La Petite Gazette du 22 février 2017
ALPHONSE RONDELET, PROFESSEUR, DONNAIT DES COURS PRIVES DANS LES ANNEES 30…Monsieur Michel Rasquin, de Manhay, travaille actuellement à la rédaction d’un récit de vie sur l’évacuation de deux familles de Petithan (les Rondelet et les Gavrenne) en mai 1940, pour l’aider dans sa tâhce, il peut compter sur 3 témoins en vie, dont une dame de 97 ans à la mémoire fabuleuse, Mme Marthe Rondelet qui, lui a confié ceci : « Avant la guerre, dans les années 30, Alphonse Rondelet, professeur, a donné à son domicile des cours privés particuliers à un nombre invraisemblable de jeunes de la région (dans un de ses carnets, je trouve les noms de jeunes de Werbomont, Harre, Tilff, Tohogne, La Roche, Ny, Oneux, Bende-Jeneret, Roche-à-Frêne, Villers Ste Gertrude, Houmart,Soy, Barvaux, Petithan bien sur,Wéris, Mormont,Habiémont,Burnontige, Fanzel, Méan, Aisne, Sy, Deux-Rys…). Nombre de ces jeunes, après des primaires et, souvent à l’époque, 2 années de plus (N.D.L.R. « le quatrième degré »), par ces cours, sont arrivés à présenter et à réussir les examens organisés par l’Etat et sont devenus facteurs, gendarmes, douaniers, garde-forestiers, agents de la RTT, agents de la SNCB, militaires etc. Nombre de jeunes gens de la région lui doivent l’ouverture des portes à ces emplois ( je présume, que par cette formation de base complète – math, français, trigo, géographie, etc.- ils ont pu, dans un premier temps, accéder à des emplois de niveau 4 à l’époque, ce qui correspondait aux « moyennes », c’est-à-dire 3 ans après les primaires; d’autres ont persévéré et décroché des emplois de niveau 1 (directeur etc.): fabuleux ! Alphonse Rondelet, pendant la guerre, a composé un poème dont la scène se passe dans le château de l’espérance, mettant en scène Hitler, Mussolini, le diable et l’auteur, Alphonse Rondelet, de Petithan, né en 1859 et décédé pendant la guerre 40-45. Ce poème est assez long, trois pages, et a été rédigé par colère et par dépit, après que son fils Louis a été tué lors d’un bombardement sur la route de « l’exode », vers le 17 mai 1940, entre Laon et Soissons. Il se termine par ces deux vers: » Je vous avais maudits, d’avoir tué mon fils, Je remercie Dieu de vous avoir punis« . A découvrir très prochainement dans cette rubrique. |
La Petite Gazette du 29 mars 2017
UN POEME D’ALPHONSE RONDELET REDIGE PENDANT LA GUERRE, INSPIRE PAR LA COLERE ET LE DEPITMonsieur Michel Rasquin, de Manhay, a recueilli les souvenirs, particulièrement clairs et précis, de Mme Marthe Rondelet, 97 ans, au sujet de la période de guerre, de l’évacuation et des drames qui bouleversèrent alors sa famille. Nous les avons déjà évoqués dans notre édition du 22 février dernier. Monsieur Rasquin les rappelle brièvement : « Louis Rondelet, fils d’Alphonse, fut tué le 16 mai 1940 par l’aviation allemande, mitraillant et bombardant les colonnes civiles de réfugiés, lors de l’exode en France, à Froidmont, près de Soissons. » Ce tragique épisode lui a inspiré un long poème dont il est utile de rappeler le contexte. « Alphonse a perdu son épouse à l’accouchement lors de la naissance de son fils Louis. En mai 1940, Louis ne semblait pas clairement décidé à « évacuer », c’est son père qui l’a convaincu qu’il se devait d’accompagner son épouse et ses deux filles, Marthe et Maria. Il a écrit ce poème peu avant sa propre mort, pendant la guerre, par dépit, se sentant coupable de la mort de son fils, culpabilisant énormément ; Alphonse est mort avant la fin de la guerre 40-45 , il n’a donc pas connu la mort d’Hitler ni celle de Mussolini. Durant les premières années de guerre, on lui a fait remarquer tout le danger d’avoir rédigé et d’exhiber un tel poème ; il le cachait dès lors dans son veston, à l’emplacement de son cœur. C’est à sa mort que Marthe l’a découvert, caché, dans la doublure de ses vêtements. Le titre de ce poème, « Le Château de l’Espérance », n’est pas choisi au hasard par Alphonse Rondelet : l’ « espérance » désignait, pour les habitants du milieu du village de Petithan, le quartier sis en haut du village, celui, entre autres, de la famille Rondelet ; on s’interpellait en demandant : « comment ça va à l’espérance ! » Ce texte était initialement rédigé à la main par Alphonse Rondelet, il a été recopié et dactylographié à diverses reprises, probablement avec quelques coquilles… ou interprétations… » document confié à Michel Rasquin par Marthe, ce 18 janvier 2017
La scène se passe dans le château de l’espérance
Acteurs : Alphonse, Hitler, Mussolini, Le Diable
Alphonse Heil Hitler, le menteur, le voleur et le traître De l’Europe entière voudrait être le maître Que dis-je ? Il le sera, le veut absolument De sa voix de Stentor il le dit nettement Qui pourrait résister à sa puissante armée Si belle, si forte, si bien disciplinée ? Maître de la terre, le sera sur les eaux, De par ses aéros et ses nombreux vaisseaux Il se crispe, mugit comme un taureau sauvage Qu’un vieux toréador a mis en pleine rage Que Dieu est avec lui, qu’il lui tend les deux mains Afin qu’il punisse les peuples inhumains Mais ton DIEU, hypocrite n’est autre que le diable, Et non point le DIEU, bon et le seul adorable Qui saura te punir pour les crimes affreux Que tu auras commis dans ton règne odieux Ton âme est gonflée de tous les plus grands vices Aimant à répandre leurs graines si novices Tu as eu, on le sait un très bon précepteur Le gros Mussolini, maçon, instituteur,
Hitler Si c’est de lui que je tiens les faits qu’on m’impose Pourquoi me cherche-t-on une folle dispute ?
Alphonse Si ton frère est menteur, faut-il que tu le sois Remets dans ton carnier cet infantile exploit Dans tout vice, il y a un peu de jalousie Et dans les tiens, Hitler, perce la sombre envie Je rends, moi, à César ce qui est à César Et que chacun de vous prenne chacun sa part Le maçon prit d’abord la belle Abyssinie Et que peu de temps après, la petite Albanie Dans ces coups de Jarnac le chemin fut tracé Hitler prit l’Autriche, qu’il avait reniée Huit autres États tombèrent l’un après l’autre Y compris, ô regret, si tristement le notre ? Les deux copains chantaient enivrés de bonheur Or, ce dernier, souvent, est proche du malheur Les Grecs prirent bon pied dans toute l’Albanie Les Italiens sont chassés de la Lybie Et le seront, sous peu, de leurs ports africains Poursuivis, pas à pas, par les australiens
Mussolini Le négus est rentré dans son Abyssinie C’est un homme doué d’un superbe génie Je n’ai plus, contre lui, la maîtrise de l’air Et l’ai, moins encore, sur notre belle mer Mes ennemis me chassent de la Numidie Mes soldats se rendent, O triste perfidie Mon DIEU que t’ai-je fait pour me punir ainsi Me livrer tout entier, à un vil ennemi Comtesse Gyano, charmante et douce fille Que va-t-il advenir de toute ma famille ? Entends-tu gronder toute ma nation Ce tonnerre vengeur, la révolution
Mussolini appelle Hitler Frère, vite, très vite, arrive à mon secours Si tu ne veux me voir Knock-out dans peu de jours
Hitler Ne désespère pas, ami, je t’en supplie Je saurai dénouer leur Nœud d’hypocrisie Je forme une seconde, invincible Armée
Mussolini La première a brûlé, celle-ci rôtira
Hitler Mes braves légions vont conquérir l’Attique Et mettre dans ma main tout le sud balkanique
Mussolini Nous avons au Nord Est un puissant ennemi Que nous devrions tâcher de faire notre ami
Hitler Un ami d’un traître, d’un juif comme Lénine Mais c’est aller droit à la propre ruine Le traître reste traître ; il ne saurait changer Et marcher avec lui, c’est courir au danger Deux cents divisions vont franchir sa frontière, Bien habituées à l’ours : prendre son beau Moscou Ou j’aurai le plaisir de lui tordre le coup
Mussolini Ce gros animal est d’une forte structure Qu’on ne remarque pas sous sa lande parure Malheur qui compte seul se trompe aisément Et tout ce que j’ai fait à mes propres dépens
Alphonse, Belge de cœur Mais l’ours est un grizzly d’une très forte taille Et saura riposter bataille par bataille Pendant ce temps John Bull ce nouveau Jupiter Arrose l’Allemagne et de feu et de fer Détruit gens et maisons, usine après usine Et rend de la vigueur à son ami Lénine Qui blessé tout d’abord, redouble de courage Et fait des allemands un terrible carnage Les oblige à quitter en hâte son état Après les avoir mis dans ce honteux état Les géants s’embarquent à grands flots
Mussolini Ami plus qu’un moyen pour se tirer d’affaire Il faut savoir mourir quand on ne sait rien faire
Ils se pendent
Chers amis, je vous tiens de par l’ordre de DIEU Que vous aurez laissé c’est un si méchant DIEU Venez comme Néron, voir griller nos entrailles Que je mets, à l’instant dans ces rudes tenailles
Alphonse Je vous avais maudits, d’avoir tué mon fils Je remercie DIEU de vous avoir punis. Alphonse Rondelet, Petithan |