LES GUES SUR L’OURTHE SOUS LE REGIME HOLLANDAIS

La Petite Gazette du 7 janvier 2015

POUR TRAVERSER L’OURTHE SOUS LE REGIME HOLLANDAIS : LES GUÉS

Monsieur René Gabriel, de Roanne-Coo, est, vous le savez, un infatigable chercheur. Il aime à étudier les archives et à en extraire tout ce qui permet de mieux comprendre notre passé régional. Des archives des Ponts et Chaussées, il a extrait cet intéressant document faisant l’inventaire des gués sur l’Ourthe de Barvaux à Angleur. Il se demande cependant ce qui motiva la rédaction de ce document faisant manifestement réponse à une étude relative à un autre projet (Vous remarquerez que cet employé, au vu de la façon qu’il les écrit, ne connaissait sans doute pas très bien les lieux dont il parlait). Pourrez-vous éclairer M. Gabriel à propos de ce document ? En outre, ces anciens gués évoquent-ils pour vous des souvenirs particuliers ? Possédez-vous des informations les concernant ? Il serait vraiment intéressant de pouvoir se pencher sur les moyens de communication de jadis dans nos contrées…

« Renseignements  demandés  sur  la  position  et  l’importance  des  gués  se  trouvant  dans  les 2, 3 et  4 e lots.

1-. Gué du  Grand  Barvaux. Laisse  la  maison  de  M. Colin  à  droite, traverse  la  queue  de l’île, forme  une  ligne  oblique  au  courant  de  l’Ourthe, traverse  le  courant  du  moulin  en  aval, sert  à  la  communication  des  Ardennes  avec  le  Condroz passant  par  les  villages  de  Tohogne et  Wéris. Communication  qu’on  propose  de  conserver  au  moyen  de  pont  fixe  sur  les  ouvrages nr 30. Ce  serait  sur  l’écluse et  le  barrage  nr 30  qu’on  proposerait  un  pont  pour  voiture  destiné  à  conserver  cette  communication  importante.

2-. Gué 700 a (aune : ancienne  mesure  de  longueur  représentant  autrefois  1 m20, supprimée  en  1840.) aval  du  précédent  contre  une  batte  appartenant  à  M. Colin  au  lieu-dit Habinet, forme  une  ligne  brisée  et  oblique  au  courant. Communication  à  l’usage  des  habitants  de  Barvaux  pour  l’exploitation  des  prairies et  de  la  culture.

3-. Gué 400 aunes en aval  barrage  nr 29, forme  une  ligne  oblique  au  courant.  Communication  de  Barvaux  à  Bomal. Le  chemin  se  trouvera  coupé  par  la  dérivation  de  l’écluse nr 29. Cette  communication  étant  indispensable  surtout  pour  l’entrée  dans  Barvaux  des  produits  de  la  culture  situés  sur  la  rive  droite  de  l’Ourthe  entre  Bomal  et  l’écluse  nr 29. On  propose  la  maintenir  au  moyen  d’un  pont  sur  les  ouvrages  nr 29.

4-. Gué  situé  à  Bomal  100 aunes  en  aval  du  barrage  nr 28. Oblique  au  courant, sert  de  communication  du  Condroz  avec  Spa et  Malmedy  par  Tohogne  et  Wéris, les  chemins  y  arrivent  presque  en  ligne  directe. Communication  à  conserver  aussi  au  moyen  des ponts  sur  les  ouvrages nr 28.

5-. Gué  en  dessous  de  la  ferme  de  Petite  Bomal, amont  de  l’écluse  nr 27 servant  à  l’exploitation  des  terrains  de  cette  ferme  qui  se  trouvent  sur  la  rive  gauche. Ce  gué  est  sur  une  ligne  oblique  au  courant.

6-. Gué  en  dessous  du  ruisseau  de  Logne, 500 aunes  amont  de  l’écluse  nr 25, est  oblique  au  courant, le  chemin  pour  y  arriver  venant  de  Verlenne (sic)  fait  beaucoup  de  détours. Ce  qui  sert  de  communication de  ce  dernier  endroit  avec  Vieux Ville.

7-. Gué  400 aunes  aval  de  Sy et  400 aunes  en  amont  du  barrage  nr 24, forme  une  ligne  brisée  au  courant. Communication  de  Verlenne  à  Filot. Ce  chemin  est  vicinal  et  forme  des  détours  pour  arriver  au  gué.

8-. Gué  en  amont  et  près  l’écluse  nr 23, il  est  d’équerre  au  courant. Ce  chemin  servant  de  communication  de  Hamoir  Lassue  avec  Verlenne, Durbuy, Tohogne et  le  Condroz  fait  plusieurs  détours  à  cause  des  montagnes. Un  pont  pour  voitures  sur  les  ouvrages  nr 24  serait  peut-être  suffisant  pour  remplacer  le  gué  et  les  précédents.

9-. Gué  à  Hamoir  Lassue  en  face  du  château de  M. Doneat servant  à  l’exploitation de  la  ferme  de  ce  château, le  gué  est  oblique  au  courant.

10-. Gué  à  Hamoir en  aval  du  pont  et  1200 aunes  aval  de  l’écluse  nr 22  est  oblique  à  la  rivière. Le  chemin  passant par  ce  gué  sert  de  communication  des  Ardennes  avec  le  Condroz  passant  par  les  communes  de  Filot  et  Ouffet. L’ancien  pont  indique  suffisamment l’importance  de  cette  communication  qu’on  pourrait  rétablir  commodément  sur  les  ouvrages  nr 22 ou  mieux nr 21. Les  ponts  nouveaux , serviraient  aussi, malgré  l’allongement  du  chemin, à  l’exploitation  des  fermes  de  Tabreux et  de  Renne.

11-. Gué  vis  à  vis  de  la  ferme  de  Tabreux, 800 aunes  en  aval  de  l’écluse  nr 21, est  oblique  à  la  rivière,  sert  à  l’exploitation  des  prairies  de  la  ferme  de  Tabreux, se  dirige  vers  Ouffet  dont  on  amène  les  produits  sur  la  rive  gauche.

12-. Gué à  300  aunes  en  aval  de  l’écluse  nr 20, 10  aunes  en  amont  de  l’île  près  Fairon, est  oblique  au  courant, sert  de  communication  de  Fairon  à  Hamoir et  Xinies (sic). Serait  remplacé  part  les  ponts  à  établir  sur  les  ouvrages  nr 21.

13-. Gué  à  Comblain la  Tour  près  du  passage  d’eau, est  oblique  à  la  rivière. Le  passage  est  facile  en  été, sert  de  communication  vicinale  de  Ouffet  à  Xhoris.

14-. Gué  à  Comblain  au  Pont. Communication  d’Antine (sic)  à  Oneux et  Beaufays. Ce  gué  est  oblique  à  la  rivière. Sur  les  ouvrages  nr 17  pourrait  être  rétablie  l’ancienne  communication  du  Condroz  avec  Spa  et  par  conséquent  celle  de  Comblain   avec  Oneux  et  villages  voisins, réclamé  par  les  habitants  des  deux  rives.

15-. Gué  de  Douflamme  passant  sur  les  deux  îles  de  l’embouchure  de  l’Aiwaille (sic) (l’Amblève)  et  de  là  va  traverser  l’Ourthe  en  amont  du  pont. Sert  de  communication  de  Beaufays  avec  le  Condroz  par  Comblain  au  Pont.

16-. Gué  à  la  Gombe, 900 aunes  en  aval  de l’écluse  nr 13, il  est  oblique  à  la  rivière. Communication  de  Beaufays  avec  le  Condroz  passant  par  le  village  du  Sart. Il  est  avantageusement  remplacé  par  les  ponts  à  exécuter  sur  l’écluse  nr 13  qui  servira  de  communication  d’Esneux  avec  Poulseur  et  le  Condroz.

17-. Gué  à  Esneux  en  face  du  village  en  amont  de  l’île, forme  une  ligne  oblique  à  la  rivière. Chemin  de  Beaufays  avec  le  Condroz, est  peu  commode  et  ne  sert  que  pour  les  riverains.

18-. Gué, 1200 aunes  en  aval  de  l’écluse  nr 10  à  côté  de  la  maison  de  M. Damery. Ce  gué  est  fort  difficile  et  forme  une  ligne  brisée. Communication  de  Hon (?)  à  Plainevaux. C’est  par  les  ouvrages  nr 11  et  préférablement  par  les  ouvrages  nr 10  qu’on  croit  qu’il  conviendrait  d’établir  les  communications  réclamées  par  les  habitants  d’Esneux  et  villages  voisins.

19-. Gué  en  amont  de  Fechereux, 200 aunes  en  amont  du  nr 9, forme  une  ligne  brisée  et  est  très  difficile. Communication  d’Esneux à  Fechereux, impossible  actuellement.

20-. Gué à  100 aunes  du  nr 8, est  oblique  à  la  rivière et  difficile, sert  à  la  communication  de  Hony  à  Esneux.

21-. Gué  à  500 aunes  du  nr 6, forme  une  oblique. Communication  vicinale et  Tilff  à  Angleur, ce  gué  est  peu  pratiqué.

Près  de  la  borne (68) Les  ponts  qu’on  devrait  proposer  sur  l’écluse  et  les  barrages  nr 6  à  Tilff  font  l’objet  d’une  proposition  spéciale  conformément  à  la  lettre  de  l’administration  du  15  août 1829 pour  assurer  les  communications  par  voiture  depuis  Barvaux  jusqu’à  Tilff. On  propose  la  construction  de  grands  ponts, compris  celui  sur  les  ouvrages  nr 136  à  Poulseur. Ces  ponts  pourraient  changer  de  numéro  selon  les  arrangements que  voudraient  ou  pourraient  prendre  les  communes  les  plus intéressées  et  les  plus  riches. Ces  arrangements  pourraient  consister  en  un  péage  qu’elle  percevraient  à  leur  profit. Lorsqu’elles  auraient  fait  le  tout  ou  au  moins  grande  partie  de  la  dépense  de  construction  première ou  d’une  rétribution  à  consentir  par  elles  sur  chaque  passant. Lorsque  l’administration  aurait  supporté  les  frais  d’établissement il  serait  prudent  de  stipuler  aussi  dans  les  deux  cas  à  laquelle  des  deux  parties  resterait  l’entretien des  communications.

Je  crois  que  plusieurs  communes  convenablement  avisées  entreraient  facilement  en  négociation  pour  l’exécution  d’ouvrages  qui  leur  procureraient  tant  d’avantages  pour  l’avenir.

Comblain au Pont  le  27  août 1829. »

 

La Petite Gazette du 21 janvier 2015

LES GUÉS SUR L’OURTHE

Le document présenté par Monsieur René Gabriel vous a fait réagir… C’est tant mieux et j’espère que vous n’en resterez pas là…

Monsieur Robert Gillon, de Tilff, a lu attentivement ce document et nous fait part de ses remarques :

« A propos des passages à gué, je crois reconnaitre le village de Hon que vous indiquez d’un point d’interrogation. Il s’agit probablement de Ham, village classé du site de la boucle de l’Ourthe, entre Esneux et Hony. La rivière décrit un oméga à cet endroit, sur la rive droite. En face, c’est la Roche aux Faucons, alors commune de Plainevaux. Je ne vois pas de gué à cet endroit… »

Monsieur Jean-Francois Gerardy, d’Houffalize, s’est également penché sur la question et rappelle :

«  A la fin de l’époque hollandaise, Guillaume d’Orange avait pour objectif de développer notre Ardenne qui était la région la plus pauvre de son royaume.  Pour ce faire, un projet d’envergure était envisagé : relier La Meuse et la Moselle.   Ce nouveau cours d’eau navigable devait développer l’économie dans notre verte province.

Pour ce faire, il comptait se servir du bassin de L’Ourthe.  Pour arriver à rendre l’Ourthe navigable, il était nécessaire de modifier fortement la géométrie du cours d’eau naturel.  Un nombre conséquent d’écluses étaient prévues.  Cela allait modifier les traversées du cours d’eau, donc les gués.  Des ponts allaient devoir être construits, il était donc nécessaire de les définir et le premier travail était de quantifier l’importance de chaque gué de l’Ourthe et sa transformation future, si nécessaire,  en pont.

La difficulté technique de ce projet consistait à relier les deux bassins hydrographiques, celui de La Meuse et celui de La Moselle.  La ligne de séparation de ces bassins se situe à proximité du village de Buret dans la commune d’Houffalize, à proximité de la frontière du Grand-Duché de Luxembourg.  A cet endroit, des vestiges de cet ouvrage d’art subsistent : le début d’un tracé d’un canal, le canal de Buret à Bernistap.  Il s’agit d’un canal d’une longueur d’environ 1 km en pleine campagne.  A une extrémité de ce canal, on peut encore apercevoir la voute d’un tunnel qui devait permettre aux bateaux de passer sous la ligne de séparation des bassins hydrographiques.  Dans le village de Buret, les ouvriers étaient logés au lieu dit – Les baraquements – tandis que les ingénieurs séjournaient à quelques kilomètres de là, au château de Tavigny.

La révolution belge a éclaté et le projet fut arrêté.  Après la révolution, l’essor du chemin de fer sonna le glas de ce projet qui fut abandonné. »

 

La Petite Gazette du 28 janvier 2015

ENCORE LES GUÉS SUR L’OURTHE

Monsieur René Gabriel, de Roanne, qui m’avait donné l’occasion de vous présenter cet étonnant recensement des gués sur l’Ourthe en 1829, nous apporte une précision :

« Je  retrouve  d’autres  notes: Ponts  et  Chaussées farde  4450. Réclamation  de  la  commune  de  Comblain-au-Pont.

Liège  le  4  août 1865. Comblain  au  Pont  réclame  suite  à  la  suppression  de  trois  gués  par  suite  du  canal  de  l’Ourthe et  du  chemin  de  fer  en  voie  d’exécution  dans  cette  vallée.

Le  premier  en  aval  du  passage  d’eau  de  Liotte  sur  l’Emblève, les  2  et  3  situés  sur  l’Ourthe  respectivement  en  amont  du  pont  de  Scay (aval de  Comblain  au  pont) et  à  Lawé  en  dessus  de  ce  village. Le  gué  de  Liotte  a  été  supprimé  en  1859  par  la  construction  du  barrage  de  Douxflamme  qui  a  surélevé  le  niveau  de  l’Amblève  de  0,80 m  en  ce  point.

Il  serait  préférable  d’adjoindre  au  passage  d’eau  de  Douxflamme  un  bac  pour  voitures. La  fourniture  de ce  bac  incombe  à  la  Compagnie du  Luxembourg  chargée  de  pourvoir  au  rétablissement  des  communications  supprimées  par  ses  travaux.

Le  gué  au  pont  de  Scay  devient  inutile  suite  à  la  construction  prochaine  de  la  route  d’Aywaille  à  Douxflamme.

Pour  le  gué  de  Lawé  la  Compagnie  du  Luxembourg  est  tenue  à l’entretenir  suite  aux  termes  du  cahier  des  charges  relatif  à  la  concession  du  chemin  de  fer. »

 

La Petite Gazette du 4 février 2015

LES GUÉS DE HAM ENTRE HONY ET ESNEUX

C’est un réel plaisir pour moi de constater comme vous suivez attentivement les sujets traités dans cette page et comment vous manifestez votre intérêt au travers de vos communications.

Ainsi, Madame Nicole Dodeur complète les informations publiées jusqu’à ce jour à propos de l’existence ancienne de ces gués sur l’Ourthe :

« Il y avait deux gués menant à Ham dans la boucle de l’Ourthe. On ne les distingue plus maintenant. Ils sont en pointillés sur la carte faite lors du recensement des chemins pour la confection du livret « Grand Site de la Boucle de l’Ourthe » (2011 ?)

1) gué d’amont situé + ou – 1 km après la Roche aux faucons. Dans le prolongement, plus en amont le long du chemin de halage, il y avait le chemin du gué d’amont CV51 arrivant au bout du village de Ham.

Celui-ci se prolongeait sur la rive gauche par le chemin menant à Avister : actuellement rue du gué d’amont puis chéra de Fêchereux très encaissé.

2) gué d’aval situé en face du hameau de Fêchereux. Dans le prolongement, en aval, il y avait le chemin de halage puis le chemin du gué d’aval CV51 commençant à Lhonneux et arrivant aussi au bout du village de Ham. »

Merci pour ces précisions qui permettent de bien visualiser les lieux.

 

La Petite Gazette du 18 février 2015

TOUJOURS A PROPOS DES GUÉS SUR L’OURTHE

C’est au tour de Monsieur Jean Ninane, d’Esneux, de partager ses connaissances sur ce sujet qui, manifestement, vous passionne :

« Oui, il y eut des gués, très anciens, à proximité de Ham.

Autrefois, Il n’y avait aucun pont, ni à Esneux, ni à Hony, ni à Méry. Aucune canalisation de l’Ourthe n’existait. Aucune route n’unissait Esneux à Liège par la vallée. Seules les betchètes
permettaient un voyage direct.

Les charrettes et autres véhicules attelés devaient gagner les hauteurs pour rejoindre
un accès à Liège. C’est ainsi que ces attelages se rendaient à Ham (rive droite de l’Ourthe) pour rejoindre par des chemins encore plus ou moins accessibles le hameau de Féchereux situé sur la rive gauche.

On devrait plutôt parler des gués de Féchereux. Là nous avions un double gué. Un chemin menait de Ham au gué d’Amont et un autre au gué d’Aval. De Féchereux deux chemins encore accessibles menaient à Nomont, Famelette… C’est attesté car, à Féchereux, existe encore la « rue Gué d’Amont ».

Ces gués sont-ils encore utilisables, décelables ? On a construit en aval pour favoriser l’accès au canal de l’Ourthe, un barrage imposant à Lhonneux. La hauteur d’eau a augmenté au-dessus des gués.  M. André Nelissen(+) (déjà cité dans la découverte des tombes de Crèvecoeur) a publié un article « les gués de Fechereux » dans le bulletin du Vieux Liège n° 144 (T IV) de janvier mars 1964. »

Le sujet intéresse également Madame Céline Bayer, d’Esneux :

Il y avait également un gué à Hony, il se trouvait un peu plus bas que le pont, à la hauteur du « Chemin des Cloutiers » et de l’autre côté « du Trou Lina« .  Ces deux chemins existent toujours.

D’ailleurs, au début du siècle dernier, le pont était là, mais le fermier qui avait son champ le long de l’eau passait par le gué quand l’eau était basse, et jusqu’au dragage de l’Ourthe il y a une 50 d’année on pouvait encore y passer

Voici  ce que les anciens m’ont raconté et que j’ai connu pour le passage à pied quand l’été était très sec. »

 

La Petite Gazette du 4 mars 2015

TOUJOURS CES GUÉS SUR L’OURTHE

Monsieur Maurice Demoulin s’est lui aussi investi dans cette recherche et il a patiemment étudié la magnifique carte des Pays-Bas Autrichiens établie par le comte de Ferraris  entre 1770 à 1778.

« Si nous parlions encore un peu des gués sur l’Ourthe.

Sur une carte de 1777, j’ai retrouvé des informations qui concernent ces passages d’eau de l’Ourthe (Ourt) sur la carte.

On peut y voir un gué entre Esneux et Amostrenne, vers le château d’Esneux (différent du château du Rond Chêne).

La carte ne représente pas de gué du côté de Ham (Han sur la carte), mais un chemin aboutit sur la berge de l’Ourthe face à Beauregard (ferme de Lonneux)

Sur la rive droite de l’Ourthe, dans la boucle, plusieurs chemins mènent à Ham : comme Monsieur Ninane le précise dans l’article paru dans La Petite Gazette du 20 février, il doit y avoir eu un ou des gués en cet endroit pour passer sur la rive gauche en direction de Plainevaux.

Un chemin venant de Hayen, Hotgné (Hoteigné sur la carte) et le château d’Avionpuits arrive au village de Méry, rive droite, face au château de Monceau. Il serait surprenant qu’un passage n’ait pas existé à cet endroit, surtout que l’île (un peu en amont du pont actuel) devait faciliter la traversée. N’oublions pas, non plus, que les armées de la toute jeune République française ont traversé l’Ourthe à cet endroit lors de la bataille de Hamay.

A Hony, rive gauche, deux chemins arrivent sur la berge sans autre issue : peut être aussi un passage à cet endroit.

La carte représente également des gués du côté de Poulseur et Comblain.

Je suis persuadé qu’il existait un gué à Chanxhe à l’endroit de la «maison du passeur » où j’ai habité début de la guerre 40/45. Ce passage correspond à un chemin reliant Chanxhe à MontComblain et que j’ai souvent emprunté. Ajoutons que le canal de l’Ourthe avait prévu une jonction vers cet endroit et que la SNCB y avait aménagé un passage à niveau, d’où…

C’est aussi à cet endroit que l’armée allemande avait construit un pont après que l’ancien a sauté.

Pour les amateurs, la carte ancienne de la Belgique se trouve sur le site « http://www.ngi.be/ferraris KBR/index».

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

La Petite Gazette du 12 juin 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ? 

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, évoque des souvenirs professionnels et vous interroge sur des réalités disparues :

« Mon métier de conducteur de trains m’a permis de circuler dans bien des gares où les espaces libres étaient souvent occupés par des chantiers de découpe de petits bois alors pourrait-on aborder ce sujet dans La Petite Gazette ?

Il n’y a pas si longtemps, on pouvait encore admirer dans bien des gares desservies par la ligne 42 Rivage-Gouvy des endroits réservé à la découpe de bois. Depuis la forêt, les camions ou jadis des chariots acheminaient des bois en long qui étaient découpés en longueurs différentes suivant les sections et leurs futures utilisations. Après, il fallait semble-t-il charger les wagons à la main.

train-dans-les-bois« Photo prise par mes soins le 29 avril 1988, près de l’entrée côté gare du tunnel de Trois-Ponts, car j’avais ce jour là l’honneur de conduire ce petit train »

Quel travail, car la rentabilité devait être assurée, les commandes honorées et les salaires mérités. Toutes ces petites découpes de bois ont disparu du paysage ferroviaire, mais pourrait-on laisser la parole à tous ceux qui y ont travaillé parfois sous un soleil généreux, mais aussi lors du mauvais temps très souvent présent dans notre région ?

Depuis combien de temps ces chantiers existent-ils ?

Quels étaient les outils ou les machines utilisées ainsi que la force motrice disponible ?

Quel était le rendement demandé à un homme ?

Comment étaient chargés les wagons et quelle était leur destination ?

Les ouvriers avaient-il un abri pour manger ou se réfugier en cas d’orage par exemple ?

Les salaires étaient-ils payés en fonction du travail effectué ou à l’heure ?

Et cerise sur le gâteau existent-ils des photos disponibles ?

J’adresse déjà un grand merci à tous ceux qui voudront bien satisfaire ma curiosité d’en connaître plus sur ce passionnant et exigeant métier.

La Petite Gazette du 17 juillet 2013

QUI NOUS PARLERA DES CHANTIERS SUR LESQUELS LES BOIS ETAIENT DECOUPES A MESURE ?

Monsieur Josy Depierreux, de Vielsam, souhaitait il y a quelque temps que vous évoquiez ces réalités disparues, Madame Denise David-Lacasse, de Harre, répond à son souhait :

« En lisant cet article sur les métiers du bois, il me revient un fait que feu mon époux Marcel m’a raconté, une difficulté qu’il a rencontrée dans l’exercice de son métier.

La guerre terminée, dès 1945, mon mari, 22 ans alors, a travaillé en exploitation forestière comme découpeur : les troncs d’arbres arrivaient sur son lieu de travail après avoir été ébranchés et pelés. Son travail consistait à scier à la longueur demandée, à trier les bois selon leur grosseur et à les charger sur des wagons pour les envoyer, par le vicinal, en région liégeoise pour le besoin des charbonnages.

Je précise que le vicinal s’arrêtait dans les villages pour charger et décharger les diverses marchandises et les personnes dans le sens Comblain – Manhay. On y rechargeait ensuite les divers bois préparés pour livrer dans les charbonnages liégeois. Les chantiers où les hommes travaillaient s’appelaient « gares ».

Scier les bois était très délicat car ils avaient été mitraillés pendant la guerre et étaient assez abîmés. Il fallait donc beaucoup d’attention pour ne pas casser la scie. Quand la scie ne coupait plus, il fallait intervenir avec la pince présentée, notamment, par M. Serge Ghyse, de Nandrin. Cette pince à avoyer servait au découpeur à redresser les pointes de la lame, en wallon on disait : rimète dèl voye ; ensuite, il fallait relimer la scie. »

Monsieur Joseph Gavroye, de Soumagne, évoque également ses souvenirs sur ce sujet :

« Dans ma région et depuis la création, en 1904, du vicinal Lierneux- Vielsalm, des quais étaient réservés à cette manutention. J’ai bien connu, dans mon jeune temps, pareille entreprise à l’arrêt de Regné-Hébronval. Il y a bien des années déjà qu’on a fait table rase de ce quai pour y installer un lotissement.

Comme le dit si bien Monsieur Depierreux, les bois en long y étaient acheminés en provenance des grandes forêts voisines. Il s’agissait d’épicéas dont le bois était très apprécié pour servir à l’étançonnage dans les galeries des mines de charbon.

Une équipe de 4 à 5 hommes était occupée à scier ces bois suivant les longueurs souhaitées. Il s’agissait en l’occurrence de la famille Frérès, le père, les deux fils plus un ouvrier. Pour leur protection, en cas d’intempéries, les braves disposaient d’un petit abri de fortune et, pour se chauffer, ils se servaient des déchets de bois, ce qui ne manquait pas. Je crois qu’ils étaient payés suivant le volume débité. Ces quatre scieurs ne sont plus de ce monde aujourd’hui !

Le travail en lui-même se faisait en continu, tous les jours ouvrables de la semaine. Les scies ordinaires subissaient régulièrement un affûtage exécuté de main de maître par un des types de l’équipe, spécialiste dans cette tâche. Au préalable, des chèvres en bois avaient été fabriquées afin de supporter les pièces à débiter. Les chèvres étaient marquées des longueurs à respecter lors de la découpe. Le sciage terminé, la marchandise était entreposée par lots respectifs le long du quai de chargement ; des wagons adéquats étaient acheminés sur des voies de garage et cela suivant les besoins. Les scieurs y déposaient les bois avec un certain art car il y allait de la sécurité lors du transport par rail jusqu’à la gare S.N.C.B. de Vielsalm où le tout était centralisé. Un transbordement avait lieu sur des wagons S.N.C.B. dont l’empattement était différent.

Des petits chantiers étaient prévus le long des voies ferrés, beaucoup disparaîtront lors de la fermeture des charbonnages et aussi lors du démantèlement des lignes du vicinal. »

La Petite Gazette du 28 août 2013

LES CHANTIERS DE BOIS DECOUPES A MESURE

Monsieur André Hubert, de Gouvy, nous confie ses précieux souvenirs à ce sujet :

« Ces chantiers existaient dans les gares mais aussi le long des routes et des chemins forestiers. A partir de l’été 1940, j’ai fait partie d’une équipe de trois personnes qui découpaient des bois en long sur la route de Dinez à Montleban. J’avais 14 ans et j’habitais Les Tailles, je marchais 7 Km pour aller de mon domicile au chantier, par des petits chemins, et faisais le même chemin au retour, le soir. On travaillait aussi le samedi et je me reposais le dimanche après-midi pour être dispos le lundi matin.

Les bois posés en long sur trois chevalets étaient découpés suivant des données fournies par le marchand. Les bois étaient tracés par un homme expérimenté qui devait bien réfléchir pour tirer le meilleur volume de la somme des bois découpés. Les bois découpés à la petite scie étaient classés par espèce. Je me souviens de trois appellations :

– sclimbes = bois minces et de faible longueur (1,50 m. environ) qui servaient sans doute à confectionner des claies de protection latérale ou verticale.

– rallonges = pièces plus grosses d’environ 3 m. de long.

– bois plus gros et de différentes longueurs pour les charbonnages et les chantiers, pour le soutènement.

Nous étions payés au volume des bois découpés et réceptionnés. Après ce chantier de 1940, le résultat financier pour chacun des participants donnait un salaire d’environ 35 francs par personne et par jour. Je n’ai pas gardé le souvenir du mode de transport utilisé vers les gares ou les entreprises utilisatrices . » Un tout grand merci pour ces renseignememts.

La Petite Gazette du 8 octobre 2013

LES CHANTIERS DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur José Cornet, de Juzaine, évoque ses souvenirs de ce temps révolu :

« Mon frère Victor a travaillé de nombreuses années sur le chantier de la gare de Bomal comme découpeur de bois avec, entre autres, Aimé Gaspard, dit le Boubou, de Champ de Harre (que vous découvrirez sur la photo ci-dessous), Floribert Close, de Barvaux, Marcel Maqua, de Rouge Minière, Ariste Devahive, de Fays, Raymond Lambert, d’Erezée… et d’autres qui, comme lui, découpaient les bois qui avaient été découpés à la cognée et étaient amenés par camion, des Ford Canada.

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Une vieille baraque en bois, adossée au talus, servait pour les repas, déposer les vêtements et ranger le petit outillage ; il y sentait bon la résine et le café.

Nous, gamins avec mon frère, descendions à vélo sur le chantier le mercredi et nous allions souvent chercher de l’eau fraîche pour les hommes à la havée de Herbet. Ce métier était très dur car, après la découpe, il fallait charger les bois sur des wagons et, évidemment, cela se faisait à la main. Parfois, ils déchargeaient aussi des wagons pour le compte des entreprises Detrooz qui étaient toutes proches.

Après la scie à main est venue la tronçonneuse, ils en ont également découpé à la scie circulaire. Les employeurs étaient les entreprises Huet, de Grand-Menil, et Charles Rigo. Occasionnellement, mon frère Victor a également travaillé à la découpe de bois, sur l’ancienne gare de Chêne al Pierre et du côté de Martinrive. »

La Petite Gazette du 16 octobre 2013

LES GARES SNCV DE JADIS, AVEC LES  « QUAIS DE DECOUPAGE ».

Monsieur Raymond Gillet a poursuivi l’enquête, il nous livre ses souvenirs :

« La ligne SNCV PussemangeBouillon–  Paliseul comportait plusieurs quais de découpage, notamment dans les gares de : SugnyCorbionNoirefontaineMogimont (Bellevaux) et à Paliseul c’était le « quai de transbordement » où la ligne SNCV côtoyait une voie SNCB.

A l’aube des années cinquante, en gare de Noirefontaine,  il y avait en permanence plusieurs découpeurs de bois de mines ; notamment mon oncle Alfred Rosillon (né en 1928), il œuvrait avec plusieurs frères de la famille Adam. Les épicéas arrivaient déjà par camions, ces bois avaient été triés pour les « bois de mine ».

Le quai de découpage était très proche et parallèle à une voie, un emplacement était réservé aux chevalets. Au nombre de trois, ils étaient  alignés et constituaient la « gade ». Une volige reliait les chevalets, elle comportait des traits de scie tous les 10cms ; pour les mètres les traits étaient plus importants.

Après le sciage des « bois de mines », les différentes « chutes » ou pointes d’épicéas étaient triées, sciées en 1,50/1.60 m et répertoriées par grosseur (longueur de la circonférence au fin bout). Le classement était le suivant : 12/14cm – 14/16cm – 16/18cm – 18/20cm, l’oncle Alfred n’utilisait pas le mètre ruban pour ce classement,  il formait un cercle tout simplement en rapprochant les pointes du pouce et de l’index de la main.

Ces différents bois étaient fagotés en bottes et ces dernières s’appelaient les « sclimbes ». Par grosseur le nombre de bois était le suivant : 12/14 = 12 bois – 14/16 = 10 bois – 16/18 = 8 bois – 18/20 = 6 bois. Mon oncle se rappelle avoir fagoté jusqu’à 40 sclimbes à l’heure (le classement par grosseur étant déjà réalisé). Son record personnel fut la réalisation de 300 fagots de sclimbes sur une journée ; le fagot était payé 1,50fr à l’époque (1948-1950).

Je vous invite à regarder la photo d’un autorail tracteur Art. 104 qui amène des wagons vides pour chargement des bois de mine à Dochamps ; remarquez, derrière le tas des bois de mine, il y a un tas de « sclimbes » arrangés par grosseur, les rangées supérieures comportent 8 bois, les autres 6 bois.

autorail-dochamps

En ces temps-là il n’y avait pas de pointeuse sur le quai et  l’horaire était parfois irrégulier, le lundi généralement moins de 8 heures, les autres jours de 9 à 10 heures voire plus même, suivant le temps et les nécessités des  délais  de fourniture, chômage des wagons et acheminement vers Paliseul. La voie du vicinal longeant le quai de découpage permettait l’alignement de 6 à 7 wagons SNCV type à « haussette ».

Le casse-croute était vite réglé, excepté quand il y avait la « gamelle » un feu était nécessaire ce n’était pas courant parce que qui dit feu dit alimentation et surveillance, mais vu l’accumulation des pointes d’épicéas  cela devenait une nécessité.  Le coin repas était protégé des vents par un « hayon » ; rectangle réalisé avec des perches d’épicéas et de la toile de jute ou à défaut de la paille de seigle, ce hayon était incliné dos au vent et à la pluie. A cette époque la scie utilisée était toujours la scie à cadre; oncle Alfred en possédait deux, grand-père Ovide « rafraîchissait » régulièrement les lames.

Avant de conclure je souhaiterais vivement vous rappeler quelques chiffres édifiant de cette époque ; ce sont des chiffres extraits du « Rapport 1959 – 75eme exercice social SNCV ». En 1938 la dite SNCV a transporté 153.668 tonnes de bois de mines, en 1959 seulement  36.113 tonnes. Elle a possédé jusque 5.524 wagons de marchandises ouverts. Dans notre pays il y eu 158 gares de transbordement partagées avec la SNCB.

Vous remarquerez la seconde photo avec la scie, le bidon « FB » (Ferronnerie Bouillonaise) et la typique gamelle.

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La Petite Gazette du 23 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Voici les souvenirs qu’un lecteur a gardés de cette époque :

« A la lecture de La Petite Gazette évoquant ces chantiers de découpe de bois, je me rappelle ma jeunesse à la gare de Marenne. Une voie de chargement se trouvait sur le territoire de la gare, un heurtoir était placé près de l’ex-passage à niveau et un autre en bordure de la prairie de chez Bechoux. Deux aiguillages étaient en service ainsi qu’un gabarit afin de surveiller le chargement des wagons.

Durant de nombreuses années, on a découpé une grande quantité de bois de toutes les mesures. Beaucoup de ces bois étaient destinés principalement aux charbonnages de la région liégeoise. Ces bois servaient aux galeries souterraines, où circulaient les wagonnets poussés par les mineurs ou tirés par les chevaux. L’avantage du bois dans la construction des galeries est le grincement du bois occasionné par les mouvements de la terre. Lorsque le bruit du bois se faisait plus fort, les mineurs avaient le temps de se mettre à l’abri dans un endroit plus sécurisé ; les dégâts provoquiés par l’éboulement n’auront pas fait de victimes…

Revenons au sciage du bois sur l’étendue de la gare ; actuellement, la route permettant la suppression du passage à niveau a fait disparaître cet endroit. Je me rappelle deux personnes ayant passé plusieurs années à découper les bois de notre région : M. Emile Gaillard et M. Joseph Dupont ont travaillé durant de nombreuses années, parfois d’autres ouvriers venaient en renfort.

Il y avait plusieurs mesures de découpe des bois. Le mètre-ruban ainsi qu’une toise, dont je ne me rappelle plus la longueur, étaient utilisés. La toise consistait en une longueur de bois sur laquelle se trouvaient deux grosses pointes en acier à une distance des scieurs. Après avoir découpé la base de l’arbre, l’ouvrier le mesurait avec cette toise. Rappelons que le bucheron, à cette époque, avait abattu l’arbre à la cognée, la coupe n’était dès lors pas aussi nette que quand elle fut faite à la tronçonneuse.

Les bois ainsi découpés étaient assemblés en tas d’une hauteur de deux mètres. Chaque tas contenait des longueurs et des diamètres différents. Lorsque les troncs avaient un grand diamètre, les ouvriers utilisaient la scie « passe-partout » ; pour les bois normaux, la scie ordinaire était utilisée. Ce n’était pas des armatures métalliques comme aujourd’hui, les deux montants, sur lesquels était fixée la lame, étaient reliés par un toron de corde avace, au milieu, un morceau de bois, qui permettait en tordant plus ou moins fort cette corde, de tendre la lame ; le morceau de bois se bloquait alors sur le bois reliant les deux montants.

Pour se reposer, pour manger et se mettre à l’abri, une petite cahute était installée entre deux tas de bois ; une tôle pour le toit et, à l’arrière, une toile de jute pour protéger les deux compagno,ns de travail. Lorsque la lame ne donnait plus de bons résultats, il était nécessaire de remettre l’outil en ordre de marche. Dans l’abri de fortune, il fallait aiguiser la lame avec une lime triangulaire et parfois utiliser la pince à avoyer, dont la Petite gazette nous a plusieur fois entretenus. » A suivre…

La Petite Gazette du 30 octobre 2013

LES SCIEURS DE BOIS A LA GARE DE MARENNE

Retrouvons la suite de ces souvenirs publiés dès la semaine dernière :

« Durant  la bataille des Ardennes, beaucoup de bois ont été abîmés : déracinés par les chars, abattus en partie par des obus ou remplis de shrapnells (du nom de l’inventeur anglais (1761 – 1842) de ces obus remplis de balles, en allemand, schrapnell. Actuellement, morceaux d’obus, de grenades…). Le territoire de la gare de chargement ne fut plus suffisant pour déposer les bois que les bûcherons abattaient dans la région. Plusieurs espèces d’arbres furent amenées devant la gare ou sur le terre-plein au-delà du passage à niveau. Seul le bois de sapin était utilisé pour les mines. Un grand nombre de wagons chargés de bois quittèrent la gare de Marenne, la bascule utilisée pour la vérification du poids des wagons n’a jamais autant fonctionné.

La bascule était située dans les environs du pont actuel, le gabarit se trouvait également en cet endroit. L’entretien de la bascule se faisait tous les trois ou quatre ans. En amenant d’autres wagons ouverts pour le chargement des bois, deux wagons fermés étaient étaient mis à stationner au butoir se trouvant près du passage à niveau. Un de ces wagons servait de bureau, cuisine et dortoir, l’autre était un petit atelier contenant même une petite forge. Deux ouvriers spécialisés devaient remettre les bascules en ordre de fonctionnement (peinture, remplacement des pièces défectueuses et étalonnage). En soirée, mon père allait quelquefois rendre visite à ces hommes, parfois je l’accompagnais. Je me souviens qu’un de ces ouvriers était originaire de Vielsalm.

Le transport par camion et la modernisation des scieries ont supprimé tout ce travail du bois qui se faisait sur le territoire de la gare de chargement. La fin de ces lieux de travail venait de commencer, la suite, vous la constater actuellement ! »

Madame Denise David-Lacasse, de Harre, se souvient également que « dans les villages le long de la ligne vicinale ManhayComblain-la-Tour, il y avait de ces terrains appelés « chantiers », c’était là que les ouvriers préparaient les bois à la demande pour alimenter les charbonnages liégeois. Les ouvriers chargeaient les wagons du vicinal qui s’en retournaient vers Comblain-la-Tour et là, de nouveau, il fallait du personnel pour décharger et recharger sur des wagons de la S.N.C.B. car l’empâtement était différent d’une société à l’autre. Ici, en Ardenne, ces chantiers s’appelaient « gares » tout simplement. On disait : lès ovrîs d’b’wès alî-st-ovrer so l’gåre. »

 La Petite Gazette du 13 novembre 2013

ENCORE A PROPOS DES CHANTIERS DE DECOUPE DES BOIS

Messieurs Raymond Gillet et René Gabriel ont beaucoup œuvré pour La Petite Gazette cette semaine. Il est vrai qu’il s’agit là de passionnés… Le premier nous raconte cette plaisante anecdote :

« La gare vicinale de Noirefontaine possédait deux  » quais de découpage ». Celui représenté sur cette photo est celui des « feuillus ». Le quai des « résineux » se situe à l’extrême gauche de la photo. (Nous en avons parlé dernièrement)

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Les personnes occupées sur ce quai étaient originaires de la région anversoise , il s’agissait de la famille Faes . Le papa, Louis, était né en 1886 à Turnhout,il parlait un français impeccable, ses enfants fille et garçons travaillaient avec lui. Louis avait des moustaches à la « hongroise ».
La route nationale parallèle au quai reliait Paliseul à Bouillon et, déjà à  cette époque, des touristes hollandais venaient visiter notre Ardenne, juchés  sur leurs typiques vélos.
Un jour Louis vis apparaître deux cyclistes hollandaises, il les laissa s’approcher et, de sa voix style Louis Jouvet, il leur « décrocha » la tirade suivante :

Abaissez le capot on voit le moteur, ce n’est pas pour le moteur, mais c’est pour l’odeur !
La plus âgée des dames lui répondit du tac au tac  » Viens-y frotter tes moustaches !  »

Louis était à cent lieues d’avoir une réponse en français, il en resta bouche bée. On ne l’entendit plus de la journée… »

Monsieur Gabriel nous fait part de l’état actuel de ses recherches, nous explique pourquoi le sujet l’intéresse et nous promet une suite à ses propos :

« J’ai rencontré, tout récemment, monsieur Pierre Colin, de Burnontige, dont les parentsz tenaient l’Hôtel du Vicinal. Il se souvient très bien de la gare de Burnontige où un chantier de découpe de bois de mine existait. Les wagons arrivaient avec le tram, étaient décrochés et placés sur une voie particulière. Il n’y avait pas de bâtiment de gare, seulement un quai et un bâtiments où les découpeurs pouvaient remiser leur matériel. M. Colin se rappelle les noms de deux de ces découpeurs, les frères Stelet, Fernand et Arthur.

Quand M. Josy Depierreux a lancé cette recherche dans La Petite Gazette, j’étais content car cet ancien métier de découpeur allait être, comme beaucoup d’autres petits métiers, oublié… J’avais décidé d’attendre quelque peu les premières réponses et elles sont venues. Très prochainement, je reviendrai vers vous avec nombre de renseignements SNCB. En effet, j’ai toujours habité des maisonnettes ou gares et, de ce fait, ai parcouru de nombreuses cours à marchandises. Par la suite, ma profession à la SNCB fut, pendant près de 40 ans, dans le domaine du factage, il s’agit d’un service s’occupant plus particulièrement, suivant les gares, des wagons, des commandes, de la distribution, du triage, de l’acheminement… »

La Petite Gazette du 27 novembre 2013

ENCORE UN CHANTIER DE DECOUPE DE BOIS

Monsieur Robert Nizet, de Vielsalm, nous confie à son tour sa contribution à la documentation sur les quais de découpe des bois longeant les lignes de chemin de fer. Il nous en présente un qu’il a bien connu.

« Celui-ci était situé à Vielsalm, en amont de la gare et sous le pont de la route de Rencheux. On y a découpé, des années durant, des quantités incroyables de bois destinés aux mines. C’était pour nous les gamins habitant au quartier de la gare un terrain de jeu idéal et pour nos parents une source inépuisable de « petit bois » pour allumer le feu. S’y sont succédé au travail les équipes (notamment) de Jean Bontemps de Ville-du-Bois, d’Armand Frères d’Hébronval et des Martiny des Tailles.

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La photo date de 1948 et j’y figure avec mon papa. »

La Petite Gazette du 18 décembre 2013

LES TRAVAUX FORESTIERS QUI OCCUPAIENT MON MARI

Madame Françoise Schröder-Closjans, de Louveigné, évoque le travail de son mari :

«Les premières années de notre mariage se passèrent à Francorchamps. Après la fenaison et la tonte des haies, mon mari, son voisin, L. Goffin, et les frères de celui-ci ont effectué divers travaux forestiers dans des bois appartenant à la famille Stersteven aux alentours de Stavelot, Francorchamps et Malmédy.

Tous les travaux s’effectuaient à la main, abattage, découpage, sciage…

Avant la plantation de sapins dans des endroits fangeux, il fallait faire des mottes pour éviter le pourrissement des jeunes racines. Ce travail consistait à faire des rigoles autour d’un carré de terrain pour permettre au surplus d’eau de s’évacuer.

En 1960, quelques mois après notre arrivée à la ferme de la Fagne de Deigné, mon mari effectuait son premier débardage avec son cheval. Le travail en forêt était un travail d’équipe. Après l’abattage, l’ébranchage et, parfois, le pelage à l’aide d’une rasette, mon mari amenait les bois le long des chemins forestiers. Certains bois étaient chargés entiers et conduits dans les scieries de la région par camion. C’est en lisant une récente Petite Gazette, précise mon aimable correspondante, que je me suis souvenue de cet outil que mon mari possédait pour enlever les écorces ou peler les bois comme il disait. Il s’agissait d’une rasette que provenait, je pense, de la maison Joseph Leloup à Aywaille. N’en ayant plus l’usage, il l’avait donné à un de ses amis. Dans un ouvrage consacré aux vieux outils, j’ai retrouvé un modèle identique à celui que possédait mon mari et présenté comme étant : « un pèle-tronc, outil servant à l’écorçage des bois ».

Les bois de mine étaient sciés à la longueur voulue par deux découpeurs. Ces bois, chargés sur des camions, étaient acheminés directement vers les charbonnages ou à la gare de Remouchamps pour être expédiés par wagons. Tous ces travaux du début des années 60 étaient effectué à la main.

Quelques années plus tard, ce fut l’apparition des tronçonneuses et des engins mécaniques mais, pour le débardage, le cheval est resté prioritaire. Lorsque le débardage de gros arbres nécessitait un attelage à deux chevaux, Pol Rixhon, de Paradis-Harzé, venait seconder mon mari.

Par mauvais temps, mon mari ramenait certains ouvriers forestiers à la maison pour manger leurs tartines. Cette période a été très enrichissante, elle nous a permis la rencontre de divers métiers du bois et de la forêt ainsi qu’un nouveau vocabulaire français et wallon. »

La Petite Gazette du 29 janvier 2014

AVANT DE COUPER TOUS CES BOIS, IL A FALLU LES PLANTER…

Monsieur René Gabriel, de Roanne Coo, dévore avec passion archives et vieux documents et, surtout, aime à partager avec les lecteurs de La Petite Gazette les intéressantes qu’il fait :   « Voici  quelques  renseignements  retrouvés  lors  de  mes  recherches  dans  les  différents  bans  locaux.

En 1837, le  roi  Léopold I, rentrant  vers  Spa  après  une  visite  à  la  cascade  de  Coo, se  trouve  désolé  devant  les  landes  arides  qu’il  traverse, nos  fagnes  où  paissent  alors  des milliers  de  moutons.  A  partir  de  cette  époque  de  nombreux  “experts”  vont  se  pencher  sur  ce  problème et  bien  des  années  plus  tard  un  plan  de  boisement  de  ces  vastes  étendues  sera  d’actualité. Vers  1875-1880  on  plante  donc  de  nombreux  feuillus  et  résineux  en  Ardenne. Les  résineux  sont  principalement  des  pins  sylvestres  et des mélèzes.

Ex: 1879. En  commune  de  Ferrières  le  bourgmestre  reçoit  l’information  d’envoyer  le  messager  enlever  25  kilos  de graines  de  pins  sylvestres  au  dépôt, les  graines  de mélèzes  seront  fournies  plus  tard. Ces  graines  seront  semées  en  pépinière  par  le  forestier  local. Il  n’est  alors  pas  encore  question  d’épicéa. Petite anecdote amusante à propos  de l’enlèvement  des  graines  pour  Ferrières en  1879, le  responsable  précise  au  bourgmestre d’envoyer  le  messager  « avec  un  sac  sans  trou … » I  vâ  mî … ! précise mon sympathique correspondant.

Plus  tard, en  commune  de  Basse-Bodeux  cette  fois, en 1914, les  autorités  notent  que  des  milliers  de  pins  sylvestres  ont  été  plantés  mais  qu’une  invasion    très  importante  d’écureuils  menace  ces  peuplements car  ils  rongent  les  écorces  et  les  arbres  dépérissent. Il  est  donc  décidé  de  tuer  les  écureuils  et  une  prime  de  25  centimes  par  animal  tué  est  accordée  à  condition  de ramener  la  queue  du  rongeur  au … bourgmestre !

Nous  avons  là  un  premier  départ  d’enrésinement en  Ardenne, il  est  probable  que  la  plantation  de  l’épicéa va  bientôt  apparaitre  également  peu  après.

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Il  faudra  attendre, bien  évidemment,  l’arrivée  du  rail  en  Ardenne (1890 pour  Rivage-Trois-Ponts) pour  remarquer  un  trafic  de  bois  de mines. Certaines cartes  postales, vers 1920  ou  peu  avant, montrent  des  wagons  chargés  de  longues  perches (poteaux  télégraphiques  probablement) et  bois de  mine  en  gares  de  Remouchamps  et  Trois-Ponts. »

Monsieur Jacques Bourdouxhe (voir les commentaires) s’est intéressé à cette série d’articles dans lesquels il a puisé des informations pour l’aider dans sa passion, le modélisme. Répondant à ma demande, il nous adresse ces deux photographies montrant la qualité et la précision de ses réalisations.

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Voici des photos de mon diorama représentant une bicabine  ( type 18  ) remorquant un wagon à haussettes chargé de grumes destinées aux charbonnages.

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Cette seconde photo a été prise au Brésil   ( mon épouse est brésilienne ) ou  j’ai amené le diorama pour une exposition de modélisme ferroviaire à Curitiba  (Etat du Parana )
Le matériel roulant est à l’échelle TT  ( 1/120 ) populaire en Allemagne et en Europe de l’est. L’écartement de voie est de 9mm pour représenter une voie métrique (ce qui est le cas pour la majorité des lignes vicinales qui ont existé sur le réseau SNCV/NMVB  ).
Comme il n’existe rien de disponible dans le commerce, à part les chassis tout le reste est de construction maison. Les carrosseries  ont été réalisées par la technique de l’impression 3D.
Ma famille maternelle  (famille Guillaume) a gravité pendant de longues années autour d’Esneux : Poulseur, Ham , Esneux (où je suis né), Fontin  et Montfort. »

Un grand merci à Monsieur Bourdouxhe et toutes les félicitations de la Petite Gazette