouverons d’autres bergers et bergères de nos contrées, mais je vous engage à m’envoyer photos, documents et souvenirs que vous avez conservés de ces étonnants personnages d’hier.

La Petite Gazette du 20 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

Il n’y a pas que l’illustre Bellem qui garda les moutons de nos vallées et de nos plateaux…

Monsieur Louis Vieuxtemps, collaborateur régulier du journal Les Annonces, m’a confié cette jolie photographie d’une bergère, encore active avant la dernière guerre mondiale, Léocadie Hanozet

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Mon correspondant apporte quelques renseignements intéressants sur ce personnage : « La famille Hanozet s’installe sur la ferme de Petit-Bomal en mai 1909 et y restera jusqu’en 1946. 14 enfants sont nés dans cette famille dont Jean-Baptiste Hanozet, (11 mars 1873 – 11 janvier 1963), l’aîné des quatre garçons qui sera le dernier berger de Saint-Rahy, pâturages dominant la ferme en direction d’Izier.

Léocadie Hanozet, (21 juillet 1867- décédée fin 1944) était une des dix filles de la famille. A l’occasion, elle relayait Jean-Baptiste, mais tout porte à croire qu’elle fut bergère avant lui et, de ce fait, fut l’avant-dernière bergère de Saint-Rahy. »

Vous aussi, certainement, vous avez des souvenirs de ces bergers d’hier, du mystère qui entourait leurs connaissances, de leurs pouvoirs supposés… Nous en parlerez-vous ? J’attends avec beaucoup d’impatience tout ce que vous pourrez nous dire à ce propos.

La Petite Gazette du 27 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

C’est encore à Monsieur Louis Vieuxtemps que nous devons ces deux très jolies photographies du dernier berger de Saint-Rahy, pâturages relevant de l’ancienne seigneurie de Petit-Bomal, à quelques centaines de mètres d’où se construit votre hebdomadaire préféré ! On y voit Jean-Baptiste Hanozet, le frère de Léocadie dont vous avez fait la connaissance la semaine dernière.

003« Sur ce cliché, nous dit M. Vieuxtemps, Jean-Baptiste Hanozet est âgé de près de 70 ans (nous sommes en 1942), on le voit quittant la magnifique ferme de Petit-Bomal pour se rendre vers le mont Saint-Rahy, comme il le fit durant 37 ans.

 

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Cette autre photographie date de la même époque, elle aurait été prise quelques semaines après la précédente, nous précise notre correspondant. Il semble bien que c’est alors le printemps, les fleurs éclairent les pâturages de leurs jolies couleurs et le berger est là, pensif mais attentif, son chien à ses pieds et sa canne à la main. »

Si vous avez connu ce berger ou si vous en avez connu d’autres, ce serait particulièrement intéressant que vous nous confiez vos souvenirs, vos anecdotes, vos documents pour faire revivre cette vieille profession de nos régions.

La Petite Gazette du 18 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Grâce à la précieuse collaboration de plusieurs collectionneurs de vues anciennes de nos contrées, j’ai eu l’immense plaisir de vous présenter plusieurs clichés de bergers ou de bergères de nos régions ; et les photographies parues ont suscité, à leur tour, d’intéressantes réactions.

Aujourd’hui, c’est Monsieur Freddy Rixhon, de Ferrières, qui nous apporte de précieux renseignements relatifs au berger présent sur la carte postale que nous avait confiée M. Freddy Lemaire, d’Aywaille. (Voir l’article du 13 septembre 2000)

« Le berger présent sur cette photographie n’est autre que Monsieur François Mahieu, de Burnontige, mieux connu encore sous le nom de « François d’al Creû » explique mon correspondant. Voici ce que dit de lui Maurice Capitaine dans Temps et cendres de mes jeunes années, le numéro 11 de la très belle collection « Au rythme de Ferrières »

 « François Mahieu, habitant le lieu-dit Al Creû, sur le chemin de Saint-Antoine. Une grave maladie, le typhus, contractée dans son jeune âge, avait laissé quelques séquelles dans son comportement. Oh rien de bien grave ! C’est ainsi qu’il avait vingt, parfois trente, chèvres auxquelles il s’adressait sur un ton doctrinal châtié. Les chèvres qui ne comprenaient évidemment rien à cet éloquent laïus avaient pris l’habitude de s’assembler autour de lui, paraissant  prêter une oreille attentive à ses propos. Les enfants qui passaient par-là pour se rendre au catéchisme en avaient fait un sujet de curiosité. Ils s’arrêtaient pour voir et entendre notre ami pérorer, parfois pour s’en moquer, mais fort rarement, car François était un homme doux, gentil, malin qui n’aurait pas fait de tort à une mouche. »

Monsieur Rixhon, en collectionneur averti qu’il est, me signale qu’il existe au moins quatre autres cartes postales, d’autant d’éditeurs différents, immortalisant ce berger ! Je le remercie chaleureusement pour toutes ses informations.

Une personne de Werbomont, qui a très bien connu Jean-Baptiste Hanozet, le dernier berger de Petit-Bomal, a eu l’extrême gentillesse de nous contacter pour nous narrer quelques souvenirs :

« Je veux bien croire que j’ai bien connu ce berger, me dit-elle, car c’est mon mari, malheureusement décédé aujourd’hui, qui, au moment de l’Offensive, lui a racheté son troupeau. La famille Hanozet se préparait à quitter la ferme de Petit-Bomal et Jean-Baptiste proposa à mon époux de reprendre le troupeau. Mon mari a toujours élevé des moutons, il le faisait pour la viande, pour l’élevage… Il fut d’ailleurs le premier à avoir fait venir des moutons d’Angleterre ! Mon époux et le berger se connaissaient évidemment et, pendant les années de guerre, ils s’étaient notamment aidés pour répondre aux réquisitions allemandes. Quand mon mari a accepté la proposition du berger de reprendre ses bêtes, s’est posée la question du transport de celles-ci. Comment les moutons allaient-ils aller de Petit-Bomal à Bois Saint-Jean ? En marchant, tout simplement ! Jean-Baptiste Hanozet souhaita que ce soit mon mari qui l’accompagne pour cette longue promenade et c’est ce qui se fit. Quand les bêtes furent arrivées sur place, j’ai vu le vieux berger pleurer de joie ; il se disait très heureux de constater que ses moutons seraient mieux encore.

Au sujet du berger de Petit-Bomal, je me rappelle une anecdote qu’il racontait. Souvent, nous disait-il, il lui arrivait de se disputer avec son frère, mais toujours pour la même raison : la nuit, Jean-Baptiste se relevait pour aller chiper le bon foin que son frère gardait pour ses chevaux ! »

Un immense merci à cette lectrice qui nous a réservé ces quelques souvenirs de première main.

La Petite Gazette du 31 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

C’est toujours avec beaucoup d’impatience que j’attends que vous me confiez vos souvenirs des rencontres que vous avez sans doute faites avec ces étonnants personnes de nos régions. En effet, les bergers et les bergères ont toujours bénéficié d’une aura de mystère auprès de toutes les personnes qui ne possédaient pas leurs connaissances des choses de la nature. En espérant que vous aurez la gentillesse de nous parler de ces personnages extraordinaires, je ne résiste pas au plaisir de vous présenter deux nouvelles cartes postales anciennes ayant pour sujet principal le berger de Burnontige, François Mahieu.

Monsieur F. Rixhon, de Ferrières, qui avait reconnu ce berger sur une photo prêtée par Monsieur Lemaire, d’Aywaille, m’a remis quatre cartes postales différentes présentant ce berger ; vous en découvrirez deux aujourd’hui.

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 Carte postale des éditions Goblet, Source de Harre à Burnontige portant en légende « Harre : un berger ardennais dans les environs de la Source de Harre » avec, en plus, la mention « Touristes, visitez la Source de Harre »

 006

 carte postale des éditions Léon Vanderhoven, à Liège, portant en légende : « Burnontige – Le chèvrier. Un coin pittoresque de nos environs » Avec, en plus, la mention : « Pension de Famille Gaiemet-Mignolet Burnontige – Werbomont. Téléphone : 70 Werbomont »

 

La Petite Gazette du 8 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES, DES PERSONNAGES ETONNANTS …

Toujours avec le seul désir de vous voir me communiquer les souvenirs que vous avez conservés de vos rencontres avec ces personnages étonnants qu’étaient les bergers et les bergères de nos contrées, j’ai l’immense plaisir de vous faire découvrir les deux dernières cartes postales représentant le berger de Burnontige que m’a, si gentiment, prêtées Monsieur Rixhon, de Ferrières.

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 Carte postale éditée par Photo Gonay, Moulin Harre

008

Editeur Hôtel Colin

Mon correspondant a indiqué que cette vue daterait de 1935

Si vous possédez, vous aussi, des photos de bergers ou de bergères de nos villages ; pensez que nombreux sont les lecteurs et les lectrices qui prendraient plaisir à les découvrir. Vos souvenirs sont, bien entendu, les bienvenus. Merci d’avance.

La Petite Gazette du 15 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Monsieur J. Paquay, de Nadrin, nous a déjà fait le plaisir de partager avec nous les jolies photographie de sa collection ; aujourd’hui, il nous propose cette jolie carte postale du château Saint-Jean, aux environs de la Baraque Fraiture, plus précisément à Samrée.

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« Cette carte postale a été postée le 22 juin 1913, me précise M. Paquay. Cette photographie nous fait découvrir un berger bien habillé, gardant son troupeau près de la façade arrière de l’imposant château de « Bois Saint-Jean ». Il est aidé dans sa tâche par un garçon et deux chiens.

Le recto de la carte atteste du reçu par un certain Victor Vincent, à Bihain, de la somme de deux cent treize francs et cinquante centimes, à l’adresse de François Chabat, négociant en laines à Comblain-la-Tour.  Qui était le dénommé Victor Vincent ? Etait-il le propriétaire des moutons ou le régisseur du château ?

En ce qui concerne le château construit au XIXème siècle par le Comte de Limburg Stirum, il avait alors, avec son impression donjon et sa tour ronde, des allures de petite forteresse. Ayant été réquisitionné par les Allemands pour y établir le quartier-général de Von Manteuffel à la fin de la guerre, il fut bombardé et incendié par les Alliés, fin 1944. Reconstruit après la guerre, il a perdu les allures médiévales de son caractère d’antan. »

Merci pour toutes ces informations ; j’espère que l’un ou l’autre lecteur pourra répondre à votre question relative à Monsieur Victor Vincent.  Votre question j’ajoute la mienne, qui nous parlera de ce négociant en laines de Comblain-la-Tour ? J’imagine que parmi les lecteurs de l’excellente revue « Les Echos de Comblain », il s’en trouvera un qui possède des renseignements à propos de ce négociant ; peut-être nous fera-t-il le plaisir de les partager avec nous ?

Monsieur Freddy Rixhon, grâce à qui nous avons pu faire la connaissance du berger de Burnontige,  m’a écrit à nouveau pour me demander de rectifier le nom de ce berger : « depuis toujours, j’ai entendu les gens du cru parler de F. Mathieu, pour désigner ce berger ardennais ; le livre de M. Capitaine, qui est une référence pour moi, m’a conduit à corriger le Mathieu en Mahieu :  ce fut une erreur. Ce Mathieu, source confirmée par une nonagénaire, en pleine forme, de Burnontige, a eu une fille mariée à un Mahieu, d’où probablement la confusion. »

Merci à M. Rixhon pour son souci du détail et de la précision.

La Petite Gazette du 20 décembre 2000

BERGERS ET BERGERES DE NOS REGIONS

La photo parue, il y a un mois, dans La Petite Gazette et nous présentant le berger du château de Bois St-Jean, a fait réagir un lecteur heureux cette photo et tout aussi heureux de partager ses souvenirs avec nous

« Le berger Victor Vincent, que l’on voit sur cette photo, était le cousin germain de mon père, Camille Vincent. Il exploitait, en tant que locataire et avec ses parents, ses frères et ses sœurs, la ferme du Bois St-Jean, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Son père, Lambert Vincent, était le frère jumeau de mon grand-père paternel ; il est décédé au Bois St-Jean et repose au cimetière de Bérismenil. Mon père parlait assez souvent de ses cousins et cousines du Bois St-Jean et, particulièrement, de Victor qui s’occupait d’un grand troupeau de moutons, dont ils étaient les propriétaires. »

Merci M. Vincent d’avoir, pour La Petite Gazette, ressuscité les souvenirs de votre papa.

La Petite Gazette du 10 janvier 2001

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Après la parution de la jolie photographie et des informations relatives au berger du domaine de Bois Saint-Jean, M. J. Paquay, de Nadrin, a glané de nouvelles informations qu’il a tenu à partager avec nous.

Madame J. Renard-Cornet, de Hives, dont le papa était garde-chasse à Saint-Jean, a bien connu Victor Vincent. « Il était fermier au domaine de Bois Saint-Jean ; je me souviens bien qu’il faisait aussi, à la demande, le tour des fermes des villages voisins pour châtrer les jeunes taureaux et en faire des bœufs destinés à l’engraissement. »

010 Carte-vue montrant la façade avant du château, avant 1903 (carte-vue extraite des collections de M. J. Paquay)

 

 

 

Madame P. Petit-Rappe lui a également confirmé que Victor Vincent était bien le fermier de Saint-Jean : « je l’ai d’autant bien connu qu’il était un frère de ma maman ; il était aussi marchand de bestiaux. A cette époque, le troupeau de moutons se composait d’un millier de têtes appartenant au fermier. Ceci explique le reçu attestant une transaction personnelle de V. Vincent, pour une fourniture de laine à M. Chabat. La production herbeuse sur ce plateau froid, sur des terres acides, dans un îlot agricole souvent noyé dans le brouillard et entouré de grandes forêts, était très aléatoire. De plus, les moutons devaient chaque jour partager leur herbage avec le gibier : cervidés et surtout sangliers laboureurs. La concurrence était très vive. C’est d’ailleurs cette raison qui motiva V . Vincent à quitter le domaine dans les années 20 – 25 pour émigrer à Ortho, puis à aller finir ses jours à Bastogne. Il fut remplacé à Saint-Jean par la famille Désert, qui continua l’exploitation ovine jusque dans les années 70. Le troupeau de moutons d’Alphonse Désert se composait lui aussi d’un millier de têtes. »

Monsieur Louis de Fisenne, de Fisenne, a également réagi suite à la parution de la photo du berger de Bois Saint-Jean : « Dans mon jeune âge, j’allais passer une partie de mes vacances au château de Bois Saint-Jean. J’y ai dès lors connu, bien qu’il soit déjà très âgé, l’ancien propriétaire, le Comte de Limburg, qui n’avait pas d’enfant. Je connaissais bien son fils adoptif, Charles, avec qui j’entretenais d’excellentes relations. Je possède la même carte postale que celle publiée dans La Petite Gazette et je puis vous affirmer que le berger avec ses moutons est bien le propriétaire du troupeau et non le régisseur du château. Le gamin qui l’accompagne est son neveu, Léon Dumont, mon cousin. En effet, la maman de Léon et la mienne étaient les sœurs de Victor, qui, avec  sa maman, et d’autres sœurs et  frères, occupait les bâtiments de la ferme. Je suis né en 1911 et je me souviens  très bien que nous allions, à Pâques, récolter les œufs que les cloches avaient déposés dans le parc du château. C’était encore la bonne époque. Je suis déjà retourné souvent à Bois Saint-Jean pour revivre un peu de ma jeunesse. »

011Photo de la cour de la ferme de Bois Saint-Jean dans les années 1920. A l’arrière-plan : le château (document extrait des collections de M. J. Paquay)

Monsieur Paquay a également conservé des souvenirs du début de sa carrière de garde forestier quand, plus d’une fois, il a retrouvé des animaux égarés, ou en fugue, dans les bois communaux de Samrée, dont j’ai la garde et qui jouxtent le domaine de Saint-Jean Les moutons quitteront définitivement Saint-Jean après la retraite de M. A. Désert. Après un intermède de bétail indigène, ils sont remplacés, depuis quelques années, par des animaux plus imposants, venant d’outre-Atlantique : des bisons canadiens. Nos cervidés et autres sangliers ardennais ne font plus le poids face à ces mastodontes américains : la concurrence est devenue déloyale, ils doivent désormais s’alimenter en forêt uniquement. »

Un immense merci

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

LES MOUTONS ET LES BERGERS DE LA COMMUNE DE FERRIERES

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, a entrepris une intéressante recherche sur les troupeaux et les bergers de Ferrières au début du XIXe siècle. Il nous en livre le résultat :

« Nous  avons  remarqué  que  le  relevé géographique  de  Philippe Vandermaelen établi  en  1831 précisait  que  la  commune  de  Ferrières  comptait autrefois  8  troupeaux  de  moutons. Les  relevés  de  population  de  la  commune  ont  commencé  à  être  tenus  à  partir  de  1846. Nous  devrions  donc  y  retrouver  la  trace  de  plusieurs  de  ces  bergers. Le  résultat  de  cette  recherche  donne :

Stiennon Gilles, 67  ans, né  à  Esneux,  il  habite  Lognoul.

Dubois  Lambert, 32  ans, né à Hamoir.

Dengis  Julien, né  à  Villers  Ste-Gertrude  le  15  mars  1830.

Maréchal Gilles, né  à  Louveigné  le  13 mars 1802.

Maon Gérard, né 15  janvier 1792, il  habite  le  Thier  de  Ferrières.

Bodson Gilles, né  à  Bra, 23 ans, il  habite  St-Roch.

Abraham Servais, 47 ans, né  à  My, il  habite  Rouge Minière.

Gosset  Théodore Joseph, berger  né  à  Heid  le  9 octobre  1825.

Le  relevé  suivant, celui  de  1866, en  cite  encore :

Maréchal Gilles  Joseph, né  à  Louveigné  le  13  mars 1802, il  meurt  le  27  avril 1868. Berger  à  Thiers, maison nr 4.

Maon Gérard, né  à  Ferrières  le  15 janvier 1792, il  meurt  le  6  juin 1869, il  habitait  à  Thiers.

Dangis  Julien, né  à  Ferrières  le  3  septembre 1808, berger  à  Burnontige.

Ajoutons  qu’un  dénombrement  établi  en  1822  dans  la  commune  mentionnait :

165 vaches  et  395 moutons  à  Burnontige, 44 chefs  de  famille.

143 vaches  et   32 moutons  à  Houpet  et  Malacord, 47 cf.

109 vaches et  227 moutons  à  Ferrières  et  Lognoul, 43 cf.

69 vaches  et  62 moutons  à  Rouge Minière, 29 cf.

Soit un total : 486 vaches  et  716  moutons  pour  163 chefs  de  famille. »

 

 

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

La Petite Gazette du 12 juin 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ? 

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, évoque des souvenirs professionnels et vous interroge sur des réalités disparues :

« Mon métier de conducteur de trains m’a permis de circuler dans bien des gares où les espaces libres étaient souvent occupés par des chantiers de découpe de petits bois alors pourrait-on aborder ce sujet dans La Petite Gazette ?

Il n’y a pas si longtemps, on pouvait encore admirer dans bien des gares desservies par la ligne 42 Rivage-Gouvy des endroits réservé à la découpe de bois. Depuis la forêt, les camions ou jadis des chariots acheminaient des bois en long qui étaient découpés en longueurs différentes suivant les sections et leurs futures utilisations. Après, il fallait semble-t-il charger les wagons à la main.

train-dans-les-bois« Photo prise par mes soins le 29 avril 1988, près de l’entrée côté gare du tunnel de Trois-Ponts, car j’avais ce jour là l’honneur de conduire ce petit train »

Quel travail, car la rentabilité devait être assurée, les commandes honorées et les salaires mérités. Toutes ces petites découpes de bois ont disparu du paysage ferroviaire, mais pourrait-on laisser la parole à tous ceux qui y ont travaillé parfois sous un soleil généreux, mais aussi lors du mauvais temps très souvent présent dans notre région ?

Depuis combien de temps ces chantiers existent-ils ?

Quels étaient les outils ou les machines utilisées ainsi que la force motrice disponible ?

Quel était le rendement demandé à un homme ?

Comment étaient chargés les wagons et quelle était leur destination ?

Les ouvriers avaient-il un abri pour manger ou se réfugier en cas d’orage par exemple ?

Les salaires étaient-ils payés en fonction du travail effectué ou à l’heure ?

Et cerise sur le gâteau existent-ils des photos disponibles ?

J’adresse déjà un grand merci à tous ceux qui voudront bien satisfaire ma curiosité d’en connaître plus sur ce passionnant et exigeant métier.

La Petite Gazette du 17 juillet 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ?

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, souhaitait il y a quelque temps que vous évoquiez ces réalités disparues, Madame Denise David-Lacasse, de Harre, répond à son souhait :

« En lisant cet article sur les métiers du bois, il me revient un fait que feu mon époux Marcel m’a raconté, une difficulté qu’il a rencontrée dans l’exercice de son métier.

La guerre terminée, dès 1945, mon mari, 22 ans alors, a travaillé en exploitation forestière comme découpeur : les troncs d’arbres arrivaient sur son lieu de travail après avoir été ébranchés et pelés. Son travail consistait à scier à la longueur demandée, à trier les bois selon leur grosseur et à les charger sur des wagons pour les envoyer, par le vicinal, en région liégeoise pour le besoin des charbonnages.

Je précise que le vicinal s’arrêtait dans les villages pour charger et décharger les diverses marchandises et les personnes dans le sens Comblain – Manhay. On y rechargeait ensuite les divers bois préparés pour livrer dans les charbonnages liégeois. Les chantiers où les hommes travaillaient s’appelaient « gares ».

Scier les bois était très délicat car ils avaient été mitraillés pendant la guerre et étaient assez abîmés. Il fallait donc beaucoup d’attention pour ne pas casser la scie. Quand la scie ne coupait plus, il fallait intervenir avec la pince présentée, notamment, par M. Serge Ghyse, de Nandrin. Cette pince à avoyer servait au découpeur à redresser les pointes de la lame, en wallon on disait : rimète dèl voye ; ensuite, il fallait relimer la scie. »

Monsieur Joseph Gavroye, de Soumagne, évoque également ses souvenirs sur ce sujet :

« Dans ma région et depuis la création, en 1904, du vicinal Lierneux- Vielsalm, des quais étaient réservés à cette manutention. J’ai bien connu, dans mon jeune temps, pareille entreprise à l’arrêt de Regné-Hébronval. Il y a bien des années déjà qu’on a fait table rase de ce quai pour y installer un lotissement.

Comme le dit si bien Monsieur Depierreux, les bois en long y étaient acheminés en provenance des grandes forêts voisines. Il s’agissait d’épicéas dont le bois était très apprécié pour servir à l’étançonnage dans les galeries des mines de charbon.

Une équipe de 4 à 5 hommes était occupée à scier ces bois suivant les longueurs souhaitées. Il s’agissait en l’occurrence de la famille Frérès, le père, les deux fils plus un ouvrier. Pour leur protection, en cas d’intempéries, les braves disposaient d’un petit abri de fortune et, pour se chauffer, ils se servaient des déchets de bois, ce qui ne manquait pas. Je crois qu’ils étaient payés suivant le volume débité. Ces quatre scieurs ne sont plus de ce monde aujourd’hui !

Le travail en lui-même se faisait en continu, tous les jours ouvrables de la semaine. Les scies ordinaires subissaient régulièrement un affûtage exécuté de main de maître par un des types de l’équipe, spécialiste dans cette tâche. Au préalable, des chèvres en bois avaient été fabriquées afin de supporter les pièces à débiter. Les chèvres étaient marquées des longueurs à respecter lors de la découpe. Le sciage terminé, la marchandise était entreposée par lots respectifs le long du quai de chargement ; des wagons adéquats étaient acheminés sur des voies de garage et cela suivant les besoins. Les scieurs y déposaient les bois avec un certain art car il y allait de la sécurité lors du transport par rail jusqu’à la gare S.N.C.B. de Vielsalm où le tout était centralisé. Un transbordement avait lieu sur des wagons S.N.C.B. dont l’empattement était différent.

Des petits chantiers étaient prévus le long des voies ferrés, beaucoup disparaîtront lors de la fermeture des charbonnages et aussi lors du démantèlement des lignes du vicinal. »

La Petite Gazette du 28 août 2013

LES CHANTIERS DE BOIS DECOUPES A MESURE

Monsieur André Hubert, de Gouvy, nous confie ses précieux souvenirs à ce sujet :

« Ces chantiers existaient dans les gares mais aussi le long des routes et des chemins forestiers. A partir de l’été 1940, j’ai fait partie d’une équipe de trois personnes qui découpaient des bois en long sur la route de Dinez à Montleban. J’avais 14 ans et j’habitais Les Tailles, je marchais 7 Km pour aller de mon domicile au chantier, par des petits chemins, et faisais le même chemin au retour, le soir. On travaillait aussi le samedi et je me reposais le dimanche après-midi pour être dispos le lundi matin.

Les bois posés en long sur trois chevalets étaient découpés suivant des données fournies par le marchand. Les bois étaient tracés par un homme expérimenté qui devait bien réfléchir pour tirer le meilleur volume de la somme des bois découpés. Les bois découpés à la petite scie étaient classés par espèce. Je me souviens de trois appellations :

– sclimbes = bois minces et de faible longueur (1,50 m. environ) qui servaient sans doute à confectionner des claies de protection latérale ou verticale.

– rallonges = pièces plus grosses d’environ 3 m. de long.

– bois plus gros et de différentes longueurs pour les charbonnages et les chantiers, pour le soutènement.

Nous étions payés au volume des bois découpés et réceptionnés. Après ce chantier de 1940, le résultat financier pour chacun des participants donnait un salaire d’environ 35 francs par personne et par jour. Je n’ai pas gardé le souvenir du mode de transport utilisé vers les gares ou les entreprises utilisatrices . » Un tout grand merci pour ces renseignememts.

La Petite Gazette du 8 octobre 2013

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur José Cornet, de Juzaine, évoque ses souvenirs de ce temps révolu :

« Mon frère Victor a travaillé de nombreuses années sur le chantier de la gare de Bomal comme découpeur de bois avec, entre autres, Aimé Gaspard, dit le Boubou, de Champ de Harre (que vous découvrirez sur la photo ci-dessous), Floribert Close, de Barvaux, Marcel Maqua, de Rouge Minière, Ariste Devahive, de Fays, Raymond Lambert, d’Erezée… et d’autres qui, comme lui, découpaient les bois qui avaient été découpés à la cognée et étaient amenés par camion, des Ford Canada.

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Une vieille baraque en bois, adossée au talus, servait pour les repas, déposer les vêtements et ranger le petit outillage ; il y sentait bon la résine et le café.

Nous, gamins avec mon frère, descendions à vélo sur le chantier le mercredi et nous allions souvent chercher de l’eau fraîche pour les hommes à la havée de Herbet. Ce métier était très dur car, après la découpe, il fallait charger les bois sur des wagons et, évidemment, cela se faisait à la main. Parfois, ils déchargeaient aussi des wagons pour le compte des entreprises Detrooz qui étaient toutes proches.

Après la scie à main est venue la tronçonneuse, ils en ont également découpé à la scie circulaire. Les employeurs étaient les entreprises Huet, de Grand-Menil, et Charles Rigo. Occasionnellement, mon frère Victor a également travaillé à la découpe de bois, sur l’ancienne gare de Chêne al Pierre et du côté de Martinrive. »

La Petite Gazette du 16 octobre 2013

LES GARES SNCV DE JADIS, AVEC LES  « QUAIS DE DECOUPAGE ».

Monsieur Raymond Gillet a poursuivi l’enquête, il nous livre ses souvenirs :

« La ligne SNCV PussemangeBouillon–  Paliseul comportait plusieurs quais de découpage, notamment dans les gares de : SugnyCorbionNoirefontaineMogimont (Bellevaux) et à Paliseul c’était le « quai de transbordement » où la ligne SNCV côtoyait une voie SNCB.

A l’aube des années cinquante, en gare de Noirefontaine,  il y avait en permanence plusieurs découpeurs de bois de mines ; notamment mon oncle Alfred Rosillon (né en 1928), il œuvrait avec plusieurs frères de la famille Adam. Les épicéas arrivaient déjà par camions, ces bois avaient été triés pour les « bois de mine ».

Le quai de découpage était très proche et parallèle à une voie, un emplacement était réservé aux chevalets. Au nombre de trois, ils étaient  alignés et constituaient la « gade ». Une volige reliait les chevalets, elle comportait des traits de scie tous les 10cms ; pour les mètres les traits étaient plus importants.

Après le sciage des « bois de mines », les différentes « chutes » ou pointes d’épicéas étaient triées, sciées en 1,50/1.60 m et répertoriées par grosseur (longueur de la circonférence au fin bout). Le classement était le suivant : 12/14cm – 14/16cm – 16/18cm – 18/20cm, l’oncle Alfred n’utilisait pas le mètre ruban pour ce classement,  il formait un cercle tout simplement en rapprochant les pointes du pouce et de l’index de la main.

Ces différents bois étaient fagotés en bottes et ces dernières s’appelaient les « sclimbes ». Par grosseur le nombre de bois était le suivant : 12/14 = 12 bois – 14/16 = 10 bois – 16/18 = 8 bois – 18/20 = 6 bois. Mon oncle se rappelle avoir fagoté jusqu’à 40 sclimbes à l’heure (le classement par grosseur étant déjà réalisé). Son record personnel fut la réalisation de 300 fagots de sclimbes sur une journée ; le fagot était payé 1,50fr à l’époque (1948-1950).

Je vous invite à regarder la photo d’un autorail tracteur Art. 104 qui amène des wagons vides pour chargement des bois de mine à Dochamps ; remarquez, derrière le tas des bois de mine, il y a un tas de « sclimbes » arrangés par grosseur, les rangées supérieures comportent 8 bois, les autres 6 bois.

autorail-dochamps

En ces temps-là il n’y avait pas de pointeuse sur le quai et  l’horaire était parfois irrégulier, le lundi généralement moins de 8 heures, les autres jours de 9 à 10 heures voire plus même, suivant le temps et les nécessités des  délais  de fourniture, chômage des wagons et acheminement vers Paliseul. La voie du vicinal longeant le quai de découpage permettait l’alignement de 6 à 7 wagons SNCV type à « haussette ».

Le casse-croute était vite réglé, excepté quand il y avait la « gamelle » un feu était nécessaire ce n’était pas courant parce que qui dit feu dit alimentation et surveillance, mais vu l’accumulation des pointes d’épicéas  cela devenait une nécessité.  Le coin repas était protégé des vents par un « hayon » ; rectangle réalisé avec des perches d’épicéas et de la toile de jute ou à défaut de la paille de seigle, ce hayon était incliné dos au vent et à la pluie. A cette époque la scie utilisée était toujours la scie à cadre; oncle Alfred en possédait deux, grand-père Ovide « rafraîchissait » régulièrement les lames.

Avant de conclure je souhaiterais vivement vous rappeler quelques chiffres édifiant de cette époque ; ce sont des chiffres extraits du « Rapport 1959 – 75eme exercice social SNCV ». En 1938 la dite SNCV a transporté 153.668 tonnes de bois de mines, en 1959 seulement  36.113 tonnes. Elle a possédé jusque 5.524 wagons de marchandises ouverts. Dans notre pays il y eu 158 gares de transbordement partagées avec la SNCB.

Vous remarquerez la seconde photo avec la scie, le bidon « FB » (Ferronnerie Bouillonaise) et la typique gamelle.

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La Petite Gazette du 23 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Voici les souvenirs qu’un lecteur a gardés de cette époque :

« A la lecture de La Petite Gazette évoquant ces chantiers de découpe de bois, je me rappelle ma jeunesse à la gare de Marenne. Une voie de chargement se trouvait sur le territoire de la gare, un heurtoir était placé près de l’ex-passage à niveau et un autre en bordure de la prairie de chez Bechoux. Deux aiguillages étaient en service ainsi qu’un gabarit afin de surveiller le chargement des wagons.

Durant de nombreuses années, on a découpé une grande quantité de bois de toutes les mesures. Beaucoup de ces bois étaient destinés principalement aux charbonnages de la région liégeoise. Ces bois servaient aux galeries souterraines, où circulaient les wagonnets poussés par les mineurs ou tirés par les chevaux. L’avantage du bois dans la construction des galeries est le grincement du bois occasionné par les mouvements de la terre. Lorsque le bruit du bois se faisait plus fort, les mineurs avaient le temps de se mettre à l’abri dans un endroit plus sécurisé ; les dégâts provoquiés par l’éboulement n’auront pas fait de victimes…

Revenons au sciage du bois sur l’étendue de la gare ; actuellement, la route permettant la suppression du passage à niveau a fait disparaître cet endroit. Je me rappelle deux personnes ayant passé plusieurs années à découper les bois de notre région : M. Emile Gaillard et M. Joseph Dupont ont travaillé durant de nombreuses années, parfois d’autres ouvriers venaient en renfort.

Il y avait plusieurs mesures de découpe des bois. Le mètre-ruban ainsi qu’une toise, dont je ne me rappelle plus la longueur, étaient utilisés. La toise consistait en une longueur de bois sur laquelle se trouvaient deux grosses pointes en acier à une distance des scieurs. Après avoir découpé la base de l’arbre, l’ouvrier le mesurait avec cette toise. Rappelons que le bucheron, à cette époque, avait abattu l’arbre à la cognée, la coupe n’était dès lors pas aussi nette que quand elle fut faite à la tronçonneuse.

Les bois ainsi découpés étaient assemblés en tas d’une hauteur de deux mètres. Chaque tas contenait des longueurs et des diamètres différents. Lorsque les troncs avaient un grand diamètre, les ouvriers utilisaient la scie « passe-partout » ; pour les bois normaux, la scie ordinaire était utilisée. Ce n’était pas des armatures métalliques comme aujourd’hui, les deux montants, sur lesquels était fixée la lame, étaient reliés par un toron de corde avace, au milieu, un morceau de bois, qui permettait en tordant plus ou moins fort cette corde, de tendre la lame ; le morceau de bois se bloquait alors sur le bois reliant les deux montants.

Pour se reposer, pour manger et se mettre à l’abri, une petite cahute était installée entre deux tas de bois ; une tôle pour le toit et, à l’arrière, une toile de jute pour protéger les deux compagno,ns de travail. Lorsque la lame ne donnait plus de bons résultats, il était nécessaire de remettre l’outil en ordre de marche. Dans l’abri de fortune, il fallait aiguiser la lame avec une lime triangulaire et parfois utiliser la pince à avoyer, dont la Petite gazette nous a plusieur fois entretenus. » A suivre…

La Petite Gazette du 30 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Retrouvons la suite de ces souvenirs publiés dès la semaine dernière :

« Durant  la bataille des Ardennes, beaucoup de bois ont été abîmés : déracinés par les chars, abattus en partie par des obus ou remplis de shrapnells (du nom de l’inventeur anglais (1761 – 1842) de ces obus remplis de balles, en allemand, schrapnell. Actuellement, morceaux d’obus, de grenades…). Le territoire de la gare de chargement ne fut plus suffisant pour déposer les bois que les bûcherons abattaient dans la région. Plusieurs espèces d’arbres furent amenées devant la gare ou sur le terre-plein au-delà du passage à niveau. Seul le bois de sapin était utilisé pour les mines. Un grand nombre de wagons chargés de bois quittèrent la gare de Marenne, la bascule utilisée pour la vérification du poids des wagons n’a jamais autant fonctionné.

La bascule était située dans les environs du pont actuel, le gabarit se trouvait également en cet endroit. L’entretien de la bascule se faisait tous les trois ou quatre ans. En amenant d’autres wagons ouverts pour le chargement des bois, deux wagons fermés étaient étaient mis à stationner au butoir se trouvant près du passage à niveau. Un de ces wagons servait de bureau, cuisine et dortoir, l’autre était un petit atelier contenant même une petite forge. Deux ouvriers spécialisés devaient remettre les bascules en ordre de fonctionnement (peinture, remplacement des pièces défectueuses et étalonnage). En soirée, mon père allait quelquefois rendre visite à ces hommes, parfois je l’accompagnais. Je me souviens qu’un de ces ouvriers était originaire de Vielsalm.

Le transport par camion et la modernisation des scieries ont supprimé tout ce travail du bois qui se faisait sur le territoire de la gare de chargement. La fin de ces lieux de travail venait de commencer, la suite, vous la constater actuellement ! »

Madame Denise David-Lacasse, de Harre, se souvient également que « dans les villages le long de la ligne vicinale ManhayComblain-la-Tour, il y avait de ces terrains appelés « chantiers », c’était là que les ouvriers préparaient les bois à la demande pour alimenter les charbonnages liégeois. Les ouvriers chargeaient les wagons du vicinal qui s’en retournaient vers Comblain-la-Tour et là, de nouveau, il fallait du personnel pour décharger et recharger sur des wagons de la S.N.C.B. car l’empâtement était différent d’une société à l’autre. Ici, en Ardenne, ces chantiers s’appelaient « gares » tout simplement. On disait : lès ovrîs d’b’wès alî-st-ovrer so l’gåre. »

 La Petite Gazette du 13 novembre 2013

ENCORE A PROPOS DES CHANTIERS DE DECOUPE DES BOIS

Messieurs Raymond Gillet et René Gabriel ont beaucoup œuvré pour La Petite Gazette cette semaine. Il est vrai qu’il s’agit là de passionnés… Le premier nous raconte cette plaisante anecdote :

« La gare vicinale de Noirefontaine possédait deux  » quais de découpage ». Celui représenté sur cette photo est celui des « feuillus ». Le quai des « résineux » se situe à l’extrême gauche de la photo. (Nous en avons parlé dernièrement)

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Les personnes occupées sur ce quai étaient originaires de la région anversoise , il s’agissait de la famille Faes . Le papa, Louis, était né en 1886 à Turnhout,il parlait un français impeccable, ses enfants fille et garçons travaillaient avec lui. Louis avait des moustaches à la « hongroise ».
La route nationale parallèle au quai reliait Paliseul à Bouillon et, déjà à  cette époque, des touristes hollandais venaient visiter notre Ardenne, juchés  sur leurs typiques vélos.
Un jour Louis vis apparaître deux cyclistes hollandaises, il les laissa s’approcher et, de sa voix style Louis Jouvet, il leur « décrocha » la tirade suivante :

Abaissez le capot on voit le moteur, ce n’est pas pour le moteur, mais c’est pour l’odeur !
La plus âgée des dames lui répondit du tac au tac  » Viens-y frotter tes moustaches !  »

Louis était à cent lieues d’avoir une réponse en français, il en resta bouche bée. On ne l’entendit plus de la journée… »

Monsieur Gabriel nous fait part de l’état actuel de ses recherches, nous explique pourquoi le sujet l’intéresse et nous promet une suite à ses propos :

« J’ai rencontré, tout récemment, monsieur Pierre Colin, de Burnontige, dont les parentsz tenaient l’Hôtel du Vicinal. Il se souvient très bien de la gare de Burnontige où un chantier de découpe de bois de mine existait. Les wagons arrivaient avec le tram, étaient décrochés et placés sur une voie particulière. Il n’y avait pas de bâtiment de gare, seulement un quai et un bâtiments où les découpeurs pouvaient remiser leur matériel. M. Colin se rappelle les noms de deux de ces découpeurs, les frères Stelet, Fernand et Arthur.

Quand M. Josy Depierreux a lancé cette recherche dans La Petite Gazette, j’étais content car cet ancien métier de découpeur allait être, comme beaucoup d’autres petits métiers, oublié… J’avais décidé d’attendre quelque peu les premières réponses et elles sont venues. Très prochainement, je reviendrai vers vous avec nombre de renseignements SNCB. En effet, j’ai toujours habité des maisonnettes ou gares et, de ce fait, ai parcouru de nombreuses cours à marchandises. Par la suite, ma profession à la SNCB fut, pendant près de 40 ans, dans le domaine du factage, il s’agit d’un service s’occupant plus particulièrement, suivant les gares, des wagons, des commandes, de la distribution, du triage, de l’acheminement… »

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

ENCORE UN CHANTIER DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur Robert Nizet, de Vielsalm, nous confie à son tour sa contribution à la documentation sur les quais de découpe des bois longeant les lignes de chemin de fer. Il nous en présente un qu’il a bien connu.

« Celui-ci était situé à Vielsalm, en amont de la gare et sous le pont de la route de Rencheux. On y a découpé, des années durant, des quantités incroyables de bois destinés aux mines. C’était pour nous les gamins habitant au quartier de la gare un terrain de jeu idéal et pour nos parents une source inépuisable de « petit bois » pour allumer le feu. S’y sont succédé au travail les équipes (notamment) de Jean Bontemps de Ville-du-Bois, d’Armand Frères d’Hébronval et des Martiny des Tailles.

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La photo date de 1948 et j’y figure avec mon papa. »

La Petite Gazette du 18 décembre 2013

LES TRAVAUX FORESTIERS QUI OCCUPAIENT MON MARI

Madame Françoise Schröder-Closjans, de Louveigné, évoque le travail de son mari :

«Les premières années de notre mariage se passèrent à Francorchamps. Après la fenaison et la tonte des haies, mon mari, son voisin, L. Goffin, et les frères de celui-ci ont effectué divers travaux forestiers dans des bois appartenant à la famille Stersteven aux alentours de Stavelot, Francorchamps et Malmédy.

Tous les travaux s’effectuaient à la main, abattage, découpage, sciage…

Avant la plantation de sapins dans des endroits fangeux, il fallait faire des mottes pour éviter le pourrissement des jeunes racines. Ce travail consistait à faire des rigoles autour d’un carré de terrain pour permettre au surplus d’eau de s’évacuer.

En 1960, quelques mois après notre arrivée à la ferme de la Fagne de Deigné, mon mari effectuait son premier débardage avec son cheval. Le travail en forêt était un travail d’équipe. Après l’abattage, l’ébranchage et, parfois, le pelage à l’aide d’une rasette, mon mari amenait les bois le long des chemins forestiers. Certains bois étaient chargés entiers et conduits dans les scieries de la région par camion. C’est en lisant une récente Petite Gazette, précise mon aimable correspondante, que je me suis souvenue de cet outil que mon mari possédait pour enlever les écorces ou peler les bois comme il disait. Il s’agissait d’une rasette que provenait, je pense, de la maison Joseph Leloup à Aywaille. N’en ayant plus l’usage, il l’avait donné à un de ses amis. Dans un ouvrage consacré aux vieux outils, j’ai retrouvé un modèle identique à celui que possédait mon mari et présenté comme étant : « un pèle-tronc, outil servant à l’écorçage des bois ».

Les bois de mine étaient sciés à la longueur voulue par deux découpeurs. Ces bois, chargés sur des camions, étaient acheminés directement vers les charbonnages ou à la gare de Remouchamps pour être expédiés par wagons. Tous ces travaux du début des années 60 étaient effectué à la main.

Quelques années plus tard, ce fut l’apparition des tronçonneuses et des engins mécaniques mais, pour le débardage, le cheval est resté prioritaire. Lorsque le débardage de gros arbres nécessitait un attelage à deux chevaux, Pol Rixhon, de Paradis-Harzé, venait seconder mon mari.

Par mauvais temps, mon mari ramenait certains ouvriers forestiers à la maison pour manger leurs tartines. Cette période a été très enrichissante, elle nous a permis la rencontre de divers métiers du bois et de la forêt ainsi qu’un nouveau vocabulaire français et wallon. »

La Petite Gazette du 29 janvier 2014

AVANT DE COUPER TOUS CES BOIS, IL A FALLU LES PLANTER…

Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo, dévore avec passion archives et vieux documents et, surtout, aime à partager avec les lecteurs de La Petite Gazette les intéressantes qu’il fait :   « Voici  quelques  renseignements  retrouvés  lors  de  mes  recherches  dans  les  différents  bans  locaux.

En 1837, le  roi  Léopold I, rentrant  vers  Spa  après  une  visite  à  la  cascade  de  Coo, se  trouve  désolé  devant  les  landes  arides  qu’il  traverse, nos  fagnes  où  paissent  alors  des milliers  de  moutons.  A  partir  de  cette  époque  de  nombreux  “experts”  vont  se  pencher  sur  ce  problème et  bien  des  années  plus  tard  un  plan  de  boisement  de  ces  vastes  étendues  sera  d’actualité. Vers  1875-1880  on  plante  donc  de  nombreux  feuillus  et  résineux  en  Ardenne. Les  résineux  sont  principalement  des  pins  sylvestres  et des mélèzes.

Ex: 1879. En  commune  de  Ferrières  le  bourgmestre  reçoit  l’information  d’envoyer  le  messager  enlever  25  kilos  de graines  de  pins  sylvestres  au  dépôt, les  graines  de mélèzes  seront  fournies  plus  tard. Ces  graines  seront  semées  en  pépinière  par  le  forestier  local. Il  n’est  alors  pas  encore  question  d’épicéa. Petite anecdote amusante à propos  de l’enlèvement  des  graines  pour  Ferrières en  1879, le  responsable  précise  au  bourgmestre d’envoyer  le  messager  « avec  un  sac  sans  trou … » I  vâ  mî … ! précise mon sympathique correspondant.

Plus  tard, en  commune  de  Basse-Bodeux  cette  fois, en 1914, les  autorités  notent  que  des  milliers  de  pins  sylvestres  ont  été  plantés  mais  qu’une  invasion    très  importante  d’écureuils  menace  ces  peuplements car  ils  rongent  les  écorces  et  les  arbres  dépérissent. Il  est  donc  décidé  de  tuer  les  écureuils  et  une  prime  de  25  centimes  par  animal  tué  est  accordée  à  condition  de ramener  la  queue  du  rongeur  au … bourgmestre !

Nous  avons  là  un  premier  départ  d’enrésinement en  Ardenne, il  est  probable  que  la  plantation  de  l’épicéa va  bientôt  apparaitre  également  peu  après.

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Il  faudra  attendre, bien  évidemment,  l’arrivée  du  rail  en  Ardenne (1890 pour  Rivage-Trois-Ponts) pour  remarquer  un  trafic  de  bois  de mines. Certaines cartes  postales, vers 1920  ou  peu  avant, montrent  des  wagons  chargés  de  longues  perches (poteaux  télégraphiques  probablement) et  bois de  mine  en  gares  de  Remouchamps  et  Trois-Ponts. »

Monsieur Jacques Bourdouxhe (voir les commentaires) s’est intéressé à cette série d’articles dans lesquels il a puisé des informations pour l’aider dans sa passion, le modélisme. Répondant à ma demande, il nous adresse ces deux photographies montrant la qualité et la précision de ses réalisations.

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Voici des photos de mon diorama représentant une bicabine  ( type 18  ) remorquant un wagon à haussettes chargé de grumes destinées aux charbonnages.

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Cette seconde photo a été prise au Brésil   ( mon épouse est brésilienne ) ou  j’ai amené le diorama pour une exposition de modélisme ferroviaire à Curitiba  (Etat du Parana )
Le matériel roulant est à l’échelle TT  ( 1/120 ) populaire en Allemagne et en Europe de l’est. L’écartement de voie est de 9mm pour représenter une voie métrique (ce qui est le cas pour la majorité des lignes vicinales qui ont existé sur le réseau SNCV/NMVB  ).
Comme il n’existe rien de disponible dans le commerce, à part les chassis tout le reste est de construction maison. Les carrosseries  ont été réalisées par la technique de l’impression 3D.
Ma famille maternelle  (famille Guillaume) a gravité pendant de longues années autour d’Esneux : Poulseur, Ham , Esneux (où je suis né), Fontin  et Montfort. »

Un grand merci à Monsieur Bourdouxhe et toutes les félicitations de la Petite Gazette