BERGERS ET BERGERES DE NOS CONTREES

Petite remarque préliminaire : Les illustrations de ce chapitre sont loin d’être d’une qualité irréprochable, c’est parce qu’elle date d’une époque où mes chroniques étaient transmises au journal sans le support technique du numérique. La plupart des illustrations que me fournissaient les correspondants de la Petite Gazette étaient alors de simples photocopies. Il me semblait utile de le rappeler.

La Petite Gazette du 26 juillet 2000

A LA RENCONTRE DU BERGER DE PETIT-BOMAL

Madame Christine Gillet, de Jemelle, ne reçoit pas Les Annonces, car elle habite en dehors du triple secteur de distribution ; cela ne l’empêche cependant pas d’en être une lectrice assidue et attentive grâce à une de ses amies de Chéoux, qui lui envoie régulièrement ses journaux. Mme Gillet est née, en 1922, à Bomal, elle a quitté le village dix ans plus tard, mais en emportant avec de merveilleux souvenirs d’enfance. Elle se souvient notamment d’un personnage qui, il y a quelques années, tint la vedette de La petite Gazette : le berger de Petit-Bomal.

« Nous allions, de temps en temps, nous promener à la ferme ; il y avait une dame qui s’appelait Rachelle. Ce que nous adorions voir par dessus tout, c’étaient les moutons, quand ils rentraient de Saint-Rahy. Nous attendions pour les regarder rentrer. Le berger dormait alors dans la bergerie ; j’ai encore son image devant les yeux. Il est là devant moi avec sa houppelande… »

J’imagine que ma correspondante n’est pas la seule, parmi les lecteurs et les lectrices de La Petite Gazette, a avoir conservé des souvenirs, peut-être même aussi des photos, des derniers bergers de nos régions. Comme nous l’avons fait avec d’autres professions disparues ou menacées, j’aimerais beaucoup que cette rubrique s’ouvre aux souvenirs relatifs aux bergers de nos régions, aux craintes que leurs connaissances faisaient naître, à leur vie, aux horaires auxquels ils étaient soumis…J’espère surtout en recevoir des photographies, que ce soient celles de ces vieux bergers du début du siècle ou celles de ces nombreux enfants qui, il n’y a pas si longtemps, ont surveillé ou gardé les petits troupeaux des grandes fermes de chez nous. Qui sera le premier a faire revivre cette profession si importante hier encore.

La Petite Gazette du 13 septembre 2000

LES BERGERS DE NOS BELLES CONTREES

Les hasards du contenu de vos correspondances m’ont mis sur la piste des bergers et des bergères qui, jadis, faisaient paître petits et grands troupeaux le long de nos chemins, dans les bois ou sur les terrains communaux. Comme vous êtes réellement formidables, il m’a suffit d’en parler une seule fois pour recevoir vos premiers commentaires et, surtout, vos premiers documents.

Ainsi, j’ai l’immense plaisir de vous proposer une première photographie illustrant cette nouvelle rubrique ; elle provient des collections de Monsieur Freddy Lemaire, d’Aywaille.

001

« Ce berger a été photographié, pour les éditions LUMA, d’Aywaille, avant 1940, dans la région de Harre-Burnontige. »  Mais nous ne savons rien de l’identité de ce berger qui fait paître son maigre troupeau ; était-il vraiment berger ou l’a-t-il été le temps de prendre cette photo dont la légende nous dit qu’il s’agit de Bellem ? Grâce à vous, nous en saurons certainement davantage très bientôt. Dans nos prochaines éditions, nous retrouverons d’autres bergers et bergères de nos contrées, mais je vous engage à m’envoyer photos, documents et souvenirs que vous avez conservés de ces étonnants personnages d’hier.

La Petite Gazette du 20 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

Il n’y a pas que l’illustre Bellem qui garda les moutons de nos vallées et de nos plateaux…

Monsieur Louis Vieuxtemps, collaborateur régulier du journal Les Annonces, m’a confié cette jolie photographie d’une bergère, encore active avant la dernière guerre mondiale, Léocadie Hanozet

002

Mon correspondant apporte quelques renseignements intéressants sur ce personnage : « La famille Hanozet s’installe sur la ferme de Petit-Bomal en mai 1909 et y restera jusqu’en 1946. 14 enfants sont nés dans cette famille dont Jean-Baptiste Hanozet, (11 mars 1873 – 11 janvier 1963), l’aîné des quatre garçons qui sera le dernier berger de Saint-Rahy, pâturages dominant la ferme en direction d’Izier.

Léocadie Hanozet, (21 juillet 1867- décédée fin 1944) était une des dix filles de la famille. A l’occasion, elle relayait Jean-Baptiste, mais tout porte à croire qu’elle fut bergère avant lui et, de ce fait, fut l’avant-dernière bergère de Saint-Rahy. »

Vous aussi, certainement, vous avez des souvenirs de ces bergers d’hier, du mystère qui entourait leurs connaissances, de leurs pouvoirs supposés… Nous en parlerez-vous ? J’attends avec beaucoup d’impatience tout ce que vous pourrez nous dire à ce propos.

La Petite Gazette du 27 septembre 2000

LES BERGERES ET LES BERGERS DE NOS REGIONS

C’est encore à Monsieur Louis Vieuxtemps que nous devons ces deux très jolies photographies du dernier berger de Saint-Rahy, pâturages relevant de l’ancienne seigneurie de Petit-Bomal, à quelques centaines de mètres d’où se construit votre hebdomadaire préféré ! On y voit Jean-Baptiste Hanozet, le frère de Léocadie dont vous avez fait la connaissance la semaine dernière.

003« Sur ce cliché, nous dit M. Vieuxtemps, Jean-Baptiste Hanozet est âgé de près de 70 ans (nous sommes en 1942), on le voit quittant la magnifique ferme de Petit-Bomal pour se rendre vers le mont Saint-Rahy, comme il le fit durant 37 ans.

 

004

Cette autre photographie date de la même époque, elle aurait été prise quelques semaines après la précédente, nous précise notre correspondant. Il semble bien que c’est alors le printemps, les fleurs éclairent les pâturages de leurs jolies couleurs et le berger est là, pensif mais attentif, son chien à ses pieds et sa canne à la main. »

Si vous avez connu ce berger ou si vous en avez connu d’autres, ce serait particulièrement intéressant que vous nous confiez vos souvenirs, vos anecdotes, vos documents pour faire revivre cette vieille profession de nos régions.

La Petite Gazette du 18 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Grâce à la précieuse collaboration de plusieurs collectionneurs de vues anciennes de nos contrées, j’ai eu l’immense plaisir de vous présenter plusieurs clichés de bergers ou de bergères de nos régions ; et les photographies parues ont suscité, à leur tour, d’intéressantes réactions.

Aujourd’hui, c’est Monsieur Freddy Rixhon, de Ferrières, qui nous apporte de précieux renseignements relatifs au berger présent sur la carte postale que nous avait confiée M. Freddy Lemaire, d’Aywaille. (Voir l’article du 13 septembre 2000)

« Le berger présent sur cette photographie n’est autre que Monsieur François Mahieu, de Burnontige, mieux connu encore sous le nom de « François d’al Creû » explique mon correspondant. Voici ce que dit de lui Maurice Capitaine dans Temps et cendres de mes jeunes années, le numéro 11 de la très belle collection « Au rythme de Ferrières »

 « François Mahieu, habitant le lieu-dit Al Creû, sur le chemin de Saint-Antoine. Une grave maladie, le typhus, contractée dans son jeune âge, avait laissé quelques séquelles dans son comportement. Oh rien de bien grave ! C’est ainsi qu’il avait vingt, parfois trente, chèvres auxquelles il s’adressait sur un ton doctrinal châtié. Les chèvres qui ne comprenaient évidemment rien à cet éloquent laïus avaient pris l’habitude de s’assembler autour de lui, paraissant  prêter une oreille attentive à ses propos. Les enfants qui passaient par-là pour se rendre au catéchisme en avaient fait un sujet de curiosité. Ils s’arrêtaient pour voir et entendre notre ami pérorer, parfois pour s’en moquer, mais fort rarement, car François était un homme doux, gentil, malin qui n’aurait pas fait de tort à une mouche. »

Monsieur Rixhon, en collectionneur averti qu’il est, me signale qu’il existe au moins quatre autres cartes postales, d’autant d’éditeurs différents, immortalisant ce berger ! Je le remercie chaleureusement pour toutes ses informations.

Une personne de Werbomont, qui a très bien connu Jean-Baptiste Hanozet, le dernier berger de Petit-Bomal, a eu l’extrême gentillesse de nous contacter pour nous narrer quelques souvenirs :

« Je veux bien croire que j’ai bien connu ce berger, me dit-elle, car c’est mon mari, malheureusement décédé aujourd’hui, qui, au moment de l’Offensive, lui a racheté son troupeau. La famille Hanozet se préparait à quitter la ferme de Petit-Bomal et Jean-Baptiste proposa à mon époux de reprendre le troupeau. Mon mari a toujours élevé des moutons, il le faisait pour la viande, pour l’élevage… Il fut d’ailleurs le premier à avoir fait venir des moutons d’Angleterre ! Mon époux et le berger se connaissaient évidemment et, pendant les années de guerre, ils s’étaient notamment aidés pour répondre aux réquisitions allemandes. Quand mon mari a accepté la proposition du berger de reprendre ses bêtes, s’est posée la question du transport de celles-ci. Comment les moutons allaient-ils aller de Petit-Bomal à Bois Saint-Jean ? En marchant, tout simplement ! Jean-Baptiste Hanozet souhaita que ce soit mon mari qui l’accompagne pour cette longue promenade et c’est ce qui se fit. Quand les bêtes furent arrivées sur place, j’ai vu le vieux berger pleurer de joie ; il se disait très heureux de constater que ses moutons seraient mieux encore.

Au sujet du berger de Petit-Bomal, je me rappelle une anecdote qu’il racontait. Souvent, nous disait-il, il lui arrivait de se disputer avec son frère, mais toujours pour la même raison : la nuit, Jean-Baptiste se relevait pour aller chiper le bon foin que son frère gardait pour ses chevaux ! »

Un immense merci à cette lectrice qui nous a réservé ces quelques souvenirs de première main.

La Petite Gazette du 31 octobre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

C’est toujours avec beaucoup d’impatience que j’attends que vous me confiez vos souvenirs des rencontres que vous avez sans doute faites avec ces étonnants personnes de nos régions. En effet, les bergers et les bergères ont toujours bénéficié d’une aura de mystère auprès de toutes les personnes qui ne possédaient pas leurs connaissances des choses de la nature. En espérant que vous aurez la gentillesse de nous parler de ces personnages extraordinaires, je ne résiste pas au plaisir de vous présenter deux nouvelles cartes postales anciennes ayant pour sujet principal le berger de Burnontige, François Mahieu.

Monsieur F. Rixhon, de Ferrières, qui avait reconnu ce berger sur une photo prêtée par Monsieur Lemaire, d’Aywaille, m’a remis quatre cartes postales différentes présentant ce berger ; vous en découvrirez deux aujourd’hui.

005

 Carte postale des éditions Goblet, Source de Harre à Burnontige portant en légende « Harre : un berger ardennais dans les environs de la Source de Harre » avec, en plus, la mention « Touristes, visitez la Source de Harre »

 006

 carte postale des éditions Léon Vanderhoven, à Liège, portant en légende : « Burnontige – Le chèvrier. Un coin pittoresque de nos environs » Avec, en plus, la mention : « Pension de Famille Gaiemet-Mignolet Burnontige – Werbomont. Téléphone : 70 Werbomont »

 

La Petite Gazette du 8 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES, DES PERSONNAGES ETONNANTS …

Toujours avec le seul désir de vous voir me communiquer les souvenirs que vous avez conservés de vos rencontres avec ces personnages étonnants qu’étaient les bergers et les bergères de nos contrées, j’ai l’immense plaisir de vous faire découvrir les deux dernières cartes postales représentant le berger de Burnontige que m’a, si gentiment, prêtées Monsieur Rixhon, de Ferrières.

007

 Carte postale éditée par Photo Gonay, Moulin Harre

008

Editeur Hôtel Colin

Mon correspondant a indiqué que cette vue daterait de 1935

Si vous possédez, vous aussi, des photos de bergers ou de bergères de nos villages ; pensez que nombreux sont les lecteurs et les lectrices qui prendraient plaisir à les découvrir. Vos souvenirs sont, bien entendu, les bienvenus. Merci d’avance.

La Petite Gazette du 15 novembre 2000

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Monsieur J. Paquay, de Nadrin, nous a déjà fait le plaisir de partager avec nous les jolies photographie de sa collection ; aujourd’hui, il nous propose cette jolie carte postale du château Saint-Jean, aux environs de la Baraque Fraiture, plus précisément à Samrée.

009

« Cette carte postale a été postée le 22 juin 1913, me précise M. Paquay. Cette photographie nous fait découvrir un berger bien habillé, gardant son troupeau près de la façade arrière de l’imposant château de « Bois Saint-Jean ». Il est aidé dans sa tâche par un garçon et deux chiens.

Le recto de la carte atteste du reçu par un certain Victor Vincent, à Bihain, de la somme de deux cent treize francs et cinquante centimes, à l’adresse de François Chabat, négociant en laines à Comblain-la-Tour.  Qui était le dénommé Victor Vincent ? Etait-il le propriétaire des moutons ou le régisseur du château ?

En ce qui concerne le château construit au XIXème siècle par le Comte de Limburg Stirum, il avait alors, avec son impression donjon et sa tour ronde, des allures de petite forteresse. Ayant été réquisitionné par les Allemands pour y établir le quartier-général de Von Manteuffel à la fin de la guerre, il fut bombardé et incendié par les Alliés, fin 1944. Reconstruit après la guerre, il a perdu les allures médiévales de son caractère d’antan. »

Merci pour toutes ces informations ; j’espère que l’un ou l’autre lecteur pourra répondre à votre question relative à Monsieur Victor Vincent.  Votre question j’ajoute la mienne, qui nous parlera de ce négociant en laines de Comblain-la-Tour ? J’imagine que parmi les lecteurs de l’excellente revue « Les Echos de Comblain », il s’en trouvera un qui possède des renseignements à propos de ce négociant ; peut-être nous fera-t-il le plaisir de les partager avec nous ?

Monsieur Freddy Rixhon, grâce à qui nous avons pu faire la connaissance du berger de Burnontige,  m’a écrit à nouveau pour me demander de rectifier le nom de ce berger : « depuis toujours, j’ai entendu les gens du cru parler de F. Mathieu, pour désigner ce berger ardennais ; le livre de M. Capitaine, qui est une référence pour moi, m’a conduit à corriger le Mathieu en Mahieu :  ce fut une erreur. Ce Mathieu, source confirmée par une nonagénaire, en pleine forme, de Burnontige, a eu une fille mariée à un Mahieu, d’où probablement la confusion. »

Merci à M. Rixhon pour son souci du détail et de la précision.

La Petite Gazette du 20 décembre 2000

BERGERS ET BERGERES DE NOS REGIONS

La photo parue, il y a un mois, dans La Petite Gazette et nous présentant le berger du château de Bois St-Jean, a fait réagir un lecteur heureux cette photo et tout aussi heureux de partager ses souvenirs avec nous

« Le berger Victor Vincent, que l’on voit sur cette photo, était le cousin germain de mon père, Camille Vincent. Il exploitait, en tant que locataire et avec ses parents, ses frères et ses sœurs, la ferme du Bois St-Jean, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. Son père, Lambert Vincent, était le frère jumeau de mon grand-père paternel ; il est décédé au Bois St-Jean et repose au cimetière de Bérismenil. Mon père parlait assez souvent de ses cousins et cousines du Bois St-Jean et, particulièrement, de Victor qui s’occupait d’un grand troupeau de moutons, dont ils étaient les propriétaires. »

Merci M. Vincent d’avoir, pour La Petite Gazette, ressuscité les souvenirs de votre papa.

La Petite Gazette du 10 janvier 2001

LES BERGERS ET LES BERGERES DE NOS REGIONS

Après la parution de la jolie photographie et des informations relatives au berger du domaine de Bois Saint-Jean, M. J. Paquay, de Nadrin, a glané de nouvelles informations qu’il a tenu à partager avec nous.

Madame J. Renard-Cornet, de Hives, dont le papa était garde-chasse à Saint-Jean, a bien connu Victor Vincent. « Il était fermier au domaine de Bois Saint-Jean ; je me souviens bien qu’il faisait aussi, à la demande, le tour des fermes des villages voisins pour châtrer les jeunes taureaux et en faire des bœufs destinés à l’engraissement. »

010 Carte-vue montrant la façade avant du château, avant 1903 (carte-vue extraite des collections de M. J. Paquay)

 

 

 

Madame P. Petit-Rappe lui a également confirmé que Victor Vincent était bien le fermier de Saint-Jean : « je l’ai d’autant bien connu qu’il était un frère de ma maman ; il était aussi marchand de bestiaux. A cette époque, le troupeau de moutons se composait d’un millier de têtes appartenant au fermier. Ceci explique le reçu attestant une transaction personnelle de V. Vincent, pour une fourniture de laine à M. Chabat. La production herbeuse sur ce plateau froid, sur des terres acides, dans un îlot agricole souvent noyé dans le brouillard et entouré de grandes forêts, était très aléatoire. De plus, les moutons devaient chaque jour partager leur herbage avec le gibier : cervidés et surtout sangliers laboureurs. La concurrence était très vive. C’est d’ailleurs cette raison qui motiva V . Vincent à quitter le domaine dans les années 20 – 25 pour émigrer à Ortho, puis à aller finir ses jours à Bastogne. Il fut remplacé à Saint-Jean par la famille Désert, qui continua l’exploitation ovine jusque dans les années 70. Le troupeau de moutons d’Alphonse Désert se composait lui aussi d’un millier de têtes. »

Monsieur Louis de Fisenne, de Fisenne, a également réagi suite à la parution de la photo du berger de Bois Saint-Jean : « Dans mon jeune âge, j’allais passer une partie de mes vacances au château de Bois Saint-Jean. J’y ai dès lors connu, bien qu’il soit déjà très âgé, l’ancien propriétaire, le Comte de Limburg, qui n’avait pas d’enfant. Je connaissais bien son fils adoptif, Charles, avec qui j’entretenais d’excellentes relations. Je possède la même carte postale que celle publiée dans La Petite Gazette et je puis vous affirmer que le berger avec ses moutons est bien le propriétaire du troupeau et non le régisseur du château. Le gamin qui l’accompagne est son neveu, Léon Dumont, mon cousin. En effet, la maman de Léon et la mienne étaient les sœurs de Victor, qui, avec  sa maman, et d’autres sœurs et  frères, occupait les bâtiments de la ferme. Je suis né en 1911 et je me souviens  très bien que nous allions, à Pâques, récolter les œufs que les cloches avaient déposés dans le parc du château. C’était encore la bonne époque. Je suis déjà retourné souvent à Bois Saint-Jean pour revivre un peu de ma jeunesse. »

011Photo de la cour de la ferme de Bois Saint-Jean dans les années 1920. A l’arrière-plan : le château (document extrait des collections de M. J. Paquay)

Monsieur Paquay a également conservé des souvenirs du début de sa carrière de garde forestier quand, plus d’une fois, il a retrouvé des animaux égarés, ou en fugue, dans les bois communaux de Samrée, dont j’ai la garde et qui jouxtent le domaine de Saint-Jean Les moutons quitteront définitivement Saint-Jean après la retraite de M. A. Désert. Après un intermède de bétail indigène, ils sont remplacés, depuis quelques années, par des animaux plus imposants, venant d’outre-Atlantique : des bisons canadiens. Nos cervidés et autres sangliers ardennais ne font plus le poids face à ces mastodontes américains : la concurrence est devenue déloyale, ils doivent désormais s’alimenter en forêt uniquement. »

Un immense merci

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

LES MOUTONS ET LES BERGERS DE LA COMMUNE DE FERRIERES

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, a entrepris une intéressante recherche sur les troupeaux et les bergers de Ferrières au début du XIXe siècle. Il nous en livre le résultat :

« Nous  avons  remarqué  que  le  relevé géographique  de  Philippe Vandermaelen établi  en  1831 précisait  que  la  commune  de  Ferrières  comptait autrefois  8  troupeaux  de  moutons. Les  relevés  de  population  de  la  commune  ont  commencé  à  être  tenus  à  partir  de  1846. Nous  devrions  donc  y  retrouver  la  trace  de  plusieurs  de  ces  bergers. Le  résultat  de  cette  recherche  donne :

Stiennon Gilles, 67  ans, né  à  Esneux,  il  habite  Lognoul.

Dubois  Lambert, 32  ans, né à Hamoir.

Dengis  Julien, né  à  Villers  Ste-Gertrude  le  15  mars  1830.

Maréchal Gilles, né  à  Louveigné  le  13 mars 1802.

Maon Gérard, né 15  janvier 1792, il  habite  le  Thier  de  Ferrières.

Bodson Gilles, né  à  Bra, 23 ans, il  habite  St-Roch.

Abraham Servais, 47 ans, né  à  My, il  habite  Rouge Minière.

Gosset  Théodore Joseph, berger  né  à  Heid  le  9 octobre  1825.

Le  relevé  suivant, celui  de  1866, en  cite  encore :

Maréchal Gilles  Joseph, né  à  Louveigné  le  13  mars 1802, il  meurt  le  27  avril 1868. Berger  à  Thiers, maison nr 4.

Maon Gérard, né  à  Ferrières  le  15 janvier 1792, il  meurt  le  6  juin 1869, il  habitait  à  Thiers.

Dangis  Julien, né  à  Ferrières  le  3  septembre 1808, berger  à  Burnontige.

Ajoutons  qu’un  dénombrement  établi  en  1822  dans  la  commune  mentionnait :

165 vaches  et  395 moutons  à  Burnontige, 44 chefs  de  famille.

143 vaches  et   32 moutons  à  Houpet  et  Malacord, 47 cf.

109 vaches et  227 moutons  à  Ferrières  et  Lognoul, 43 cf.

69 vaches  et  62 moutons  à  Rouge Minière, 29 cf.

Soit un total : 486 vaches  et  716  moutons  pour  163 chefs  de  famille. »

 

 

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

La Petite Gazette du 12 juin 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ? 

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, évoque des souvenirs professionnels et vous interroge sur des réalités disparues :

« Mon métier de conducteur de trains m’a permis de circuler dans bien des gares où les espaces libres étaient souvent occupés par des chantiers de découpe de petits bois alors pourrait-on aborder ce sujet dans La Petite Gazette ?

Il n’y a pas si longtemps, on pouvait encore admirer dans bien des gares desservies par la ligne 42 Rivage-Gouvy des endroits réservé à la découpe de bois. Depuis la forêt, les camions ou jadis des chariots acheminaient des bois en long qui étaient découpés en longueurs différentes suivant les sections et leurs futures utilisations. Après, il fallait semble-t-il charger les wagons à la main.

train-dans-les-bois« Photo prise par mes soins le 29 avril 1988, près de l’entrée côté gare du tunnel de Trois-Ponts, car j’avais ce jour là l’honneur de conduire ce petit train »

Quel travail, car la rentabilité devait être assurée, les commandes honorées et les salaires mérités. Toutes ces petites découpes de bois ont disparu du paysage ferroviaire, mais pourrait-on laisser la parole à tous ceux qui y ont travaillé parfois sous un soleil généreux, mais aussi lors du mauvais temps très souvent présent dans notre région ?

Depuis combien de temps ces chantiers existent-ils ?

Quels étaient les outils ou les machines utilisées ainsi que la force motrice disponible ?

Quel était le rendement demandé à un homme ?

Comment étaient chargés les wagons et quelle était leur destination ?

Les ouvriers avaient-il un abri pour manger ou se réfugier en cas d’orage par exemple ?

Les salaires étaient-ils payés en fonction du travail effectué ou à l’heure ?

Et cerise sur le gâteau existent-ils des photos disponibles ?

J’adresse déjà un grand merci à tous ceux qui voudront bien satisfaire ma curiosité d’en connaître plus sur ce passionnant et exigeant métier.

La Petite Gazette du 17 juillet 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ?

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, souhaitait il y a quelque temps que vous évoquiez ces réalités disparues, Madame Denise David-Lacasse, de Harre, répond à son souhait :

« En lisant cet article sur les métiers du bois, il me revient un fait que feu mon époux Marcel m’a raconté, une difficulté qu’il a rencontrée dans l’exercice de son métier.

La guerre terminée, dès 1945, mon mari, 22 ans alors, a travaillé en exploitation forestière comme découpeur : les troncs d’arbres arrivaient sur son lieu de travail après avoir été ébranchés et pelés. Son travail consistait à scier à la longueur demandée, à trier les bois selon leur grosseur et à les charger sur des wagons pour les envoyer, par le vicinal, en région liégeoise pour le besoin des charbonnages.

Je précise que le vicinal s’arrêtait dans les villages pour charger et décharger les diverses marchandises et les personnes dans le sens Comblain – Manhay. On y rechargeait ensuite les divers bois préparés pour livrer dans les charbonnages liégeois. Les chantiers où les hommes travaillaient s’appelaient « gares ».

Scier les bois était très délicat car ils avaient été mitraillés pendant la guerre et étaient assez abîmés. Il fallait donc beaucoup d’attention pour ne pas casser la scie. Quand la scie ne coupait plus, il fallait intervenir avec la pince présentée, notamment, par M. Serge Ghyse, de Nandrin. Cette pince à avoyer servait au découpeur à redresser les pointes de la lame, en wallon on disait : rimète dèl voye ; ensuite, il fallait relimer la scie. »

Monsieur Joseph Gavroye, de Soumagne, évoque également ses souvenirs sur ce sujet :

« Dans ma région et depuis la création, en 1904, du vicinal Lierneux- Vielsalm, des quais étaient réservés à cette manutention. J’ai bien connu, dans mon jeune temps, pareille entreprise à l’arrêt de Regné-Hébronval. Il y a bien des années déjà qu’on a fait table rase de ce quai pour y installer un lotissement.

Comme le dit si bien Monsieur Depierreux, les bois en long y étaient acheminés en provenance des grandes forêts voisines. Il s’agissait d’épicéas dont le bois était très apprécié pour servir à l’étançonnage dans les galeries des mines de charbon.

Une équipe de 4 à 5 hommes était occupée à scier ces bois suivant les longueurs souhaitées. Il s’agissait en l’occurrence de la famille Frérès, le père, les deux fils plus un ouvrier. Pour leur protection, en cas d’intempéries, les braves disposaient d’un petit abri de fortune et, pour se chauffer, ils se servaient des déchets de bois, ce qui ne manquait pas. Je crois qu’ils étaient payés suivant le volume débité. Ces quatre scieurs ne sont plus de ce monde aujourd’hui !

Le travail en lui-même se faisait en continu, tous les jours ouvrables de la semaine. Les scies ordinaires subissaient régulièrement un affûtage exécuté de main de maître par un des types de l’équipe, spécialiste dans cette tâche. Au préalable, des chèvres en bois avaient été fabriquées afin de supporter les pièces à débiter. Les chèvres étaient marquées des longueurs à respecter lors de la découpe. Le sciage terminé, la marchandise était entreposée par lots respectifs le long du quai de chargement ; des wagons adéquats étaient acheminés sur des voies de garage et cela suivant les besoins. Les scieurs y déposaient les bois avec un certain art car il y allait de la sécurité lors du transport par rail jusqu’à la gare S.N.C.B. de Vielsalm où le tout était centralisé. Un transbordement avait lieu sur des wagons S.N.C.B. dont l’empattement était différent.

Des petits chantiers étaient prévus le long des voies ferrés, beaucoup disparaîtront lors de la fermeture des charbonnages et aussi lors du démantèlement des lignes du vicinal. »

La Petite Gazette du 28 août 2013

LES CHANTIERS DE BOIS DECOUPES A MESURE

Monsieur André Hubert, de Gouvy, nous confie ses précieux souvenirs à ce sujet :

« Ces chantiers existaient dans les gares mais aussi le long des routes et des chemins forestiers. A partir de l’été 1940, j’ai fait partie d’une équipe de trois personnes qui découpaient des bois en long sur la route de Dinez à Montleban. J’avais 14 ans et j’habitais Les Tailles, je marchais 7 Km pour aller de mon domicile au chantier, par des petits chemins, et faisais le même chemin au retour, le soir. On travaillait aussi le samedi et je me reposais le dimanche après-midi pour être dispos le lundi matin.

Les bois posés en long sur trois chevalets étaient découpés suivant des données fournies par le marchand. Les bois étaient tracés par un homme expérimenté qui devait bien réfléchir pour tirer le meilleur volume de la somme des bois découpés. Les bois découpés à la petite scie étaient classés par espèce. Je me souviens de trois appellations :

– sclimbes = bois minces et de faible longueur (1,50 m. environ) qui servaient sans doute à confectionner des claies de protection latérale ou verticale.

– rallonges = pièces plus grosses d’environ 3 m. de long.

– bois plus gros et de différentes longueurs pour les charbonnages et les chantiers, pour le soutènement.

Nous étions payés au volume des bois découpés et réceptionnés. Après ce chantier de 1940, le résultat financier pour chacun des participants donnait un salaire d’environ 35 francs par personne et par jour. Je n’ai pas gardé le souvenir du mode de transport utilisé vers les gares ou les entreprises utilisatrices . » Un tout grand merci pour ces renseignememts.

La Petite Gazette du 8 octobre 2013

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur José Cornet, de Juzaine, évoque ses souvenirs de ce temps révolu :

« Mon frère Victor a travaillé de nombreuses années sur le chantier de la gare de Bomal comme découpeur de bois avec, entre autres, Aimé Gaspard, dit le Boubou, de Champ de Harre (que vous découvrirez sur la photo ci-dessous), Floribert Close, de Barvaux, Marcel Maqua, de Rouge Minière, Ariste Devahive, de Fays, Raymond Lambert, d’Erezée… et d’autres qui, comme lui, découpaient les bois qui avaient été découpés à la cognée et étaient amenés par camion, des Ford Canada.

001

Une vieille baraque en bois, adossée au talus, servait pour les repas, déposer les vêtements et ranger le petit outillage ; il y sentait bon la résine et le café.

Nous, gamins avec mon frère, descendions à vélo sur le chantier le mercredi et nous allions souvent chercher de l’eau fraîche pour les hommes à la havée de Herbet. Ce métier était très dur car, après la découpe, il fallait charger les bois sur des wagons et, évidemment, cela se faisait à la main. Parfois, ils déchargeaient aussi des wagons pour le compte des entreprises Detrooz qui étaient toutes proches.

Après la scie à main est venue la tronçonneuse, ils en ont également découpé à la scie circulaire. Les employeurs étaient les entreprises Huet, de Grand-Menil, et Charles Rigo. Occasionnellement, mon frère Victor a également travaillé à la découpe de bois, sur l’ancienne gare de Chêne al Pierre et du côté de Martinrive. »

La Petite Gazette du 16 octobre 2013

LES GARES SNCV DE JADIS, AVEC LES  « QUAIS DE DECOUPAGE ».

Monsieur Raymond Gillet a poursuivi l’enquête, il nous livre ses souvenirs :

« La ligne SNCV PussemangeBouillon–  Paliseul comportait plusieurs quais de découpage, notamment dans les gares de : SugnyCorbionNoirefontaineMogimont (Bellevaux) et à Paliseul c’était le « quai de transbordement » où la ligne SNCV côtoyait une voie SNCB.

A l’aube des années cinquante, en gare de Noirefontaine,  il y avait en permanence plusieurs découpeurs de bois de mines ; notamment mon oncle Alfred Rosillon (né en 1928), il œuvrait avec plusieurs frères de la famille Adam. Les épicéas arrivaient déjà par camions, ces bois avaient été triés pour les « bois de mine ».

Le quai de découpage était très proche et parallèle à une voie, un emplacement était réservé aux chevalets. Au nombre de trois, ils étaient  alignés et constituaient la « gade ». Une volige reliait les chevalets, elle comportait des traits de scie tous les 10cms ; pour les mètres les traits étaient plus importants.

Après le sciage des « bois de mines », les différentes « chutes » ou pointes d’épicéas étaient triées, sciées en 1,50/1.60 m et répertoriées par grosseur (longueur de la circonférence au fin bout). Le classement était le suivant : 12/14cm – 14/16cm – 16/18cm – 18/20cm, l’oncle Alfred n’utilisait pas le mètre ruban pour ce classement,  il formait un cercle tout simplement en rapprochant les pointes du pouce et de l’index de la main.

Ces différents bois étaient fagotés en bottes et ces dernières s’appelaient les « sclimbes ». Par grosseur le nombre de bois était le suivant : 12/14 = 12 bois – 14/16 = 10 bois – 16/18 = 8 bois – 18/20 = 6 bois. Mon oncle se rappelle avoir fagoté jusqu’à 40 sclimbes à l’heure (le classement par grosseur étant déjà réalisé). Son record personnel fut la réalisation de 300 fagots de sclimbes sur une journée ; le fagot était payé 1,50fr à l’époque (1948-1950).

Je vous invite à regarder la photo d’un autorail tracteur Art. 104 qui amène des wagons vides pour chargement des bois de mine à Dochamps ; remarquez, derrière le tas des bois de mine, il y a un tas de « sclimbes » arrangés par grosseur, les rangées supérieures comportent 8 bois, les autres 6 bois.

autorail-dochamps

En ces temps-là il n’y avait pas de pointeuse sur le quai et  l’horaire était parfois irrégulier, le lundi généralement moins de 8 heures, les autres jours de 9 à 10 heures voire plus même, suivant le temps et les nécessités des  délais  de fourniture, chômage des wagons et acheminement vers Paliseul. La voie du vicinal longeant le quai de découpage permettait l’alignement de 6 à 7 wagons SNCV type à « haussette ».

Le casse-croute était vite réglé, excepté quand il y avait la « gamelle » un feu était nécessaire ce n’était pas courant parce que qui dit feu dit alimentation et surveillance, mais vu l’accumulation des pointes d’épicéas  cela devenait une nécessité.  Le coin repas était protégé des vents par un « hayon » ; rectangle réalisé avec des perches d’épicéas et de la toile de jute ou à défaut de la paille de seigle, ce hayon était incliné dos au vent et à la pluie. A cette époque la scie utilisée était toujours la scie à cadre; oncle Alfred en possédait deux, grand-père Ovide « rafraîchissait » régulièrement les lames.

Avant de conclure je souhaiterais vivement vous rappeler quelques chiffres édifiant de cette époque ; ce sont des chiffres extraits du « Rapport 1959 – 75eme exercice social SNCV ». En 1938 la dite SNCV a transporté 153.668 tonnes de bois de mines, en 1959 seulement  36.113 tonnes. Elle a possédé jusque 5.524 wagons de marchandises ouverts. Dans notre pays il y eu 158 gares de transbordement partagées avec la SNCB.

Vous remarquerez la seconde photo avec la scie, le bidon « FB » (Ferronnerie Bouillonaise) et la typique gamelle.

outils-du-scieur

La Petite Gazette du 23 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Voici les souvenirs qu’un lecteur a gardés de cette époque :

« A la lecture de La Petite Gazette évoquant ces chantiers de découpe de bois, je me rappelle ma jeunesse à la gare de Marenne. Une voie de chargement se trouvait sur le territoire de la gare, un heurtoir était placé près de l’ex-passage à niveau et un autre en bordure de la prairie de chez Bechoux. Deux aiguillages étaient en service ainsi qu’un gabarit afin de surveiller le chargement des wagons.

Durant de nombreuses années, on a découpé une grande quantité de bois de toutes les mesures. Beaucoup de ces bois étaient destinés principalement aux charbonnages de la région liégeoise. Ces bois servaient aux galeries souterraines, où circulaient les wagonnets poussés par les mineurs ou tirés par les chevaux. L’avantage du bois dans la construction des galeries est le grincement du bois occasionné par les mouvements de la terre. Lorsque le bruit du bois se faisait plus fort, les mineurs avaient le temps de se mettre à l’abri dans un endroit plus sécurisé ; les dégâts provoquiés par l’éboulement n’auront pas fait de victimes…

Revenons au sciage du bois sur l’étendue de la gare ; actuellement, la route permettant la suppression du passage à niveau a fait disparaître cet endroit. Je me rappelle deux personnes ayant passé plusieurs années à découper les bois de notre région : M. Emile Gaillard et M. Joseph Dupont ont travaillé durant de nombreuses années, parfois d’autres ouvriers venaient en renfort.

Il y avait plusieurs mesures de découpe des bois. Le mètre-ruban ainsi qu’une toise, dont je ne me rappelle plus la longueur, étaient utilisés. La toise consistait en une longueur de bois sur laquelle se trouvaient deux grosses pointes en acier à une distance des scieurs. Après avoir découpé la base de l’arbre, l’ouvrier le mesurait avec cette toise. Rappelons que le bucheron, à cette époque, avait abattu l’arbre à la cognée, la coupe n’était dès lors pas aussi nette que quand elle fut faite à la tronçonneuse.

Les bois ainsi découpés étaient assemblés en tas d’une hauteur de deux mètres. Chaque tas contenait des longueurs et des diamètres différents. Lorsque les troncs avaient un grand diamètre, les ouvriers utilisaient la scie « passe-partout » ; pour les bois normaux, la scie ordinaire était utilisée. Ce n’était pas des armatures métalliques comme aujourd’hui, les deux montants, sur lesquels était fixée la lame, étaient reliés par un toron de corde avace, au milieu, un morceau de bois, qui permettait en tordant plus ou moins fort cette corde, de tendre la lame ; le morceau de bois se bloquait alors sur le bois reliant les deux montants.

Pour se reposer, pour manger et se mettre à l’abri, une petite cahute était installée entre deux tas de bois ; une tôle pour le toit et, à l’arrière, une toile de jute pour protéger les deux compagno,ns de travail. Lorsque la lame ne donnait plus de bons résultats, il était nécessaire de remettre l’outil en ordre de marche. Dans l’abri de fortune, il fallait aiguiser la lame avec une lime triangulaire et parfois utiliser la pince à avoyer, dont la Petite gazette nous a plusieur fois entretenus. » A suivre…

La Petite Gazette du 30 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Retrouvons la suite de ces souvenirs publiés dès la semaine dernière :

« Durant  la bataille des Ardennes, beaucoup de bois ont été abîmés : déracinés par les chars, abattus en partie par des obus ou remplis de shrapnells (du nom de l’inventeur anglais (1761 – 1842) de ces obus remplis de balles, en allemand, schrapnell. Actuellement, morceaux d’obus, de grenades…). Le territoire de la gare de chargement ne fut plus suffisant pour déposer les bois que les bûcherons abattaient dans la région. Plusieurs espèces d’arbres furent amenées devant la gare ou sur le terre-plein au-delà du passage à niveau. Seul le bois de sapin était utilisé pour les mines. Un grand nombre de wagons chargés de bois quittèrent la gare de Marenne, la bascule utilisée pour la vérification du poids des wagons n’a jamais autant fonctionné.

La bascule était située dans les environs du pont actuel, le gabarit se trouvait également en cet endroit. L’entretien de la bascule se faisait tous les trois ou quatre ans. En amenant d’autres wagons ouverts pour le chargement des bois, deux wagons fermés étaient étaient mis à stationner au butoir se trouvant près du passage à niveau. Un de ces wagons servait de bureau, cuisine et dortoir, l’autre était un petit atelier contenant même une petite forge. Deux ouvriers spécialisés devaient remettre les bascules en ordre de fonctionnement (peinture, remplacement des pièces défectueuses et étalonnage). En soirée, mon père allait quelquefois rendre visite à ces hommes, parfois je l’accompagnais. Je me souviens qu’un de ces ouvriers était originaire de Vielsalm.

Le transport par camion et la modernisation des scieries ont supprimé tout ce travail du bois qui se faisait sur le territoire de la gare de chargement. La fin de ces lieux de travail venait de commencer, la suite, vous la constater actuellement ! »

Madame Denise David-Lacasse, de Harre, se souvient également que « dans les villages le long de la ligne vicinale ManhayComblain-la-Tour, il y avait de ces terrains appelés « chantiers », c’était là que les ouvriers préparaient les bois à la demande pour alimenter les charbonnages liégeois. Les ouvriers chargeaient les wagons du vicinal qui s’en retournaient vers Comblain-la-Tour et là, de nouveau, il fallait du personnel pour décharger et recharger sur des wagons de la S.N.C.B. car l’empâtement était différent d’une société à l’autre. Ici, en Ardenne, ces chantiers s’appelaient « gares » tout simplement. On disait : lès ovrîs d’b’wès alî-st-ovrer so l’gåre. »

 La Petite Gazette du 13 novembre 2013

ENCORE A PROPOS DES CHANTIERS DE DECOUPE DES BOIS

Messieurs Raymond Gillet et René Gabriel ont beaucoup œuvré pour La Petite Gazette cette semaine. Il est vrai qu’il s’agit là de passionnés… Le premier nous raconte cette plaisante anecdote :

« La gare vicinale de Noirefontaine possédait deux  » quais de découpage ». Celui représenté sur cette photo est celui des « feuillus ». Le quai des « résineux » se situe à l’extrême gauche de la photo. (Nous en avons parlé dernièrement)

gare-noirefontaine

Les personnes occupées sur ce quai étaient originaires de la région anversoise , il s’agissait de la famille Faes . Le papa, Louis, était né en 1886 à Turnhout,il parlait un français impeccable, ses enfants fille et garçons travaillaient avec lui. Louis avait des moustaches à la « hongroise ».
La route nationale parallèle au quai reliait Paliseul à Bouillon et, déjà à  cette époque, des touristes hollandais venaient visiter notre Ardenne, juchés  sur leurs typiques vélos.
Un jour Louis vis apparaître deux cyclistes hollandaises, il les laissa s’approcher et, de sa voix style Louis Jouvet, il leur « décrocha » la tirade suivante :

Abaissez le capot on voit le moteur, ce n’est pas pour le moteur, mais c’est pour l’odeur !
La plus âgée des dames lui répondit du tac au tac  » Viens-y frotter tes moustaches !  »

Louis était à cent lieues d’avoir une réponse en français, il en resta bouche bée. On ne l’entendit plus de la journée… »

Monsieur Gabriel nous fait part de l’état actuel de ses recherches, nous explique pourquoi le sujet l’intéresse et nous promet une suite à ses propos :

« J’ai rencontré, tout récemment, monsieur Pierre Colin, de Burnontige, dont les parentsz tenaient l’Hôtel du Vicinal. Il se souvient très bien de la gare de Burnontige où un chantier de découpe de bois de mine existait. Les wagons arrivaient avec le tram, étaient décrochés et placés sur une voie particulière. Il n’y avait pas de bâtiment de gare, seulement un quai et un bâtiments où les découpeurs pouvaient remiser leur matériel. M. Colin se rappelle les noms de deux de ces découpeurs, les frères Stelet, Fernand et Arthur.

Quand M. Josy Depierreux a lancé cette recherche dans La Petite Gazette, j’étais content car cet ancien métier de découpeur allait être, comme beaucoup d’autres petits métiers, oublié… J’avais décidé d’attendre quelque peu les premières réponses et elles sont venues. Très prochainement, je reviendrai vers vous avec nombre de renseignements SNCB. En effet, j’ai toujours habité des maisonnettes ou gares et, de ce fait, ai parcouru de nombreuses cours à marchandises. Par la suite, ma profession à la SNCB fut, pendant près de 40 ans, dans le domaine du factage, il s’agit d’un service s’occupant plus particulièrement, suivant les gares, des wagons, des commandes, de la distribution, du triage, de l’acheminement… »

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

ENCORE UN CHANTIER DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur Robert Nizet, de Vielsalm, nous confie à son tour sa contribution à la documentation sur les quais de découpe des bois longeant les lignes de chemin de fer. Il nous en présente un qu’il a bien connu.

« Celui-ci était situé à Vielsalm, en amont de la gare et sous le pont de la route de Rencheux. On y a découpé, des années durant, des quantités incroyables de bois destinés aux mines. C’était pour nous les gamins habitant au quartier de la gare un terrain de jeu idéal et pour nos parents une source inépuisable de « petit bois » pour allumer le feu. S’y sont succédé au travail les équipes (notamment) de Jean Bontemps de Ville-du-Bois, d’Armand Frères d’Hébronval et des Martiny des Tailles.

sam_4128

La photo date de 1948 et j’y figure avec mon papa. »

La Petite Gazette du 18 décembre 2013

LES TRAVAUX FORESTIERS QUI OCCUPAIENT MON MARI

Madame Françoise Schröder-Closjans, de Louveigné, évoque le travail de son mari :

«Les premières années de notre mariage se passèrent à Francorchamps. Après la fenaison et la tonte des haies, mon mari, son voisin, L. Goffin, et les frères de celui-ci ont effectué divers travaux forestiers dans des bois appartenant à la famille Stersteven aux alentours de Stavelot, Francorchamps et Malmédy.

Tous les travaux s’effectuaient à la main, abattage, découpage, sciage…

Avant la plantation de sapins dans des endroits fangeux, il fallait faire des mottes pour éviter le pourrissement des jeunes racines. Ce travail consistait à faire des rigoles autour d’un carré de terrain pour permettre au surplus d’eau de s’évacuer.

En 1960, quelques mois après notre arrivée à la ferme de la Fagne de Deigné, mon mari effectuait son premier débardage avec son cheval. Le travail en forêt était un travail d’équipe. Après l’abattage, l’ébranchage et, parfois, le pelage à l’aide d’une rasette, mon mari amenait les bois le long des chemins forestiers. Certains bois étaient chargés entiers et conduits dans les scieries de la région par camion. C’est en lisant une récente Petite Gazette, précise mon aimable correspondante, que je me suis souvenue de cet outil que mon mari possédait pour enlever les écorces ou peler les bois comme il disait. Il s’agissait d’une rasette que provenait, je pense, de la maison Joseph Leloup à Aywaille. N’en ayant plus l’usage, il l’avait donné à un de ses amis. Dans un ouvrage consacré aux vieux outils, j’ai retrouvé un modèle identique à celui que possédait mon mari et présenté comme étant : « un pèle-tronc, outil servant à l’écorçage des bois ».

Les bois de mine étaient sciés à la longueur voulue par deux découpeurs. Ces bois, chargés sur des camions, étaient acheminés directement vers les charbonnages ou à la gare de Remouchamps pour être expédiés par wagons. Tous ces travaux du début des années 60 étaient effectué à la main.

Quelques années plus tard, ce fut l’apparition des tronçonneuses et des engins mécaniques mais, pour le débardage, le cheval est resté prioritaire. Lorsque le débardage de gros arbres nécessitait un attelage à deux chevaux, Pol Rixhon, de Paradis-Harzé, venait seconder mon mari.

Par mauvais temps, mon mari ramenait certains ouvriers forestiers à la maison pour manger leurs tartines. Cette période a été très enrichissante, elle nous a permis la rencontre de divers métiers du bois et de la forêt ainsi qu’un nouveau vocabulaire français et wallon. »

La Petite Gazette du 29 janvier 2014

AVANT DE COUPER TOUS CES BOIS, IL A FALLU LES PLANTER…

Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo, dévore avec passion archives et vieux documents et, surtout, aime à partager avec les lecteurs de La Petite Gazette les intéressantes qu’il fait :   « Voici  quelques  renseignements  retrouvés  lors  de  mes  recherches  dans  les  différents  bans  locaux.

En 1837, le  roi  Léopold I, rentrant  vers  Spa  après  une  visite  à  la  cascade  de  Coo, se  trouve  désolé  devant  les  landes  arides  qu’il  traverse, nos  fagnes  où  paissent  alors  des milliers  de  moutons.  A  partir  de  cette  époque  de  nombreux  “experts”  vont  se  pencher  sur  ce  problème et  bien  des  années  plus  tard  un  plan  de  boisement  de  ces  vastes  étendues  sera  d’actualité. Vers  1875-1880  on  plante  donc  de  nombreux  feuillus  et  résineux  en  Ardenne. Les  résineux  sont  principalement  des  pins  sylvestres  et des mélèzes.

Ex: 1879. En  commune  de  Ferrières  le  bourgmestre  reçoit  l’information  d’envoyer  le  messager  enlever  25  kilos  de graines  de  pins  sylvestres  au  dépôt, les  graines  de mélèzes  seront  fournies  plus  tard. Ces  graines  seront  semées  en  pépinière  par  le  forestier  local. Il  n’est  alors  pas  encore  question  d’épicéa. Petite anecdote amusante à propos  de l’enlèvement  des  graines  pour  Ferrières en  1879, le  responsable  précise  au  bourgmestre d’envoyer  le  messager  « avec  un  sac  sans  trou … » I  vâ  mî … ! précise mon sympathique correspondant.

Plus  tard, en  commune  de  Basse-Bodeux  cette  fois, en 1914, les  autorités  notent  que  des  milliers  de  pins  sylvestres  ont  été  plantés  mais  qu’une  invasion    très  importante  d’écureuils  menace  ces  peuplements car  ils  rongent  les  écorces  et  les  arbres  dépérissent. Il  est  donc  décidé  de  tuer  les  écureuils  et  une  prime  de  25  centimes  par  animal  tué  est  accordée  à  condition  de ramener  la  queue  du  rongeur  au … bourgmestre !

Nous  avons  là  un  premier  départ  d’enrésinement en  Ardenne, il  est  probable  que  la  plantation  de  l’épicéa va  bientôt  apparaitre  également  peu  après.

trois-ponts-gare

Il  faudra  attendre, bien  évidemment,  l’arrivée  du  rail  en  Ardenne (1890 pour  Rivage-Trois-Ponts) pour  remarquer  un  trafic  de  bois  de mines. Certaines cartes  postales, vers 1920  ou  peu  avant, montrent  des  wagons  chargés  de  longues  perches (poteaux  télégraphiques  probablement) et  bois de  mine  en  gares  de  Remouchamps  et  Trois-Ponts. »

Monsieur Jacques Bourdouxhe (voir les commentaires) s’est intéressé à cette série d’articles dans lesquels il a puisé des informations pour l’aider dans sa passion, le modélisme. Répondant à ma demande, il nous adresse ces deux photographies montrant la qualité et la précision de ses réalisations.

  IMG_1341

Voici des photos de mon diorama représentant une bicabine  ( type 18  ) remorquant un wagon à haussettes chargé de grumes destinées aux charbonnages.

dioramaSNCV
Cette seconde photo a été prise au Brésil   ( mon épouse est brésilienne ) ou  j’ai amené le diorama pour une exposition de modélisme ferroviaire à Curitiba  (Etat du Parana )
Le matériel roulant est à l’échelle TT  ( 1/120 ) populaire en Allemagne et en Europe de l’est. L’écartement de voie est de 9mm pour représenter une voie métrique (ce qui est le cas pour la majorité des lignes vicinales qui ont existé sur le réseau SNCV/NMVB  ).
Comme il n’existe rien de disponible dans le commerce, à part les chassis tout le reste est de construction maison. Les carrosseries  ont été réalisées par la technique de l’impression 3D.
Ma famille maternelle  (famille Guillaume) a gravité pendant de longues années autour d’Esneux : Poulseur, Ham , Esneux (où je suis né), Fontin  et Montfort. »

Un grand merci à Monsieur Bourdouxhe et toutes les félicitations de la Petite Gazette

L’IMPORTANCE DE L’ACTIVITE LIEE A L’EXTRACTION DU MINERAI DE FER A FERRIERES A LA FIN DU XVIIIe SIECLE

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, est, vous le savez bien, un inlassable chercheur, passionné par les réalités passées de sa région. Il ne se fatigue de fouiller et de déchiffrer les archives que nous ont laissées les siècles écoulés et il aime à partager ses intéressantes découvertes. Il revient sur l’évocation de l’importante activité que générait, encore à la fin du XVIIIe, l’extraction du minerai de fer.Voic, avec l’orthographe de l’époque, le fruit de ses découvertes:

Liste  des  minéraux  tirez  au  Comté  de  Logne  sur  le  bien  des  Seigneurs  du  Chapitre  de  Stavelot  depuis  le  Noel 1781  jusqu’au  Noel 1782.

1781.

Le  28  Xbre (décembre)  mesuré  à  L. Sylvestre  et  consors 18  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Seigneurs  du  Chapitre  de  Stavelot  deriere  leur  cense  à  Feriere  lesquels  sont  vendus  à  la  Delle veuve  Xhardez  à  9 florins  le  char, vient  auxdits  Sgr  pour  propriété   la  dime  déduite  25  sous  par  char, ici : 20,9,1 florins.

Le  28  Xbre  mesuré  à  Martin  Paulus et  à  G. J. Sylvestre  12  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  lesquels  sont  vendus  aux  Mrs Boumalle  à  9  florins  le  char,  vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  13,12,3 florins.

Le  28  Xbre  mesuré  à  Antoine  Sylvestre  de  Feriere  6  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  lesquels  sont  vendus  au  Sr Henry  Lambert   à  9  florins  le  char, vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  6,16,2 florins. 

1782.

Le  2  janvier  mesuré  audit  Sylvestre  15 ½  chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu et  sont  vendus  au  Sr  H. Lambert  à  9 florins  le  char,  vient  auxdits  Sgrs  pour  propriété  25  sous  par  char  la  dime  déduite, icy  17,1,0 florins.

Le  2  janvier  mesuré  à  Martin  Paulus et  à  G. J. Sylvestre  25 ½ chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  et  sont  vendus  aux  Mrs  de  Boumal  à  9  florins  de  char, vient  pour  propriété  auxdits  Sgrs  25  sous  par  char la dime  déduite, icy  28,8,1 florins.

Le  15  avril  mesuré  à  H. Roucelle  et  consors  11  chars  mine  venante  du  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  et  tirée  par  le  bien  du  Sr Biron  à  Filot, icy  aux  Sgrs  1  florin  par  char  la  dime  déduite, 10 florins.

Le  19  avril  mesuré  à  J. J. Charlier  et  consors  59  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  aux  Aguesses  et  sont  vendus  au  Sr J. P. Hubin à  4,15 florins  le  char, icy  auxdits  Sgr  le  4 eme  la  dime  déduite  ou  63,13,3 florins.

Le  20  dito  mesuré  à  Henry Seret et  consors 18  chars  mine  tirez  sur  le  bien  audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  4 eme  la  dime  déduite  ou  12,5,1 florins.

Le  23  dito  mesuré  audit  Seret 10 ½ chars et  1  mesure  grosse  mine  tirez  sur  ledit  bien audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4 eme la  dime  déduite, 7,3,3 florins.

Le  23  avril  mesuré  à  J. J. Charlier et  consors  21  chars  et  2  mesures  grosse  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  et  sont  vendus  au  Sr mayeur Lembrée  à  3  florins le  char,  icy  auxdits  Sgrs  le  4 eme  la  dime  déduite, 14,7,2 florins.

Le  5  juillet et  suivants  mesuré à  Seny  et  consors 149 ½ chars mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  à  la  heid  des  Cheins  à  Filot  et  sont  vendus  aux  Mrs Hauzeur  à  5 florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs 1 florin  par  char  la  dime  déduite, 135,18,1 florins.

Le  5  juillet  mesuré  à  H. Roucelle et  consors  72 ½ chars  mine  tirez  sur  le  même  bien, vient  auxdits  Sgrs  1  florin  par  char  la  dime  déduite, 65,18,1 florins.

Le  9  juillet mesuré  à  M. Bonjean et  consors  13  chars  mine  tirez  par  le  bien G. Bonjean  venante  de  dessous  le  chemin  à  Feriere et  sont  vendus  au  Sr M. Wathelet  à  7,5 florins  le  char, icy auxdits  Sgrs  le  10 eme pour  terrage  la  dime  déduite, 8,0,1 florins.

Le  9 dito mesuré  à  G. Masset  et  consors 13  chars  mine  tirez  par  le  bien  G. Bonjean  venante  de  dessous  le  chemin  à  Feriere  et  sont  vendus  aux  Mrs Boumalle  à  7,5 florins  le  char, icy  aux  Sgrs du  Chapitre  le  10 eme pour  terrage  la  dime  déduite, 8,0,1 florins.

Le  19  juillet  mesuré  à D. Brialmont  46  chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  aux  Aguesses  et  sont  vendus  à  la  Delle  veuve  Xhardez  à  4,5 florins  le  char, ici  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 44,8,2 florins.

Le  19  juillet  mesuré  à J. C. Hubin  46  chars  mine  tirez  sur  le  même  lieu  et  sont  vendus  à  J. P. Hubin  à  4,10 florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 47,0,3 florins.

Le  19 dito  mesuré  à  F. Marechal  46  chars  mine  tirez  sur  le  même  lieu et  ont  vendus au  Sr  maieur  Lembrée  à  4,10 florins le  char, icy auxdits  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 31,7,1 florins.

Le  20  août  mesuré à  Henry  le  Kaye  et  consors  100 chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs la  4 eme  la  dime  déduite, 68,3,2 florins.  

Le  4 7bre mesuré  à  J.P. Hubin et  consors  94  chars  mine  tirez  sur  ledit  bien  audit  lieu  dont  la  dime  se  paie  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduite, 64,1,3 florins.

Item  aussi  estimé  audit  Hubin  9 ½ chars  mine  venantes  du  bien  Joseph  Guillaume  et  tirée  par  celui  des  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  audit  lieu  dont  la  dime  se  paie  à  3  florins  le  char, icy  auxdits  Sgrs le  30 eme  la  dime  déduite, 0,18,3 florins.

Le  6 9bre mesuré  à  J.C. Hubin et  consors  101 chars  mine  tirez  sur  le  bien  des  Sgrs  audit  lieu  et  sont  vendus au  Sr maieur  Lembré  à  3  florins  le  char, icy  aux  Sgrs le  4eme la  dime  déduite, 68,17,1 florins.

Le  8  dito mesuré à  J.F. Brialmont  et  consors  127  chars  mine  tirez  sur  le  même  bien  que  dessus  audit  lieu  et  sont  vendus  au  même  à  3  florins  le char, icy  aux  Sgrs le  4eme  la  dime  déduits, 86,1,3 florins.

Les  postes  de la  veuve  Xhardez  portent : 64,17,3 florins.

Les  postes  de  Mrs  Boumalle  portent : 50,1,1 florins.

Ceux  du  Sr H. Lambert  portent 23,17,2 florins.

Ceux  de  Herman Roucelle  portent : 17,18,1 florins.

Ceux  de  J.P. Hubin  portent : 193,4,0 florins.

Ceux  du  Sr maieur  Lembrée  portent : 268,17,1 florins.

Celui  de  Mrs Haueur  porte : 135,18,1 florins.

Celui  du  Sr Wathelet  porte : 8,0,1 florins.

Total : 822,14,2 florins.

Le  Sr Henry  Lambert  at  quitté  le  poste  le  28  mars  1785 portant  40,12,1 florins  par  une  étuve  quarrée  qu’il  at  livré  auxdits  Sgrs  du  Chapitre  de  Stavelot  à  leur  cense  de  Ferière.

B. Gisbrant.

Mon correspondant commente : « Plus de 1.000 chars, 1.011 exactement, ont été extraits des terres des Seigneurs du Chapitre de l’abbaye de Stavelot à Ferrières durant cette seule année ! remarquons qu’ils sont vendus à des prix différents et que plusieurs taux d’imposition existent. Retenons également qu’ils sont désignés « char mine » ou « grosse mine » ; il semble ainsi que le minerai soit de qualité différente suivant les endroits d’extraction. »

N.D.L.R. J’attire également votre attention sur le fait que c’est bien la dîme, l’impôt religieux, qui s’applique puisqu’il s’agit d’une ressource du sous-sol, cet impôt ne concerne donc pas que les carottes, les navets ou les pommes de terre…

FAITS DE RESISTANCE A FERRIERES

La Petite Gazette du 5 novembre 2008

QUI SE SOUVIENT ENCORE DES FUSILLES DE FERRIERES ?

Madame Flore Duchesne, de Havelange, fut une de mes toutes premières correspondantes quand, il y a bientôt dix ans, je repris les commandes de La Petite Gazette et, depuis lors, elle nous confie régulièrement ses souvenirs. Comme vous, j’en suis ravi.

Aujourd’hui, elle se fait particulièrement grave et, profitant du fait qu’elle trie des tas de vieux documents, elle partage l’avis d’un autre correspondant qui insistait il y a quelques semaines sur la nécessité de témoigner.

« Les anciens, comme moi, écrit-elle, nous devons mieux assumer notre devoir de mémoire. J’espère que des lectrices et des lecteurs se manifesteront sur ce sujet que j’évoque afin de faire prendre conscience aux gens qui n’ont pas connu cette époque du bonheur qu’il y a à vivre dans un havre de paix et de quiétude, à l’abri de la terreur, de la destruction et de la mort et cela depuis si longtemps ! »

« Ils étaient plus d’une douzaine. Leur âge ? de plus ou moins 18 à 25 ou 30 ans. J’en ai connu un, natif d’Ocquier, il était le fils de Marie Marlair et de Joseph Pauly, un cousin de papa. Déporté en France par les Allemands pour travailler, dans des conditions épouvantables, à la construction du Mur de l’Atlantique, Edgard Pauly avait réussi à s’évader et à regagner la Belgique où il avait pris le maquis et où il était devenu membre actif de la Résistance. A la veille de la Libération, chargé de mission avec tout un groupe de résistants, talonnés par un ennemi aux abois, ils sont tombés dans une embuscade. Avec un autre volontaire, Edgard a fait front, permettant à ses camarades de s’échapper, les sauvant ainsi d’une mort certaine. Faits prisonniers, ils ont été ramenés à Ferrières où, avant de s’enfuir, leurs geôliers les ont lâchement assassinés au mépris de toutes les règles de la guerre et ce en compagnie d’autres jeunes venus d’horizons divers. C’était le 2 septembre 1944 ; à la veille de la Liberté ! (Oquier où j’habitais alors a été libérée le 8 septembre.)

Par un raffinement de cruauté, leurs bourreaux, avant de les exécuter, ont brûlé tous leurs papiers d’identité et leur ont enlevé tous leurs objets personnels.

Ferrières1

Quand on les a retrouvés (des gens de Ferrières j’imagine) ce n’étaient plus que des morts tristement anonymes ; le seul moyen pour permettre de les identifier a été de les aligner côte à côte et de les prendre en photo après les avoir numérotés, numéro qui allait être repris sur leur cercueil.

 

Mon Dieu ! Peut-on imaginer la tragédie vécue par leurs familles ; ces gens à la recherche d’un fils, d’un mari, d’un frère ou d’un fiancé n’ont disposé, pour retrouver un être cher plein de vie et de jeunesse que de mauvaises photos d’amateur jointes à un simple numéro… Que de larmes, de désespoir et de rage Ferrières2ont dû couler sur ces humbles bouts de carton ! »

 

SOUVENIR DE DECES D’EDGARD PAULY

 

 

La semaine prochaine, nous retrouverons Mme Duchesne et l’évocation d’une autre victime des ces crimes de guerre à Ferrières. Si vous pouvez développer ce sujet, n’hésitez pas une seconde et répondez s’il vous plaît  à l’appel de ma correspondante.

 

La Petite Gazette du 12 novembre 2008

QUI SE SOUVIENT ENCORE DES FUSILLES DE FERRIERES ?

Madame Flore Duchesne, de Havelange, s’est souvenue, en triant de vieux papiers, de cet épisode tragique de septembre 1944. La semaine dernière, elle rappelait le souvenir d’Edgard Pauly, aujourd’hui, elle nous parle d’une autre victime :

« Quelques années plus tard, j’ai connu, à titre posthume, un autre de ces suppliciés : c’était un cousin de mon mari, il s’appelait Maurice Lecomte et habitait Ciney. Le jeune Maurice (il n’avait pas 19 ans, Edgard, lui, en avait 21) avait été massacré, lui aussi, à Ferrières… Même date, même endroit et, comme je l’ai appris de la bouche de sa maman, deux photos et un numéro comme seuls signes de reconnaissance.  Edgard, 21 ans, Maurice, 19 ans, mais  les autres … qui étaient-ils ? Des résistants, bien sûr, mais aussi, sans doute, des otages, peut-être même des habitants des environs ; peut-être aussi a-t-on érigé un monument à leur mémoire ? J’avoue que je n’en sais rien et que je n’ai jamais cherché à savoir… Pourquoi ?

J’avais 16 ans, on retrouvait des morts partout ; submergés d’horreurs, on n’arrivait plus à suivre. En s’enfuyant, les débris de l’armée du grand Reich jonchaient les routes de cadavres et pourtant, pour nous, allait suivre l’Offensive des Ardennes, puis la découverte des camps d’extermination. Après, les gosses de mon âge ne voulaient qu’une chose : vivre comme tout le monde, dans la paix, la joie et la sécurité et oublier surtout que cela avait pu exister.

On essaie de gommer son passé, les cauchemars de son adolescence, mais on n’y arrive pas vraiment… La preuve, c’est qu’au soir de ma vie, tous ces jeunes disparus depuis si longtemps reviennent parfois hanter ma mémoire. C’est pourquoi j’aimerais savoir qui se souvient encore de ces fusillés de Ferrières. Qui étaient-ils ? Quelle était leur histoire ? Comment se sont-ils retrouvés là pour cet ultime rendez-vous ? Y aura-t-il, parmi les lecteurs, quelqu’un qui pourra m’expliquer qui étaient les autres petits gars de Ferrières ? »

J’imagine que oui et j’attends vos réactions avec impatience

 La Petite Gazette du 26 novembre 2008

A FERRIERES, LES DRAMES DE LA GUERRE

Monsieur Armand F Collin, du C.L.H.A.M. (Centre Liégeois d’Histoire et d’Archéologie Militaires) profite de l’évocation d’un drame de guerre à Ferrières pour nous communiquer des renseignements recueillis lors d’une recherche qu’il a menée dernièrement sur les diverses stèles et monuments de l’entité : « Dernièrement, m’écrit-il, j’ai fait une recherche sur Ferrières  et pris les photos des divers stèles et monuments de  l’entité.

1.Kersten Léon. 21 ans. Fils d’un fermier de St-Roch.Le lundi (26.04.43) de Pâques, des soldats allemands de la  Wehrmacht effectuent un contrôle à Ferrières. Kersten fait mine de quitter la place du Bati (devenue Chablis), fait demi-tour et se dirige vers le chef du détachement. Ce dernier crie en  français ‘Halte, vos papiers’ Kersten crie  ‘Non’ L’allemand lui donne un coup de matraque  et Kersten réplique par un coup de poing puis veut fuir. Un soldat allemand l’abat.

Ferrières3

2. Lahaye Gilbert. Etudiant. Ferrières 02.02.1925. Arrêté le 01.09.1944.Ancion Joseph. Cultivateur. La Gleize 22.05.1921. Sabotages, transport d’armes. Thiry Pierre. Verlaine 11.05.1917. Depuis le 15.08.1944,  guide pour les réfractaires.Ancion et Thiry arrêtés à la ferme Jacot à Izier. Font partie de l’A.S. Zone V. Secteur 4. Sous-secteur Byl. Ils sont abattus le 02.09.1944 à l’endroit du monument leur dédié.

Ferrières4

Dès la semaine prochaine, nous retrouvons M. Collin face à d’autres monuments de Ferrières. 

   La Petite Gazette du 3 décembre 2008

A FERRIERES LES DRAMES DE LA GUERRE

Monsieur André Rixhon, de Ferrières, apporte à Mme Duchesne les précisions qu’elle souhaitait obtenir. Il m’a, en effet, fait parvenir ce qu’a écrit sur le sujet M. Alfred Dubru (Le sous-secteur Byl Secteur 4 – Zone V, Arlon, 1984 pages 53 et 54). Après avoir remercié chaleureusement mon correspondant, je vous livre l’intéressant récit qu’il nous a communiqué :

« Samedi 2 septembre 1944.

Pour le maquis de Ferrières, c’est un jour à marquer d’une pierre noire. Dans la nuit du 1 au 2, une patrouille de 5 hommes s’en va au ravitaillement. Mission : tuer une vache et la ramener au camp. En cours de route, elle rencontre les Allemands; une fusillade éclate: Roukens Maurice, Ronvaux René et Lecompte Maurice sont tués. (MEMORANDUM, p.81)

Ce n’est malheureusement pas terminé. Suite à un coup de feu malencontreux tiré à la lisière Sud du camp, une colonne alleman­de qui passait sur la grand-route Ferrières-Werbomont, fait demi-tour et attaque le camp. Maurice Nicolay, chef du VI° groupement raconte : « Le 2.9.44, à Ferrières, dans la matinée, les troupes allemandes, averties de l’existence de notre camp de refuge, l’investissent avec des forces importantes. Bielen Nestor, officier de réserve, qui partage avec moi la direction du camp, sollicite la direction des hommes armés et attaque immédiatement l’agresseur; sa couverture me permet de rassembler les hommes non armés et plus ou moins affolés par le tir de l’ennemi. Après avoir établi une deuxième ligne de soutien dotée de FM (Cdt Théo), j ‘ évacue le personnel dans une région plus sereine.  J’envoie ensuite mes derniers hommes armés pour faire établir, jusqu’à la ligne de feu, un service de ravitaillement en munitions (Capt Massart et Lt Crotteux). L’ennemi .bloqué, se  retire après 35 minutes de combat au cours duquel il s’est servi d’armes automatiques, grenades et artillerie légère d’infanterie. Les ravitailleurs, pour assurer leur mission, ont  traversé, à plusieurs reprises, des terrains découverts fortement battus par le feu de l’infanterie adverse. » (UFAS. Maurice Nicolay)

Henri Frédéric fut gravement blessé au cours de la mission, de ravitaillement en munitions.

Cornu Louis, Dupont Hubert, Hermant Charles, Huard René, Lens Théodore, Maris René et Pluem Christian furent tués au cours du combat.

Du côté ennemi, une septantaine d’attaquants, dont le comman­dant de la colonne auraient été tués. (MEMORANDUM, p.86) Après le combat, le camp fut déménagé et installé dans les bois de Fays. Et comme si le tribut payé par le VI » groupement n’avait pas été assez lourd, il fallut que la journée s’achevât par le massa­cre de Burnontige. Comme déjà dit, l’hôtel Gaiemet servait d’hôpital au Sous-Secteur BYL. Toute la famille Gaiemet  avait été arrêtée le 2.3.44. Le père et la fille furent déportés la mère, gravement malade, avait été libérée: elle rejoignit son hôtel et continua à accor­der l’hospitalité aux blessés et aux malades.

Ferrières5

 

L’Hôtel Gaiemet (photo 2008)

 

Que s’est-il passé le 2 septembre ? D’après Philippe, sur dénon­ciation, les P.O.A. se rendirent à l’hôtel, croyant le capturer. Ils y trouvèrent quelques personnes dont trois infirmières ainsi qu’Omer Sellier, Huguette Moise et la propriétaire. Ils tuèrent les trois infirmières : Suzanne Boscheron, Josette Petit et Hortense Swinnen, enfermèrent Mme Gaiemet dans la cave et mirent le feu à l’établissement. Omer Sellier et Huguette Moise (à cette époque, Mademoiselle Jamotte) furent relâchés après un interro­gatoire de cinq heures.

Ferrières6

 

 

 

 

 

Monument élevé à la mémoire des trois infirmières.

C’est Modeste Servasy qui découvrit le drame dans toute son hor­reur, le lendemain, en venant ravitailler le maquis. »

Les photos qui m’ont servi à illustrer cet article m’ont été transmises par Monsieur Armand F Collin, du C.L.H.A.M. (Centre Liégeois d’Histoire et d’Archéologie Militaires) qui, dernièrement a mené une recherche sur les diverses stèles et monuments de l’entité de Ferrières.

La Petite Gazette du 10 décembre 2008

ENCORE AU SUJET DES FUSILLES DE FERRIERES

Monsieur Jacques Jöbses revient sur le sujet avec une question précise : « Mon père faisait partie de l’AS-groupe BYL durant la dernière guerre et, dernièrement, je l’ai brièvement remplacé lors du pèlerinage annuel de son groupe.

Une commémoration avait précisément lieu au carrefour de My en mémoire de résistants qui ont été fusillés à Ferrières à la fin de l’occupation allemande. Il y a deux stèles de part et d’autre du carrefour. Venant de Werbomont, la première se trouve à droite avant le carrefour et la seconde, à droite aussi, mais après le carrefour, en direction de Huy . Mon père m’a aussi parlé du fait que des gens avaient été fusillés près de l’église.

Cela étant, je profite de l’occasion pour lancer un appel à la mémoire des lecteurs dans l’espoir d’obtenir un renseignement qui ferait un grand plaisir à mon père.

Je vous ai dit que mon père, originaire de Liège, se trouvait du côté de Harre en 1944. Les 27 et 28 1944 ont eu lieu deux largages de containers par l’aviation alliée. Mon père faisait partie du groupe chargé de les récupérer.

Il se souvient très nettement des champs entourés de bois ainsi que de l’ambiance nocturne et des containers accrochés à leurs parachutes (spectacle enchanteur à son âge !), du bruit des containers qui touchent le sol et des parachutes qui descendent lentement, mais il ne se souvient plus des endroits exacts (endroits qui lui ont paru magnifiques à l’époque, il avait 19 ans) qui devaient se situer aux alentours de Harre/Manhay. En réalité le premier largage était prévu le 25 août 1944 mais les avions chargés de l’opération avaient été pris en chasse par l’aviation allemande et l’opération avait été reportée.

Les noms de code des opérations étaient « Périclès » et « Tulipier » puis a été modifié en « Thémistocle », avec comme mot de passe « Thémistocle avait un bâton convaincant ».

Est-ce que cela dit quelque chose à quelqu’un ?

Evidemment, les membres de l’opération n’était pas nombreux… Quelqu’un pourrait-il préciser où se trouvaient ces terrains de largage ? Un immense merci de la part de mon papa. »

Si vous avez des précisions sur ces opérations, ne manquez pas de nous les communiquer, vos renseignements intéresseront bien d’autres personnes…

La Petite Gazette du 28 janvier 2009

FERRIERES… EMOTION

Il y a plusieurs semaines, à la demande de Mme Flore Duchesne, de Havelange, vous m’avez permis d’évoquer divers drames qui secouèrent Ferrières durant le dernier conflit mondial. L’une des relations qui avaient été faites alors a été envoyée directement à Mme Duchesne et cette relation est d’importance, jugez plutôt.

« Je tiens à témoigner car j’ai vécu à la date du 2 septembre 1944 une triste histoire de très près, écrit Mme Marie-Louise Lahaye, de Vieuxville. Une des victimes était mon grand frère, il n’avait pas 20 ans, c’était un brillant étudiant. Nous étions fin août, c’est en se rendant chez son ami Jules Sépul, où une cachette avait été aménagée pour eux, qu’il fut arrêté avant d’être emprisonné à la maison Gaiemet où les Allemands assassinèrent Mme Gaiemet et trois infirmières avant d’incendier la maison !

Ensuite, il fut transféré à la ferme Jacot, à Izier, où d’autres jeunes étaient prisonniers, des malheureux innocents qui ont eu la malchance de se trouver sur le passage de ces bourreaux ! Parmi eux se trouvait un traître parlant allemand qui, sans les connaître et pour sauver sa peau, les dénonça comme des terroristes.

C’est le 1er septembre que nous avons appris l’arrestation de Gilbert, la nuit fut longue, papa, ma sœur et moi avons prié et supplié le Seigneur de nous garder Gilbert, notre rayon de soleil ; maman était décédée depuis quatre ans.

Le samedi 2 septembre, nous sommes partis, mon père et moi, par le bois, rejoindre le village d’Izier, les Allemands se préparaient à partir car les alliés avançaient. Je me souviens du bruit de leurs bottes martelant les pavés de la cour, ils étaient comme fous, criant et hurlant, une vraie débandade. J’étais terrorisée !

Les prisonniers sortirent de la cave où ils étaient enfermés, je me précipitai vers mon frère, le tirant par le bras : « Viens Gilbert, viens ! ». Le soldat eut un instant d’hésitation, mais il me repoussa violemment, quand j’y repense c’était hardi, mais, à douze ans, on ne mesure pas le danger !

Le convoi se forma, les camions étaient en avant, suivis par ces beaux jeunes, les mains derrière le dos, entourés de quatre soldats. Il s’agit de Pierre Thiry, de Verlaine, Joseph Ancion, de Ferrières, Gilbert Lahaye, de Ferrières. A une vingtaine de mètres suivaient deux papas, dont un tenant par la main sa petite fille !

Ce fut une longue marche sous une pluie fine de septembre, parfois les Allemands se retournaient pointant leurs armes vers nous et nous ordonnaient de partir. Nous avons continué, traversant le village d’Izier, suivant la route vers Burnontige.

Le père Ancion nous quitta et prit un raccourci pour rentrer chez lui au thier de Ferrières. Arrivés au sentier qui mène vers le bois de Raumont, mon frère tourna la tête vers la gauche car, de là, il aperçut notre maison, il nous fit un signe d’adieu de la main et c’est la dernière image que je garde de lui.

Quelques minutes plus tard, des coups de feu retentirent dans le bois et là… j’ai compris ! Papa ne réalisait pas et ne voulait pas y croire. Le lendemain, c’est un homme du village qui découvrit le triste spectacle.

Les jours et les mois qui suivirent furent très douloureux pour nous trois, je vivais comme je pouvais entre l’école et les tristes soirées, soutenant de mon mieux mon papa et ma soeur.

Bien qu’il y ait plus de 64 ans de cela, ma mémoire est intacte et pas un jour ne passe sans que je ne revive ce tragique épisode.

A Burnontige, trois monuments furent érigés à la mémoire de ces disparus, un principal où sont inscrits les noms des victimes de la guerre 40-44. Un autre en retrait en souvenir des trois infirmières assassinées et un dans le bois de Raumont.

Depuis, chaque année, à la date du 10 mai, du 2 septembre et le 11 novembre, les anciens combattants et les autorités communales de Ferrières rendent hommage et déposent des fleurs à ces monuments. »

Un immense merci pour ce poignant témoignage.