Un merveilleux produit : la Solvine

La Petite Gazette du 30 décembre 2009

CONNAISSEZ-VOUS LA SOLVINE ?

Monsieur Jean-Pierre Corvers, de Rouvreux, est un lecteur fidèle de La Petite Gazette. Aujourd’hui, il fait appel à vos souvenirs dans l’espoir d’apprendre un maximum de choses sur ce petit objet du quotidien de sa grand-mère.

« J’ai retrouvé cette boîte chez ma grand-mère, à Tilff, il y a bien longtemps ; elle, en effet, est décédée en 1977.

solvine

Sur cette petite boîte, je lis : Ets Louis Jamart, Esneux, Belgique. Sur le bord: registre de commerce 26759 (ou 69, chiffre partiellement effacé). Sur le dessous: Evite gerçures, engelures, crevasses, boutons, etc.

Les lecteurs voudront-ils mener l’enquête et nous donner de plus amples informations sur ce produit conçu chez nous ? Je l’espère vivement et me réjouis de prendre connaissance des renseignements qu’ils voudront bien m’apporter. »

La Petite Gazette du 6 janvier 2010

PARLONS UN PEU DE LA SOLVINE

« Il me semble pouvoir affirmer, écrit Monsieur  Pierre Bartholomé, encore un lecteur fidèle de La Petite Gazette, que ce produit était élaboré au départ du suint de la laine de mouton. Cet animal figure d’ailleurs sur la boite.

A mon sens, poursuit mon correspondant, il provient du nom d’une société verviétoise, sise à la sortie de Verviers en direction d’Eupen et portant le nom de : » Le Solvant Belge ».

Cette ancienne firme était spécialisée dans le traitement des laines en
provenance du monde entier et principalement d’Australie. Le traitement dans les dernières années consistait au lavage de la laine et, entre autres, on en retirait le suint  (sorte de graisse) qui imprègne la laine de mouton. Cette graisse était traitée et purifiée pour de nombreux usages dont des produits pharmaceutiques. A ce propos, Monsieur Jean d’Olne, (que je salue cordialement) de Sprimont, grand spécialiste en textile pourrait nous en apprendre beaucoup à ce sujet et ajouter des détails qui me sont méconnus.

Il semblerait donc que le négociant d’Esneux commercialisait sous sa propre marque et son conditionnement cette graisse, qui en fait était « un déchet », en provenance du Solvant Belge verviétois.

Personnellement, lors de mon adolescence, sujet à de fréquentes crises de furonculose , j’ai très souvent utilisé cette graisse en pansement pour faire « mûrir » ces clous ou  furoncles très douloureux. Ce fut toujours avec succès et conseillé d’ailleurs par le pharmacien du coin pour extraire toute inflammation. Donc, en résumé, me référant à Solvine et Solvant Belge d’une part ainsi qu’à la reproduction d’un mouton sur la boite, je pense être dans le vrai en vous contant ces souvenirs. »

Que de renseignements ! un tout grand merci. Et vous avez-vous utilisé de la Solvine ?

 La Petite Gazette du 20 janvier 2010

LA SOLVINE A PRESENT

Voilà un produit qui aura laissé bien des souvenirs également dans la mémoire des lecteurs : Monsieur Jean d’Olne saisit la balle au bond :

«Monsieur  Pierre Bartholomé m’envoie gentiment « la patate chaude »… je demande donc à Google:

Solvent  Belge

« Aujourd’hui usine Traitex, en activité. C’est une usine de traitement de la laine, nettoyage et dégraissement.  Dans l’ancien atelier, trois machines à vapeur et une machine d’extraction pour le suint. L’entreprise « Solvent Belge » y fabriquait la Solventine. »

C’est donc confirmé. J’ai trouvé dans le même  article la photo de l’atelier de production:

solvine 2

 

Le suint produit par les moutons peut être comparé au sébum secrété par la peau humaine. C’est une matière onctueuse qui est récupérée après le lavage ou le solventage de la laine (lavage = à l’eau; solventage … au solvent).

 

Cette matière, judicieusement traitée après récupération, fournit la lanoline, dont chacun connaît le nom, utilisée en cosmétique, en pharmacie, et, c’est moins connu, pour la production d’antirouille.

Mon premier emploi a été dans la seule usine de production de lanoline en Belgique, Croda Belge, qui était établie à Verviers, et qui traitait la lanoline brute provenant des lavoirs de laine.

Avant la mise au point des méthodes de récupération de la lanoline, elle était rejetée avec l’eau de lavage. À Verviers, elle formait une  gangue épaisse qui couvrait les rochers et le fond de la Vesdre. À Bradford, en Angleterre,  la lanoline brute rejetée dans la rivière (l’Aire, qui a donné les chiens airedale) dégageait du gaz, que les gamins s’amusaient à enflammer, provoquant de longues traînées de feu sur la rivière… La disparition des entreprises de lavage de laine et la sévérité du contrôle des rejets industriels ont mit fin à ces pollutions dans les deux villes.

Un dernier mot sur la  lanoline: il s’agit d’une cire, et pas d’une graisse. Elle n’est pas sujette au rancissement, ce qui en fait l’importance pour la stabilité des onguents en tous genres où on l’utilise. » Merci pour ces précisions.

Madame Godefroid, de Trooz, m’a également parlé de « Solventine » « issue du suint du mouton, mes parents, fermiers à Chaineux, l’utilisaient, pendant la guerre, pour soigner les animaux, principalement les mamelles blessées. Elle était fabriquée dans la région verviétoise. »

Madame Christiane Laureys-Horicks, arrière-grand-mère de Bande, se souvient et confirme : « La « solvine » ou en tout cas une petite boîte contenant du suint de mouton ( beurk que cela sentait mauvais !), je me souviens très bien l’avoir appliquée sur le bout de mes tétons parce que j’avais des crevasses qui me faisaient beaucoup souffrir lors de l’allaitement de mes bébés. Pommade souveraine dans mon cas et qui m’avait été conseillée et fournie par un grand ami de la famille. Pommade difficile à trouver et qui de plus perdait assez rapidement son élasticité, d’où la difficulté de l’appliquer sur des endroits super sensibles… Mais il y a longtemps de cela et nous habitions alors Bruxelles ! »

Monsieur Roger Ninane, de Barvaux-en-Condroz, nous dit que la « solvine » est « une pommade contre les gerçures etc. elle était fabriquée à  base de suif de laine de mouton. Dans les années 1950, mes parents étaient cultivateurs et l’utilisaient pour mettre sur les mamelles des vaches qui avaient soit des gerçures ou qui avaient été mordues par des hérissons. Nous l’utilisions aussi pour nous. »

Monsieur Oster Tassigny, de Grand Menil nous en parle aussi : « La solvine existait en boîte de 250 grammes et la solventine en boîte de 500 grammes. Elles étaient vendues par Jamart à Esneux et cette graisse était dans toutes les fermes de Wallonie. Jamart passait deux fois par an, mon père l’appelait « Jamart » mais, pour ma mère, c’était « Solventine ». Cette graisse était bonne pour tout, il y en avait une boîte dans l’étable pour les mamelles gercées ou autre bobo pour les jeunes veaux d’un an qui étaient allés en prairie et qui avaient des varrons à chaque côté de l’échine, cela les soulageait. Elle soignait aussi les plaies au collier du cheval ou graissait les mamelles de la truie. Il y avait une boîte pour les besoins de la famille, gerçures, engelures, cors au pied et même pour les maux de ventre. Cette graisse était comestible et pour le prouver, j’ai vu Jamart en manger une noisette. »

La Petite Gazette du 27 janvier 2010

ENCORE DES SOUVENIRS DE LA SOLVINE

Monsieur Roland Georges, de Welkenraedt, se souvient et confirme :

« La graisse de laine de mouton Solvine provenait certainement de la région de Verviers. Une fois ou deux par an, jusque dans les années 60/70, peut-être encore plus tard, un Monsieur, toujours très bien habillé, portant un cache-poussière bleu pâle, roulant en Mercedes, toujours un gros cigare aux lèvres, passait dans toutes les fermes (ma région Engreux-Mabompré) en demandant souvent en wallon de Verviers : « Nu v’fâ-t-i nin dèl crârre du lin-ne ? »

Je me rappelle très bien ces boîtes jaunes. Cette graisse servait surtout pour soigner les crevasses aux mamelles des vaches, de même elle se montrait très efficace pour les crevasses aux mains. Je suis certain que d’autres lecteurs se souviennent de ce vendeur ambulant et même, peut-être de son nom. »

Alors, vous vous en souvenez ? Vous nous le direz ?

La Petite Gazette du 24 février 2010

ENCORE LA SOLVINE

Un lecteur de Ham Esneux nous apporte la confirmation par le document suivant :

jamart_solvine

Il s’agit d’une facture  de Louis Jamart sur laquelle on lire qu’il habitait le village de Ham Esneux dans les années 50 (la  » Villa Blanche « ). Il avait épousé une fille du village de Ham. Son atelier / dépôt se trouvait route de Liège à Esneux (les lieux ont abrité quelques années plus tard une menuiserie).

Sa graisse « Solvine »était très réputée dans les fermes et le monsieur décrit par un lecteur : cache-poussière et gros cigare… c’était lui ! »

2 réflexions sur “Un merveilleux produit : la Solvine

  1. Avez-vous connaissance de la pommade « luxurale », que j’ai connue dans les années 1960 dans les Flandres françaises.
    C’est ma grand’mère à l’époque, qui utilisait cette pommade un peu à toutes les sauces contre les inflammations (furoncles entre autres). J’avais environ 10 ans à l’époque… et je me souviens que ça sentait mauvais mais que c’était très efficace.

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