V1 – BOMBES VOLANTES – ROBOTS

Parmi les sujets largement commentés dans les colonnes de La Petite Gazette, les « robots »,  ces bombes volantes identifiées également V1, ont occupé une place de choix puisque c’est durant plus d’une année que les témoignages me sont parvenus. Je vous les ai rassemblés ici.

La Petite Gazette du 12 mars 2003

QUAND ON VIVAIT DANS LA PEUR DES ROBOTS

   C’est grâce à Monsieur Houlmont, de Boncelles, que nous avons l’occasion d’évoquer cet aspect si particulier du quotidien de la dernière guerre.

« Pour les citadins, pendant la guerre, le problème numéro un était de trouver de la nourriture. C’est ainsi que mon papa sillonnait, à vélo, l’Ardenne et le Condroz en quête de ravitaillement.

C’était le temps des robots, ces avions sans pilote équipés, déjà, d’un moteur à réaction installé sur leur queue. Le bruit de ce moteur était effrayant et, en plus, il en sortait des flammes.

Lorsque le moteur se coupait par manque de carburant, cet engin de mort, bourré d’explosifs, en perdant de l’altitude, continuait tel un planeur silencieux vers son objectif.

Un jour, mon papa, en rase campagne à Neuville en Condroz, roulait paisiblement. Il me raconta : « Me voilà tout d’un coup parti à gauche puis à droite ! Qu’est-ce qu’il se passe ? Je n’ai pourtant pas bu ! Deux à trois secondes plus tard,   BOUM »

Ce n’est qu’alors qu’il réalisa que c’était le robot, passant si près et au-dessus de lui, qui l’avait fait tituber. Ce jour-là, il l’a échappé belle. »

001

un robot (V1) tombe sur le Condroz en 1944

Photo appartenant à mon papa, Maurice Henry.

Pour en avoir entendu raconter d’autres dans mon entourage, j’imagine qu’il subsiste, dans les familles, bon nombre de souvenirs de ce type. Aura-t-on la chance de voir l’une ou l’autre photographie de ces robots ? Je compte sur votre habituelle et bienveillante collaboration pour développer ce sujet et, d’ores et déjà, vous en remercie chaleureusement.

La Petite Gazette du 16 avril 2003

 PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

   Alors que je me trouvais à la Foire aux livres de Poulseur, il y a quinze jours, j’ai eu le plaisir de faire la connaissance de nombreux lecteurs de La Petite Gazette qui avaient répondu à l’invitation que je leur avais lancée. J’ai eu ainsi l’occasion de discuter fort agréablement avec des correspondants qui, aujourd’hui, ne sont plus que des signatures mais également des visages. Merci pour toute la sympathie que vous m’avez manifestée.

Parmi les visiteurs de ce jour, Monsieur Léon Gabriel, de Sprimont, m’a remis le texte d’une ancienne chanson dite d’actualité au moment de sa parution, elle a été composée le 21 mars 1945 : « Les robots » paroles de Firmin Vancrutsen (de Seraing). La feuille était imprimée par la maison Martino de Seraing et vendue 5 francs ! La chanson, qui ne compte pas moins de six couplets et six refrains, peut se chanter sur l’air « Mi voyêdge ou les plaisirs di l’evacuation ». Je vous en livre quelques extraits :

1er couplet

Voici plusieurs semaines

Que les concitoyens

Attrapent la migraine

A cause des fridolins

C’est une arme nouvelle

Qu’ils viennent lancer sur nous

Une arme très cruelle

Nous en deviendrons fous !

1er refrain

Et quand on entend le V1

On se cache, un à un,

Dans la cave ou dans les abris

Malgré tous nos soucis

On entend la détonation

Même dans son pantalon !

Puis, alors, quand il est passé

Vite…, on va respirer

2e couplet

Le jour comme la nuit

Il en passe sans arrêt

Ça fait beaucoup de bruit

On n’sait plus où l’on est

Quand on les voit venir

Avec le feu derrière

Dans un profond soupir

 L’on dit une prière !

 2e refrain

Nous deviendrons neurasthéniques

Si ça n’peut pas s’calmer

Il n’y a qu’un moyen pratique

C’est de s’encourager

Et s’ils nous lançaient des V2

On s’rait quand même joyeux

Malgré la haine des hitlériens

Car nous sommes Sérésiens !

(…)

5e couplet

A présent, c’est fini

Nous sommes habitués

Car le régime nazi

Commence à s’effondrer

Et malgré cet hiver

Nous ne sommes pas changés

Car on dit que Hitler

Et mort et enterré

5e refrain

Hitler a été enterré

Dans l’trou fait par un V

Sur sa tombe, on écrit ces mots :

« Pour le roi des robots » !

C’est d’ailleurs pour ça qu’à Seraing

Nous n’avons plus d’chagrins

Et que vous chanterez en chœur

Ce refrain plein d’ardeur.

Continuez à m’envoyer vos souvenirs ou documents relatifs aux robots, les courriers reçus manifestent beaucoup d’intérêt pour cette rubrique.

La Petite Gazette du 29 avril 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Comme je l’espérais, cette rubrique est génératrice d’intéressants courriers, mais, et ce n’est peut-être pas étonnant, je ne reçois guère d’illustrations… Je sais qu’il existe peu de photographies de ces machines infernales en vol, mais je pense qu’il existe sans doute des photographies prises là où s’étaient écrasées ces armes terribles. Avec votre collaboration, nous pourrions les présenter à la grande famille des lecteurs de la Petite Gazette.

Monsieur Guillaume Claessen, de Tinlot, se souvient lui aussi :

« A l’époque, j’habitais à Herstal, rue des Vergers. Le jeudi, j’avais l’habitude de dîner chez André Lejeune à proximité de chez moi, rue Petite Foxhalle. Un jeudi, j’ai refusé, pour un motif oublié depuis, de m’arrêter. A peine rue des Vergers, le robot est arrivé, la pétarade du moteur s’est arrêtée. Sans savoir comment, je me suis trouvé le nez dans la rigole… Une énorme explosion, un terrible nuage de poussière s’est élevé. Des briques et des gravas s’abattaient tout autour. Peu après, j’appris, qu’André avait été victime de cet engin de mort. Je l’avais échappé belle ! »

Madame Laroche, de Marchin, vous interroge au sujet de ces « robots »

« C’est la première fois que j’entends ce terme de « robots ». S’agit-il de V1 ou de V2 ou était-ce encore avant car il me semble que les V1 et les V2 étaient mieux dirigés sur des cibles, Londres notamment. Merci des réponses que vous m’apporterez. »

Bientôt, je reviendrai sur le sujet en puisant d’intéressantes informations dans les écrits de M. Grailet qui s’intéressa à ce sujet avant de se pencher sur l’or des Gaulois en Ardenne…

La Petite Gazette du 7 mai 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Monsieur René Lardinois, de Mabonpré, ne mâche pas ses mots :

« La photo du V1 tombant sur le Condroz est fausse ! Jamais le V1 n’a eu des ailes pareilles. Il n’y a pas sur cette photo la tuyère d’échappement raccordée à la chambre de compression à éclatement ce qui provoquait ce bruit de pétarade ressemblant à une suite d’explosion (…)

Pour moi, poursuit M. Lardinois, il s’agit d’une maquette téléguidée ( ?) comme il y en a eu dans certains aéroclubs de modélisme où l’on a fabriqué des tas de maquettes volantes. Certaines très réussies. Sur la photo du journal, on peut voir des insignes : sur les V1, on ne mettait aucun insigne. » Et mon correspondant de m’envoyer le copie de cette photographie à titre de comparaison…

002       Monsieur Jean Ninane, d’Esneux, me dit que, bien souvent, à la lecture de La Petite Gazette, il a envie de m’écrire pour partager ses souvenirs avec vous, mais qu’il remet sans cesse son projet. Je crois que vous êtes nombreux dans cette situation, alors prenez exemple sur M. Ninane qui, cette fois, a pris la plume : « Cette fois, je saute sur les V1 et les V2, les terribles « Buzz Bomb » dont avaient peur nos amis américains.

Je me trouvais au collège Saint-Louis, lorsque j’ai vu ma première bombe volante… son bruit et sa flamme caractéristiques. On ne les craignait pas encore mais après l’explosion de celle-ci, nous avons repris le chemin d’Angleur (les trains d’Ourthe-Amblève ne passaient plus le pont du Val-Benoît) en nous cachant derrière les murs chaque fois que nous en entendions.

Je me rappelle au moins six impacts précis à Esneux :  quatre chutes firent des victimes – une dame rue de Poulseur, un ami, Charles Arnould, dans les bois de Crévecoeur, les deux autres touchèrent des membres de la famille Lambin, à la ferme du château du même Crévecoeur et de la famille de Geradon, à Méry.

Plusieurs soldats américains furent blessés dans des maisons de l’avenue Montéfiore, non par l’explosion d’une bombe volante qui s’abattit dans l’Ourthe auprès du pont, mais par les vitres et portes des habitations.

Le restaurant de mes cousins Donis, à Houte-si-Plou, (la « Coccinelle » actuelle) fut ravagé ; la véranda de droite (rebâtie en dur depuis cet événement) se retrouvait en miettes). »

Mme Maria Lambotte, de Werbomont, se souvient elle aussi :

« J’étais alors chez mon grand-père. La porte de la cuisine s’ouvrit brusquement laissant une large place à l’obscurité d’un soir comme tant d’autres. Sur le pas de la vieille demeure Tante Marie était blême. Ses traits décomposés laissaient présager une grande frayeur, mais elle put articuler :

Il y a un robot arrêté au-dessus de chez Sylvestre !

Sa sœur aînée me poussa dans la pièce voisine, le semblable de la salle à manger qu’à la campagne on nommait communément ‘la chambre’.

Couche-toi sous la table ! me dit-elle en s’alignant à mon côté, tout comme sa sœur. J’éprouvais une grande fierté d’être au cœur d’un événement au même titre que les grands.

Il y eut un silence – oh pas bien long – puis un bruit sourd. Le robot avait terminé sa course dans la forêt. Grand-père esquissa un mouvement circulaire sur le pavé de la pointe de sa canne pour aider son genou défaillant à se relever. Il reprit place dans le fauteuil. Mes tantes reprirent leurs occupations du soir, je me remis à mes jeux. On s’était presque habitué à la guerre ! »

Nous confierez-vous, à votre tour, les souvenirs que vous avez conservés de l’emploi de ces armes terribles qu’étaient les robots ?

La Petite Gazette du 14 mai 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

   Surprise cette semaine dans mon courrier en découvrant l’envoi de M. Francis Delmelle, de Nandrin. Il me transmettait une copie de la photo du V1 « tombant sur le Condroz », rigoureusement identique à celle que m’avait confiée mon papa ! Si c’est réellement un faux ( !) je constate simplement que le cliché, dans sa version originale, existe en plus d’un exemplaire ! Cela va rassurer mon papa, tant mieux.

« Je dispose du même cliché en version originale provenant de parents éloignés. La photo est identique, mais la légende diffère « V1 ou robot tombant sur Bierset – septembre 1944 » » Bien entendu, mon correspondant souhaite des précisions… Malheureusement, je ne puis être très précis, j’ai à nouveau questionné papa sur l’origine de cette photo. Il ne sait plus du tout comment elle est entrée en possession de la famille. Elle se trouvait dans le carton à photographies de mon grand-père, décédé il y a trente ans maintenant ! Il se souvient seulement l’avoir vue dès la fin de la guerre, en 1945 donc… Est-il possible qu’elle existe encore en d’autres exemplaires ? Si oui, faites-le-moi savoir s’il vous plaît.

Pour les passionnés par ce sujet, je ne puis que recommander l’excellente revue « Les cahiers de jadis » éditée par l’A.S.B.L. « Mémoire de Neupré » et dont le numéro 32, 8ème série 2002-2003, consacre un très intéressant article sur les bombes volantes. Les renseignements qu’il contient sont extraits du dossier pédagogique réalisé par l’Enseignement de la Province de Liège en 1994 et le texte très largement inspiré d’une conférence donnée par M. Eugène Buchet.  On y aborde l’historique de ces armes de représailles, mais aussi les aspects techniques de ces avions sans pilote. Schémas techniques, vues de robots en vol et surtout carte des points d’impact des bombes volantes autour de Liège, d’Esneux à Fexhe et de Bierset à Fléron complètent de façon très utile l’exposé.

Il est possible de s’abonner à cette publication s’intéressant au passé de Neupré, mais qui aborde également des sujets d’intérêt plus général, en versant une modique cotisation annuelle (4 publications annuelles). Questionnez La Petite Gazette pour les renseignements pratiques.

 La Petite Gazette du 21 mai 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

   Monsieur Robert Noltinck, de Marche-en-Famenne mais originaire de Liège, a eu l’excellente idée de me transmettre  un petit fascicule intitulé « Liège sous les V » dont je vous propose de découvrir le dessin de couverture.

003     « Ce petit livret ne présente aucune photographie de ces bombes volantes, mais le dessin de couverture est réaliste. »

Ce livre contient la liste complète des victimes et leur état-civil, mais aussi six pages de documents photographiques montrant les dégâts occasionnés à Liège et la façon adoptée par la population pour se protéger. On y trouve en outre un plan de l’agglomération liégeoise émaillés des points d’impact des robots. Il y en eu 936  faisant 1035 morts et plus de 2000 blessés hospitalisés. L’offensive par « V » se divise en deux périodes distinctes. La première du 20 novembre au 3 décembre 1944, la seconde du 16 décembre 1944 au 31 janvier 1945.

Mon correspondant se souvient :

« Les V1 volaient à quelques centaines de mètres d’altitude ce qui permettait de les entendre arriver. Ils étaient propulsés par une série discontinue de petites explosions s’échappant d’une tuyère surmontant la bombe qui tombait lorsque le moteur s’arrêtait. La précision était faible, la bombe tombait sur la ville au petit bonheur la malchance !    Par moments, il en arrivait une toutes les cinq minutes, nuit en jour, de novembre à janvier. Comme je devais étudier, j’avais alors presque vingt ans, j’avais trouvé logique d’installer mon bureau d’études dans … la cave.

Le V2 était une véritable fusée balistique qui montait dans la stratosphère et qui retombait, elle aussi, sans grande précision, mais, elle, sans faire de bruit. En effet, puisqu’elle était supersonique, le bruit de la traversée dans l’air ne s’entendait qu’après l’explosion ! Je crois qu’un seul V2 est tombé sur Liège, mais qu’ils furent plus nombreux sur Anvers. » Merci pour ces passionnantes précisions.

Monsieur Marcel Ska, de Cherain, se souvient aussi de cette époque : « Pendant l’Offensive, je m’étais réfugié à la ferme Grogna, à Ouffet. Un jour, trois hommes de Grand-Halleux sont venus passer une nuit à la ferme, mais le lendemain matin, ils partaient déjà car il passait trop de robots. Ils en avaient compté 28 durant la nuit !

En 1944, il en est tombé un non loin d’où j’habite actuellement et je sais que, dans les débris, on retrouvait de la mitraille de toutes sortes : des fers à gaufres, des fers à repasser…

En 1944 toujours, la Résistance avait fait dérailler un train transportant des V1 au lieu-dit « Les prâlles » à la sortie de Gouvy. Deux n’avaient pas été rechargés. Un peu plus tard, les Allemands ont installé une rampe de lancement à la sortie de Sterpigny. Un matin, en sortant pour me rendre à la messe, j’ai entendu un terrible vacarme. J’ai regardé dans la direction d’où cela venait et j’ai vu le départ d’un V1 à environ deux kilomètres de chez nous. Quelque temps plus tard, en regardant à nouveau dans la même direction, j’ai vu le départ d’un deuxième. Je m’en souviens encore comme si on était toujours ce jour-là, je pourrai encore vous en indiquer l’emplacement exact. »

Merci pour ces renseignements partagés avec toutes celles et tous ceux qui se passionnent pour ce sujet. Nous confierez-vous, à votre tour, les souvenirs que vous avez conservés de l’emploi de ces armes terribles qu’étaient les robots ?

 La Petite Gazette du 27 mai 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Vous êtes nombreux à suivre le conseil que je vous donnais, à savoir de m’écrire pour conter vos souvenirs, mais aussi pour apporter des informations sur le sujet.

Ainsi, la photo confiée par mon papa continue à faire couler beaucoup d’encre et ce n’est que tant mieux. Monsieur Raymond Delcommune, de Champlon, m’adresse un courrier extrêmement intéressant et qu’il consacre exclusivement à cette photo.

« Parmi les photos de V1 pris en vol, celle-ci figure, selon moi, parmi les plus reproduites.

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Le dessin de la page de couverture d’un petit livre intitulé « Gemarteld Antwerpen »,édité en 1945, s’en inspire très certainement. On peut y voir en arrière-plan la cathédrale d’Anvers et le Boerentoren.

Dans une autre revue flamande, on signale que ce robot aérien s’est abattu en 1944 sur une base américaine à Elewijt. Le photographe fut tué par l’explosion. Sa « dernière photo » (probablement imprimée à de nombreux exemplaires) fut vendue sur place pour aider sa famille (zijn foto werd ter plaatse verkocht ter ondersteunig van zijn nabestaanden).

Ensuite cette photo va faire une carrière presque internationale. Ce V1 tombera bizarrement  dans de nombreux endroits et même à Bruxelles. En février dernier, sur internet, cette photo était vendue comme « rare original photo of a german V-1 Buzz Bomb coming down. U.S. soldier snapped the picture as it was coming down in Britain!

Patteet raconte, à la page 165 de son livre “160 dagen terreur van Vliegende Vg », édité en 1994, que, selon un témoin local qui possédait cette photo, que le robot a été abattu par la D.T.C.A. à Lemputten op Berlaar-Heikant et a été photographié par un soldat de la batterie. C’était le 9 janvier 1945 vers 17h. Le rapport du P.L.B. (Passieve Luchtbescherming) mentionnera deux morts, quatre blessés graves et six blessés légers ainsi que des dégâts matériels importants.

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Un lecteur signale « jamais le V1 n’a eu des ailes pareilles ». S’agit-il d’un trucage photographique ? Je trouve la remarque de ce lecteur pertinente. Dieter Hölsken, dans son livre « V-Missiles of the third reich the V1 and V2” parle aussi de cette photo à la page 310 de son ouvrage.

 

 

 

Il y soulève la question des ailes coniques et du nez court ce qui est inhabituel pour ces engins aériens. Il pense avec réserve qu’il s’agit d’une nouvelle version de V1 plus rapide. Il est exact que ces engins ne portaient jamais de cocarde ou insignes nazis. Il y avait de petites inscriptions et chiffres destinés uniquement aux techniciens et manipulateurs de ces bombes volantes.

006Anthony Young, auteur de « The flying Bomb”, montre une photo très surprenante d’un V1 prise par un photographe amateur. On y voit des ailes coniques et un nez court. L’auteur précise qu’il s’agit d’une photo non retouchée.

 

Enfin, M. Delcommune conclut son courrier en m’interpellant : « Cher Monsieur, croyez-vous possible de trouver le négatif de la photo de votre papa ? »

Comme je vous le disais dernièrement, papa ne sait plus comment cette photo est entrée dans les collections familiales, avant la fin de la guerre ou dès la fin de celle-ci…

Monsieur Laurent, de Fairon, est également en possession de cette fameuse photographie.

« A 17 ans, j’ai travaillé quelque temps chez le photographe Dickenscheid, à Ougrée, rue de Boncelles. On y développait les films et, en faisant un tirage, on aperçut ce V1 qui tombait… Monsieur Dickenscheid en profita pour en faire plusieurs photos pour offrir aux amis. Voilà comment j’en ai reçu une. Derrière, il est mentionné 43 (?). Il n’y a aucune inscription sur les ailes, ce sont comme des ombres… Cela a dû être photographié dans le haut d’Ougrée, on voit des toits et des arbres. »

Chacun pourra, grâce à ces témoignages et à ces informations, se rendre compte de l’intérêt de pareille recherche. Merci à toutes et à tous pour votre précieuse et si utile collaboration.

 La Petite Gazette du 4 juin 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Vous êtes nombreux à suivre le conseil que je vous donnais, à savoir de m’écrire pour conter vos souvenirs, mais aussi pour apporter des informations sur le sujet.

   Monsieur Eloi Balthasar, de Rouvreux, apporte, à son tour, son témoignage sur les robots :    « Chacun sait donc que le robot ne devenait menaçant que quand son moteur s’arrêtait, la durée et la distance parcourue en planant étant aléatoire. Or donc, un jour de l’hiver 44 – 45, nous étions arrêtés avec nos traîneaux devant la maison paternelle, rue vieille chera à Florzé-Sprimont, quand nous entendîmes un robot arriver. Cela ne nous inquiéta pas d’emblée puisque le moteur pétaradait !

Il arrivait naturellement de l’Est et la maison nous le cachait. Après quelques secondes, le bruit fut si effrayant que nous nous jetâmes quand même à terre contre la façade. Il frôla les toits dans un fracas assourdissant, le moteur tournant toujours à plein régime et il alla, à pleine vitesse, s’encastrer et exploser dans la colline qui constitue le versant nord de la rue du Houmier (faisant la liaison entre Florzé et Rouvreux). Il n’y eut que des dégâts matériel car cette rue était alors peu bâtie. Ma maison actuelle vit son toit se soulever et ses tuiles retomber une latte plus bas : il fallut le refaire.

Pour une raison que j’ignore, ce robot s’était donc retrouvé à une altitude anormalement basse, lui faisant rencontrer un obstacle avant l’épuisement du carburant.

A la même époque, la ligne de bus Liège-Remouchamps, qui avait repris ses activités après la Libération, exploitait plusieurs véhicules d’avant-guerre avec moteur extérieur et un autre plus moderne avec moteur intérieur, dont le tuyau d’échappement se trouvait à l’arrière à hauteur du toit. N’étant pas mécanicien, je ne sais si ces détails sont liés, mais ce bus imitait remarquablement le bruit des V1 (avant l’arrêt du moteur naturellement !) Vu la vieille coutume campagnarde de rebaptiser toute personne ou toute chose, on appela donc ce bus « le robot » et on s’enquérait le plus naturellement du monde : Est-ce que le robot est déjà passé ?» Peut-être les membres les plus anciens de cette société de transport auraient-ils des souvenirs et des renseignements plus précis sur le sujet ? »

Cela serait effectivement intéressant, merci de répondre aux questions soulevées par M. Balthasar.

Monsieur Arsène Mormont, de Braibant-Ciney, contribue lui aussi à cette rubrique en me faisant parvenir cette photo.

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« J’ai pris cette photo près du grand bunker de Ouistreham plage. Ce V1 a été prélevé sur sa rampe de lancement et ramené à Ouistreham à titre de souvenir. » Merci à M. Mormont pour cette excellente initiative. Vu le nombre de témoignages reçus, je puis vous annoncer que nous poursuivrons cette enquête dans les semaines à venir.

La Petite Gazette du 11 juin 2003

 PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Comme promis, nous retrouvons cette semaine encore, de nouveaux témoignages relatifs à cette période, qui, à la fin de la guerre, faisait dresser une oreille attentive à tout qui vivait en nos contrées. Mme Marcelle Renquin, de Tenneville,  se souvient elle aussi :

« En ce temps-là, je devais avoir treize ou quatorze ans et je me rappelle que quand j’habitais aux Cristalleries du Val Saint-Lambert, il y avait eu un enterrement dans la cour du Val. On attendait Monsieur le Curé et ses acolytes. C’est un robot qui est arrivé… Le moteur s’est arrêté et l’engin de mort est tombé sur les personnes rassemblées. Il y eut de nombreuses victimes et figurez-vous qu’on ne retrouvait pas, sous les gravas, la vieille dame décédée ni son cercueil. On les retrouva en dessous d’un bac à eau qui se trouvait à près de 15 mètres de la maison ! Tout qui était à l’enterrement était réellement méconnaissable… » Pour illustrer son propos, ma correspondante a joint ces photos extraites de l’ouvrage : « La Seconde Guerre Mondiale – Le débarquement de Normandie » Je me dois également de signaler que M. Gilbert Brilot, de Chapois-Ciney, a eu la même excellente idée.

008  009M. Boudlet, d’Anthisnes, a tenu à participer également à cette rubrique en nous confiant souvenirs et photo :    « A cette époque, nous dormions dans la cave, ma sœur avec maman et moi avec ma grand-mère. Il fallait, en prévision des poussières qui allaient envahir les lieux, un seau d’eau et une provision de morceaux de linge. Chaque fois qu’un V1 passait, ma grand-maman ramassait le linge sur ma figure tellement j’avais peur. J’avais alors six ans… »

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Un V1 survole le carrefour de la rue de la Station à Ans, en décembre 44 Document extrait de :Paul BIRON Mon Mononke et la Libération, Bressoux, éditions DRICOT

La Petite Gazette du 18 juin 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Cette rubrique connaît un véritable succès et je m’en réjouis car elle nous aura permis de passer en revue de très nombreux témoignages et documents fort intéressants sur un sujet vieux de presque soixante ans aujourd’hui. Aujourd’hui, nous suivrons les souvenirs de Mme Godefroid-Collard, de Neupré :

« Ce que je vais vous raconter se passait alors que j’avais dix ou douze ans. J’habitais Tilff (rue des Ploppes) à l’époque des robots. J’ai entendu un bruit anormal, je suis allée sur le seuil de la maison et j’ai vu un robot. Moteur arrêté, il a traversé le village ; comme celui-ci est un fond, il fit demi-tour et son moteur reprit. Il revint vers notre maison et, une nouvelle fois, le moteur s’arrêta ; puis il s’est retourné pour la deuxième fois en partant pour de bon. Je ne sais pas où ce robot est tombé.

Comme cela m’amusait, je suis allée, une autre fois, voir un robot qui était tombé derrière chez moi, dans les champs qui appartenaient au château de Brialmont. J’ai eu la surprise de voir à l’intérieur, des casseroles, des fils barbelés, des cafetières, des boîtes à conserve vides… C’est alors que j’ai compris le bruit que faisaient les robots ! »

Ce passage du récit de Mme Godefroid-Collard fera certainement réagir une nouvelle M. Etienne Libert, de Bruxelles, qui m’expliqua que, à sa connaissance (et il s’est beaucoup renseigné), il est impossible que les V1 aient été chargés de mitraille ou de ferraille quelconque. Pour rappel, nous avons déjà communiqué un autre témoignage expliquant que les robots étaient chargés de vieux fers à gaufres et d’autres ustensiles métalliques.

011 Document aimablement transmis par M. José Giot, de Villers-le-Temple

   Entendions-nous bien, il ne m’appartient pas de dire qui a raison ou tort, mais bien d’essayer de comprendre pourquoi les souvenirs peuvent être différents… En effet, quand on étudie le plan d’un robot, on est en droit de se demander où on pouvait loger ces objets, mais comment expliquer alors le nombre de témoignages (j’en ai reçu bien d’autres encore) attestant de la présence de ces étonnantes ferrailles dans les débris des robots. M’aiderez-vous à y voir plus clair ? Comme d’habitude, je compte sur votre précieuse collaboration.

« A ce moment-là, poursuit ma correspondante, j’allais à l’école Ste-Marie (toujours à Tilff) et je faisais ma dernière année. Pour me protéger des robots, je me glissais sous la table. Il se fait que je les entendais venir de loin, mais quand je le disais on ne me croyait pas ! Un jour, j’étais sous la table et j’écrivais ce que Madame dictait. Elle vint me trouver et me demanda de me réinstaller correctement. Evidemment je refusai et je lui fis signe de se taire et c’est alors qu’elle comprit qu’un robot arrivait. Elle ne m’a plus jamais fait de remarque à ce sujet et j’ai continué à me mettre sous la table au moment où j’en entendais un. C’était l’alerte ! »

Monsieur JP Craps, d’Aywaille, se souvient lui aussi :    « En 1944, j’avis douze et nous habitions Liège, mes parents et moi. Nous venions de temps en temps à Aywaille pour nous y reposer entre deux « bombardements ». C’était une époque fatigante en ce sens qu’il fallait souvent descendre dans la cave quand l’alerte (les sirènes) se faisait entendre et je n’aimais pas être réveillé en pleine nuit.

Quand vint la période des V1 lancés sur Anvers et Liège, mon père m’apprit vite à me jeter couché sur le trottoir sitôt qu’un « robot » arrivait. On savait que lorsque son moteur s’arrêtait, il tombait. Le V1 mû par un pulsoréacteur (sorte de turbine à clapet) pétaradait et émettait un bruit de petite moto Gillet (ou Saroléa) 125 cc et vous dégringolait donc dessus quand il était à court de carburant.

Il me revient une anecdote. Un soir, chez nous, place Foch à Liège, mon Papa projetait un vieux film de cinéma. Avec le bruit, nous n’avons pas entendu d’alerte et, soudain, nos fenêtres ont volé en éclats, projetant mon gros chat sur moi. Un V1 venait de tomber sur un café de la place du Marché, près de l’église St-André. L’immeuble s’effondra sur un client qui n’avait pas voulu descendre à la cave car « il en avait vu d’autres ! » comme racontait le tenancier rescapé. Le client était un sergent américain ! »

012

 

 

 

Document aimablement confié par M. José Giot, de Villers-le-Temple

Merci pour ces renseignements partagés avec toutes celles et tous ceux qui se passionnent pour ce sujet.

    La Petite Gazette du 2 juillet 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Revenons donc sur ce sujet qui semble vous passionner si j’en juge par le nombre de courriers reçus !    Suivons cette semaine les souvenirs de M. J. Claessens, de Neupré.

   « Cette période du 20 décembre 1944 au 30 janvier 1945 a certainement été la période la plus noire pour les Liégeois et les habitants de la périphérie ! Alors qu’un soir, nous nous trouvions toute la famille dans la cuisine, mon frère quitta sa place pour se rendre dans la cour intérieure.  C’est alors qu’il vit arriver, du fond du jardin et à toute vitesse, notre chat « Poussy » qui se précipita dans la cave, dont la porte restait continuellement ouverte.

Mon frère appela toute la famille et nous obligea à descendre dans la cave à notre tour. Peu de temps après,  un robot tomba près de notre maison. Tout le plâtras des places tomba et les vitres furent cassées ! Un livre que mon frère était en train de lire et qui se trouvait sur la table de la cuisine fut transpercé, sur une centaine de pages, par des morceaux de carreaux. Grâce au chat et à la décision de mon frère, nous avions eu une fameuse chance !

Je joins (entre autres documents) un dessin d’un certain G. Nollomont (N.D.L.R. amateur de talent qui s’est spécialisé dans les dessins et peintures représentant l’ancien Seraing) montrant un V1 survolant les baraquements de la Chatqueue. »

013

Un tout grand merci à M. Claessens.

Monsieur René Lardinois, de Houffalize, m’a transmis un très abondant courrier sur le sujet dont j’extrais, cette semaine, ce document original et étonnant.

014

« Dessin d’un V réalisé par un écolier, Jan Scholiers, après que pareil engin se soit abattu sans dommage, dans une prairie marécageuse, au lieu dit « De moeras weide, van den oude moolen » à 2 Km d’Alost. Ce dessin est l’original, il a été réalisé sur un papier cartonné provenant d’une petite bible de poche. Cette bible était censée éloigner les démons ! Ce sont les Anglais qui emmenèrent l’engin, mais où ? »

Merci pour ce document inédit.

Une précision attendue par Mme Laroche, de Marchin, mais qui passionnera également M. René Lardinois, de Houffalize, nous est parvenue sous la plume avertie de Monsieur Jacques Bastin, de Heyd. La première citée interrogeait quant à l’origine du terme « robot », le deuxième m’écrivait dernièrement que « jamais les bombes volantes n’avaient été présentées sous la dénomination de robots ! »

« Le terme de départ employé chez nous, avant l’appellation « robot » était « bombe volante ». « Robot » est un mot qui vient en fait du tchèque « robota » et qui fut créé par l’écrivain Karel Capeck pour désigner, dans une de ses pièces de théâtre des années 1920, un automate d’aspect humain capable d’accomplir toute une série de travaux normalement exécutés par un être humain. De là, le mot « robot » a fini par s’appliquer à TOUT appareil capable d’agir de façon automatique pour emplir une fonction donnée ; et, entre autres, à nos sinistres V1. »

Voilà qui sera complet quand j’aurai ajouté que M. Bastin signale également une troisième appellation en usage alors, celle « d’Avion Sans Pilote ». Un grand merci pour ces éclaircissements bien utiles.

015

Document confié par M. J. Claessens, de Neupré, avec comme précision : V1 au-dessus de Liège, photo Istase.

 

Dès la prochaine édition, je vous proposerai le témoignage très intéressant de M. Marcel Lallemand, d’Esneux, le premier démineur belge à qui il fut donné de neutraliser un V1 non explosé.

La Petite Gazette du 9 juillet 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

Vos témoignages se succèdent, et c’est tant mieux, nous pouvons ainsi donner un aperçu très concret de cette période qui vit les habitants e nos régions se réfugier dans les caves et surveiller les moindres sons venant du ciel.

Monsieur Serge Legros, de Tilff, nous confie son vécu :    « J’habitais alors Hamoir et étais étudiant à Liège. Vu les difficultés des transports, devenus presque inexistants, nous avions été accueillis, ma sœur et moi, dans une famille amie, rue du Palais à Liège. Ce soir-là, réunis autour de la table, on tend l’oreille à chaque passage de V1.

Tout à coup… encore un, le bruit du moteur s’interrompt, un seul regard et nous nous retrouvons, à quatre, blottis sous la table de la cuisine.    L’instant d’après, c’est l’explosion, les vitres volent en éclat, nous sortons, hébétés, de dessous notre abri dans un nuage de gravas et de poussière, mais nous sommes indemnes ! L’engin avait explosé à moins de cent mètres, place du Marché et avait fait plusieurs victimes. »

Comme promis, nous aborderons aujourd’hui le témoignage de M. Marcel Lallemand, d’Esneux, (92 ans à ce jour !). Ce monsieur est le plus ancien démineur encore en vie dans notre pays, « tant en âge qu’en ancienneté de service » tient-il à préciser Son palmarès est éloquent : 766 bombes d’avion (de 50 à 1000 kg. Et plus de 2000 autres engins de toutes natures.

« Je me suis engagé au S.E.D.E.E. (Service d’Enlèvement et de Destruction des Engins Explosifs) placé sous la houlette du Commissariat à la restauration du Pays. Je fus le premier démineur belge à qui il fut donné de neutraliser un V1 non explosé, c’était le samedi 15 janvier 1945 et l’engin était tombé à Flémalle-Haute, dans un labouré durci par le gel. Accompagné du sergent René Dage, tout comme moi issu du 3° Génie, nous auscultions du regard cette saloperie dont nous ignorions tout du fonctionnement. Nous avons parcouru les 150 m. qui nous séparaient de l’engin avec la peur au ventre. Arrivés à hauteur de l’engin, nous constatons que deux systèmes de mise à feu sont placés sur la face plane à l’avant ; nous les enlevâmes sans difficulté. Par contre, sur le ventre de l’engin, se trouvent deux orifices fermés par un plastic transparent laissant apparaître des mouvements d’horlogerie. Pour les enlever, pas d’autre solution que le marteau et le burin. Les coups donnés remettent en marche le mouvement d’horlogerie. Fuir fut notre premier réflexe, puis nous optâmes pour le blocage du mouvement à l’aide d’un quart de crayon fendu sur la longueur. Ce fut la bonne solution. Nous pûmes alors extraire ces horloges sataniques. Nous sûmes plus tard qu’elles servaient à réguler le temps de vol en agissant sur les palonniers, tout comme pour un avion. Avec beaucoup moins d’appréhension, je neutralisai encore un V1 à Sart-lez-Spa. »

Toujours selon mon correspondant, cette photo, que je reproduis ci-dessous et que vous avez découverte dans l’édition de la dernière semaine de mai, serait un faux « il s’agit d’un trucage, la tuyère est mal placée ! »

Comme s’il répondait à l’avance à la question posée dernièrement, M. Lallemand indique que : « La croyance populaire prétendait qu’un V1 était bourré de mitraille : grave erreur ! »

Je prends acte, mais qui m’expliquera alors tous ces témoignages affirmant le contraire ? Où réside donc l’origine de ce mythe, si mythe il y a ?

Par contre, toujours sur le même sujet, Monsieur Jean Gabriel, de Sprimont, m’a exposé une intéressante explication qui justifierait la présence de cette mitraille hétéroclite dans certains V1.

« C’est il y a au moins trente ans que j’ai lu dans une revue, Historia si je me souviens bien, une démonstration, apparaissant comme indubitable, affirmant que chaque fois que dix V1 étaient envoyés vers leurs objectifs, les Allemands en propulsait un d’un type un peu particulier. En effet, il aurait été équipé d’un système, assez sophistiqué pour l’époque, permettant de localiser à distance l’endroit de son impact. Comme ce système était plus léger que l’explosif contenu dans les autres engins, il était lesté avec la mitraille dont il a été question. »

Voilà qui est passionnant… Qui a déjà entendu parler de ce type d’équipement ? Qui nous aidera à voir clair dans cette intéressante questions ? Merci de votre précieuse collaboration.

La Petite Gazette du 16 juillet 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

A son tour, Norbert Lagasse, de Liège, nous confie ses souvenirs … Je l’en remercie chaleureusement : « Originaire de Remouchamps, le 24 mai 1940, lors du premier bombardement de Poperinghe par l’aviation allemande, je me retrouve avec la cuisse droite sérieusement entaillée. Blessure horrible qui me laisse peu de chances de survivre ! L’amputation de la jambe est même envisagée, mais elle n’est pas réalisable ; s’ensuivent gangrène, tétanos…

Le 2 avril 1941, alors que cette blessure est encore bien loin d’être cicatrisée, j’entame une carrière d’employé à Liège, dans les bureaux de l’A.L.E. Au fil des mois, les trajets deviennent de plus en plus pénibles, mon père me trouve un logement à Liège chez une de ses cousines. Je rentre seulement à Remouchamps le week-end.

Depuis quelques semaines, je dispose du vélo de mon oncle Alphonse Lagasse que les Allemands ont arrêté le 19 juillet 1944 et envoyé en Allemagne d’où, malheureusement, il ne reviendra jamais…

Le lundi 13 novembre, la pluie retarde quelque peu mon retour vers Liège et il est 9h30 quand j’arrive au pied de la côte des Forges, à proximité de l’église de Gomzé-Andoumont pour entamer la descente vers Trooz où je prends le trolley 31 (le vélo, pour lui éviter les infâmes pavés de la vallée de la Vesdre, étant entreposé jusqu’au samedi dans une cabine grâce à la complaisance d’un collègue.

De Gomzé-Andoumont jusqu’à l’entrée de Trooz, la route est bétonnée, hormis quelques tronçons constitués de petits pavés rappelant les endroits où le vicinal Poulseur-Louveigné-Trooz coupait naguère la chaussée.

016 Le V1 photographié ici par M. Jacques Bastin a été saisi, en 1945, en Allemagne, par les troupes américaines d’occupation et remonté ensuite d’une façon « décorative » à la base de Lackland au Texas. En effet, afin de lui donner un aspect moins sinistre, les soldats l’ont repeint d’originale façon.

J’arrive dans le Rys de Mosbeux où, à proximité d’une entreprise de menuiserie, j’ai pour habitude de ralentir car le secteur pavé, sous lequel passe d’ailleurs un ruisseau, est assez long. Brusquement, j’entends la pétarade sinistre d’un robot. Puis… plus rien ! Affaire de secondes et je suis aussitôt flanqué, comme un fétu de paille contre le parapet du pont. Seulement quelques éraflures !

S’étalant devant moi : quel décor lamentable ! Poteaux et fils électriques encombrent la route. Vélo à la main, je fais cinquante mètres pour me retrouver devant un tas de briques. C’est tout ce qui reste du logement de Monsieur Biet. Dès cet instant, je vais vivre des minutes terribles. A une centaine de mètres de ce qui était son habitation, M. Biet dirige une marbrerie d’où il a évidemment perçu la déflagration. Le hasard a voulu qu’il se préparait à aller à un enterrement et qu’il avait revêtu ses « vêtements du dimanche ». Il court dans ma direction, se débarrasse de son veston et crie sa douleur. « Et ma femme et ma fille qui sont dans la maison… »

La bombe volante est tombée exactement devant sa maison, dans un pré avec une dénivellation de trois mètres environ par rapport à la route. M. Biet et moi déplaçons quelques briques entre lesquelles s’échappe un peu de fumée provenant ( ?) d’un foyer. Bientôt arrivent une dizaine de soldats canadiens en renfort. Je ne m’attarde pas davantage sur les lieux de ce drame. Retour sur Remouchamps et consultation chez le médecin : huit jours de repos pour commotion légère.

Je suis convaincu que si le vicinal Poulseur-Trooz n’avait pas existé, je n’aurais pas eu le bonheur de fêter mon 84e anniversaire, ce 24 juin. J’apprendrai que Mme Biet a été tuée et que sa fille a été gravement blessée et sortie des décombres avec énormément de difficultés. »

017V1 : 5,30 m d’envergure. 8,40 m de long. Poids : 2 tonnes dont 600 kg d’explosifs et 1000 kg de carburant (pétrole) ; Portée 400 km. Vitesse : environ 650 Km/h ; Altitude : entre 500 et 1000 mètres. (Document transmis par Mme Edmée Kerfs, de Havelange, mais née à Tilleur.)

 

La Petite Gazette du 6 août 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS…

La question posée au sujet du contenu des V1 vous a incités à m’écrire encore très nombreux à ce propos et, vous le constaterez au fil des prochaines éditions, les réponses sont loin d’aller toutes dans le même sens !

Voyons ce que nous raconte aujourd’hui Monsieur Alphonse Henrard, de Hotton.

« Je suis natif de Grâce-Berleur et pendant la guerre j’habitais cette commune. J’avais seize ans à l’époque, mais mes souvenirs sont encore intacts et complets. Nous avions constatés qu’il y avait deux « types » de V1 :  les hauts et les bas. Nous pensions que les hauts étaient pour Anvers et les bas pour nous, pour Liège. Beaucoup de jeunes, en ce temps-là, étaient férus d’aviation et de tout ce qui volait. Avec un ami nous avions été interpellés par les racontars concernant le « contenu » des V1 et nous avions décidé d’aller constater de visu.

Un jour, vers 7 heures du matin, un V1 était tombé au lieu dit « Ciseleux » au Berleur. Avec mon ami et de suite, nous avions foncé sur l’endroit et nous avions contrôlé par nous-mêmes que les restes de ce V1 ne contenait absolument rien de ce que l’on prétendait qu’il devait receler. »

La Petite Gazette du 20 août 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOT

Cette rubrique connaît toujours le même succès et vous êtes très nombreux à me dire l’intérêt que vous y portez. Merci.

018

 

 

 

Monsieur le Dr A. Labay, de Comblain-au-Pont, a visité, au début du mois de juillet dernier, le Blochaus d’Eperlecques (Pas-de-Calais, France) où une base de lancement de V1 a été reconstituée (45 mètres de long). Mon correspondant a eu l’excellente idée de photographier le site.

 

Un tout grand merci pour cette intéressante initiative.

Monsieur Jean-Pierre Beaufays, de Méry, revient sur la présence ou l’absence de mitraille dans les robots : « Mes parents et mes grands-parents, qui ont vécu à l’époque, m’ont, en effet, toujours dit (N.D.L.R. Les miens aussi !) qu’un nombre important d’objets hétéroclites étaient retrouvés à l’endroit d’impact de ces engins.

De plus, il paraît que des mitrailles ont également été retrouvées au cours d’assez récentes fouilles effectuées sur le point de chute d’un V1 au lieu dit « le Boubou » à Méry. Dans ces récits, il est toujours fait état de fers à repasser. Ne pourrait-on pas raisonnablement supposer que les éléments constituant la mécanique anti-conventionnelle de ces engins puissent passer pour des mitrailles et qu’un des éléments constitutifs de cette mécanique ait, à s’y méprendre, l’aspect d’un fer à repasser ? » La question est posée, mais trouvera-t-elle une réponse ?

Monsieur Raymond Delcommune, de Champlon-Ardenne, nous apporte quelques éléments de réponses. Il nous transmet des documents extraits de rapports secrets destinés à la deuxième Direction du Ministère de la Défense Nationale.

« Extrait d’un rapport d’observateurs de ‘passage de bombes volantes’ secteur de Sprimont : chute d’un V1 le 14 novembre 1944 à 21h28 au sud de Sprimont : « l’engin était farci de vieilles ferrailles, fer à repasser, ressorts de lit, etc. »

Un extrait d’un rapport de gendarmerie (brigade d’Olne) signale la chute d’un explosif genre V1, le 24 novembre 1944 à 23h58 au lieu-dit « Rafhay » commune d’Olne. Parmi les débris on remarque des « manches de grenades allemandes dans un rayon de deux cents mètres »

Dans un bulletin de renseignements daté du 27 novembre 1944, on lit « d’après les renseignements fournis par différentes personnes, il a été constaté très souvent au point de chute des bombes volantes la présence de mitrailles telles que : vieilles ferrailles ; fer à repasser, cadres de vélo, morceaux de vieux lits en fer, lames de rasoir, etc. »

Un autre bulletin de renseignements daté du 11 décembre 1944 rapporte « des agents signalent que certaines bombes tombées aux environs de Liège devaient contenir des morceaux de verre épais, des lames de rasoir, des morceaux de vieille ferraille. Ces objets ont été trouvés après l’explosion et ne proviennent pas des immeubles détruits par l’explosion. »

Un autre document parle du témoignage en Allemagne d’un témoin oculaire. « L’intéressé a vu remplir une carlingue de V1 de toutes sortes de mitraille de plomb, de fer, etc. mélangées à du phosphore en poudre et à des matières incendiaires. »

019

Selon moi, poursuit M. Delcommune, l’endroit de la charge explosive enclavée dans une cellule complètement fermée entre le gyro-compas et le réservoir à essence est le seul emplacement possible pour ces pièces insolites (voir photo). Il y était prévu environ 830 kilos d’explosif très puissant, dans un volume d’environ 540 dm3 . Une petite partie de l’explosif pouvait être amputée au profit de pièces métalliques de dimensions réduites. La consistance de l’explosif était proche de celle du mastic du vitrier, cette opération ne devait rencontrer d’énormes difficultés. Je crois que ce remplissage ne pouvait se faire qu’à l’usine. Evidemment les détonateurs ne se plaçaient que peu avant le catapultage. Aujourd’hui, l’actualité nous montre certains kamikazes qui utilisent du plastic explosif mélangé à des clous qui deviennent des projectiles meurtriers au moment de l’explosion. »

Merci pour ce témoignage, ces renseignements et cette tentative d’explication.  A votre tour, nous aiderez-vous à tenter de résoudre cette question ?

La Petite Gazette du 27 août 2003

AU TEMPS OÙ TOMBAIENT LES ROBOTS…

   Cette rubrique m’a encore valu de nombreux courriers montrant à suffisance l’intérêt que vous portez à ce sujet. Pour beaucoup de lectrices et de lecteurs, il aurait été l’occasion de se remémorer des souvenirs douloureux … ou plus légers.

Monsieur Raymond Delcommune, de Champlon-Ardenne, nous apporte de bien intéressants renseignements : « Dès octobre 1944, la Belgique recevra quotidiennement des V1 jusqu’au 30 mars 1945. A cette époque, les rampes de lancement sont situées en Hollande et en Allemagne. Les responsables de ces bases devaient recevoir très régulièrement du Haut commandement Allemand les « objectifs du jour ». Nombre de villes belges recevaient un numéro d’objectif, ainsi Liège avait le numéro 0103, Antwerpen 0304, Hasselt 0301, Mons 0109, etc.

De nombreux réglages précédaient le catapultage du robot aérien. Des instruments étaient réglés sur la base de paramètres obtenus sur une fiche de calcul. Ainsi il était tenu compte des informations météorologiques et géographiques. De l’exactitude de ces renseignements dépendait la précision du tir. Les gyroscopes du pilote-automatique réagissaient mal en cas de fort vent latéral. La précision moyenne des tirs variait d’environ 10 Km pour des tirs d’environ 250 Km. La tactique aérienne pour le lancement des robots n’était efficace que dans l’optique de l’envoi de « tir groupé ».

020

 

Un V1 sur 10 ( ?) était muni d’un petit poste émetteur situé juste avant l’empennage arrière (voir dessin)

 

A environ 50 Km de l’objectif, l’émetteur était alimenté et une antenne traînante d’environ 50 m. était expulsée à l’extrémité arrière du V1. pendant environ cinq minutes un signal convenu sur une fréquence connue dans la bande des 200 à 500 Khz était émis pour être détecté par des récepteurs allemands. Les manipulateurs déterminaient par radiogoniométrie le trajet parcouru et le lieu de l’impact au sol. L’écart entre le point de chute réel et théorique permettait de réajuster certains réglages.  Une série de bombes volantes pouvait ainsi être envoyée jusqu’à une nouvelle initialisation des paramètres par l’envoi d’un autre V1 avec un poste émetteur. Ainsi pour toute la journée du 16 décembre 1944 (premier jour de la Bataille des Ardennes), les représentants de l’ordre (Gendarmerie, Police, Bourgmestres…) signaleront au Ministère de la Défense Nationale 36 chutes de V1 dans toute la province de Liège. 29 tomberont sur Liège dans un rayon de 10 Km !

021    Mon précieux correspondant conclut son envoi en revenant sur la présence ou l’absence de mitraille dans les V1 : « Je crois utile de préciser, m’écrit-il, que les cas d’objets insolites trouvés dans les robots sont très rares. A défaut de recherche statistique, les cas de mitraille trouvée dans les torpilles volantes ne devraient pas excéder 1% du total des V1 envoyés sur Liège. »

Merci pour tous ces renseignements, dès la semaine prochaine, nous retrouverons d’autres souvenirs liés à cette époque particulière de la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

La Petite Gazette du 3 septembre 2003

QUAND TOMBAIENT LES ROBOTS…

   J’ai encore reçu plusieurs courriers concernant ce sujet qui vous intéresse grandement, vous interpelle ou vous émeut. Aujourd’hui, je vous propose de vous pencher sur les souvenirs de Madame Henriette Vranken-Fischer, de Sy.

« Je serais bien de l’avis de Monsieur Gabriel, de Stoumont, (voir l’édition du 9 juillet). A cette époque, j’habitais Liège, rue Ste-Julienne, endroit assez recherché, hélas, par les V1. Peut-être par sa situation au pied du Thier de Robermont et de la rue Cornillon, anciennes voies militaires vers l’Allemagne par Berneau ? Ou par certains courants d’air favorisés par le pied de la colline ? Tout ceci pour en arriver à la fréquence de ces robots. Notre famille s’était organisée, les jeunes surtout, frères, sœurs, cousins, de surcroît sportifs (basket) accouraient au plus vite quand un V1 tombait à proximité. Voici qu’un robot « spécial » tombe rue de Jupille, près de l’ancienne caserne de l’Intendance. Nous apprenons qu’il était lesté de toute une panoplie d’objets divers, batteries de cuisine, vieux fers de toutes les sortes, même des fils de fer barbelés. Les commentaires allaient bon train – bon signe – c’était la fin des Allemands !  … Après n’avons-nous pas appris que des collectes de récupération de ferreux et non ferreux étaient organisées pour soutenir l’effort de guerre et que ménagères et dames patronnesses inspirées vidaient caves et greniers. »

Merci pour ces souvenirs.

La Petite Gazette du 10 septembre 2003

PENDANT QUE TOMBAIENT LES ROBOTS

Monsieur L. Disy habite Liège, mais, grâce à ses enfants établis à Burnontige, il lit régulièrement La Petite Gazette.

« Les souvenirs concernant les robots me rappellent bien les moments tragiques, mais aussi, parfois, amusants. En cette fin 1944, j’habitais rue des Vennes à Liège et, à cinq minutes de chez moi, rue de Wetzlaer, résidait mon copain. Je passais chez lui une grande partie de la journée car le Collège était fermé. En raison du danger, tous les habitants de ces maisons de quatre étages vivaient dans les caves. Tous, sauf un, le brave Monsieur Limet ! Durant toute la guerre, ses voisins savaient s’il venait de passer car il fumait des feuilles de marronniers…

Parfois, un sourire était difficile à réprimer quand il nous relatait les conversations qu’il avait dans la garde-robe avec l’esprit de sa femme, morte avant la guerre !

En relation avec les esprits, il ne craignait rien, restant nuit et jour dans son troisième étage.  Un soir, cependant, nous le vîmes arriver dans la cave avec sa couverture. Comme nous étions étonnés, il nous expliqua que, sur un bâtiment proche, les mauvais esprits venaient d’apparaître et qu’il était très soucieux. Il fut, cette fois, très difficile de ne pas extérioriser nos rires.    La nuit suivante, un robot rasa le bâtiment en question !    Fini de rire. Dès lors, nous étions anxieux de connaître les confidences des esprits.

Pour vivre dans les caves, les gens s’étaient organisés. Ils avaient descendu les matelas, quelques provisions et un poêle dont on faisait sortir la buse par le soupirail. Comme on le disait, les gamins de m… s’amusaient en faisant pipi dans les buses tout en se réjouissant de l’effet produit un mètre plus bas.

Dans les caves, à huit ménages plus les amis, on discutait, on s’informait et on jouait à la belote des heures durant à un demi-centime le point.

A 23 heures arrivaient trois robots, de direction différente sans toujours tomber sur Liège. Par bravade, je disais : « Je retourne par le robot d’onze heures » ce que je faisais chaque soir.

022

 

 

 

 

 

 

Base de lancement de V1 au blochaus d’Eperlecques (Pas-de-Calais)

Photo réalisée par M. Le Dr A. Labay

 

Un soir, le père de mon copain me dit, vers 22h30, « Louis, tu devrais peut-être retourner plus tôt aujourd’hui » Je l’écoutai.    En arrivant chez moi, je descendis à la cave pour souhaiter une bonne nuit à mes parents et grands-parents avant de souper et de regagner ma chambre. J’y étais à peine qu’un V1 tombait presque en face de la maison. La porte avait été défoncée par une bille de chemin de fer venant de je ne sais où.

A quelques maisons de chez nous habitait la famille Verspelt. De leur porte, il ne restait que la partie inférieure, sous la serrure. M. Verspelt, en pyjama, devant son restant de porte, me dit : Maintenant, il ne me reste plus qu’à faire Meuhh !

Un autre de mes voisins trouva, dans sa chambre, un paquet de tabac et un briquet venant d’ailleurs car il n’y avait pas de fumeur chez lui ! Dans notre cuisine, le hareng prêt pour mon souper était constellé de morceaux de verre.    Dès cette soirée, j’ai dormi dans la cave, comme le restant de ma famille. Ce soir-là, le pressentiment de M. Lavigne m’avait vraisemblablement sauvé la vie.

La Petite Gazette du 1er octobre 2003

AU TEMPS OÙ VOLAIENT LES ROBOTS…

   Alors que d’autres témoignages me sont encore parvenus dernièrement, je vous livre aujourd’hui le contenu d’un courrier reçu il y a bientôt quatre mois…

« J’ai lu avec intérêt, me dit M. Jean-Jacques Brock, de Vielsalm, le récit de Mme Godefroid. A l’époque des faits qu’elle relate, j’étais tilffois moi aussi et j’habitais au fond de la rue de Louvetain, sur les hauteurs de Cortil, vers les 7 collines. Les gosses que nous étions disposaient là d’un observatoire privilégié pour regarder tomber les « bombes volantes » ; Cortil se trouve, en effet, sur la rive droite de l’Ourthe, à l’est de celle-ci. Or les robots qui nous survolaient, venant d’Allemagne, étaient destinés au complexe industriel de Seraing, situé à l’ouest, et leur charge de carburant était calculée en fonction de la météo (vent essentiellement) pour être épuisée en vue de l’objectif de sorte qu’ils s’abattent dessus, faute de propulsion.

Ce système rudimentaire aujourd’hui remplacé, par l’électronique et le guidage par satellite, était fort imprécis et il était fréquent que ces engins tombent trop court ou trop long. Leur chute était d’ailleurs annoncée par l’arrêt soudain de leur moteur et de son bruit. Compte tenu de la configuration de la vallée dont la crête ouest dominait la Meuse et Seraing, presque tous les robots qui tombaient trop court s’écrasèrent donc sur cette colline, face à la nôtre, en rive gauche de l’Ourthe et nommée « Sur le Mont ». Rares sont ceux qui tombèrent de notre côté et sur le village de Tilff bien à l’abri dans le fond de la vallée. Je pense qu’il y en a eu environ 360 dans la commune. Je n’ai pas de souvenir qu’ils contenaient de la ferraille (il n’y avait pas de compartiment pour une telle charge inoffensive qui eût, en outre, nécessité un surcroît de carburant inutile et dispendieux), mais leur explosion les réduisait bien entendu à cet état ce qui peut avoir entretenu la confusion. Je ne pense pas non plus que leur système de vol leur aurait permis de faire demi-tour car leur système de guidage était très rudimentaire et n’aurait pas permis de correction aussi forte. Je sais par contre par un ami qui fut pilote dans la R.A.F. que de tels engins furent souvent détournés de leurs cibles anglaises par les Spitfires qui les poussaient de l’aile. »

D’autres témoignages viendront encore, prochainement, compléter cette intéressante collection de récits consacrés aux bombes volantes. Merci de votre précieuse collaboration.

 La Petite Gazette du 8 octobre 2003

AU TEMPS OU TOMBAIENT LES ROBOTS

   Cette rubrique attire toujours autant de courriers et je m’en réjouis. Il me faut cependant réclamer un peu de patience à tous ceux qui m’ont écrit pour l’alimenter, je ne puis tout publier d’un coup ! Il y a déjà de longues semaines que M. Van Craywinkel, d’Evelette, nous a fait parvenir son témoignage.

« Oui, j’ai connu la période de guerre aux passages des V1 dans notre contrée… Un jour, en matinée, alors qu’il y avait un brouillard très opaque, j’entends le bruit caractéristique fait par ces engins. Tout à coup, le bruit cesse et, comme tout le monde, je crains une catastrophe. Le V1 est tombé dans le petit hameau d’Ossogne, Havelange, il a explosé dans une prairie proche des maisons. Je me suis rendu de suite sur les lieux et j’y ai constaté l’effet de cet engin qui avait éparpillé toutes sortes de ferrailles. Deux jeunes filles avaient été blessées à la figure, mais, heureusement, ce n’était pas très grave.

Quelques jours après, je suis allé à Haillot où un V2, à ce que l’on a dit, est tombé et a explosé en plein centre de la route principale. Il a creusé un cratère de cinq à six mètres de profondeur et causé des dégâts aux bâtiments proches. Heureusement, il n’y eut pas de victime, mais la peur se lisait sur tous les visages. »

Monsieur Willy Hendrix, de Neblon le Pierreux, vous conseille la lecture de l’ouvrage de souvenirs dû à la plume de Mme Marie-Thérèse Hanot, édité en 1994 par les éditions Dricot de Bressoux (il y est toujours disponible). Illustrant les propos de l’auteur, vous y découvrirez de nombreuses photographies montrant les dégâts causés par ces engins à Liège, les familles vivant dans les caves, les rues dans lesquelles les cheminées des poêles sortaient des soupiraux…

Monsieur René Franquet, de Barvaux, se souvient lui aussi :    « Nous habitions alors à Herstal, non loin de la F.N. et, à cause de cette usine, c’était un endroit très dangereux car les robots, ces machines infernales, avaient toujours tendance à tomber en panne de carburant dans les alentours immédiats.

Mon souvenir le plus précis, c’est notre cave : papa en avait fait un genre de galerie de mine, étançonnée par de grosses poutres de bois reliées entre-elles. Maman dormait à côté de moi et papa, lui, dans un hamac accroché à ces gros bois. Je revois aussi mon petit tableau noir et des craies de couleur, et aussi une étagère garnie de linges et de cruches d’eau. Vu l’inconscience de mon jeune âge, je trouvais même cela amusant.

Au petit matin du 26 septembre 1944, rien ne laissait imaginer le pire, sans le bruit caractéristique du robot, sans alerte… Il y eut soudain une énorme explosion. Je me souviens des vitres brisées, de cette poussière de plâtras, des cris du voisinage. Je revois maman se précipiter deux rues plus bas où habitait toute sa famille. Au-delà des mots, quelle horreur à ses yeux… La rue Adrien Cartier était transformée en un tas de ruines au milieu desquelles un cratère géant fumait encore. Ce jour-là, j’ai perdu mes grands-parents, un oncle, une tante, en tout il y eut 17 victimes.

Autant de dégâts pour un V1, ce n’était pas possible ! Nous ne le savions pas, mais cet engin sournois, puissant, silencieux était une fusée V2, la première tombée à Herstal ; il y en aura bien d’autres par la suite.

Aujourd’hui, je ne me pose même pas la question concernant ces histoires de casseroles, fers à gaufres ou autres ustensiles… Imaginez-vous les ingénieurs allemands capables de transporter une tonne d’explosif grâce à son pulsoréacteur, ou de créer le Messerschmitt bimoteur à réaction qui surclassait tous les appareils alliés, qui prenaient la fuite rien qu’à sa vue, ou encore d’inventer cette fusée V2 qui inspirera plus tard la N.A.S.A. qui en testera bien des répliques ; s’occuper de casseroles ? Ils en rougiraient de honte ! »

La Petite Gazette du 22 octobre 2003

AU TEMPS OU TOMBAIENT LES ROBOTS…

J’ai toujours, dans mon bac à courriers, divers témoignages relatifs à ces engins qui semèrent la terreur en nos contrées dans les derniers moments de la guerre 39 –45. Aujourd’hui, j’en extrais le récit que m’a fait parvenir Mme Flore Duchesne, de Havelange.

« N’en déplaise à vos correspondants qui affirment le contraire, je pense, comme bien d’autres, qu’il y avait bel et bien des débris hétéroclites à bord de ces engins de malheur, ou du moins de certains. Je vous en donne d’ailleurs quelques témoignages assez probants.

A Ocquier, en 1944 vivaient des réfugiés de Liège, rescapés des robots. Tous évoquaient un chargement de mitraille, comme ils disaient,  dispersé lors de l’explosion :  morceaux de couvercle ou de boîtes de conserves, un tas d’objets pointus ou coupants destinés à tuer et qui ont fait beaucoup de victimes.

Les principales cibles visées par les V1 étant Liège et Anvers, l’écrivain Léon Caris, habitant cette dernière ville, avait mis à l’abri sa petite famille à Ocquier, où il revenait régulièrement. Grand ami de mon père, il venait souvent à la maison et parlait des robots comme de véritables machines à tuer, chargées d’objets métalliques, tranchants pour la plupart, ou alors très lourds ; il y avait même des boulons et des grands clous.

Les robots manquaient parfois leur cible. C’est ainsi qu’il en est tombé deux ou trois dans la campagne avoisinant notre village et je me souviens, lorsqu’ils s’arrêtaient, de la panique indescriptible qui s’emparait des gens. Cela ne durait que quelques secondes, mais si on savait que cet engin était en train de tomber, par contre… on ne savait pas où… et cela pouvait être sur votre tête ! Quel ouf de soulagement, quand on entendait l’explosion. Le plus proche est tombé à un kilomètre du village et, à Ocquier, il y a eu des vitres cassées, entre autres une des grandes vitrines de la quincaillerie (chez Camille Walhin actuellement chez le docteur Legrand) qui fut fendue de bas en haut ! Avec des amis, papa est allé voir le lieu de l’impact. Lui aussi évoquait des débris divers, parmi lesquels il avait retrouvé  – il était formel –  des restes de réveil-matin, mais peut-être étaient-ce là les rouages et les ressorts du mouvement d’horlogerie dont parlait M. Lallemand ?

Merci pour ces nouveaux témoignages. Il est vraisemblable que nous ne vous mettrons pas tous d’accord sur la présence ou non d’objets métalliques transportés par les robots, mais là n’est pas non plus l’objet de la publication de pareils témoignages… Grâce à vous, nous pouvons faire revivre le quotidien de cette époque, avec ses craintes, les précautions prises et, parfois, les joies, tout de même, surtout celles vécues par les enfants d’alors dont, heureusement, l’insouciance pouvait prendre le dessus sur la peur.

La Petite Gazette du 29 octobre 2003

AU TEMPS OÙ TOMBAIENT LES ROBOTS…

    Décidément, cette rubrique connaît un succès qui dépasse et de loin toutes mes prévisions… En effet, chaque semaine m’apporte de nouveaux témoignages et de nouveaux souvenirs. Au risque de me répéter, je me félicite de cette abondance de courriers et je vous en remercie.

Madame Sornin, de Modave, m’écrit ceci : « J’habitais Saint-Nicolas, dans « le fond des rues », j’ai aussi connu les robots et je trouvais cela amusant, comme M. René Franquet, d’aller chez un copain, qui demeurait cinq maisons plus loin, et cela en passant par des ouvertures pratiquées dans les caves et permettant de passer de l’une à l’autre.

Je logeais chez ma tante, on avait installé, avec des tréteaux, un plancher au-dessus des pommes de terre et nous dormions, côte à côte, bercés par le ronflement du poêle dont la buse sortait par le soupirail. La cave était aussi étançonnée par de grosses poutres, comme au charbonnage, pour la rendre plus sûre. En plus, on n’allait plus à l’école !

J’avais, à cette époque, une souris blanche que j’emmenais partout avec moi, dans mes excursions. On mettait une couverture sur le coke et elle se promenait dessus. Elle devait cependant faire souvent sa toilette !

Une après-midi, on entendit le bruit caractéristique du robot. Vite, tout le monde à la cave, moi y compris ! Soudain, je pense à ma souris restée en haut… Je remonte pour aller la chercher sous les cris de « Non, reviens ici ! » J’attrape ma Belle et je redescends vers la cave. Tout à coup, le robot tombe derrière la maison en tuant une maman et ses trois enfants. L’escalier sur lequel je me trouvais se détache alors du mur et tombe dans le fond, dans une incroyable poussière. J’entends encore ma grand-maman s’écrier « Nom di Dju, èlle èst touwèye ! » Et moi de répondre : « Non, Grand-maman, elle vit encore ! » Bien sûr, je parlais de Belle… »

La Petite Gazette du 19 novembre 2003

AU TEMPS OÙ VOLAIENT LES ROBOTS…

   Il y a déjà cinq mois que j’ai reçu le témoignage de M. V. Lambion, de Comblain-la-Tour, seule l’abondance des courriers reçus sur le sujet explique cette parution si tardive ; il paraît que là réside la réalité du succès…

« J’avais alors 20 ans et je commençais les premiers labours d’automne à la ferme Ch. Defechereux, à Sparmont (Comblain-Fairon). Tout à coup, j’ai vu arriver, de la direction Comblain-la-Tour – Xhoris, mon premier V1, qui correspondait très bien aux photos que vous avez publiées. J’étais ahuri par le bruit assourdissant qu’il émettait, puis arrêt du moteur et chute de l’engin sur le pont roulant de la carrière de granit de Ouhar (Anthisnes). Comme j’étais sur une hauteur, j’ai eu le loisir de bien regarder le tout.

Huit à dix jours plus tard, j’étais toujours aux labours, au lieu dit ‘Banc des menteurs ‘,en face de la ferme de Houp-le-loup. Soudain, nouveau bruit infernal, mes trois chevaux se sont cabrés sur leurs pattes arrières en hennissant, puis Boum ! Je dois vous avouer, qu’avec une dame de La Rock, Anthisnes, venue ramasser du bois mort, nous avons eu la trouille de notre vie en voyant le V1 foncer sur nous. Heureusement au dernier moment, le moteur s’est arrêté et il est tombé juste en face de nous, dans le vallon creusé entre les deux fermes précitées. Nous avons été couverts de petits déchets de zinc et de ferraille et plusieurs carreaux des deux fermes ont volé en éclats.

Une quinzaine de jours plus tard, j’étais parti me faire opérer à la clinique Sainte-Rosalie et, après une dizaine de jours, j’étais sortant. Dans cette matinée, le premier robot que j’ai connu sur Liège est tombé dans le quartier de l’église des Oblats. On avait déjà eu peur quand un deuxième arriva sur Don Bosco dans le quartier du Laveu. Là ce fut plus grave pour l’hôpital. Beaucoup de vitres se brisèrent et les infirmières couraient d’un étage à l’autre pour tenter de calfeutrer les fenêtres en empêchant les courants d’air qui faisaient frissonner tous les patients. Les scènes de panique auxquelles j’ai assisté seront trop longues à vous expliquer.

Comme j’étais sortant, j’attendais la petite camionnette au charbon de bois de Michel Perello. Comme cela faisait aussi beaucoup de bruit et qu’il me fallait le temps de régler mes factures, les malades dans les chambres de la façade hurlaient de peur en entendant ce moteur. Nous avons quitté l’hôpital et avons même traversé les pelouses du Boulevard d’Avroy pour passer sur le seul pont de bateaux gonflables érigé par le Génie américain. C’était vraiment la pagaille dans tous les coins de la ville. Vu l’étroitesse de la camionnette, nous avons pu traverser l’Ourthe sur la passerelle réservée aux piétons, à hauteur du Pont des Grosses Battes, qui, lui, avait été dynamité. Quand nous sommes arrivés « Au fortin », rue de Tilff, il en est encore tombé un sur l’Hôtel du Bon Accueil en face du point d’arrêt de Streupas. »

    Un immense merci pour ce témoignage si vivant.

La Petite Gazette du 26 novembre 2003

LES V1 SONT AUSSI TOMBES SUR BRUXELLES…

Monsieur Willy Orins, de Petit Houmart, enfant, habitait à Forest. « J’avais huit ans et j’habitais, à Forest, rue de la Soierie, près de la gare de formation (arrière-gare de Bruxelles Midi) . En pleine nuit, un V1, dans sa chute malencontreuse, détruisit plusieurs habitations rue Bollinckx en faisant plusieurs victimes.

Pendant un court instant, alors que j’étais presque à un kilomètre de l’impact, je pouvais lire mon journal de classe tant l’amplitude lumineuse de l’explosion était importante. Les Allemands ratèrent la gare, mais pas les civils !

La crainte des V1 naissait du bruit spécifique de leur tuyère. On les entendait de loin, mais quand le bruit cessait on savait l’imminence de la chute. On ne savait où ils tomberaient car, en chutant, il changeait souvent de direction. »

ILS ONT AUSSI DECOLLE DE NOTRE ARDENNE !

Un courrier me venant de Tavigny et signé Mme Sulhant-Maréchal (si je lis bien) évoque également cette réalité de la peur née du bruit de ces engins, mais ce courrier rapporte aussi que l’Ardenne vit décoller ces engins de mort.

« J’ai beaucoup de plaisir à lire ces histoires qui me rappellent beaucoup de souvenirs. Un beau matin, en allant faire du feu pour la ‘cabolèye’ des cochons ; un bruit formidable se fit entendre au-dessus de moi. C’était comme si trois circulaires à bois fonctionnaient en même temps. J’ai couru dans le fenil à côté où je me suis abritée, toute tremblante de peur. Je ne l’ai pas vu, mais je l’ai bien entendu ! Il paraît que c’était un V1 et qu’il est tombé sur Paris. Il aurait été fabriqué dans notre Ardenne, du côté de Les Tailles, dans les bois… et je le crois volontiers. Je n’ai jamais oublié ce fameux bruit ni la frousse qu’il m’avait fichue. »

La Petite Gazette du 3 décembre 2003

AU TEMPS OU VOLAIENT LES ROBOTS…

Encore un témoignage sur ce sujet qui, manifestement, ne vous lasse pas et vous inspire toujours autant. La particularité du témoignage de Monsieur Michel Donnay, d’Alleur, vous apparaîtra dès sa première ligne.

« Je n’étais pas en Belgique à ce moment-là, j’étais alors contraint au travail obligatoire près de Berlin. Il me semble toutefois qu’il faudrait ajouter à cette saga, qu’en Allemagne, la propagande de Goebels vantait leur puissance de destruction. Chacune de ces armes de représailles, affirmait alors cette propagande, détruisait 800 constructions lors de son explosion.

Je crois aussi, comme cela a été dit dans ces colonnes, que le terme « avion sans moteur » (« sans pilote ? ») s’appliquait à une arme expérimentée avant les V1 et les V2.    D’après ce que j’ai vu et entendu, c’était une carlingue d’avion de chasse sans moteur. Bourrée d’explosifs, elle devait être remorquée et larguée sur l’objectif, mais je n’ai jamais lu que les Allemands s’en soient servis.

Au sujet de l’origine du nom « robot », il s’agit, en effet comme d’autres l’ont signalé, d’un mot slave qui signifie ‘travail’. »

Merci pour ces intéressantes précisions. Nous retrouverons, prochainement, M. Donnay qui évoquera pour nous un étonnant souvenir de son retour en Belgique après la libération de Berlin par l’Armée Rouge.

La Petite Gazette du 10 décembre 2003

UN V1 A DETRUIT NOTRE MAISON A ANGLEUR.

Encore un passionnant souvenir illustré que nous devons à M. Houlmont, de Boncelles.

« Un robot est tombé sur notre maison et celles voisines, rue Verhaeren, à Angleur. Le robot est tombé entre les numéros 41 et 43, côté Est donc à l’arrière et en contrebas.

Les conséquences : au 45, un peu de dégâts. Les maisons aux n° 41 et 43 furent rasées. Il n’y eut, heureusement, aucune victime ! Au n°43, personne n’était présent, au n°41 (chez les Bernimolin) tout le monde était terré dans la seule cave qui ait tenu le coup. Ils furent sortis par le soupirail et d’autres brèches ouvertes dans les décombres grâce aux secours de l’époque. En plus, le feu ravageait les ruines.

Chez nous, au n°39, mes parents avaient heureusement décidé, sept jours auparavant, d’évacuer vers la campagne car c’était quand même plus sûr. Après plusieurs déménagements, nous nous sommes fixés à Ombret, village dont je vous parlerai encore.

Dans notre maison, bien avant qu’on ne parle de V1, papa avait étançonné toutes les caves avec des piquets d’acacia installés tous les quatre-vingts centimètres. C’était amusant, tout comme le palais des glaces de la Foire de Liège, sans les glaces bien sûr.

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Voici ce qu’il restait de notre maison après le passage du robot

Chez nous, inutile de vous dire, vous le voyez vous-mêmes, que papa a dû démolir avant de reconstruire. Quelle catastrophe, la maison venait juste d’être payée !

Avant les V1, se souvient ma sœur Laure Houlmont, elle aussi de Boncelles, (j’étais trop petit alors pour m’en souvenir moi-même), il y avait eu les bombardements/ On vivait alors portes semi-ouvertes, jour et nuit. Voici ce qu’elle m’a raconté.

Chaque fois qu’il y avait une alerte nocturne (sirènes), papa et moi nous bousculions dans l’escalier pour aller nous mettre à l’abri dans les caves « blindées ». J’ai alors questionné ma sœur, « Et maman alors? » Maman raisonnait autrement, elle disait : « dj’inme ostan d’èsse touwée d’on cô qui di morri êtèrèe ! » C’était défendable. En entendant ce récit, il me vient encore une question que j’adresse à ma sœur : « Et moi alors, le tout petit gamin, qu’est-ce que je devenais ? » Réponse ironique de Laure : « Toi, on te laissait dormir avec maman ! »

Autant vous dire que je ne suis pas très content de leurs réactions… Enfin, je suis vivant et en bons termes avec ma sœur. »

La Petite Gazette du 23 décembre 2003

AU TEMPS OÙ VOLAIENT LES ROBOTS…

   C’est réellement un anthologie de témoignages et de souvenirs que la Petite Gazette aura réalisé sur ce sujet. La régularité, l’abondance et l’intérêt de vos courriers relatifs aux V1 qui tombèrent sur nos villages et nos villes confirment, si besoin en était encore, combien ce sujet vous passionne. Cette semaine, c’est Monsieur Jean-Marie Goffart, de Neupré, qui se souvient.

« Comme je suis né en 1934, j’ai connu, bien sûr, le temps des robots. Mes parents habitaient la rue Mandeville, à Liège ; nous avons d’abord expérimenté les bombardements de 1943, les Américains étant venu bombarder la gare des Guillemins.

Hélas, un vent défavorable soufflait et toutes les bombes tombèrent rue Mandeville, tuant un certain nombre de civils et détruisant pas mal de maisons. Celle de mes parents étant devenue inhabitable, nous nous relogeâmes au centre ville, rue de l’Official, sur le côté de l’ancien Sarma, au second étage. Ce détail a son importance, car les robots, lorsque leur moteur s’arrêtait, vous donnaient encore de 8 à 15 secondes avant d’arriver au sol. Comme, pour descendre à la cave, il y avait trois étages, bien souvent, l’explosion survenait avant que je ne sois dans la cave. Il m’est arrivé aussi, dans ma précipitation, d’arriver au bas de l’escalier, cul par dessus tête. Heureusement, j’étais mince et léger, je ne me suis jamais rien cassé.

Aussi, après un certain temps, nous nous contentions de nous abriter sous la table pour éviter d’éventuels débris. Je dois dire que, contrairement à certains de vos correspondants, j’avais très peur de ces machines infernales comme j’ai vu également des soldats américains dans le même état d’esprit !

A l’école, en effet, les cours ne furent pas suspendus tout de suite, quand l’instituteur entendait le bruit d’un robot, il arrêtait de parler. Si le moteur s’arrêtait, les 25 enfants disparaissaient sous leur banc, dans cris, sans panique. L’instituteur restait à son bureau, en apparence impassible et, après l’explosion, le cours reprenait parfois sans le moindre commentaire.

Quant aux ferrailles trouvées dans ces engins, il semble bien, en effet, que certains en contenaient. Ce qui est assez logique, ces débris augmentaient le danger que ces machines infernales représentaient pour les civils qui constituaient leurs cibles.

Je vous félicite pour cette série d’articles, les acteurs de cette époque deviennent en effet assez vieux et je pense que c’est un témoignage intéressant pour les jeunes.

Au sujet de la poussière dégagée lors des bombardements, c’est effectivement un des dangers connus et, à l’époque, nous avions un seau d’eau et des morceaux de tissu qui, imbibés de cette eau, constituaient un filtre assez efficace contre la poussière. »

Vous l’aurez constaté, depuis des mois, rares sont mes chroniques hebdomadaires ne comptant pas un ou plusieurs témoignages concernant les robots. Il me semble maintenant que nous avons fait le tour de la question et que nous n’apprendrons plus rien d’inédit sur ces engins de mort. Vos réactions ont été quasiment unanimes pour apprécier cette longue série et, bien entendu, je vous permettrai de découvrir tout ce que j’ai reçu à ce jour sur le sujet. Je ne serais cependant pas honnête en ne signalant pas que l’un ou l’autre parmi vous m’ont demandé d’arrêter de publier des témoignages évoquant des périodes aussi sinistres que celles des guerres. Enfin, un lecteur de Mabonpré-Houffalize m’a littéralement inondé de courriers dénonçant l’appellation même de « robot » qui, selon lui n’a jamais été employée à l’époque des bombes volantes. Le but de La Petite Gazette n’est certainement  pas de polémiquer, mais simplement de vous permettre de communiquer souvenirs, témoignages et récits du temps passé. Je choisirai cependant, parmi les nombreuses photocopies de documents transmises par ce lecteur, de vous proposer cette photo dont je ne puis, malheureusement, vous dire de quel ouvrage elle est extraite.

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Une des rares photos présentant Werner von Braun.

 

Monsieur Raymond Boland, d’Anthisnes, m’a, quant à lui confié ce document extrait d’une revue abandonnée par un soldat américain et qu’il a recueillie alors qu’il n’avait que quatorze ans.

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La Petite Gazette du 30 décembre 2003

UN ROBOT TOMBÉ  À LIÈGE EST À L’ORIGINE DE LA CONSTRUCTION D’UNE CHAPELLE À PETITE-SOMME

 M. Jean Courtois, de Somme-Leuze, nous conte cette étrange histoire. « A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, un robot tombe sur le couvent des Sœurs de la Charité de Cointe. Ce couvent avait pour Mère supérieure la fille du comte Charles de Vaux, propriétaire d’un château à Petite-Somme. Le couvent étant très endommagé, les Sœurs vinrent s’installer au château accompagnée d’un aumônier, l’abbé Francois Willem.

En 1944, lors de la retraite allemande, une charrette, tirée par un cheval, venait de Somme-Leuze en direction de Petite-Somme, elle était remplie de soldats allemands (des SS de triste réputation. A l’église, ils commencent à monter la route du village. Il y avait alors un nid très important de résistants à la ferme des Basses, exploitée à l’époque par Emile Piron. Une rencontre entre les Allemands et les résistants aurait été catastrophique.

L’abbé Willem, accoudé à une fenêtre du château, imaginant le nombre de victimes que ferait pareille rencontre, fit la promesse de faire bâtir une chapelle en l’honneur de N-D de Lourdes si tout se passait sans casse. L’abbé avait vraisemblablement une bonne cote auprès du Très-Haut car, à mi-côte, les Allemands firent demi-tour pour se diriger vers Septon. Là, ils rencontrèrent des maquisards et  bien des morts et des blessés restèrent sur le terrain.

En 1946 –1947, sous l’impulsion de l’abbé, les habitants de Petite-Somme se mirent au travail. Les pierres furent amenées du Bois des Roches, au lieu dit Sur Ourmont, avec un tombereau et un cheval.

Joseph Courtois mit, gracieusement, à disposition le terrain pour bâtir la chapelle. Aidé par son frère Louis, ils retroussèrent leurs manches et, en quelques semaines, la chapelle était bâtie.

Elle fut inaugurée, en grande pompe, à l’occasion d’une grand-messe dite par l’abbé lui-même. La bénédiction fut suivie d’une réception réunissant les autorités communales et paroissiales, mais aussi la fanfare et les personnes qui avaient participé à cet événement. C’est avec émotion que je vous fais ce récit car, âgé de dix-sept ans alors, j’ai vécu ces faits. J’en profite pour remercier toutes les personnes qui entretiennent ce lieu béni. »

La Petite Gazette du 7 janvier 2004

AU TEMPS OÙ TOMBAIENT LES ROBOTS

    Comme annoncé, je poursuis la publication des informations et témoignages en ma possession au sujet des V1 et des V2 . Monsieur Pierre Paulis, de Ferrières, intervient à son tour : « Madame Sulhant-Maréchal, de Tavigny, dans l’édition du 26 novembre, suggère que des V1 « fabriqués du côté des Tailles » soient tombés sur Paris. Oui et non. Oui pour Paris et notre Ardenne, non pour le V1. Le formidable bruit qui a terrorisé cette dame est celui d’un V2 lors de son lancement. Celui-ci a bel et bien été testé en Ardenne belge, dans la région de la Baraque de Fraiture.

Mon fils, Pierre-Emmanuel, que la chose passionne, a écrit une synthèse des diverses études faites sur le sujet. Elle est trop longue que pour être publiée dans La Petite Gazette, mais elle doit paraître prochainement dans la revue « Espace  Magazine ». Quoi qu’il en soit, il est bien prouvé aujourd’hui que Les Tailles et Sterpigny ont été les lieux d’essais des tout premiers V2 inventés par W. von Braun.

Ce premier V2, fabriqué en Allemagne et lancé, depuis un chemin creux de Sterpigny, le 8 septembre 1944 à 11 heures, tomba sur Maisons-Alford, près de Paris à 11h05 où il tua 7 personnes et en blessa 40. Un premier essai, le 6 septembre, sur le plateau des Tailles avait échoué. En tout, quatre V2 ont été amenés sur le sol ardennais, mais un seul a gagné les airs, heureusement !

Ne confondons pas V1 et V2. S’ils ont en commun la volonté de tuer et de détruire et, finalement, de donner la victoire à l’Allemagne – en visant, le premier, les régions proches (18000 V1 ont été lancés, et le second les régions lointaines (plus de 3000 V2 ont pris leur envol), leur constitution est totalement différente. Leur destinée le fut aussi d’ailleurs. Le V1 disparut avec la capitulation du Reich et le V2 donna naissance à l’ère spatiale.

Le V1, dit « bombe volante » est un petit avion à réaction, sans pilote, propulsé à l’aide d’une rampe de lancement (45 mètres). Son rayon d’action est assez limité et son altitude faible. Les premiers furent lancés la nuit du 12 au 13 juin 1944.

  1. 7,73 m, envergure : 5,18 m, poids : 2,2 tonnes

Le V2 est une lourde fusée supersonique (13 tonnes) s’élevant verticalement dans un bruit énorme jusqu’à 100 Km d’altitude. Lorsque le carburant est épuisé, après 350 Km environ, la fusée plongeait, silencieuse, vers la terre où explosait sa charge d’une tonne.

  1. 13 m., D. 1,70 m., puissance 600 000 ch., vitesse 5000 Km/h

Ainsi donc, il y aura bientôt 60 ans que s’envolaient les premières fusées. C’est le début de l’astronautique moderne. Depuis lors, grâce à la fusée de plus en plus puissante, l’homme est allé sur la Lune, il vient de commencer la visite de Mars ; de nombreux satellites nous entourent et l’on peut admirer, tous les soirs clairs, la station spatiale habitée traverser notre ciel (toutes les 90 minutes) ; un satellite a quitté notre système solaire…

Et ce sont bien nos bois wallons qui, vu leur discrétion, ont été, involontairement sans doute, les premiers collaborateurs de cette fabuleuse aventure qu’est devenue la conquête spatiale. »

La Petite Gazette du 14 janvier 2004

ALORS QUE LES ROBOTS TOMBAIENT SUR LE PAYS

   Mme F. Gilsoul Legrand, de Méry-Esneux, se souvient également de cette époque noire de notre histoire : « A ce temps-là, j’habitais Hayen et j’avais 13 ans. La chute des robots m’a fort marquée et le souvenir m’est resté très précisément. J’aimerais rectifier certains petits détails. Un jour, en fin d’après-midi, un robot s’arrêta au dessus du village de Hayen. Il piqua sur un chêne et éclata en se désagrégeant. Il éparpilla toutes ses ferrailles y compris de vieux fers à repasser et bien d’autres objets qui, en retombant au sol, blessèrent mon oncle Lambert et tuèrent son fils Charles, donc M. Arnould. Cela s’est passé au lieu dit ‘Le troisième four à chaux’, sur un petit chemin qui mène vers le village de Hayen, sur la route du Laveu. Les deux victimes y travaillaient à faire du bois de chauffage. »

Ce témoignage fait, une nouvelle fois, état de la présence d’objets étonnants dans les débris de ce robot. Nous l’avons vu, à de multiples reprises, de nombreux témoins affirment avoir vu ces objets alors que les informations plus rigoureuses et l’étude des plans semblent rendre impossible pareille présence. Nous n’aurons donc pas pu faire la lumière de façon définitive sur ce sujet, mais nous aurons, du moins, eu l’occasion de constituer une très importante anthologie de témoignages. Merci à toutes et à tous pour votre collaboration.

La Petite Gazette du 21 janvier 2004

AU TEMPS OÙ TOMBAIENT LES ROBOTS…

Je poursuis, comme convenu, la publication des témoignages et récits qui m’étaient parvenus avant que je ne vous demande de réserver vos envois à d’autres sujets, tout aussi passionnants et moins traités dans nos colonnes.

Je me suis néanmoins résolu à déroger à cette règle que je m’étais fixée en découvrant le contenu de l’envoi de M. Pierre André, de Liège, car je suis persuadé qu’il remettra beaucoup de choses en place dans l’esprit de bien des lecteurs.

« Je vous envoie un extrait du ROBERT, Dictionnaire historique de la langue française sous la direction d’Alain Rey, – première édition 1992, trois tomes, 4304 pages – qui note à la définition ‘robot’ : (…) dès 1944, dans le français régional de Liège, pour désigner les V1 (…)

Voilà qui éclaircit bien des positions, un grand merci à M. André.

UN OBJET MYSTERIEUX APPARTENANT PEUT-ETRE A UNE BOMBE VOLANTE

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Monsieur Renato Lardinois, de Houffalize, m’a beaucoup écrit au sujet des bombes volantes, il m’a notamment dessiné cet objet qui l’intrigue et qu’il a découvert dans un « trou de bombe volante à Anvers. J’ai retrouvé le même, poursuit-il, dans un bois à Foy Noville, sous quarante centimètres de terre On s’est battu dans ce bois, précise-t-il utilement. » Il se demande s’il ne s’agirait pas du palonnier à câbles qui faisait fonctionner les ailerons arrières des V1, mais, poursuit-il, « à Foy, on ne parle pas de chute de V1 ! Qu’est-ce donc ? »

Cette lectrice, dont nous lirons les souvenirs cette semaine, habite maintenant Bomal s/O, mais ses souvenirs nous mènent tout droit à Kinkempois.

« Les bombardements ont détruit notre maison en mai 1944, nous avons évacué et loué une maison, rue des écoles. Le 16 décembre, un V1 est tombé à proximité des ateliers de la gare et un deuxième rue des écoles. L’arrière-cuisine et l’angle arrière de la maison ainsi que tout l’arrière de la maison voisine se sont effondrés. Nos voisins étaient dans leur cave.

En quelques minutes, des soldats américains de la 741e B engineen company sont arrivés sur les lieux, ont dégagé les décombres et sorti nos voisins de leur inconfortable situation. Maman était fâchée parce qu’on riait d’entendre notre voisine qui refusait qu’un soldat touche ses jambes pour la porter et la sortir du trou.

Je me souviens très bien d’un réservoir  d’environ 1,5 m. et de 75 à 80 cm. De haut. Il y avait aussi ce que tout le monde appelle un fer à repasser. Une sorte de poignée avec deux trous à l’arrière. Un fer de forme ovale d’où sortaient deux fils assez épais. Un Américain a photographié cet objet avant de l’emporter avec d’autres débris.

Je pense que les Allemands souhaitaient détruire les ateliers de réparations des locomotives. Après la chute de certains V1, les américains captaient des émissions radio donnant les positions d’impact. Un émetteur a été découvert à la gare d’Ougrée où, à proximité, un homme a été arrêté.

Ma correspondante tient à préciser qu’elle n’a jamais utilisé l’appellation G.I. qui, pour elle, ne signifie pas un homme. En outre, elle se rappelle avoir ri quand les civils disaient que les vantards étaient tous ingénieurs. »

 La Petite Gazette du 3 mars 2004

UN V1 EST TOMBE A COO

Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo, est un infatigable chercheur (et c’est un chercheur qui trouve…) Il vient de publier la première partie d’une étude consacrée à Coo. Ce premier tome évoque la période s’étendant de 1107 à 1842 et le second est en préparation. Son auteur nous permet d’en découvrir, en exclusivité, une des pages. « Le curé de l’époque, l’abbé Alfred Corman, avait consigné, dans un petit carnet, les événements de la fin de guerre. Voici ce qu’il écrit à la date du 20 décembre 1944 :

Mercredi 20 décembre

   Je sors vers onze heures, personne sur les chemins. Je vais chez Louis Philippe, de là je vois passer en direction de Roanne-Coo quelques véhicules allemands suivis d’infanterie.

(Louis Philippe était le père de Georges Philippe, lui-même père de Colette Philippe, il habitait une demeure proche de l’actuel hôtel-pension de Philippe Constant, son arrière-petit-fils)

Vers deux heures, je monte à Grand-Coo, la bataille fait rage, toute la population de Grand-Coo est dehors, rafales de mitrailleuses, la bataille se rapproche.

   Vers trois heures, des tanks remontent, allemands ? Je redescends.

   Vers trois heures et demi, les gens de Grand-Coo descendent, d’autres tanks remontent, ce sont des américains, victoire, ils viennent de Moulin-du-Ruy.

   A leur suite, je vais jusqu’à la halte, heures affreuses passées dans la cave par les Philippe, chez les Thonon, Croix Rouge américaine, deux allemands gravement blessés, un catholique conscient bien disposé, je lui donne l’absolution, il gisait dehors sur une civière, il demande à boire puis à rentrer car il a froid, on accède à ses désirs. A l’intérieur, un autre blessé protestant était soigné par les Américains, je lui donne l’absolution, sous condition.

   (Roger Colinet, alors âgé de quatre ans, se souvient avoir vu le blessé sur une civière maculée de sang).

N allemand blotti en contrebas sur la ligne du chemin de fer est fait prisonnier, la maison Th. L… (maison Thonon ?) avait été touchée. (…)

   Vingt minutes avant dix heures, un V1 s’écrase sur la montagne à l’arrière de Grand-Coo, des carreaux tombent, cinq. »

Ayant questionné plusieurs personnes du village, j’ai finalement rencontré, c’est toujours M. Gabriel qui s’exprime, M. Georges Delvaux, de Petit-Coo, qui m’a déclaré bien se souvenir de l’endroit où le V1 était tombé.

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« Nous avions d’ailleurs fait une photographie où je posais devant les débris du V1 qui n’avait pas complètement explosé. » La photo a été prise par Fernand Philippe et elle a été retrouvée. Le document montre M. Georges Delvaux appuyé contre la tête de l’engin.La photo a été prise en 1949, cinq années après la chute, mais l’endroit était resté désert. Plus tard, un ferrailleur averti profita de l’occasion et enleva les débris. »

 La Petite Gazette du 31 mars 2004

POUR LA ÈNIÈME FOIS … AU TEMPS OÙ VOLAIENT LES ROBOTS

    D’emblée, signalons qu’il ne s’agit pas de revenir sur un sujet aussi largement traité, les redites seraient certainement inévitables et, disons-le, certainement insupportables. Si j’y reviens néanmoins, c’est parce qu’un lecteur attentif, Serge,  a découvert cette étonnante photographie dans une revue de l’aéronautique mondiale intitulée « Inter Avia » et datée de mai 1946.

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Remarquez le petit cockpit, à gauche du buste se détachant du fuselage.  Cette photo était accompagnée du texte suivant :

« On s’est parfois demandé, non sans raison, s’il fallait considérer l’arme à longue portée V1, propulsée par réaction et à téléguidage, comme un avion ou comme un obus. Une réponse à cette question nous est fournie par le V1 à pilote, quoiqu’il ne s’agisse là que d’un engin expérimental. Dans les premières V1 sans équipage, des vibrations s’étaient produites qui, plusieurs fois, avaient provoqué une rupture d’aile et la chute. La source de ces vibrations, le moteur travaillant par à-coups, ne pouvait être modifiée ; il fallait donc déterminer par des vols d’essais à quelles vitesses ces phénomènes de résonance ne se produisaient pas. Rappelons que les vols d’essais du V1 qui, du fait du peu de confiance qu’inspirait « cet avion » pouvaient bien effrayer le pilote le plus résolu, ont été exécutés par une femme, Hanna Reitsch, pilote de planeur. »

La Petite Gazette du 28 avril 2004

POUR COMPLETER LA COLLECTION DE DOCUMENTS SUR LES ROBOTS

   Madame Solange Bral Lamer, de Terwagne, me transmet la photo que vous découvrez ci-après. Elle a été prise lors d’un voyage effectué par le Dr et Mme Louis Meys en promenade dans le Pas de Calais, à St-Omer. Il y ont vu un robot sur base de lancement à destination de l’Angleterre. Sur la photo transmise, vous aurez, comme moi, la surprise de distinguer, fort nettement cette fois, l’espèce de cockpit juste sous la tuyère.

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6 réflexions sur “V1 – BOMBES VOLANTES – ROBOTS

  1. Pour apporter un complément à l’article de Mr.Ninane d’Esneux , je voudrais apporter un témoignage : Charles Arnould ,accompagné de son père ,était dans les bois de Crèvecoeur pour ramasser du bois mort. Mon frère Jean devait les accompagner , mais au dernier moment il a renoncé à cette expédition….Bien lui en a pris..!! Moi-même, de 9 ans plus jeune que mon frère Jean , j’étais un ami du frère de Charles Arnould , Jacky Arnould qui s’est expatrié au Canada et qui y est décédé…Je me souviens également d’une anecdote fort gênante pour moi , gamin de 10 ans en 1944. Nous hébergions dans notre maison de la rue Fabricienne à Esneux 2 soldats américains dont un était un indien pur race.. ils avaient très peur des « robots » Un jour , lors du passage d’un de ces engins de mort , nous étions réfugiés , ma mère , les soldats et moi en dessous de notre robuste table du « living room » , table en chène massif et très épaisse. A un moment donné , peut-être de peur, j’ai lâché un pet silencieux mais très « odorant »…!!! je n’ai jamais été aussi honteux de moi que cette fois -là…la preuve , j’y pense encore…

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  2. Bonjour,
    J’ai lu avec intérêt ces différents témoignages au sujet des armes V. Pouvez-vous, s’il vous plaît, me communiquer la date de la chute du V1, rue Verhaeren, à Angleur dont parle Mr. Houlmont?
    Merci de votre aide,
    Très cordialement,
    Samuel Lucas

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    1. L’appel est donc lancé… Il reste aux lecteurs à se mettre au travail.
      J’entame également la recherche et, pour lui donner davantage de chances
      d’aboutir, je publierai cette demande dans une prochaine édition de la version
      papier de La Petite Gazette.
      Je ne doute pas que la réponse nous parviendra bientôt.
      Très cordialement,
      René Henry pour La Petite Gazette

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  3. Bonjour,
    Mon père Léon était à Bressoux pendant les bombardements de V1 sur Liège, il était élève prfès à l’abbaye de Bouhay…où était abbé le père Jean-Baptiste ROY, d’origine vendéenne (France), DCD en janvier 1944. Un jour mon père et son ami belge Auguste Rédiger (originaire de Grivegnée ?) étaient montés au sommet de la tour de l’église abbatiale du Bouhay, pour regarder le « spectacle » des vols de ces fusées…L’une d’elles m’a-t’il raconté était tombée sur un camp de ravitaillement américain…heureusement que ce n’était pas des munitions ! Le curé ? ou un de leurs professeurs les a sermonnés pour les faire redescendre…ce qu’ils ont fait d’ailleurs…

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